Le secteur hôtelier à l’épreuve du développement durable

Le secteur hôtelier à l’épreuve du développement durable 

L’impact du secteur hôtelier sur l’environnement

D’après Mishra & Gupta (2019), aujourd’hui l’industrie du tourisme représente 10,2% du produit intérieur brut mondial et 9,6% d’emplois dans le monde. C’est un secteur économique porteur.

Mais il n’en n’est pas moins l’un des secteur poids lourds dans la production de dioxyde de carbone (à hauteur de 5% de la consommation mondiale) et dans la participation au réchauffement climatique (à hauteur de 4,6% de la consommation mondiale). Le changement climatique et le tourisme sont donc très intimement liés. L’industrie hôtelière étant un des acteurs principaux à ces multiples impacts sur l’environnement, c’est également une industrie fragile qui a une économie très vulnérable et sensible à ces différents changements climatiques. (Gössling & Peeters, 2015).

Toujours selon Gössling & Peeters (2015), le tourisme est entièrement dépendant des énergies et pratiquement toute l’énergie utilisée dans le tourisme provient des combustibles fossiles. Comme cité précédemment, une fois brûlés, ces combustibles contribuent aux émissions de gaz à effet de serre, dont le CO2. Les émissions de CO2 dans le secteur du tourisme sont surtout dû aux transports qui représente 75% de la demande en énergie. Les combustibles fossiles ne sont néanmoins pas les seules énergies utilisées par le tourisme. Effectivement, le tourisme dépend également des ressources en eau douce. Selon Chapagain & Hoekstra (2008), « les touristes consomment de l’eau lorsqu’ils se douchent ou utilisent les toilettes, lorsqu’ils participent à des activités telles que le tourisme de ski (enneigement) et lorsqu’ils utilisent des spas, des saunas, des espaces de bien-être ou des piscines. L’eau douce est également nécessaire pour entretenir les jardins des hôtels et les terrains de golf et est incorporée dans le développement des infrastructures touristiques (par exemple l’hébergement) et la production de nourriture et de carburant. » De plus, le tourisme utilise également beaucoup de terrain incluant les aéroports, les routes, les centres commerciaux, les campings, les hôtels, les pistes de ski etc. De plus, intimement lié, à l’utilisation d’espace, la production alimentaire est aussi une ressource polluante indispensable au tourisme qui menace les écosystèmes et responsable de la perte d’espace sauvage (Vitousek, Mooney, Lubchenco, & Melillo, 1997). C’est pourquoi, le tourisme prend progressivement en compte les dimensions environnementales dans son développement, devenant même un outil stratégique d’appui à la transition écologique mondiale. Nous remarquons depuis peu, une réelle prise de conscience chez les consommateurs (la plupart provenant des pays développés) de l’impact des activités humaines sur l’environnement. Le secteur du tourisme et plus particulièrement des hôtels n’y échappent pas. Ainsi, une nouvelle forme de tourisme est née : le tourisme durable. Ce dernier peut être définit comme suit : « une forme de tourisme qui prend totalement en considération les impacts économiques, sociaux et environnementaux actuels et futures qui répondent aux besoins des clients, professionnels, de l’environnement et des communautés qui les accueillent. Le tourisme durable, répond à une protection de l’héritage naturel et culturel que nous avons » (Leroux & Pupion, 2018).

Si nous nous concentrons maintenant davantage sur le secteur hôtelier, partie intégrante du secteur du tourisme, ce dernier consomme des quantités importantes d’eau, d’électricité et de produits non durables dû à ses caractéristiques et ses activités qui sont centrées autour du service (M. F. Chen & Tung, 2014). Pour nous donner un ordre d’idée, d’après Chen & Tung (2014), un hôtel de taille moyenne achète en une semaine plus de produits qu’une centaine de familles en une année. Toujours d’après Chen & Tung (2014), de nombreux clients qui fréquentent les hôtels commencent à s’intéresser et parfois dans certains cas, à privilégier des établissements dits « green hôtels » même si cela revient à payer plus cher. C’est pourquoi, dans le contexte actuel, de nouveaux et véritables enjeux sont apparus pour ces établissements. Afin de satisfaire la demande croissante liée à la protection de l’environnement par les clients, le secteur hôtelier recherche continuellement des moyens d’y répondre à travers, notamment, le processus de management. (Mishra & Gupta, 2019)

Ainsi, durant ces dernières années, l’industrie hôtelière s’est de plus en plus préoccupée de son impact sur la durabilité environnementale (Han & Kim, 2010). De nombreux groupes hôteliers ont implantés dans leurs stratégies, des programmes spécialement conçus pour les aider à réduire leurs impacts négatifs sur l’environnement à cause de leur grande consommation d’énergie (Chan, 2008).

Les Eco-Labels : Signe de différence et d’excellence ? 

Afin de répondre au mieux à ces clients (tourisme ou business) à la recherche d’un séjour respectueux de l’environnement, des écolabels ont été créés afin de distinguer et promouvoir certains hôtels pour leur mouvance écologique. Les écolabels sont des distinctions familières, que nous retrouvons dans de nombreux secteurs. C’est pourquoi, dans le secteur de l’hôtellerie, pour devenir un « green hôtel » l’adoption d’écolabels est indispensable. D’après Leroux & Pupion (2018) l’année 2017 a été « the International Year for Sustainable Tourism for Development». Afin de répondre à ces nouveaux clients qui constituent le nouveau segment du tourisme durable, le principe de l’écolabel dans le secteur hôtelier a été créé. Il est défini comme une forme de certification reconnue qui prouve que l’établissement agit en connaissant et en utilisant des standards qui respectent l’environnement ou qui du moins, réduisent leurs impacts sur le développement durable. Toujours selon Leroux & Pupion (2018), c’est une forme totale d’innovation marketing durable qui peut se traduire comme étant un outil d’aide à la vente.

D’un point de vue client et soutenu par Lee et al. (2019), les écolabels auraient un impact positif sur la vision qu’ont les clients des hôtels porteurs d’écolabels (Etude menée dans un hôtel au Sri Lanka). De plus, les écolabels sont également vecteurs d’intention de fidélité (c’est-à-dire une intention de revenir de la part du client) et encouragent les clients à payer leurs chambres plus chères. Un hôtel pourvu d’écolabels a de meilleures relations avec ses clients. Au-delà de ces points positifs non négligeables apportés par les écolabels aux hôtels, nous nous sommes demandé si l’ensemble des hôtels souhaitait obtenir des écolabels ? D’après Leroux & Pupion (2018) , certains hôtels sont réticents à l’adoption d’écolabels car cela représente pour eux une forme de bureaucratisation et un manque d’autonomie et de libertés. De plus, notamment pour les petites structures, cela représente un coût et un investissement important non négligeable et parfois assez conséquent, les poussant à abandonner l’adoption de ces écolabels.

Néanmoins, parce que de nombreux hôtels ont adopté les écolabels, l’imitation des pairs est aussi un facteur important dans l’acquisition de ces certifications. Certains hôtels font donc la démarche d’adoption des écolabels comme choix stratégique d’alignement avec la concurrence. La pression du groupe est suffisamment forte pour les influencer.

L’apparition « des green hôtels » : simple mode ou transformation obligatoire? 

Les attributs des « green hotels »

La question que nous pouvons désormais nous poser est la suivante : Posséder des écolabels est-il l’unique attribut nécessaire pour devenir un « green hôtel » ? Les écolabels font partie intégrante de cette transformation vers des hôtels plus durables mais ne sont pas l’unique critère. L’obtention des écolabels ne représente plus une finalité en soi. Selon la Green Hôtel Association, cité par Roberto Merli et al. (2019), les « green hôtels » peuvent être défini comme suit : « Les « green hôtels » sont des « propriétés d’hébergement pro-environnementales qui mettent en œuvre différentes pratiques vertes telles que l’économie d’eau et d’énergie, la réduction des déchets solides et le recyclage et la réutilisation des éléments de service durables (poubelles, serviettes etc.) pour protéger la terre dans laquelle nous vivons ». A cette définition vient également s’ajouter l’éducation des employés. (Mishra & Gupta, 2019). Aujourd’hui, devenir un hôtel vert est aussi une très bonne stratégie pour booster la compétitivité entre les hôtels et gagner des parts de marché en attirant une toute nouvelle cible (R. Merli, Preziosi, Acampora, Lucchetti, & Ali, 2019).

Selon le modèle de Bieak Kreidler & Joseph-mathews (2009), les hôtels verts s’inscrivent dans trois dimensions différentes : installations de confort (interne et externe), matériaux utilisés (fonctionnels et décoratifs.) et humains (comportements des clients et des employés). Dans les installations de confort, nous parlons de l’interne pour décrire l’intérieur de l’hôtel comme la lumière (ampoule à basse consommation ?), la température (climatisation) etc. Pour l’externe, sur le même principe, nous parlons des espaces extérieurs de l’hôtel comme l’entretien des jardins, l’atmosphère générale de la cour intérieure etc. Concernant les matériaux fonctionnels nous étudions la consommation d’eau des toilettes de la salle de bain, les consommables etc. Pour les matériaux décoratifs cela représente tout ce que le client n’utilise pas pour son quotidien mais qui constituent une valeur ajoutée à son séjour comme les fleurs à l’entrée de sa chambre (sont-elles coupées ou en pot ?) etc. Enfin, pour l’aspect humain, l’hôtel possède-t-il des employés formés aux actions vertes ? Les clients sont-ils des participants à la vie verte de l’hôtel ? (Changement de draps tous les deux jours, recyclage de leurs déchets en chambre etc.) (Mishra & Gupta, 2019). Ces différents critères sont indispensables à l’attribution ou non, du statut de « green hôtels ».

La limite de cette transformation : Le greenwashing

Le modèle « de green hotels » est large et comporte de nombreux challenges. Aujourd’hui, le tournant vers des hôtels plus durables et plus respectueux de l’environnement semble être inévitable. Néanmoins ce modèle comporte des failles. La prise de conscience de la menace environnementale a rendu les consommateurs plus informés sur les pratiques vertes des entreprises. Les clients sont donc plus exigeants lorsque nous parlons des hôtels verts. Ainsi, l’industrie hôtelière est souvent critiquée du fait que certaines actions environnementales mises en avant par l’hôtel sont en réalité des actions à but purement économique. On appelle cela le greenwashing. (Donovan, T. and McElligott, B. (2000) cité par Rahman et al. (2015)). D’après le livre « Webster’s New Millennium Dictionary of English (2009) », le greenwashing peut être définit comme étant « une divulgation sélective faite par les entreprises où il y’a promotion d’actions vertes alors que l’entreprises n’est pas ou peu respectueuse de l’environnement. ». Par exemple, selon Garza (2011), l’insigne « sauvez la planète, réutilisez votre serviette » est un signe probant de greenwashing : l’impression d’exercer de pratiques vertes alors que le principal bénéfice pour l’hôtel est de réduire ses coûts à la blanchisserie.

Table des matières

Introduction
I- Revue de la littérature
Présentation et discussion thématique de la littérature
I. Le secteur hôtelier à l’épreuve du développement durable
1. L’impact du secteur hôtelier sur l’environnement
A. Mise en place du contexte
B. Les Eco-Labels : Signe de différence et d’excellence ?
2. L’apparition « des green hôtels » : simple mode ou transformation obligatoire ?
A. Les attributs des « green hotels »
B. La limite de cette transformation : Le greenwashing
II. La perception des clients face aux initiatives vertes des hôtels
1. Bien connaitre son client : l’importance d’un ciblage stratégique
A. La théorie du comportement planifié
B. Les caratéristiques de la cible des hôtels écologiques
C. La destination : un point clé dans l’analyse de la cible
2. Les conséquences des actions vertes sur les clients
A. Le concept de loyauté et de satisfaction
B. La volonté de payer plus cher
III. Les enjeux des hôtels de luxe face à la transition écologique
1. Les croyances et challenges du luxe
A. Attributs des hôtels de luxe
B. Motivations des clients à séjourner dans un hôtel de luxe
C. Une clientèle compatible avec des actions écologiques ?
2. Le risque perçu par les clients lors d’un séjour dans un hôtel de luxe
A. Le risque fonctionnel
B. Le risque financier
C. Le risque hédonique
D. Le risque de l’image de soi
Tableau de synthèse de la littérature par thème
Formulation des questions de recherche
Encadré récapitulatif
II- Etude de terrain
Méthode de travail et de recueil des données
Construction du questionnaire
Analyse des données
I. Analyse de la partie I du questionnaire
II. Analyse de la partie II du questionnaire
III. Analyse de la partie III du questionnaire
Discussion des résultats
Encadré récapitulatif
III-Recommandations managériales et perspective éthique et RSE
Recommandations managériales
Perspective éthique sur le sujet
Encadré récapitulatif
Conclusion

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