Caractérisation de l’adsorption de l’AOT dans la saumure sur la silice

Caractérisation de l’adsorption de l’AOT dans la
saumure sur la silice

Le phénomène d’adsorption des tensioactifs est abordé dans ce troisième et dernier chapitre

La première partie est consacrée à une étude bibliographique concernant l’adsorption de tensioactifs anioniques sur la silice et justifie le choix de la silice pour modéliser les réservoirs pétroliers. La deuxième partie est consacrée à l’adsorption sur la silice du système caractérisé dans le 2ème chapitre (AOT en milieu saumure) pour des faibles concentrations en tensioactifs (de 0CVC à ~3CVC). Le mécanisme d’adsorption, la cinétique d’adsorption ainsi que la structure de la couche adsorbée formée sur la silice seront caractérisés par la combinaison de trois techniques expérimentales : la méthode des restes, la microbalance à cristal de quartz ainsi que la réflectivité de neutrons. 

Etude de l’adsorption de tensioactifs anioniques sur la silice

Choix de la silice comme surface modèle 

Les roches réservoirs sont constituées d’une grande variété de minéraux [133]. Les roches les plus représentatives sont : – les roches carbonatées : principalement constituées de carbonate et de sodium de type calcite CaCO3 ou dolomite CaMg(CO3)2 – les roches silicatées : principalement constituées de silice de type quartz SiO2 et d’aluminium – les argiles : principalement constituées d’aluminium, de fer mais peuvent aussi contenir de la silice (de type kaolinite Al2Si2O5(OH)4, bentonite (silicate d’aluminium) ou illite (K,H3O)(Al,Mg,Fe)2(Si,Al)4O10[(OH)2,(H2O)])) – les oxydes de fer : de type goethite Fe3+O(OH) Le quartz est le minéral le plus répandu dans les réservoirs gréseux. Afin de représenter le réservoir, nous avons choisi la silice, dioxyde de silicium amorphe, comme surface modèle car son utilisation comme substrat est possible dans la plupart des techniques de caractérisation de l’adsorption. 

Description de la silice

 La silice amorphe, composée d’un arrangement géométrique irrégulier d’atomes de silice, contient à sa surface des groupements hydroxyles hydrophiles de type silanol ≡Si-OH (sous plusieurs formes) et des groupements hydrophobes de type siloxane ≡Si-O-Si≡ (Figure 43). La présence ainsi que l’abondance de ces différents groupes dépend de la préparation de la surface et de la nature de la solution au contact.La chimie de surface de la silice est caractérisée par la nature des espèces présentes à sa surface et notamment le comportement des groupements silanols ≡Si-OH, qui peuvent capter (groupement ≡Si-OH2 + ) ou perdre (groupement ≡Si-O – ) un proton en fonction du pH du milieu (Figure 44). Cependant, les trois états ≡Si-OH2 + , ≡Si-OH et ≡Si-O – coexistent toujours à la surface. Figure 44 : Espèces de surfaces possibles La charge de surface de la silice provient donc de la distribution et de la nature des groupements hydroxyles (≡Si-OH) présents à la surface (charge positive, négative ou nulle selon l’ionisation des sites hydroxyles). La silice est négativement chargée dans des conditions normales (pH neutre ~ 6/7 ), le point isoélectrique de la silice étant situé vers pH 2 [63]. La charge de surface de la silice est définie par la concentration relative des groupements SiOH2 + et SiOprésents sur la surface à un pH donné : – pH < 2 : densité de surface de ≡Si-OH2 + > densité de surface de ≡Si-O – – pH > 2 : densité de surface de ≡Si-OH2 + < densité de surface de ≡Si-O – Dans la plupart des cas, la densité de charge négative sur la surface reste faible jusqu’à environ pH 6 mais augmente rapidement entre pH 6 et 11 .

Etat de l’art sur l’adsorption de tensioactifs anioniques sur la silice

De nombreuses études portant sur l’adsorption de tensioactifs anioniques sur les roches sédimentaires telles que le grès composé majoritairement de silice ont été effectuées démontrant une adsorption très faible, voire négligeable dans la plupart des cas. Très peu d’études traitant de l’adsorption de tensioactifs anioniques sur la silice ont été répertoriées mais toutes en sont arrivées à la même conclusion : les tensioactifs anioniques ne s’adsorbent pas ou très peu sur la silice dans les conditions normales du fait de la répulsion électrostatique existant entre les tensioactifs et la silice . En effet, les interactions hydrophobes entre les chaînes carbonées des tensioactifs et les groupements hydrophobes superficiels de la silice ne sont en général pas suffisantes pour contrebalancer les répulsions électrostatiques. 86 Néanmoins, l’adsorption peut être favorisée par la modification des conditions initiales expérimentales : – diminution du pH [135,139,141] – augmentation de la force ionique par l’ajout de sel [8,135,140] – ajout de co-tensioactif [29] – changement du contre-ion du tensioactif (ex : Ca2+) [47] – modification de la structure de la silice (ex : en prenant une silice cristalline lamellaire (structure sous forme de feuillets pouvant intercaler dans les espaces interfoliaires des paires d’ions) à la place d’une silice amorphe [142] ou par exemple en prenant du quartz [143]) L’ajout de sel de type NaCl permet la neutralisation des charges superficielles par les ions Na+ . Li et al. [135] ont étudié l’adsorption du tensioactif anionique, SDS (dodécylsulfate de sodium), sur la silice. Sur la Figure 45 sont présentées les isothermes d’adsorption du SDS sur la silice à pH constant (~ 4.5) : pour une concentration en NaCl inférieure à 0.0001 M aucune adsorption n’a été mesurée car les répulsions électrostatiques sont plus fortes que les interactions hydrophobes attractives. Ils ont supposé que le SDS s’adsorbait sur la silice en présence de sel du fait des interactions hydrophobes entre les chaînes hydrophobes du tensioactif et les groupements hydrophobes de la silice (siloxanes) Ainsi, l’adsorption sur la silice de tensioactifs anioniques est favorisée par l’augmentation de la concentration en sel et par l’abaissement du pH du fait de l’affaiblissement des répulsions électrostatiques. 87 Huang et al. [29] ont montré que l’adsorption de tensioactifs anioniques sur la silice était possible en présence de tensioactifs cationiques. Dans le cas des mélanges cationiques/anioniques, l’adsorption est améliorée par la formation de paires d’ions entre les deux entités du fait de leur attraction électrostatique. Le tensioactif anionique sera alors coadsorbé avec le tensioactif cationique sur le gel de silice, les paires d’ions s’adsorbant sur les sites non chargés de la silice par interactions attractives de van der Waals. Wang et al. [47] ont étudié l’adsorption du NaAOT et CaAOT sur wafers de silicium. Les résultats avec des ions monovalents (NaAOT) ne montrent pas de preuve de l’existence d’une couche adsorbée contrairement à l’adsorption avec des ions divalents (CaAOT) : une adsorption en bicouche est alors identifiée. Ainsi, ils ont montré qu’il est possible de lier des surfactants anioniques à des surfaces anioniques par l’ajout d’ions multivalents de charge opposée à la surface grâce à un effet de pontage (« bridging effect »). Enfin, Tummala et al. [144] ont simulé l’adsorption du SDS sur différents substrats de silicium comportant des degrés d’hydroxylation différents. Ils ont montré que la charge de surface, la densité de charge de surface ainsi que la distribution (hétérogène ou pas) de ces charges affectait la quantité mais aussi la morphologie des agrégats formés à la surface. D’après ces études, l’hypothèse la plus probable concernant l’agrégation des tensioactifs anioniques sur la silice, dans les conditions où l’adsorption est observée, est la suivante : les tensioactifs anioniques s’adsorbent sur la silice par interactions hydrophobes de type dispersion (van der Waals) dans la plupart des cas puisque la silice possède une partie hydrophobe par la présence de groupements siloxanes .

Mesure et caractérisation de la couche adsorbée

 Dans cette partie, l’adsorption sur la silice du système tensioactif (AOT dans la saumure) décrit dans le deuxième chapitre est étudiée. La cinétique d’adsorption ainsi que la structure de la couche adsorbée seront analysées par la combinaison de diverses techniques expérimentales : la méthode des restes, la microbalance à cristal de quartz (QCM-D) et la réflectivité de neutrons. La microbalance à cristal de quartz est une technique de mesure dynamique : la couche adsorbée est formée sous écoulement. Elle donnera accès à la cinétique d’adsorption et peut dans certains cas permettre d’accéder à la structuration de la couche adsorbée au cours du 88 temps. A l’obtention de l’équilibre, il est possible d’obtenir des informations sur l’organisation globale de la couche. La méthode des restes et la réflectivité de neutrons sont des méthodes statiques et fournissent des informations sur la couche adsorbée à l’équilibre thermodynamique. La méthode des restes, technique classique de mesure de la quantité adsorbée à une interface solide/liquide permettra de tracer les isothermes d’adsorption et d’obtenir un ordre de grandeur de la quantité adsorbée de l’AOT sur la silice. La réflectivité de neutrons permettra de caractériser la structure interne de la couche adsorbée par la détermination de son épaisseur, de sa composition chimique ainsi que de sa rugosité de surface.

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