La gestion de l’innovation

Développement de nouveaux services une application limitée des concepts du marketing et de l’ingénierie de la conception

La gestion de l’innovation est aujourd’hui au cœur de toutes les politiques d’entreprises : innover fait figure de maître mot afin d’assurer la pérennité de l’entreprise. Toutefois, le terme d’innovation, utilisé par Joseph Schumpeter (1912) pour représenter une nouvelle combinaison de moyens de production qui crée de multiples opportunités d’investissement et de profit, est chargé d’une forte connotation industrielle. L’industrie n’a certainement pas le monopole de l’innovation29. Frédéric Jallat (1992) estime, à ce titre, que le secteur des services est un domaine prédisposé à l’innovation foisonnante, de par son universalité, son apparente simplicité et son contenu en relations humaines. Mais à quoi correspond ce que Frédéric Jallat qualifie d’innovation dans les services ? Et comment organiser les logiques d’innovation dans l’entreprise de services pour capitaliser ce foisonnement ?La première difficulté est de cerner le sens comme la portée du terme « innovation », trop souvent assimilé à la seule innovation technologique. L’appréhension de l’innovation, de son pilotage et de son organisation passe également par celle de la conception. En effet, innovation et conception sont étroitement liées, si même les deux mots ne sont pas synonymes. La conception n’est-elle justement pas un moyen de formaliser les logiques d’innovation ?

La seconde difficulté est que, quand bien même des typologies ont pu être établies pour catégoriser les services, il n’existe aucune théorie de la conception dans les services. Il existe toutefois deux courants qui peuvent alimenter une modélisation de la conception dans les services : il s’agit du marketing des services – fortement inspiré du marketing industriel – qui traite du développement de nouvelles offres de service et de l’ingénierie de la conception qui s’attache à modéliser les processus de conception dans l’industrie. En quoi ces deux courants de recherche permettent-ils de combler le vide ? Dans la mesure où le chapitre I.1 a émis l’hypothèse que les modèles et théories issus de l’industrie ne pouvaient pas s’appliquer stricto sensu dans les services, existe-t-il des limites à l’application de ces modèles aux services ? Sont-ils pour autant exempts d’enseignements pour les services ? Existe-t-il d’autres théories qui pourraient constituer une alternative ou apporter de nouveaux enseignements sur la conception dans les services ?Tout d’abord, le concept d’innovation se délimite par rapport à la conception de l’offre (§ I) : l’objectif est de sortir du paradigme industrialiste pour mettre en avant un processus – et non un contenu – qui ne sépare pas la conception de la production et de la distribution. Ensuite, si le marketing des services et l’ingénierie de la conception formalisent des processus d’innovation et/ou de conception (§ II), les spécificités des services les rendent difficilement applicables, en butte aux mécanismes à l’œuvre dans la conception d’une offre de services (§ III). Enfin, dans ce contexte, l’innovation participative et l’innovation intensive sont autant d’alternatives à la formalisation des processus d’innovation (§ IV).

Du travail de définition et de délimitation relativement pointu du terme « innovation », s’évince un débat sur la frontière entre l’invention et l’innovation. Il s’agit là de faire la différence entre le contenu et un processus : ce débat est d’autant plus important dans le cadre des services qu’il permet de mieux appréhender la distinction entre les services innovants et l’innovation de service. S’il s’enrichit à partir des caractéristiques de l’innovation que distinguent les typologies proposées par les économistes et les gestionnaires, le débat ne parvient pas forcément à cerner l’innovation. Dans ces conditions, sera privilégiée l’étude des processus de conception qui intègrent, dans leurs composantes, les logiques d’innovation. Le commun du mortel fait souvent l’amalgame entre quatre termes : l’invention, la découverte, la nouveauté et l’innovation. C’est justement ce premier amalgame qui rend une définition de l’innovation délicate. Sans entrer dans le détail de ces quatre termes, l’analyse se limite au débat qui distingue généralement l’invention de l’innovation. Il y a d’un côté les idées, et de l’autre côté leur application positive sur le marché : « il est à la portée de tout le monde de concevoir des idées, mais ce qui importe, c’est d’en tirer une application positive » [Ford (1930), p.3].

 

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