Croissance et différenciation de la croute

Cette thèse publier sur clicours.com plateforme des cours et projets de fin d’études s’inscrit dans le cadre de la formation par et à la recherche des enseignants du département des sciences de la Terre de l’Université de N’djamena et de l’Institut Universitaire Polytechnique de Mongo. Elle a bénéficié du soutien financier de ces institutions et de la coopération scientifique française de l’Ambassade du Tchad.

En outre, ces travaux ont pour objectif de contribuer à l’amélioration de la connaissance géologique et de la gestion des ressources naturelles au Tchad. Plus particulièrement, cette thèse vient en complément des travaux de thèse effectués par Moussa Isseini (Isseini, 2011, Isseini et al. 2012) sur le thème « Croissance et différenciation crustales au Néoprotérozoïque : Exemple du domaine panafricain du massif du Mayo Kebbi au SudOuest du Tchad ». Le présent travail consiste donc à identifier les processus impliqués dans la mise en place des minéralisations de sulfures, d’or et d’uranium de ce segment de croûte continentale. Cette étude porte spécifiquement sur les sulfures et veines de quartz aurifères encaissées dans les roches basiques du massif du Mayo Kebbi et des processus métasomatiques du pluton de Zabili associés à des minéralisations uranifères, dans le cadre de la croissance et de la différenciation de la croûte continentale au Néoprotérozoique , dans la Ceinture Orogénique d’Afrique Centrale.

Les ceintures orogéniques panafricaines constituent les principaux segments d’une vaste ceinture orogénique Néoprotérozoïque, associée à la formation du supercontinent Gondwana entre 725 et 550-500 Ma (Figure1 ; Unrug, 1997).

Elles s’étendent du Nord-Ouest de l’Afrique jusqu’au bouclier Arabo-Nubien et du Brésil jusqu’en Afrique centrale. Des témoins sont également signalés en Europe et en Amérique du Nord (Black et al., 1979; Caby, 2003; Caby et Leblanc, 1973; Caby et Monie, 2003; Choubert et Faure-Muret, 1980 ; Dalziel, 1997; Ennih et Liégeois, 2001; Hefferan et al., 2002; Hefferan et al., 2000; Leblanc et Lancelot, 1980; Liegeois et al., 2003; Nance et Murphy, 1994; Nance et al., 2002; Rogers et al., 1995; Saquaque et al., 1989b ; Trompette, 1997; Unrug, 1997).

Le socle Précambrien d’Afrique centrale comprend des témoins de croissance crustale qui s’étendent de l’Archéen au Néoprotérorozoique. La conception ancienne d’un vaste bouclier pérenne pendant toute l’histoire des temps précambriens a été remplacée par celle des cratons multiples séparés par des ceintures orogéniques plissées qualifiées de ceintures mobiles (Rocci, 1965 et Clifford, 1970, Black and Liégeois, 1993). La succession des orogénèses a eu pour effet d’aboutir à une cratonisation progressive du continent à partir de noyaux primitifs d’âge Archéen comme celui du craton de Léo-Man et celui du craton du Congo. Les études ultérieures, et en particulier les données de géochronologie, ont permis de mettre en évidence l’importance de « l’événement thermotectonique panafricain » de Kennedy (1964) qui allait très vite être considéré comme un cycle orogénique avec sédimentation, métamorphisme et granitisation (Black, 1966, 1967, Gray et al., 2006) aboutissant à la formation de la ceinture panafricaine .

La zone mobile d’Afrique centrale s’étend alors de la bordure nord du craton de Congo jusqu’à l’Est du Nigéria, englobant le Cameroun, le Tchad, la République Centrafricaine. Elle se poursuit vers l’Est au Soudan et en Ouganda (Theunissen et al., 1992), et vers l’Ouest jusqu’au Brésil (craton de São Francisco, ceinture transamazonienne) (Caby et al., 1981 ; Teixeira et Figueiredo, 1991).

Le massif du Mayo Kebbi au sud-ouest du Tchad, objet de notre étude, est localisé entre le craton du Congo au Sud, le craton Ouest Africain à l’Ouest et le Métacraton du Sahara à l’Est, et a été formé au cours de l’orogenèse panafricaine, entre 800 et 570 Ma . Ces cratons sont délimités par des zones de sutures à l’échelle lithosphérique, résultant des collisions néoprotérozoïques.

Au Tchad la ceinture panafricaine reste encore assez mal connue. Cependant, les travaux menés au Cameroun (Penaye et al., 1989 ; Pinna et al., 1994 ; Toteu et al., 1991 ; 2001 ; 2004), dans le cadre du programme international de corrélation géologique sur la lithostratigraphie (Kasser, 1998 ; Doumnang, 2006 ; Pouclet et al., 2006 ; Vidal et al., 2004), sur la géochronologie (Penaye et al., 2006) au Sud-Ouest du Tchad ainsi que les travaux récents dans le cadre des travaux de thèse de Moussa Isseini ont permis de caractériser l’évolution géodynamique du massif du Mayo-Kebbi. Cette évolution comprend les phases suivantes:

– Mise en place d’un complexe mafique et intermédiaire (CMI) dont la métadiorite de Boloro datée à 748 ± 4 Ma par la methode U-Pb sur zircon (Isseini, 2011). Cette métadiorite, riche en terres rares, se caractérise par LaN/YbN ~ 12, Sr/Y > 32, teneurs en LILE, Cr, Ni élevées et des anomalies négatives en Nb-Ta. Ces caractéristiques sont attribuées à la fusion partielle de la plaque océanique plongeante et aux interactions des magmas produits avec le coin mantellique au cours de leur ascension.

– Mise en place des métagabbros et métabasaltes (700 ± 10 Ma: U-Pb sur zircon, Isseini 2011) de la série métavolcano-sédimentaire de Zalbi. Ces roches sont caractérisées par un découplage LILE/HFSE, des anomalies négatives en Nb-Ta et des rapports LaN/YbN indiquant un fractionnement faible à modéré des terres rares. En particulier, leurs caractères géochimiques sont similaires à ceux des bassins arrière-arcs modernes. La signature isotopique en Sr et Nd de ces roches exclut toute contamination par une croûte continentale ancienne au moment de leur mise en place. Le complexe mafique et intermédiaire (CMI) et la série métavolcano sédimentaire, forment des ceintures de roches vertes et représentent ainsi une accrétion juvénile Néoprotérozoïque en contexte de convergence de plaques associées à la formation d’arcs insulaires et de bassins arrière-arc.

– La métadiorite quartzique syntectonique du complexe magmatique des chutes Gauthiot (665 ± 1 Ma: âge U-Pb sur zircon, Penaye et al., 2006) correspond à la mise en place de magmas contemporains d’une première collision, qui implique le massif du Mayo Kebbi et le bloc rigide de l’Adamaoua-Yadé à l’Est. Cet événement marque le début de la fermeture du bassin arrière-arc de Zalbi et d’un épaississement crustal.

– L’épaississement est responsable de la différentiation intracrustale par fusion partielle des roches tectoniquement accrétées lors de l’orogénèse panafricaine. Pendant cette phase se mettent en place des magmas tonalitiques, dont les tonalites à hornblende-biotite des chutes Gauthiot et la tonalite de Guegou (complexe magmatique de Léré) datée à 647 ± 5 Ma (U-Pb sur zircon, Isseini 2011). Les magmas produits ont des caractères de magmas TTG et laissent potentiellement un résidu à grenat à la base de la croûte continentale.

– La mise en place du granite de type A de Zabili à 567 ± 10 Ma (âge U-Pb sur zircon, Isseini et al., 2012) est associée aux dernières manifestations magmatiques du cycle orogénique panafricain (intrusions post-tectoniques). Les caractères géochimiques (appauvrissement extrême en Sr, Eu, Ca, Mg, Ni) et isotopiques (εNd initial = +3 à +7) de ce granite sont compatibles avec une origine par cristallisation fractionnée poussée d’un magma issu d’une source juvénile Néoprotérozoique.

Les différents âges obtenus dans la région du Mayo-Kebbi sont comparables à ceux obtenus dans la ceinture panafricaine affleurant au Cameroun ou les études sont beaucoup plus poussées. Les plutons granitiques de Kaélé et Sima, qui constituent le prolongement du batholite du Mayo Kebbi dans le territoire Camerounais dans les régions de Garoua et de Maroua ont donnés des âges respectivement de 626 ± 15 Ma et 677 ± 40 Ma par la méthode Rb-Sr (Bessoles et Trompette, 1980). Ensuite, Pina et al., 1994, ont obtenus des âges de 639 ± 20 Ma sur le pluton granitique syntectonique de Landou par la méthode Pb-Pb sur monozircon, et 557 ± 17 Ma sur le pluton granitique post-tectonique de Vaimba.

En dehors de ces travaux qui ont permis de comprendre l’évolution géodynamique de la région du Mayo-Kebbi au sein de la ceinture panafricaine d’Afrique centrale, les travaux concernant les ressources minérales de cette région sont peu nombreux, notamment sur les minéralisations encaissées (i) par les ceinture de roches vertes, et (ii) par les granitoïdes. La région de Pala est connue pour ces indices aurifères décrits depuis les années 1970 (Chaussier, 1970), avec ces indices identifiés et listés dans les présentations du potentiel minier tchadien (Djekoundam, 1995 ; Kusnir, 1997). Les travaux récents de Mahamat Boka (2010), Deudibaye (2011) et Tchameni et al. (2013) ont permis de réactualiser le potentiel aurifère de ce secteur et de discuter du caractère orogénique de ces indices aurifères de la région de Pala. De nombreux travaux d’orpaillage sont observables dans la région encore actuellement (Figure 3) et les premiers travaux de prospection aurifères datent des années 90 et ont été menés par le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) et le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) (CHD/87/010 and CHD/91/0007projects, Schneider, 1989; JIPROMIT, 1995). Une junior coréenne a également effectué des travaux d’exploration au début des années 2000 montrant des teneurs locales à 33g/t à Kambogé (Soo-Young and Se-Jung, 2001). Des campagnes de reconnaissances minières et d’études de gisements (uranium et or) sont également menées dans le Mayo-Kébi, (Agel et al., 2010, 2011). Ce travail de compilation, de synthèse et de visites de terrain, ont permis de dégager plusieurs pistes pour la prospection de substances minérales au Tchad dont la recherche de gisements aurifères disséminés et à basse teneur, sans préjuger d’un potentiel Sn/W de ces mêmes provinces.

Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE I : CROISSANCE ET DIFFERENCIATION DE LA CROUTE
PRECAMBRIENNE : IMPACT SUR LA GENESE DE MINERALISATIONS
PARTIE II : METALLOGENIE DES CEINTURES DE ROCHES VERTES DU MAYO
KEBBI (SO DU TCHAD, CEINTURE OROGENIQUE D’AFRIQUE CENTRALE)
CHAPITRE I : CONTEXTE GEOLOGIQUE DES CEINTURES DE ROCHES VERTES
DU MAYO KEBBI
CHAPITRE II : GEOCHIMIE MAJEURS ET TRACES DES ROCHES VERTES
CHAPITRE III : LES MINERALISATIONS SULFUREES DES ROCHES BASIQUES
DU MAYO KEBBI
CHAPITRE IV : MINERALOGIE DE L’OR FILONIEN AU SEIN DES ROCHES
BASIQUES DU MAYO KEBBI
PARTIE III : MINERALISATION DE L’URANIUM ASSOCIEE AU METASOMATISME
DU GRANITE DE TYPE A DE ZABILI
CHAPITRE I : CONTEXTE GEOLOGIQUE – PETROGRAPHIE – GEOCHIMIE
(ARTICLE LITHOS)
CHAPITRE II : DISTRIBUTION ET NATURE DES MINERAUX URANIFERES –
RAPPORT AVEC LES ANOMALIES EN PHOSPHORE DES ALBITITES
CHAPITRE III : GEOCHRONOLOGIE DES GRANITES ALBITISES DATATIONS
TH-U-PB SUR MONAZITE A l’ICP-MS
PARTIE IV: DISCUSSION ET CONCLUSION
DISCUSSION
CONCLUSION GENERALE

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