PRISM, le Radar Géophysique de l’Aérostat Martien
LA MISSION SPATIALE « MARS94-MARS96 » ET L’EXPERIENCE PRISM
MARS94: UNE RENCONTRE AMBITIEUSE AVEC LA PLANETE MARS
Place de cette mission dans la stratégie globale du domaine
La connaissance de la planète Mars étant considérée comme un objectif à la fois important et réaliste pour la décade des années 90, l’ex-Union Soviétique avait défini dans le cadre d’un programme international la grande mission « MARS 94 ». Le tableau A-1-1 de l’Annexe I rappelle les missions lancées vers la planète Mars jusqu’en 92. De nos jours, l’atmosphère de Mars est raréfiée, et il n’y a pas d’eau liquide à sa surface où la température varie de +°C à -1°C. Pourtant, il y a assez d’évidences pour affirmer qu’il y a quelques milliards d’années, la situation était très différente, avec une atmosphère dense, de grandes étendues d’eau, un climat plus doux. L’analyse de ce qui est arrivé sur Mars nous aiderait à comprendre le passé, mais aussi les possibles futurs de la Terre. Il y a peut être aussi sur Mars, des traces d’une biosphère, présente ou congelée. Les découvrir nous éclairerait beaucoup sur la vie, et ses formes. Pour avancer dans cette connaissance, la mission MARS94 proposait une analyse combinée de données provenant à la fois de 2 satellites, de 2 aérostats, de pénétrateurs, de petites stations posées au sol, et peut-être aussi de petits véhicules semi-automatiques. Cette approche multi-spectrale apporterait des observations globales pour l’étude du climat, de l’atmosphère, du champ magnétique ou du plasma ionosphérique, ou des observations plus régionales pour la géologie, la minéralogie, l’hydrologie du passé, ou encore des études détaillées de sites « d’atterrissage » pour les futures missions. Les données de la mission Mars94 auraient été associées aux données du satellite américain MARS-Observer. Celui-ci, lancé en 92, devait, entre autre, fournir une cartographie améliorée de la planète. Il devait aussi servir de relais radio pour rapatrier de nombreuses images rapprochées prises à bord de l’Aérostat. Un boîtier spécial, le MBR (Mars Balloon Relay), développé avec la France, a été rajouté sur MARS-Observer pour cette fonction. En utilisant les antennes terrestres du réseau américain Deep Space Network (DSN), on espérait ainsi doubler le retour scientifique des instruments du ballon.
Objectifs scientifiques et principaux instruments de la mission
Les instruments scientifiques embarqués sur les sondes sont choisis pour répondre aux objectifs généraux suivants: – Recherches sur la surface de Mars – Recherches sur l’atmosphère, suivi météorologique de la planète – Structure interne de la planète – Etudes sur le Plasma martien – Etudes d’astrophysique Une large variété d’instruments voués à ces mesures sont répartis sur les différentes composantes de la sonde (Zakharov A.V., 94). Les tableaux A-1-2 à A-1-7 de l’annexe I détaillent les expériences selon leurs emplacements et leurs objectifs. Sur l’orbiteur, on a distingué les expériences de géomagnétisme et de plasma (tableau A-1-2), les expériences atmosphériques et de sondage à distance (tableau A-1-3), et les expériences d’astrophysique et de croisière (tableau A-1-4). Le tableau A-1-5. présentent les expériences qui équipent la station de surface METEGG. Pour l’Aérostat, on a distingué les expériences portées par la nacelle (tableau A-1-6) de celles glissées dans le guiderope (tableau A-1-7). Parmi toutes ces contributions internationales, je souligne la présence sur l’orbiteur, d’un autre radar, destiné d’abord au sondage de l’ionosphère martienne. Ce radar, de sigle LWR ou RLK, est réalisé avec l’Institut Max Planck pour l’Aéronomie de Lindau en Allemagne (Nielsen et al., 95). Il fonctionne aux alentours de 2 MHz. Selon l’heure et l’angle du sondage une partie du faisceau pourra atteindre la surface de Mars et sonder la subsurface. Bien que ce faisceau défile très vite à la surface de Mars, et que sa résolution soit médiocre, cet instrument pourrait donner des informations provenant de la subsurface avec une très large couverture de la planète.
Premier scénario, évolutions, puis abandon de la mission
Deux sondes devaient être emportées sur des fusées PROTON depuis Baïkonour en 0ctobre 94. Après une première satellisation terrestre, les véhicules spatiaux devaient prendre une trajectoire de transfert Terre-Mars de durée 3 jours. L’insertion en orbite martienne était prévue pour Septembre 95, à quelques 310 millions de km de la Terre. La séparation avec le module de descente comportant le ballon devait avoir lieu après la transition par trois orbites de descente. Le déploiement du ballon est une phase extrêmement délicate qu’il est difficile de mettre au point et de reproduire sur Terre. Après une phase de freinage par le bouclier thermique du container, un parachute se déploie, et tandis que la vitesse de la chute se réduit, le gonflage du ballon est entamé, alors que la pression ambiante est encore extrêmement faible. L’ensemble de la séquence est telle qu’elle nécessite une épaisseur atmosphérique supérieure à la moyenne martienne. Les sites martiens d’arrivée doivent être choisis en fonction de cet impératif: ils doivent donc être un à deux kilomètres au dessous du niveau normal de la surface. Cette surépaisseur de l’atmosphère assure une marge pour garantir le déploiement. Toute chute trop brutale de l’aérostat sur la surface de Mars se solderait par sa destruction immédiate et par l’anéantissement de cette partie de la mission. Pendant les années de préparation de la mission, de nombreuses difficultés se sont accumulées: des difficultés de confirmation définitive de la mission, de sélection des instruments embarqués, des changements politiques importants en Union Soviétique, redevenue Russie, puis des difficultés économiques en Russie, des changements des priorités politiques, une inflation imprévisible. En France, dans une bien moindre mesure, il y a eu aussi des difficultés financières, techniques et organisationnelles pour réaliser le ballon, le guiderope et l’instrumentation. Vers 92, la mission a été décomposée en deux tranches: Mars94, avec un lancer en 94 pour l’orbiteur, les pénétrateurs et les petites stations, et Mars96, avec un lancer en 96, avec un orbiteur simplifié et l’Aérostat. Le créneau de lancement de 96 est moins favorable que celui de 94, la masse que l’on peut transférer est moindre. Le déploiement du ballon se ferait dans ce cas vers Novembre 97. Pourrait-on encore, à l’automne 97, utiliser les services de MARS-Observer et de son MBR? Durant l’été 93, le contact avec MARS-Observer est perdu au voisinage de la planète rouge. Quelques semaines plus tard, on reconnaît que le satellite est définitivement perdu. En Russie principalement, les retards continuent encore de s’accumuler. Le lancement de l’orbiteur instrumenté doit être reporté au créneau astral suivant, celui de 96. Mars n’existe plus. Deux lancements ne peuvent être financés et planifiés pour la même année. Peut-on décaler le lancement du ballon au créneau de 98? Les fenêtres de tir pour l’envoi depuis la Terre de sonde vers Mars, se décalent le long de l’orbite Martienne. Comme l’orbite de Mars est assez excentrique, la qualité de ces rendez vous varie. Ainsi le créneau de lancement de 94 était plus propice que celui de 96, lequel est bien meilleur que celui de 98. Pour une fusée et une quantité d’ergols (carburant et comburant) données au départ, on a moins de masse transférable jusqu’à Mars. Le créneau suivant se situe au début de 01. Le décalage provoque aussi un avancement dans le cycle des saisons martiennes qui sont très marquées. Ainsi le créneau 96 déposait le ballon sur Mars juste avant la saison des grands vents de poussière connus depuis les missions de Mariner9 et des sondes Viking I et II. Le créneau de lancement de 98 provoque une arrivée en pleine saison des vents. Ceux ci peuvent atteindre 0 km/h. Il n’est plus question de laisser le ballon approcher la surface martienne. Il faut le renforcer, changer sa dynamique, reprendre toute l’étude…Ou prendre un autre risque, attendre en orbite la fin de la saison des vents, elle dure environ six mois. Le risque de défaillance est alors jugé trop grand. Fin 94, les russes proposent d’utiliser, pour l’éventuelle mission Mars98, une fusée Molnya au lieu de la Proton, elle coûte six fois moins cher, elle est aussi beaucoup moins puissante. La masse transférable est encore plus faible. Il n’est plus possible d’assurer une orbite d’attente. Il faut assurer l’injection directe du module de descente dès l’arrivée vers Mars, sans orbite de descente. Le scénario du déploiement du ballon est encore plus serré, les marges montrées par les calculs sont trop faibles, et elles dépendent trop des méthodes de calculs. Alors que la mission de l’orbiteur, devenue mission Mars96, n’a pas encore abouti, doit-on démarrer un programme avec un ballon aux caractéristiques nécessairement nouvelles, alors que l’ancien concept n’a pas fait toutes ses preuves? Au mois de Juin 95, la décision est prise, le projet de l’aérostat martien est abandonné. Les essais du CNES pour le déploiement de l’aérostat sont menés à leur terme à la rentrée 95. Puis on achève la documentation des différents travaux menés au CNES, ou dans les laboratoires. Quand on analyse les possibilités d’un aérostat pour améliorer notre connaissance de MARS, on ne peut que regretter cette fin.
INTRODUCTION |
