Contribution a l’etude chimique et biologique des feuilles de Carica papaya L.

Depuis l’antiquité, dans le monde entier, les hommes apprécient les vertus des plantes qui jouent un rôle capital dans l’art de guérir. Il y a encore quelques siècles, il n’y avait que les plantes pour se soigner. Au fil des siècles, diverses pratiques ont été développées pour extraire les principes actifs des plantes [36]. De nos jours, les produits naturels sont encore une source importante pour la recherche de nouveaux composés actifs contre de nombreuses maladies. L’utilisation thérapeutique des plantes fait partie intégrante des traditions, de toutes les cultures. La valorisation médicinale dans ces pratiques passe par l’isolement et l’identification de nouvelle(s) molécule(s) en effectuant des fractionnements bioguidés par l’activité sur une cible biologique [1]. Les recherches modernes ont montré que l’action des plantes médicinales est due à quelques constituants, peu nombreux, élaborés par la plante [5]. Le travail des chimistes permettra une identification plus précise des agents actifs des plantes et une meilleure définition de leurs vertus. Les progrès de la science ont permis également un rapprochement significatif entre la pharmacopée végétale et la médecine moderne basée sur la chimiothérapie. Différents principes actifs de plantes ont ainsi pu émerger tels: la morphine et la quinine. La reproduction par synthèse de ces principes actifs a abouti à la découverte de nouveaux médicaments [28]. Dans les pays en voie de développement comme Madagascar, la population rurale utilise encore les plantes à des fins thérapeutiques [46]. A Madagascar il existe une grande biodiversité qui donne beaucoup d’avantages aux scientifiques pour développer leurs recherches. C’est à partir des théories et des pratiques observées par les tradipraticiens que les scientifiques du temps moderne tentent d’affirmer l’existence des principes actifs contenus dans une plante, d’isoler le principe actif responsable des vertus curatives et d’en déterminer leurs structures chimiques. Dans ce cadre, ce travail conduit à l’identification du ou des principe(s) actif(s).

LES SUBSTANCES NATURELLES

Propriétés
Elles ont des propriétés diverses selon leur famille, leur genre ou leur espèce. Quelques unes de ces propriétés ont été notées : propriété anti-inflammatoire et analgésique du pinène, humlène, trans α-farnesène du Katrafay (Cedrelopsis grevei, Ptaeroxylacées) [41] ; propriétés anticancéreuses de Rutacéline isolée de la plante Fahavalokazo (Zanthoxylum madagascariense Baker, Rutaceae) [16].

GENERALITES SUR CARICA PAPAYA

Botanique
Règne : Plantae
Sous-règne : Tracheobionta
Division : Magnoliophyta
Classe : Magnoliopsida
Sous-classe : Dilleniidae
Ordre : Violales
Famille : Caricaceae
Genre : Carica
Espèce : papaya
Noms vernaculaires : Papaye ou arbre à melon(en français) – Mapaza (en malgache) .

C’est un arbre généralement non ramifié à tronc unique, non ligneux et fortement marqué par les cicatrices foliaires, atteignant 2 à 10m de haut .

Les grandes feuilles palmées possèdent sept lobes qui sont groupés en couronne terminale au faîte du tronc et sont longuement pétiolés ; sous ces feuilles pendent les papayes groupées comme en grappes . Lorsque les feuilles tombent, fanées, elles laissent une cicatrice très apparente sur le tronc.

Le papayer est ordinairement un arbre dioïque, les pieds sont mâles ou femelles, mais il existe des types hermaphrodites (bisexués). Les fleurs mâles apparaissent sur de longues panicules ramifiées à l’aisselle des feuilles, tandis que les fleurs femelles naissent isolées ou par groupe de 2 ou 3 sur la partie supérieure du tronc [47].

Au point de vue génétique, il a été établi que :
• Lorsque les fleurs femelles sont fécondées par des fleurs mâles, leur descendance est constituée de 50% de pieds mâles et 50% de pieds femelles.
• Lorsque des fleurs hermaphrodites sont autofécondées, leur descendance est de 66% de pieds bisexués et 33% de pieds femelles.
• Lorsque des fleurs femelles sont fécondées par du pollen de fleurs bisexuées, leur descendance est de 50% de pieds bisexués et de 50% de pieds femelles.

Utilisations empiriques

Les utilisations traditionnelles du papayer sont nombreuses. On peut citer 3 propriétés principales de l’espèce: anti-ictérique (feuilles, fruits et écorces), vermifuges (graines et latex des fruits) et diurétique (racines) [18]. Le fruit est traditionnellement utilisé pour l’affinement de la silhouette lors des cures d’amincissement avec état cellulitique associé [50]. La consommation du fruit est conseillée contre la constipation [26]. Les feuilles légèrement froissées servent à attendrir la viande; il suffit d’envelopper la viande et de la laisser ainsi quelques heures au frais. La décoction de feuilles permet d’enlever les taches de sang sur les vêtements [29]. Les feuilles en cataplasme sont appliquées sur les abcès. Le latex possède un pouvoir anthelminthique, cependant il s’avère toxique et purgatif aux doses efficaces. A l’état frais, le latex sert à traiter cors et verrues [3]. Il sert également à soigner l’acné, l’eczéma, les dartres et estompe les taches de rousseur. Les graines contiennent également une substance anthelminthique mais leur saveur piquante en fait perdre leur usage [29]. La papaye verte écrasée est utilisée en application sur le visage, par les populations du Pacifique et d’Asie utilisent, pour « éclaircir » le teint et détruire certaines formes de taches mélaniques [26].

Travaux chimiques et biologiques antérieurs

Chacun des organes ou parties de la papaye présente de multiples vertus, dont quelques unes sont rapportées dans le présent document. La graine contient des dérivés soufrés dont l’isothiocyanate de benzyle qui est responsable de l’activité antihelminthique [24]. D’autre part, l’ingestion d’un extrait aqueux ou chloroformique des graines par le lapin provoque l’arrêt de la spermatogenèse et une stérilité complète [18]. Les racines sont très riches en sels minéraux. La diurèse provoquée par l’ingestion d’une décoction de racines n’est pas due à une action propre mais à la richesse en sels de potassium [29]. L’écorce du tronc utilisée au Cameroun dans les ictères, a fait l’objet d’une étude approfondie. L’extrait aqueux de l’écorce a été testé sur des animaux dans un état ictérique provoqué par des saponosides. Le déjaunissement a été deux fois plus rapide pour les animaux ayant reçu, par voie buccale, cet extrait de Carica papaya. Les substances responsables de cette action sont les sucres, en particulier le xylitol qui augmente la résistance des globules rouges à l’hémolyse [18]. Enfin, le fruit est l’élément le plus important puisque deux publications, l’une en Jamaïque, l’autre en Gambie, préconisent l’application de la pulpe sur les ulcères chroniques et sur les brûlures. L’extrait aqueux du fruit non mûr a aussi montré une activité antidrépanocytaire in vitro qui serait due à la présence d’acides benzoïques. Dans le fruit on trouve des acides organiques, des carotènes, des vitamines C et E [44]. Le latex contient des enzymes protéolytiques : la papaïne et la chymopapaïne. La papaïne, de formule brute C15H28N2O5, est un complexe enzymatique qui a la faculté de digérer les protéines, les pectines, et aussi certains lipides et sucres. Ce pouvoir digestif peut donc être mis à contribution pour soigner les troubles digestifs dus à la mauvaise digestion des graisses et des protéines, ainsi que ceux dus aux troubles hépatobiliaires [29]. La chymopapaïne est utilisée pour soulager ou guérir les névralgies du nerf sciatique résultant d’une compression par hernie discale [47]. Dans les feuilles sont rencontrés des alcaloïdes dont la carpaïne. La carpaïne, de formule brute C28H50N2O4 est l’un des alcaloïdes majeurs contenus dans les feuilles qui a été étudiée pour son effet cardiovasculaire [4]. La carpaïne contenue dans l’écorce a montré une activité antipaludique in vitro [12]. Elle est aussi connue par son activité antiparasitaire [12] ; antimicrobienne et cytotoxique in vitro [18]. Une étude de l’activité cytotoxique de la carpaïne sur une gamme de lignées cellulaires cancéreuses a été confirmée et, d’une manière inattendue, il a été prouvé que certains dérivés de cette molécule sont dotés d’activité cytotoxique bien plus puissante que celle de la Carpaïne [4].

GENERALITES SUR LES ALCALOÏDES 

Définition
Ce sont des substances azotées qui ont toutes une action plus ou moins énergique sur le système nerveux central et souvent aussi sur le système nerveux végétatif [17].

Propriétés
Les alcaloïdes ont en général une saveur amère et sont souvent colorés. Ils sont solides et cristallisables lorsqu’ils sont oxygénés, sinon ce sont des liquides volatiles. Ils sont doués de pouvoir rotatoire qui constitue un test de contrôle de pureté du point de vue physiologique, la forme lévogyre est la plus active [11]. Ces alcaloïdes basiques sont généralement peu solubles dans l’eau et solubles dans les solvants organiques moyennement polaires tels CH2Cl2, CHCl3, AcOEt. L’atome d’azote dans les alcaloïdes est sous forme d’amine secondaire ou tertiaire, dans certains cas quaternaires et l’on parle d’alcaloïdes quaternaires.

Biogenèse
La plupart des alcaloïdes sont dérivés d’acides aminés tels que le tryptophane, l’ornithine, la lysine, l’acide aspartique, la phénylalanine et la tyrosine. Ces acides aminés sont décarboxylés en amines biogènes qui sont ensuite couplées à d’autres squelettes carbonylés.

Table des matières

INTRODUCTION
Partie I- GENERALITES
I-1-Les substances naturelles
I-1-1- Définition
I-1-2- Propriétés
I-1-3- Biogenèse
I-2-Généralités sur Carica papaya L.
I-2-1- Botanique
I-2-2- Utilisation empirique
I-2-3- Travaux chimiques et biologiques antérieurs
I-3-Généralités sur les alcaloïdes
I-3-1- Définition
I-3-2- Propriétés
I-3-3- Biogenèse
I-3-4- Les différentes classes d’alcaloïdes
I-3-5- Les intérêts biologiques
I-4-Généralités sur les antibactériens et antioxydants
I-4-1- Les antibactériens
I-4-2- Les antioxydants
I-5-Détermination structurale
I-5-1- Spectroscopie de Résonance Magnétique Nucléaire (RMN)
I-5-2- Spectrométrie de Masse (SM)
Partie II- MATERIELS ET METHODES
II-1-Matériels de laboratoire
II-2-Méthodes
II-2-1- Préparation du matériel végétal
II-2-2- Screening phytochimique
II-2-3- Extraction
II-2-3-1-Extraction par solvant de polarité croissante
II-2-3-2-Extraction par partage
II-2-3-3-Extraction par solvant spécifique
II-2-4- Fractionnement et isolement
II-2-4-1-Chromatographie sur couche mince
II-2-4-2-Chromatographie sur couche mince préparative
II-2-4-3-Chromatographie liquide à basse pression
II-2-5- Méthodologie des tests biologiques
II-2-5-1-Test microbiologique : antibactérien
II-2-5- 2-Test antioxydant
II-2-6- Détermination de structure
Partie III- RESULTATS ET DISCUSSIONS
III-1-Résultats du criblage phytochimique
III-2-Résultats de l’extraction des alcaloïdes totaux
III-3-Résultats des CCM des alcaloïdes totaux
III-4-Résultats du test antibactérien des alcaloïdes totaux
III-5-Résultats du fractionnement des alcaloïdes totaux
III-6-Résultats des CCM des fractions F1 à F5
III-7-Résultats du test antibactérien des fractions F1 à F5
III-8-Résultats du test antioxydant des fractions F1 à F5
III-9-Isolement de AR-011 et AR-012
III-10-Isolement de AR-013 et AR-014
III-11-Résultats des CCM des produits isolés
III-12-Résultats du test antibactérien des produits isolés
III-13-Résultats des analyses spectrales
CONCLUSION

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