Comptabilité et analyse des états financiers

Comptabilité et analyse des états financiers

LES PRINCIPES DE QUANTIFICATION OU DE MESURE

Les principes de quantification généralement retenus sont au nombre de trois :

le principe de monétarisation ;
le principe des coûts historiques ;
le principe de prudence.

Le principe de monétarisation (« money measurement principle »)

En comptabilité générale, tous les faits comptables, toutes les transactions sont exprimés en unités monétaires. La monnaie est le langage retenu pour construire les représentations comptables de l’entité car il permet d’exprimer la valeur d’objets différents (une machine, un stock,…) dans une unité de mesure commune et rend ainsi possible leur agrégation. Il importe de comprendre que le choix du principe de monétarisation et donc d’une quantification monétaire a pour effet d’exclure un certain nombre de phénomènes du champ de la représentation comptable. Le champ du réel représentable par la monnaie empêche de saisir des pans entiers du réel qui échappent à la sphère de l’économie marchande comme les dimensions sociales, écologiques, sociétales,… et plus encore l’éthique de l’entité. Ainsi donc, l’immatériel, véritable richesse d’une entité puisqu’il s’agit de sa capacité à innover, créer, n’est que partiellement appréhendé par la comptabilité. En d’autres termes, la comptabilité exclut les éléments non monnayables du patrimoine ou de l’activité de l’entité. Le principe de monétarisation est souvent complété par celui de nominalisme qui pose l’hypothèse de la stabilité de l’unité monétaire dans le temps. Or, la valeur de la monnaie évolue au fil du temps. Dès lors, et particulièrement en période de forte inflation, cette hypothèse est mise à mal et des réajustements de valeur s’imposent si l’on veut maintenir la représentativité de l’image comptable produite. À titre exemplatif, la valeur nette comptable d’un immeuble acquis il y a de nombreuses années risque d’être éloignée de sa valeur réelle actuelle. Si l’on veut dès lors annuler les effets de l’inflation, une réévaluation dudit immeuble devrait être envisagée et intégrée dans la comptabilité (voyez le chapitre 8). Par ailleurs, l’existence de différentes monnaies dans le monde rend malaisée la comparaison des activités d’entités présentes dans des zones utilisant des monnaies spécifiques. Songeons à deux entités : une européenne, dont les états financiers sont libellés en EUR, et une américaine, dont les états sont libellés en USD. Au 31.12.N, elles affichent un chiffre d’affaires identique, compte tenu d’un taux de change 1 EUR = 1,20 USD. Il suffit que le cours de change entre les deux monnaies évolue pour créer une hiérarchie (mesurée par le chiffre d’affaires) entre les deux entités. Au sein d’une même entité, un décrochage ou une appréciation du dollar par rapport à l’euro peut modifier la présentation de ses comptes consolidés. Supposons ainsi un groupe européen de distribution dont l’activité américaine représenterait 70 millions d’USD, outre 30 millions d’EUR dans la zone euro.

Le principe des coûts historiques (« historical cost principle »)

La détermination de la valeur des avoirs d’une entité peut se faire en adoptant différents critères de valorisation comme le prix d’achat historique, le coût de production du bien, la valeur de revente, la juste valeur (« fair value »)… En droit comptable belge (art. 35 à 37 de l’A.R. du 30 janvier 2001), le critère retenu pour évaluer un élément est généralement son coût historique, qui se définit comme son coût d’acquisition (dans le cas d’un achat) ou son coût de production (s’il est fabriqué par l’entité), exprimé en unités monétaires du moment où il est entré dans le patrimoine de l’entité. De même, les directives européennes en matière de comptes sociaux et de comptes consolidés consacrent l’évaluation des actifs sur la base du coût historique. Méthode simple, universelle et vérifiable, l’évaluation au coût historique repose sur des données clairement identifiables et précisément mesurables car il existe des preuves objectives des coûts encourus pour acquérir l’actif (valorisation au prix d’acquisition) ou pour l’élaborer (valorisation au coût de revient). Un premier correctif est cependant apporté au principe des coûts historiques par le fait qu’à la fin de chaque exercice comptable, un certain nombre de biens vont être amortis pour enregistrer la diminution de valeur qu’ils ont subie depuis le moment de leur acquisition. Un second correctif consiste en la possibilité, sous des conditions précises, de revaloriser certaines catégories d’actifs. L’évaluation des actifs à leur coût historique, sous la déduction des éventuels amortissements et/ou réductions de valeur, est une composante essentielle du principe de prudence (voyez ci-après) qui fonde la culture comptable européenne telle qu’elle transparaît dans les directives européennes. Orienté vers le passé, le principe des coûts historiques induit implicitement celui de stabilité, que contrarie la réalité.

Le principe de prudence (« conservatism principle »)

Le principe de prudence, très présent en droit comptable belge et dans les directives européennes, a pour objectif premier d’inspirer la confiance dans les comptes publiés par les entreprises. Il consiste notamment en l’appréciation raisonnable de faits conduisant à prendre en compte immédiatement les diminutions probables de valeur des biens de l’entité alors que les augmentations de valeur ne seront comptabilisées que lorsqu’elles auront été effectivement réalisées. L’application du principe de prudence évite la surestimation de la valeur du patrimoine mais inversement peut conduire à une sous-estimation manifeste des biens de l’entité, alors même que ces biens comptables ne constituent déjà qu’une partie des « forces vives » de l’entité. Cette prudence répond à une approche juridique plutôt qu’économique, et certains auteurs parlent alors de « perspective pessimiste dans l’intérêt des tiers ».

La remise en cause du modèle traditionnel d’évaluation basé sur la prudence et les coûts historiques

Les normes comptables internationales (dites « IAS/IFRS »), inspirées avant tout par une approche anglo-saxonne, promeuvent un deuxième critère d’évaluation des actifs, la juste valeur, qui, dans certains cas, remplace le coût historique dont nous venons de souligner les limites. La juste valeur (« fair value ») se définit de la façon suivante selon les normes comptables internationales : « la juste valeur d’un actif est le montant pour lequel cet actif pourrait être échangé entre parties bien informées, consentantes et agissant dans des conditions de concurrence normale » (IAS 38-8). S’il n’est pas absent du champ des normes comptables internationales, le principe de prudence n’y occupe pas la place centrale que le droit comptable belge ou les directives européennes lui assignent.

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