Anti-inflammatoires stéroïdiens (AIS)

Thérapeutique

Corticoïdes

On les appelle aussi anti-inflammatoires stéroïdiens (AIS) pour les distinguer des anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS).

Historique

Dans les années 1940, les scientifiques travaillant sur la polyarthrite rhumatoïde de la femme âgée se sont aperçus que les signes de cette maladie régressait dans les situations physiologiques de forte production de cortisol (stress, anesthésie, gestation). L’utilisation de la cortisone comme premier AIS a été couronnée par un Prix Nobel.

Physiologie

Les surrénales sont des glandes situées au-dessus des reins, dont le cortex est composé de trois zones de fonction différentes : la zone externe, appelée zone glomérulée, qui produit les minéralocorticoïdes et l’aldostérone ; la zone moyenne, dite zone fasciculée, qui produit les glucocorticoïdes ; la zone interne, dite zone réticulée, qui produit les androgènes et la corticostérone. Les minéralocorticoïdes augmentent la récupération du sodium et de l’eau et l’élimination du potassium dans le rein. Les glucocorticoïdes agissent sur l’ensemble des fonctions métaboliques pour contrôler le métabolisme des glucides, lipides et protéines. Ils stimulent la néoglucogenèse, ont une action anti-insuline, mobilisent les acides gras, ont une action anti-stress et anti-inflammatoire. L’hormone naturelle de ce groupe est le cortisol, métabolisé après estérification en cortisone. La cortisone, la prednisolone, la méthylprednisolone sont obtenues par de simples modifications structurelles à partir du cortisol. Elles ont toutes une certaine affinité pour les récepteurs aux minéralocorticoïdes, ce qui conditionne leur toxicité. Par contre, les dérivés fluorés du cortisol (triamcinolone et dexaméthasone) ont très peu d’effet minéralocorticoïdes.

Pharmacocinétique

Formes galéniques

Les corticoïdes sont disponibles :
Sous une forme alcool, insoluble dans l’eau mais très soluble dans le propylène glycol (IV lente, attention au risque de choc),Sous une forme estérifiée insoluble (acétate, phénylpropionate, benzoate) ou soluble (phosphate, succinate).Par exemple, la méthylprednisolone existe sous une forme soluble (succinate sodique : SOLUMEDROL) hydrolysée en 2h, et sous une forme insoluble (acétate : DEPOMEDROL) présent sur une longue période au site d’injection.

Voies d’administration

On utilise la voie IV avec des formes solubles pour le traitement du choc ou les tests de frénation du cortisol. La voie orale est utilisée dans les corticothérapies prolongées, notamment à jour alterné. Attention, ces molécules sont détruites dans le rumen des Ruminants. La voie intramusculaire est la plus utilisée chez les Bovins, mais peut entraîner une douleur au site d’injection. Sa biodisponibilité est fonction de la formulation. L’administration locale permet de réduire les doses, donc de limiter le coût et la toxicité. Il s’agit de la voie cutanée, de la voie pulmonaire avec inhalateur, de la voie sous-conjonctivale, de la voie épidurale (peu utilisée), et surtout de la voie intra-articulaire (grande rémanence : jusqu’à 3 mois).

Transport plasmatique

L’albumine participe au transport de tous les corticoïdes. La transcortine est la protéine de transport du cortisol et de la prednisolone. Elle ne transporte pas les autres molécules. Après injection de prednisolone, la cortisolémie diminue, parce que la prednisolone prend la place du cortisol sur la transcortine, et que le cortisol libre part dans les tissus. C’est pourquoi, le test de frénation est impossible avec la prednisolone.

Distribution

Elle est large, sans site d’accumulation préférentiel, avec pénétration intracellulaire.

Elimination

L’élimination se fait par les fécès (1/3) et par les urines (2/3). On utilise les propriétés d’excrétion fécale pour doser le cortisol excrété par les animaux sauvages, donc leur niveau de stress, ainsi que pour le contrôle anti-dopage chez les chevaux. Il existe également une élimination dans le lait, proportionnelle au taux sanguin, et susceptible de provoquer des retards de croissance chez les nouveau-nés.

Propriétés pharmacologiques

Action sur le métabolisme du glucose

Chez les monogastriques, ils ont un effet anti-insuline, ce qui empêche l’entrée du glucose dans les cellules, et ils stimulent la néoglucogenèse : ils sont hyperglycémiants. Chez les ruminants, ils diminuent la production laitière en empêchant l’exportation de glucose. Ils sont donc indiqués dans le traitement de la toxémie de gestation chez la brebis et de l’acétonémie de la vache laitière. Il en résulte une augmentation du risque de diabète.

Action sur le métabolisme des protéines

Ils augmentent le catabolisme protidique. Il en résulte une amyotrophie, une atrophie cutanée, des retards de cicatrisation, des retards de croissance et de l’ostéoporose.

Action sur le métabolisme des lipides

Ils favorisent la lipolyse par action sur les catécholamines, et augmentent donc le taux d’acides gras circulants.

Action sur le système nerveux

Les corticoïdes sont psychostimulants, ils créent un état d’euphorie, qui explique leur utilisation comme produit dopant, ou en association pendant la phase d’induction d’une antibiothérapie. Ils favorisent également la prise alimentaire (action orexigène).
Ils abaissent le seuil épileptique.

Action sur le système cardiovasculaire

Les corticoïdes sont utilisés dans le traitement du choc endotoxinique, mais n’ont pas d’action dans le choc hémorragique. Ils provoquent une vasoconstriction cutanée.

Action sur le système gastro-intestinal

Les corticoïdes diminuent la synthèse protéique, donc la cicatrisation. Ils sont également immunosuppresseurs, et inhibent la production de mucus, ce qui les rend ulcérigènes. La sécrétion du suc pancréatique est également augmentée.

Action sur le sang

Les corticoïdes induisent des modifications de la numération-formule :Augmentation du nombre d’hématies, de plaquettes et de neutrophiles, Diminution des lymphocytes et des éosinophiles.

Action sur l’œil

Les corticoïdes peuvent entraîner une opacification du cristallin et des glaucomes. Ils potentialisent également les viroses oculaires. Ne jamais les utiliser sur les ulcères cornéens !

Action sur le métabolisme hydrominéral

La prednisolone, la méthylprednisolone et l’isofluprédone augmentent la récupération du sodium et de l’eau et l’élimination du potassium au niveau rénal. Tous les autres corticoïdes n’ont pas d’effet minéralocorticoïde.

Action sur le métabolisme phosphocalcique

Les corticoïdes diminuent l’absorption du calcium et entraînent une calciurie, avec des risques d’hyperparathyroïdie secondaire.

Action sur la glande surrénale

L’ACTH est une hormone antéhypophysaire, qui a deux rôles :
Une action ponctuelle sur la corticosurrénale via le sang, qui stimule la synthèse de corticoïdes,
Une action trophique qui maintient par son action le matériel enzymatique nécessaire à la production de corticoïdes. Sur un animal sain, le cortisol exerce un rétrocontrôle négatif sur l’hypothalamus et l’hypophyse, et une injection d’ACTH provoque un pic de cortisolémie. La cortisolémie physiologique diminue le soir et augmente le matin. Elle est sujette à d’importantes variations liée au stress. Sur un animal traité aux corticoïdes de synthèse, le rétrocontrôle négatif bloque la synthèse d’ACTH, et de ce fait, la sécrétion de cortisol endogène. Au terme de plusieurs semaines, l’absence de sécrétion d’ACTH provoque une dégénérescence de la zone fasciculée de la corticosurrénale, qui perd sa capacité à répondre à la stimulation à l’ACTH. Cette toxicité surrénalienne est plus marquée lors de l’utilisation de formes retard (DEPOMEDROL).
Le test à l’ACTH, aussi appelé test de frénation, permet d’évaluer l’état fonctionnel du cortex surrénalien. On utilise une injection IV de tétracosactide (SYNACTHENE).

Action sur le système immunitaire

Elle ne touche que la composante Th1 de la réponse immunitaire (donc la vaccination n’est pas concernée).Chez toutes les espèces, la corticothérapie induit une lymphocytopénie, dont la durée et l’importance varient en fonction de la formulation. Selon l’espèce, elle est due à une redistribution dans les nœuds lymphatiques ou à une lymphocytose (rongeurs et lagomorphes).
Elle induit également une monocytopénie, et une inhibition de l’activité des macrophages, à l’origine de complications infectieuses favorisant l’installation ou la dissémination des infections et viroses. Attention donc à ne pas les utiliser en cas de virose ou d’autre affection dont l’immunité est cellulaire !

Mécanisme d’action

Les corticoïdes bloquent la synthèse de l’acide arachidonique qui est à l’origine des leucotriènes et prostaglandines. Leur action est également pléiotrope sur une centaine de gènes intranucléaires, dont ils expriment ou inhibent l’expression. Ils ont donc des propriétés anti-inflammatoires non spécifiques, directes, et agissant sur les 3 phases de la réaction inflammatoire (vasculaire, cellulaire, réparatrice), contrairement aux AINS qui n’agissent que sur la phase vasculaire.
Indications

Les corticoïdes sont indiqués dans le cadre 

De thérapie substitutive, lors de défaut d’aldostérone (cortisone en traitement de crise, puis fludrocortisone) ou d’hypocorticisme. De thérapie des troubles métaboliques : diminution des besoins en glucose lors de cétose ou de toxémie de gestation. De thérapeutique anti-allergique (dermatite, urticaire, asthme, uvéite, bronchiolite).Du traitement des maladies infectieuses : effet anti-pyrétique, orexigène, psychostimulateur. Du déclenchement du part chez les bovins (formulation à action rapide : dexaméthasone phosphate) en cas d’indication médicale avérée.

Mise en œuvre d’une corticothérapie

On commence par s’assurer de l’absence de contre-indications (phénomène infectieux ou parasitaire concomitant, risque d’hypocorticisme iatrogène). La toxicité dépend plus de la durée du traitement que de la dose utilisée.

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