Concepts généraux de la métamorphose du phénomène du vol des bœufs

Concepts généraux de la métamorphose du phénomène du vol des bœufs

Le vol de bœufs est un phénomène ancien à Madagascar. Il sřagit alors dřune pratique quasi-normale pour toute société de civilisation pastorale. Comme de nombreux acteurs : BAZIN J. et TERRAY E ( 1902), lřon déjà maintes fois signalé que : « les vols de bétail et les razzias réciproques sont caractéristiques du mode de vie pastorale. Dans ces sociétés, les dits phénomènes sont liés à leur fondement même. Il faut guerroyer pour avoir des pâturages et des femmes, voler pour accroitre son troupeau et appauvrir l’autre. Une concurrence sociale en quelque sorte ».Le célèbre anthropologue Evants-Pritchard (1956) a écrit quřici « la razzia de bétail est chose courante(…) car voler (…) les bêtes d’une autre tribu, c’est une entreprise louable. Ils voient dans l’adresse et le courage du combattant les vertus supérieures ; dans la razzia la plus noble des professions, la plus avantageuse aussi ».Un auteur célèbre DAY J. (1958) a remarque ( dans le document ŖIn Cahiers Jussieu ŗ ) que :« Jadis, lorsque l’homme allait demander la main d’une jeune fille, s’il ne savait pas voler, on ne voulait pas de lui et on le traduit de misérable. On disait qu’il pouvait laisser crever de faim femme et enfants. Le vol existait, existera parce que c’est une chose toute naturelle dans notre milieu et dans notre île ». NAKANY Pierre (1826) écrit dans lřouvrage ŖUn Bara parle des vols de bœufs ŗ : « En pays Betsileo ancien, le guerrier habile dans les raids et les combats s’appelle le » fanalolahy ». En « Foko Bara » , la considération du vol de bœufs comme une activité or”dina”ire est restée jusqu’à très récemment encore »La lutte contre cette pratique du vol de bœufs et lřinsécurité en général est devenu un leitmotiv du pouvoir qui va se tourner dřailleurs vers le développement de lřagriculture et dřautres activités nécessitant la sécurité. Pour le Betsileo et les Hautes ŔTerres en général, ce tournant commence avec lřexpansion Merina au début du XIXe siècle. Les faits de vols de bœufs et de banditisme rural nřont pas cessé cependant. Le phénomène est réapparu dřune façon plus ou moins cyclique au cours de lřévolution en parlant de ceux avancés déjà par dřautres chercheurs. Citons alors la métamorphose du phénomène de vol de bœufs à Madagascar :

Razzia et brigandages pendant le régime politique de Ranavalona 1ère (1830-1860)

La publication dans le « Bulletin de l’académie Nationale des arts, des Lettre et des Sciences, page 313-317 » explique le razzia et brigandages entre 1830 à 1860 :
« Il faut tout de suite signaler que de ces faits de brigandages avec rapts de personnes et de zébus, les données fournies par les correspondances des gouverneurs au 19 ème siècle abondent. Aucune discussion ne peut être ouverte sur l’existence des faits.
Ce qui a existé en effet, c’est que l’insécurité rurale a fait rage à Madagascar pendant tout le règne de Ranavalona 1ère. Non seulement dans le Betsileo et le Sud de l’Île mais sur les Hautes Terres en général. Les bandits ou voleurs sont appelés à l’époque le « Fahavalo », c’est-àdire les ennemis. Ce qui s’est passé alors c’est que face à la dureté du pouvoir de la reine sur ces sujets et les régions nouvellement conquises, les réactions seront aussi violentes. L’histoire intérieures de Madagascar sous Ranavalona 1ère peut être résumée aux répressions et contre répressions des ennemis.En ce qui concerne les territoires conquis, les corvées et impôts de toutes sortes comme le »variraiventy isan’olona miaina » impôt de capitation « l’isam-pangady » impôt de la dîme, les indemnités de soumissions ou » saotany » qui ont consisté même au début dans certaines régions à des dons du premier enfant de chaque famille appelé « Zokin-jaza » à la reine plus les divers taxes de justice encore ont été considérés comme insupportables. Face à une telle oppression, des insoumissions et des fuites vers les marges de l’Imerina et du Betsileo plus les autres territoires conquis se sont multipliés. Ainsi que les actes de brigandages consistant à attaquer les villages et les forts militaires avec prises de force des citoyens et de bovidés. En réponses et comme solutions, les gouverneurs locaux envoient les soldats pour aller au devant ou à la poursuite de ces brigands appelés » Fahavalo ». Ceux qui sont pris seront tués et leur repaires brulés. C’est ainsi pendant le règne de Ranavalona 1ère ».

L’accalmie de 1860-1880

Le désir de mettre fin aux souffrances populaires a été avancé comme étant une des causes de complot que le futur Roi Radama II a tenté dřorganiser contre sa mère en 1957, et cřest ce quřil va effectivement appliquer dès quřil sera introniser quatre ans plus tard avec un adoucissement des corvées royales, libération des captifs, suppression des indemnités de soumission, plus des pactes de sang avec des rois Tanala et Sakalava. Bref une politique intérieure très Ŗ libéraleŗ qui va entrainer lřarrêt du phénomène fahavalo aussi bien à lřImerina et en pays Sakalava, que dans le Betsileo, le sud-est et sud-ouest de lřÎle. Une accalmie qui va se poursuivre pendant presque une vingtaine dřannées, c’est-à-dire même après la disparition du jeune roi assassiné par des gens de son entourage en 1863. Dès sa montée au trône, en effet le roi Radama II renonce aux expéditions militaires et supprime un certain nombre dřindemnités quřon a payés avant lui.
Raombana et Delva R. (1870) écrit que : « s’il y a des gens qui viennent faire leur soumissions, ils ne seront pas tués, leurs armes ne seront pas retirées, ils ne paieront pas d’amendes et on ne réduira pas leurs femmes et enfants en esclaves ». Et sur des plaintes des populations, le roi rappellera à Tananarive de nombreux officiers établis en provinces.
Après Radama II, le code de 101 articles est publié le 18 alakarabo 1868. Ce qui traduit la volonté du pouvoir et de lřadministration. Il est écrit très clairement dans le préambule du dit code que tous les citoyens sont égaux devant la loi, quřils soient riches ou pas et quřil nřy aura pas de discrimination ou « tsy mizaha tavan’olona ny lalàna ». Et lřon doit ajouter que même les impôts ont été revus à la baisse et quřil y aura donc affaiblissement de la pression étatique. Notons que cřest à cette période que lřœuvre missionnaire dans lřévangélisation et lřenseignement connaitra un véritable bond en avant à Madagascar.

Le retour de l’insécurité à partir de 1880

Plusieurs évènements vont se produire en effet à Madagascar à partir de ces années 1980. Avec la pression extérieure qui commence par sřexercer sur la Grand-Ile, le gouvernement de Rainilaiarivony sera obligé de revenir aux renforcements des corvées et les recrutements militaires pour faire face à la situation. Parmi les corvées les plus dures, on peut citer tout dřabord les divers transports dřarmes que le Premier Ministre a importées de lřextérieur. Ce qui a nécessité la levée de milliers dřhommes plusieurs fois. Nombreux sont ceux qui ont préféré prendre la fuite. Il y a eu également une multiplication de la corruption. On peut citer ensuite ce quřon appelé alors Ŗ la corvée de l’or ŗ. Une mesure que tous les témoins de lřépoque ont considérée comme la cause du chaos, et de lřinsécurité à Madagascar vers la fin de la monarchie merina. Plusieurs personnes ont été en effet envoyées de force vers les régions considérées comme aurifères. Nombreux également ceux qui se sont enfuis. En plus des corvées, il y aura les recrutements militaires à partir de 1881. La plupart de ces nouvelles recrues seront envoyés dans les religions lointaines comme à Majunga, Fort-Dauphin, Tuléar etc. Il y a ceux qui se sont évadés en cours de route et qui ont renforcé le rang des bandits de grand chemin appelés dorénavant jirika. Signalons que cette affaire de recrutement militaire a fait couler beaucoup dřencre à lřépoque même. Plusieurs journaux comme par exemple le Madagascar News, ont affirmé que la corruption a régné et que ceux qui ont payé une certaine somme ont été bons exemples. Face à tout cela, on peut dire que le phénomène de banditisme et lřinsécurité ont repris et se sont aggravés à partir de 1980 dans plusieurs régions de Madagascar avec les mêmes caractéristiques que ce qui sřetait passé au temps de Ranavalona Ière. Il y aura des assassinats, des rapts de personnes et des vols de zébus. Les données des archives et les informations données par des témoins directs des évènements concordent pour dire que le phénomène a repris et ne sřest arrêté quřau début du 20ème siècle sous la colonisation.
La solution militaire est la première mesure prise par le pouvoir dřalors. A partir des postes de commandement établis ici et là, les soldats sont envoyés à la recherche et à la poursuite des bandits. Mais, cela nřa pas arrêté les faits : les razzias et brigandages se sont poursuivis pendant plus dřune vingtaine dřannées. Ce qui veut dire combien il y a eu faiblesse du pouvoir et de lřarmée, ou bien que ce nřétait pas la solution adéquate. Selon alors un auteur appelé Guy Lux : « Tenter de donner la chasse aux bandes de fahavalo à l’aide des colonnes mobiles envoyées à leur poursuite. C’est faire courir des chiens après des essaims des mouches. Ces colonnes arriveront toujours trop tard pour empêcher les villages d’être incendiés et pillés ». La solution, pour lui « se fera (…) par le peuplement graduel de l’île la construction de routes, l’élévation des prix de la main-d’œuvre, l’enrichissement de la population, peu à peu acquise moralement par la pénétration des idées modernes et du bien être civilisation ».

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