De la reconnaissance des savoirs à la re-connaissance de l’expérience

Depuis notre arrivée sur la région des Pyrénées Atlantiques, nous travaillons dans le domaine des ressources humaines. En premier lieu, nous avons exercé dans un cabinet de ressources humaines. Nos missions portaient, sur de l’accompagnement, du bilan de compétences, de l’insertion professionnelle. Nous sommes alors en 2002, année de la mise en place d’un dispositif tout à fait innovant, voire surprenant, pour un certain nombre d’individus, je parle de la Validation des Acquis de l’Expérience. Cette initiative attire déjà notre attention en 2002, mais plutôt du côté du conseil. En effet, un tel projet pouvait faire l’objet de préconisations dans le cadre d’un bilan de compétences. Effectivement, il n’était pas rare, que les sujets cadres ou non cadres puissent faire état de difficultés quant au fait de ne pas avoir de diplôme. Cette situation semblait pouvoir être un frein quant à leur retour à l’emploi, ou encore pour pouvoir évoluer. La chose était peu développée, faiblement promue. Certes le CIBC 64, était déjà le point relais en la matière, ils avaient en charge la présentation du dispositif lors de réunions d’informations collectives organisées quotidiennement. Ils pouvaient également, être amenés à recevoir lors de rendez-vous conseils individualisés pour expliquer plus en détail le dispositif et éventuellement conseiller le diplôme qui pouvait correspondre au parcours du sujet.

En 2008, nous avons changé de poste, avec des missions différentes, ce qui nous a conduit durant deux années, à mener des activités différentes, liées à la promotion de la formation dite ‘’courte’’, du conseil en entreprise… Il s’agissait alors de : vendre des formations spécifiques ou bien, de réaliser de l’ingénierie de formation en fonction du besoin identifié dans l’entreprise. Nos missions consistaient également à réaliser auprès des entreprises des diagnostics afin d’optimiser leur gestion des ressources humaines.

Ces activités furent menées jusqu’en 2010, puis à cette époque, nous fut confier la responsabilité de ce dispositif dans la structure où nous exerçons encore actuellement. Ainsi, depuis huit années, nous sommes en charge de promouvoir ce dispositif de VAE, de le déployer en veillant à optimiser la méthodologie, et recevoir les candidats de la meilleure façon qu’il soit. Nous nous chargeons du projet, de la réalisation de l’entretien d’exploration jusqu’à l’entretien final avec le jury. La phase préalable consiste en l’identification de l’expérience du sujet et de son nombre d’années d’exercice. Au regard de cette exploration, nous proposons le diplôme qui semble le plus en adéquation avec le parcours du candidat et nous l’informons sur la manière dont va se dérouler son parcours. Cette activité, nous a permis d’appréhender de façon relativement significative, la quatrième voie de diplomation en France : la Validation des Acquis de l’Expérience. Quelle chose étrange que d’accéder à un diplôme sans avoir poursuivi un cursus de formation !

Même en 2010, soit huit années après la promulgation de la loi et la mise en œuvre de ce dispositif, le nombre de dossiers était confidentiel. Effectivement, seul deux ou trois candidats étaient en cours de cheminement pour l’obtention d’un diplôme par cette voie et peu de dossiers avaient été traités les années antérieures. Pour les candidats en cours, il s’agissait de deux cadres, qui envisageaient d’obtenir le diplôme de Niveau I intitulé : Grade de Master, le troisième était un candidat qui désirait pouvoir valider le diplôme de Niveau II : Bachelor Management Relations Clients. Sur les trois candidats du début de notre expérience seule une personne a achevé son parcours. Les autres étaient engagées depuis plusieurs années et elles ont souhaité stopper, puisque ne voyant pas d’issue rapide.

Si l’on se confère à l’évolution de cette partie de notre activité, fort est de constater qu’en en deux ou trois années, et sans employer d’outils de communication significatifs, le nombre de demandes a évolué de façon exponentielle, pour atteindre aujourd’hui plus d’une cinquantaine de dossiers traités par année. Il serait illusoire de considérer que ce phénomène est uniquement propre à notre structure, mais la raison est certainement liée également à la politique de la formation de la région Nouvelle Aquitaine. En effet, la région est un acteur majeur dans le déploiement de ce dispositif et notamment par la couverture territoriale des CIBC. Ainsi, bon nombre de demandeurs d’emploi se rapprochent de notre structure pour engager cette VAE et tenter d’obtenir un diplôme, tout est restant en recherche active en termes d’emploi. Ces demandes portent, sur trois types de diplômes, toujours le Grade de Master, le Bachelor Management Relations Clients, mais également et surtout les diplômes issus du réseau appelé ‘’NEGOVENTIS’’ qui représentent les métiers du commerce du niveau IV (bac) au niveau II (bac+3). La majorité des demandes quant à ces diplômes, portent sur le niveau II, qui correspond à des emplois métiers de ‘’middle management’’ très opérationnels. Afin d’améliorer la procédure, nous avons petit à petit élaboré une méthodologie, qui permette de répondre à toutes ces demandes de façon plus structurée.

Nous considérions que ce que nous pouvions avoir au début de cette mission, n’était pas efficient. Nous avons développé des outils, toujours dans le souci évidemment du respect du cadre légal qui s’imposait à nous. Notre priorité fut d’emblée, de mettre l’accent sur les vingt-quatre heures d’accompagnement afin de permettre aux candidats de réaliser l’exercice dans les meilleures conditions qu’il soit. Ces vingt quatre heures furent découpées en deux phases, ainsi nous avons établi des outils pour chacune d’entre elle. Ces outils étant réalisés pour aider à la formalisation des éléments en vue de cette validation. Etre aidant, est important puisqu’il est connu que ce type d’exercice peut sembler inquiétant de par sa complexité et la solitude dans laquelle se trouve le sujet. Cet accompagnement nécessite beaucoup d’attention, mais la phase finale tout autant. En effet, la préparation du jury final représentait également un axe de vigilance important dans notre pratique professionnelle. Cette ultime étape correspondait à un exercice, à priori tout à fait effrayant pour les candidats à la VAE.

Ce sentiment d’inquiétude fut confirmé, puisque dès les premiers jurys et quelques soient les diplômes, nous nous sommes rendues compte, du malaise certes des candidats, mais également, que les délibérations lors de cette phase finale étaient particulièrement délicates. On entendait une véritable dissonance entre les membres du jury. Dissonance entre ceux qui représentaient la partie académique et ceux qui représentaient le corps professionnel. La critique fut faite mainte fois, quant au manque de concepts dans le travail présenté malgré les preuves apportées quant à la réalisation des tâches invoquées. Alors que les professionnels étaient satisfaits de voir employé le ‘’jargon technique’’ spécifique à leurs activités, ils ne comprenaient pas les réticences des ‘’professeurs’’, et effectivement, les académiques ne s’y retrouvaient pas.

Le fait d’avoir à plusieurs reprises ces types de retours, nous a amené à nous interroger quant aux modalités de ce dispositif, peut-on considérer qu’il s’agisse d’une ‘’évaluation’’ ? Autres interrogations issues de notre pratique professionnelle, il s’agit de comprendre pourquoi les individus s’engagent dans un parcours qui pouvait sembler long, fastidieux et peut être incertain. Qu’attendent-ils réellement de ce passage, du résultat escompté…telles furent les questions pratiques que nous nous posions à la genèse de ce travail de recherche. Ce questionnement, n’était qu’au stade d’interrogations comme tout à chacun peut avoir sur sa pratique professionnelle, jusqu’au jour où nous avons échangé à ce sujet avec le directeur académique de notre structure. L’évolution du nombre de candidats, les questions que nous avions quant aux difficultés rencontrées, ont suscité un tel intérêt qu’il nous a suggéré d’engager de façon ‘’scientifique’’ une véritable réflexion sur le sujet. C’est ainsi que nous avons commencé ce travail, il y a maintenant trois ans et demi. Nous avons commencé ce travail par de l’exploration ‘’académique’’ et petit à petit cela nous a conduit à envisager une problématique plus théorique. Celle-ci s’est construite petit à petit pour une finalisation assez récente, cependant elle existait à l’état d’ébauche depuis un long moment et nous a guidés dans ce travail. Quelle est-elle ?

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
QUELLE GENESE A CE TRAVAIL DE RECHERCHE ?
QUELLE PROBLEMATIQUE POUR CETTE RECHERCHE ?
UN PARCOURS POUR CONDUIRE NOTRE REFLEXION
CHAPITRE PREMIER
Le contexte de notre recherche
I – LA NAISSANCE DE LA VAE
A – UNE VISION DE LA CONTINUITE
1 – Une origine moyenâgeuse ?
2 – Une approche plus contemporaine
a – un ancrage dans les écoles d’ingénieurs
a1 – L’histoire des écoles d’ingénieurs : première période
a2 – La loi du 10 juillet 1934
a3 – Quelle procédure ?
a4 – La seconde période historique des écoles d’ingénieurs
b – l’avènement de la loi de 1985
b1 – Encore un peu d’histoire
b2 – Qu’entendons-nous sous l’appellation VA85?
c – La validation des acquis professionnels de 1992
c1 – Le contexte
c2 – Qu’est-ce que la VA92 ?
B – UNE VISION PLUS LARGE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE CONTINUE
1 – La genèse de la Validation des Acquis de l’Expérience ?
a – Les origines de cette reforme
b – l’expérience britannique
2 – L’intérêt de ce dispositif
II – LA VAE DE LA GENESE A AUJOURD’HUI
A – LE DISPOSITIF INITIAL
1 – Le décret
2 – La mise en œuvre du dispositif
a – l’organisation d’une vae
a1 – La phase de recevabilité – le livret de recevabilité ou livret 1
a2 – La phase de Validation des Acquis de l’Expérience – livret 2
a3 – Le jury
b – Finalité de la VAE
c – L’évolution quantitative du dispositif
3 – Les évolutions institutionnelles de la VAE 2002-2018
a – Un constat de régression
b – Les évolutions de 2009
c – La loi de 2014
d – octobre 2017
III – NOTRE PARCOURS ET NOTRE QUESTIONNEMENT
A – NOTRE PARCOURS PROFESSIONNEL ET UNIVERSITAIRE
1 – Parcours personnel
2 – Une première expérience professionnelle
a – Le cabinet P
b – Le cabinet A
c – Le monde de la formation professionnelle continue
B – NOTRE QUESTIONNEMENT
CONCLUSION GENERALE

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