Analyse de l’impact d’une ou plusieurs agression(s) sexuelle(s) sur le désir sexuel

Les agressions sexuelles sont un phénomène fréquent qui touche toutes les strates de la population. Que ce soit durant l’enfance, l’adolescence ou à l’âge adulte, sur les hommes ou sur les femmes, de toute orientation sexuelle, dans tous les milieux sociaux, au sein de la famille ou sur les lieux de travail, ce phénomène provoque des conséquences assez bien connues sur la santé physique et mentale des victimes. Parmi ces conséquences, nous trouvons la dépression, le syndrome de stress posttraumatique (SSPT), la colère/l’irritabilité, la dissociation, l’anxiété, la toxicomanie, les tentatives de suicide et d’autres encore (Bonomi et al., 2007 ; Elliott et al., 2004 ; Kaufman et al., 2019).

Néanmoins, la littérature reste plus vague quant aux conséquences libidinales de ce traumatisme touchant, pourtant, à la sexualité. Qu’en est-il de la vie sexuelle des victimes après ce genre d’agressions ? Si plusieurs études définissent et mentionnent la satisfaction sexuelle (Bigras et al., 2015 ; Denis et al., 2020 ; Rellini et al., 2011), le niveau de désir sexuel, ou plus communément, la libido est quant à elle moins abordée.

A l’occasion de cette étude, dont le sujet traite de la victimologie, nous allons nous concentrer, non pas sur l’auteur, mais bien sur la victime et plus précisément sur les éventuels impacts que peuvent provoquer une ou plusieurs agression(s) sexuelle(s) sur la libido, vécue(s) à n’importe quel moment de la vie, perpétrée(s) par n’importe quel agresseur.

En Belgique, les agressions sexuelles sont réparties en trois catégories définies par les articles 371 à 378 du Code Pénal (2020) : le voyeurisme, l’attentat à la pudeur et le viol. La définition du viol est donnée par l’article 375 alinéa 1er : « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne qui n’y consent pas, constitue le crime de viol ». Ces actes sont répréhensibles, les peines allant d’une amende de deux cents euros à une peine de réclusion jusqu’à 30 ans en fonction des faits ou de la victime.

Le site Amnesty International Belgique (2020) propose, quant à lui, cette définition des violences sexuelles : Les violences ou agressions sexuelles sont définies comme toute forme de contact sexuel indésirable. Il en existe deux sortes : l’attentat à la pudeur et le viol. L’attentat à la pudeur a lieu lorsqu’une personne est forcée à réaliser des actes sexuels autres qu’une pénétration. Le viol est quand [sic] à lui défini comme toute pénétration sexuelle sans consentement de la victime, que ce soit avec le pénis, la langue, les doigts ou un objet. Il peut même avoir lieu au sein d’une relation ou d’un mariage.

Cette dernière définition est celle que nous utiliserons dans le questionnaire utile à cette recherche.

En 2020, Amnesty International Belgique ainsi que SOS Viol ont publié une enquête à propos des violences sexuelles dans un échantillon représentatif de 2302 Belges (hommes et femmes) âgés de 18 à 85 ans. La question posée sur l’expérience personnelle de violences sexuelles (passée ou présente) propose sept comportements :
– Formuler des demandes répétées et insistantes à caractère sexuel
– Imposer des attouchements à une personne non-consentante dans des lieux publics
– Imposer des relations sexuelles à son/sa partenaire alors qu’il/elle ne le souhaite pas
– Imposer des rapports sexuels à une personne non-consentante, en d’autres mots la violer
– Profiter d’un état d’ivresse/d’un état de dépendance d’une personne pour avoir des relations sexuelles
– Photographier/filmer intimement sans la permission ou sans le savoir .

L’étude inclut donc dans le terme « violence sexuelle » le harcèlement sexuel, l’attentat à la pudeur et le viol. Les résultats ont montré que 47% des participants ont été exposés au moins une fois dans leur vie à ces violences sexuelles. Qui plus est, près de la moitié des victimes a subi ces faits avant leurs 19 ans (bien qu’une partie des victimes ait montré une certaine pudeur, en particulier les hommes, en ne souhaitant pas répondre à la question de l’âge lors de la première agression). Si nous regardons les résultats concernant uniquement le viol, nous constatons que l’échantillon des femmes compte 43% de viol (dont environ la moitié par le partenaire) et 38% dans l’échantillon des hommes avec également la moitié par le partenaire.

Une analyse à plusieurs niveaux dans dix pays européens sur une population âgée de 18 à 27 ans a révélé que dans l’échantillon belge de 393 individus, 20,4 % des femmes et 10,1 % des hommes ont été victimes de violences sexuelles. La définition d’une violence sexuelle dans cette étude était un « comportement adopté dans l’intention ou avec pour résultat d’inciter une autre personne à se livrer à une activité sexuelle malgré son refus de le faire » (Krahé et al., 2015). En ce qui concerne la France, l’enquête Virage réalisée en 2015 auprès d’un échantillon représentatif de 16 000 femmes et 12 000 hommes âgés de 20 à 69 ans montre qu’une femme sur sept (14,5%) et un homme sur vingt-cinq (3,9%) déclarent avoir vécu au moins une forme d’agression sexuelle. L’étude n’inclut pas le harcèlement et l’exhibitionnisme mais prend en compte les tentatives (Hamel et al., 2016).

Les chiffres diffèrent beaucoup d’une enquête à l’autre, cette disparité des résultats dans des enquêtes similaires peut s’expliquer par le choix de la définition des termes utilisés, les différences de formulation des questions, les tranches d’âges des populations ainsi que la diversité des mesures (Hamel et al., 2016, Krahé et al., 2015). En outre, les données statistiques officielles ne permettent pas de représenter l’ampleur du phénomène, étant donné que les auteurs d’infractions à caractère sexuel sont fort peu identifiés par les autorités ou alors les actes ne sont pas reportés par les victimes (Denis et al., 2020 ; Moreno, 2013).

Néanmoins, la littérature s’accorde pour dire que la prévalence des agressions sexuelles, en Belgique, en France, ou dans le monde entier, concerne majoritairement les femmes. Les hommes étant aussi en majorité dans le rôle de l’agresseur (Amnesty, 2020 ; Elliott et al., 2004 ; Hamel et al., 2016 ; Krahé et al., 2015 ; Najman et al., 2005). Cependant, il existe un certain nombre d’études concernant les violences sexuelles vécues par des hommes, Peterson et al. (2011) en ont recensé quatre-vingt-sept abordant ce sujet. Leur conclusion établit que certaines populations sont plus à risque que d’autres, comme les homosexuels et les bisexuels. À ce sujet, des résultats contradictoires concernant les femmes ont été mis en évidence, une étude affirme que les femmes homosexuelles et bisexuelles présentent plus de risques de vivre une agression sexuelle que les femmes hétérosexuelles (Sigurvinsdottir & Ullman, 2015). A l’inverse, Long et al. (2007) ont démontré le contraire, ils ajoutent tout de même que les femmes homosexuelles sont celles qui présentent le plus de risques de se faire agresser par un membre de la famille.

Table des matières

INTRODUCTION
ELEMENTS THEORIQUES
1. Agressions sexuelles
Définitions
Prévalence et généralités
Les conséquences sur la santé mentale et physique
2. Désir sexuel et troubles du désir sexuel
Définitions et spécificités
Désir sexuel et agression sexuelle
QUESTIONS DE RECHERCHE ET OBJECTIFS
Question de recherche et sous-questions de recherche
Objectifs
METHODLOGIE
Échantillon
Questionnaire
RESULTATS
Analyses statistique
Niveau de désir sexuel par rapport aux caractéristiques de l’individu
Niveau de désir sexuel par rapport aux caractéristiques de la ou les agression(s)
DISCUSSION
Résultats et mise en perspective théorique
Analyses en fonction des caractéristiques de l’individu
Analyses en fonction des caractéristiques de la ou les agression(s)
Limites et points forts de la recherche
Implications futures
CONCLUSION

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