Insertion professionnelle en enseignement

Au cours des dernières décennies, de grands changements se sont produits en ce qui a trait à l’éducation au Québec. L’enseignement étant considéré comme un domaine ambigu et incertain (CSE, 2004), plusieurs réformes ont été mises en place afin de préparer les futurs enseignants à ce métier complexe (Mukamurera, 2005). À travers les époques, la formation des maîtres a grandement évolué, passant du maître artisan à un maître professionnel (MEQ, 2001). En effet, un projet de professionnalisation s’est mis en place au fil des ans dans le but de rehausser la profession et de mieux préparer les enseignants à faire face à leur réalité. Voici un aperçu de l ‘historique de la profession enseignante.

Avant le XVIIe siècle, en Europe, l’éducation ne se faisait pas de façon fonnelle en milieu scolaire. Le public était plutôt restreint et quiconque pouvait s’improviser enseignant puisque la connaissance de la matière était le seul pré-requis à l’enseignement. C’était l’époque du maître improvisé.

À partir du XVIIe siècle, les groupes étant plus nombreux qu’auparavant, il a fallu revoir les méthodes d’enseignement. Les enseignants ont donc mis en place une pédagogie basée sur une vision ordonnée du monde où ces derniers avaient « le contrôle du temps, de l’espace, des déplacements, de la posture, etc .. » (MEQ, 200 1, p.20) À cette époque, on reconnaît que les savoirs s’apprennent et se transmettent: c’est le début de la formation initiale des maîtres. Une pédagogie traditionnelle s’est installée, jumelant un maître avec un apprenti.

Par la suite, la pédagogie nouvelle a fait son entrée dans le monde de l’éducation. Cette dernière était centrée sur la science et sur l’enfant. En Europe, la pédagogie était devenue la science de l’éducation et par conséquent, le pédagogue était devenu un scientifique. Au Québec, c’est dans les années 1960 que les facultés des sciences de l’éducation ont été fondées. Le rapport Parent a été le premier véritable déclenchement de la professionnalisation enseignante (Mukamurera, 2005; Gauthier et Mellouki, 2005, CSE, 2004). Ce dernier a eu pour effet d’abolir les écoles normales pour confier la formation des maîtres aux institutions universitaires. Ce changement a permis de modifier la façon de concevoir la formation des maîtres. Il a eu pour effet de centrer la formation sur l’enfant, ses façons d’apprendre et sur l’apprentissage actif plutôt que de restreindre l’enseignement aux programmes qui étaient dispensés dans les écoles. Il n’était plus question de former un maître qui exécute de façon aveugle des méthodes statiques (Gauthier et Mellouki, 2005), mais bien de préparer les futurs enseignants afin qu’ils puissent répondre aux exigences de leur métier de plus en plus complexe (Mukamurera, 2005).

Insertion professionnelle en enseignement

Mukamurera (2005) a défini l’insertion professionnelle des enseignants selon trois aspects complémentaires. Tout d’abord, l’insertion se fait dans la sphère de l’emploi et du travail ce qui englobe l’accès aux emplois, les conditions de travail et les parcours professionnels. Un autre aspect de l’insertion est celui sur le plan institutionnel qui réfère à l’intégration dans le milieu et la maîtrise de la culture organisationnelle. Le dernier aspect de l’insertion professionnelle concerne le rôle occupationnel où l’enseignant s’adapte et développe des compétences face à la matière à enseigner et aux groupes d’élèves.

Selon Gervais (1999), l’insertion professionnelle est « un concept dynamique et non un moment neutre à la frontière de la formation et de l’emploi» (p.13). Cette période est en quelque sorte la suite de la fonnation initiale et le début de la fonnation continue. Selon cette auteure, l’insertion professionnelle devrait permettre de traverser trois frontières. La première est la frontière fonctionnelle qui pelmet de se centrer sur l’efficacité dans le travail. La seconde est la frontière inclusive qui fait référence à l’ acquisition de la culture professionnelle et l’appartenance au groupe. Cette frontière rejoint l’aspect institutionnel défini par Mukamurera (2005). La dernière frontière est appelée hiérarchique et touche à la reconnaissance sociale.

Le COFPE (2002) considère l’insertion professionnelle comme étant un processus qui débute avec l’entrée dans la profession et qui vise un développement de compétences. Ce cheminement étant tributaire de l’acquisition d’habiletés tant au niveau disciplinaire, didactique que pédagogique, on ne peut déterminer la fin de la phase d’insertion professionnelle. Dans cette optique, la permanence ne correspond pas nécessairement à la fin de la période d’insertion. Selon le COFPE (2002), le processus d’insertion professionnelle se déroule sur deux plans. L’enseignant doit tout d’abord s’intégrer sur le plan institutionnel où il assimile les valeurs du milieu. Il doit également développer des savoirs et compétences reliés à la matière et aux groupes d’élèves.

L’insertion professionnelle peut être abordée de différentes façons selon les auteurs mais la majorité d’entre eux s’entendent pour dire que cette dernière est une étape difficile pour les jeunes enseignants. En effet, les données révèlent que près de 20% des enseignants désertent la profession au cours des cinq premières années de carrière (Mukamurera, 2004). La majorité des chercheurs qui se sont penchées sur la question ont orienté leurs études vers les difficultés rencontrées en classe et sur les moyens à mettre en place pour accompagner les jeunes enseignants afin de les aider à persévérer dans le métier. La prochaine section fait état de ces recherches en ce qui concerne les débuts dans le métier d’enseignant ainsi que des programmes d’ accompagnement offerts aux novices.

Les débuts dans l’enseignement 

Les récits des nouveaux enseignants laissent entendre que ces derniers traversent une crise lors de leur entrée dans l’enseignement. Cette période est souvent caractérisée comme étant un choc des réalités pendant laquelle les enseignants débutants voient s’effondrer leurs espérances (Lamarre, 2003). Malgré sa formation, le néophyte découvre que son métier n’est pas facile et que son savoir disciplinaire ne suffit pas pour s’en sortir devant une classe (Baillauquès, 1999). Ce dernier se retrouve dans une période appelée « l’entre-deux» (Baillauquès, 1999). En effet, l’enseignant débutant est en transition entre sa formation initiale et sa pratique, il passe du stagiaire au titulaire, de l’ enseigné à l’enseignant. Cette période « entre deux » peut être très angoissante pour le nouvel arrivant puisque ce dernier se rend compte de la lourdeur de la tâche et se sent incompétent face à tant de responsabilités (Baillauquès, 1999; Lamarre, 2003).

Le mode de fonctionnement de la classe et la gestion de groupe sont les principales difficultés rencontrées par les enseignants débutants (Huberman, 1989, Lamarre, 2003; Nault, 1993; Heer et Akkari, 2004; Félix et Saujat, 2007). L’isolement est également une dure réalité (Baillauquès, 1999; Lamarre, 2003) car les novices ne sentent pas toujours le soutien nécessaire de la part des directions et des collègues de travail. Chacun travaille dans son coin et vit seul avec ses difficultés. Les jeunes enseignants doivent faire face à de nombreuses autres embûches telles que le manque de matériel (Nault, 1993; Lamarre, 2003), l’insécurité face aux contenus (Nault, 1993), l’adaptation au niveau des élèves (Heer et Akkari, 2004), la relation avec les parents et la motivation des élèves (Lamarre, 2003) .

La recenSIOn des écrits permet de constater que les débuts dans l’enseignement sont vécus difficilement par les jeunes enseignants. Afin de remédier à ce problème, plusieurs programmes d’accompagnement pour les novices ont été proposés dans le but de faciliter leur intégration sur le marché du travail. La section suivante trace le portrait des différents moyens d’accompagnement des enseignants débutants lors de leurs débuts dans la carrière.

Programmes d’accompagnement des novices 

En réponse aux difficultés rencontrées par les novices, plusieurs chercheurs ont orienté leurs études vers l’accompagnement possible des nouveaux enseignants pour favoriser leur insertion professionnelle (Lamarre, 2003 ; Nault, 1993, Gervais, 1999). Au Québec, les projets d’accompagnement ont été mis en place à la suite de l’ abolition du stage probatoire dans le but d’aider l’enseignant débutant à s’ adapter aux nombreuses responsabilités que comporte sa tâche (Lamarre, 2003). Comme l’ont démontré différentes études, le néophyte est confronté à plusieurs difficultés lors de son entrée dans le métier d’enseignant. Ce dernier a donc besoin de discuter de son vécu, d’être écouté, soutenu et conseillé dans son rôle d’enseignant (Gervais, 1999). Dans cette optique, plusieurs mesures de soutien ont été mises en place telles que le mentorat, les réseaux d’entraide et les groupes de discussions (Gervais, 1999).

Selon Gervais (1999), plusieurs buts sont visés par l’implantation des programmes d’aide. Tout d’ abord, ils permettent de prévenir le départ des débutants et de rehausser leur sentiment de compétence. Ces programmes ont également comme objectif d’offrir un soutien en ce qui a trait à certaines habiletés qui auraient dû être développées lors de la formation initiale. Ils ont également été mis en place dans une perspective de formation continue pour aider au développement professionnel des enseignants. Les projets d’accompagnement sont importants pour les enseignants débutants, car ils favorisent les relations humaines et les échanges. Selon Lamarre (2003), le fait d’être en relation avec d’autres personnes pennet au novice de faire une réflexion sur sa pratique et de se sentir rassuré.

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIER CHAPITRE
LA PROBLÉMATIQUE
1.1 BREF HISTORIQUE DE LA PROFESSION ENSEIGNANTE
1.2 INSERTION PROFESSIONNELLE EN ENSEIGNEMENT
1.2.1 Les débuts dans l’ enseignement
1.2.2 Programmes d’accompagnement des novices
1.3 CONDITIONS D’INSERTION PROFESSIONNELLE EN ENSEIGNEMENT
1.3.1 Le personnel enseignant
1.3.2 Le placement des diplômés
1.3.3 Salaire moyen des diplômés
1.3.4 Taux de chômage des diplômés
1.4 PROFILS RÉGIONAUX
1.5 PROFILS SCOLAIRES
1.6 CONVENTION COLLECTIVE DES ENSEIGNANTS
1.7 INSERTION PROFESSIONNELLE DES NÉODIPLÔMÉS SUR LE TERRITOIRE
QUÉBÉCOIS
1.8 QUESTION DE RECHERCHE
1.9 OBJECTIFS DE RECHERCHE
DEUXIÈME CHAPITRE
LE CADRE CONCEPTUEL
2.1 L’INSERTION PROFESSIONNELLE
2.1.1 Paradigme fonctionnaliste
2.1.2 Paradigme humaniste
2.1.3 Paradigme phénoménologique
2.1.4 Paradigme structuraliste
2.2 CONCEPTS ISSUS DU PARADIGME STRUCTURALISTE
2.2.1 Chalnp et habitus
2.2.2 Espace professionnel
2.2.3 Pouvoir du diplôme
TROISIÈME CHAPITRE
LA MÉTHODOLOGIE
3.1 LA RECHERCHE QUANTITATIVE
3.1.1 Étapes de la démarche scientifique de recherche quantitative
3.2 OUTIL DE COLLECTE DE DONNÉES: LE SONDAGE
3.2.1 L’échantillon
3.2.2 Technique des quotas
3.2.3 Techniques probabilistes
3.2.4 Modes d’administration
3.2.5 Le sondage du GRMJ
3.3 ANALYSE SECONDAIRE DE DONNÉES
3.4 ÉCHANTILLON UTILISÉ
3.5 LIMITES DE LA RECHERCHE
3.6 ASPECTS ÉTHIQUES
QUATRIÈME CHAPITRE
LA PRÉSENTATION DES RÉSULTATS
4.1 CONDITIONS OBJECTIVES D’rNSERTION PROFESSIONNELLE
4.1 .1 Caractéristiques des répondants et répondantes diplômés en
éducation
4.1.2 Évaluation de la situation actuelle sur le marché de l’emploi
4.1.3 Évaluation de la situation financière des diplômés en éducation
4.2 ÉVALUATION SUBJECTIVE DE L’rNSERTION PROFESSIONNELLE
4.2.1 Perception de leur avenir personnel et de la société
4.2.2 Caractéristiques importantes du travail
4.2.3 Premières expériences sur le marché du travail
4.3 Comparaison avec l’ensemble des diplômés universitaires
4.4 SYNTHÉSE DES RÉSULTATS
CINQUIÈME CHAPITRE
LA DISCUSSION
5.1 STRUCTURATION DES ESPACES PROFESSIONNELS
5.2 CONDITIONS PRÉCAIRES MAIS SATISFACTION ÉLEVÉE? RÉSULTAT D’UN
AJUSTEMENT DE L’HABITUS
CONCLUSION

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