Définition de l’agression sexuelle

Dans les écrits, différentes définitions de l’agression sexuelle ont été élaborées selon le point de vue utilisé, qu’il s’agisse de l’approche légale, médicale ou sociale (Ministère de la Santé et des Services sociaux, 2010a). De façon générale, les définitions du viol ou de l’agression sexuelle comportent une description de l’acte, de la tactique utilisée pour contraindre et spécifient l’absence de consentement (Cook, Gidycz, Koss, & Murphy, 2011). Au Québec, des intervenants de plusieurs milieux se sont réunis pour formuler les bases d’une compréhension commune de la problématique, par le biais des orientations gouvernementales en la matière qui comprennent une définition de l’agression sexuelle s’appliquant à tous, sans égard au type de geste à caractère sexuel posé ou au contexte (Gouvernement du Québec, 2001).

Une agression sexuelle est un geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis par un individu sans le consentement de la personne visée ou, dans certains cas, notamment dans celui des enfants, par une manipulation affective ou par du chantage. Il s’agit d’un acte visant à assujettir une autre personne à ses propres désirs par un abus de pouvoir, par l’utilisation de la force ou de la contrainte, ou sous la menace implicite ou explicite. Une agression sexuelle porte atteinte aux droits fondamentaux, notamment à l’intégrité physique et psychologique et à la sécurité de la personne. (Gouvernement du Québec, 2001, p. 22).

Cette définition englobe d’autres expressions telles que viol, abus sexuel, infraction sexuelle, contact sexuel, inceste ou pornographie juvénile (Gouvernement du Québec, 2001). La définition énoncée dans le Guide d’intervention médicosociale pour répondre aux besoins des victimes, un outil de référence pour les intervenants, inclut également les termes violence sexuelle, sévices sexuels, exploitation sexuelle, harcèlement sexuel et proxénétisme (Ministère de la Santé et des Services sociaux, 2010a). Elle énonce que l’agression sexuelle d’une personne « c’est lui imposer des attitudes, des paroles ou des gestes à caractère sexuel contre sa volonté ou sans son consentement » (Ministère de la Santé et des Services sociaux, 2010a, p. 17) et précise certains éléments, notamment les comportements auxquels les agresseurs peuvent avoir recours, soit la manipulation affective ou matérielle, l’intimidation, la menace ou le chantage et la violence verbale, physique ou psychologique. Cette même définition indique également que l’agresseur peut être connu de la victime, bien que ce ne soit pas toujours le cas, que le sexe et l’âge de l’agresseur ou de l’agressé n’importent pas et que l’agression sexuelle peut être subtile et ne pas laisser de traces. Il existe également plusieurs autres conceptualisations de ce phénomène, proposées notamment par des chercheurs étudiant la problématique, par des organisations gouvernementales, par des organismes communautaires ou encore par concertation entre différents milieux. Du côté canadien, on retrouve la définition adoptée dans les écrits du Ministère de la Sécurité publique (2011) basée sur le Code criminel canadien et celle du Centre canadien de la statistique juridique (Brennan & Taylor-Butts, 2008). Certaines organisations canadiennes utilisent également la définition du Comité du programme d’intervention SANE, programme ayant aussi pour but de répondre aux multiples besoins des victimes (Ledray, 1999); voir Appendice A pour ces définitions de l’agression sexuelle). Par ailleurs, toutes reflètent le préjudice inacceptable que de pareils gestes entraînent chez la victime.

Statistiques sur l’agression sexuelle 

Afin de bien comprendre l’ampleur du phénomène de l’agression sexuelle, il importe d’abord de se pencher sur les forces et faiblesses des sources d’information disponibles à ce jour permettant de le quantifier. De façon générale, on retrouve principalement deux sources de données concernant la prévalence de l’agression sexuelle, issues respectivement de données policières et de sondages effectués auprès d’échantillons représentatifs de la population. Au Québec et au Canada, les statistiques policières, compilées de façon uniforme, continue et détaillée, présentent l’avantage d’être compilées annuellement (Ministère de la Sécurité publique, 2008), alors que les données de l’Enquête sociale générale de Statistique Canada sont plutôt recueillies à des intervalles de cinq ans (Perreault & Brennan, 2010). Les données provenant d’enquêtes permettent pour leur part d’obtenir de l’information sur les incidents ne venant pas à l’attention de la police (Gannon & Mihorean, 2005; Perreault & Brennan, 2010). Par contre, elles sont sujettes aux erreurs d’échantillonnages et comptent sur l’exactitude des souvenirs des répondants et sur la fidélité de leur déclaration (Perreault & Brennan, 2010). De plus, des choix méthodologiques, par exemple la définition utilisée, le contexte dans lequel la collecte de donnée est réalisée ou les caractéristiques de l’échantillon utilisé, entraînent des variations dans les taux de prévalence obtenus par sondage (Cook et al., 2011; Koss, 1993a). Les statistiques policières sont, quant à elles, basées sur les événements signalés et retenus, mais ne fournissent donc pas un portrait complet du nombre d’agressions sexuelles (Ministère de la Sécurité publique, 2008), d’autant plus qu’il s’agit d’un des crimes les moins signalés aux autorités policières (Gannon & Mihorean, 2005). En effet, concernant le dévoilement, il est estimé qu’environ une victime sur dix signale l’agression sexuelle à la police (Brickman & Briere, 1984; Gannon & Mihorean, 2005). Une étude auprès d’un échantillon de la population québécoise a trouvé que 20 % des victimes d’agression sexuelle pendant l’enfance n’avaient encore jamais dévoilé l’agression à personne et que plus de la moitié avait attendu au moins cinq ans après la survenue de la première agression avant de dévoiler (Hébert, Tourigny, Cyr, McDuff, & Joly, 2009). Malgré cela, un regard sur l’ensemble des données disponibles, en tenant compte de ces limites, permet d’avoir une idée de l’ampleur du problème.

En ce qui concerne les données de source policière, la dernière compilation révèle qu’en 2013, 5526 infractions sexuelles, incluant 3855 agressions sexuelles et 1671 autres infractions d’ordre sexuel, ont été enregistrées au Québec, ce qui représente un taux de 67,8 infractions par 100 000 habitants (Ministère de la Sécurité publique, 2015). Il faut souligner que même si une victime a subi plus d’une infraction lors du même événement, seule l’infraction la plus grave a été comptabilisée, faisant ainsi en sorte que le nombre d’infractions équivaut approximativement au nombre de victimes. Toutefois, 19,8 % des infractions signalées remontaient à plus d’un an (Ministère de la Sécurité publique, 2015). En comparaison, dans l’ensemble du pays, en 2007, un taux d’environ 73 infractions pour 100 000 Canadiens ont été portées à l’attention des forces policières (Brennan & Taylor-Butts, 2008).

Au Canada, l’Enquête sociale générale de 2004 sur la victimisation a permis de recenser environ 512 000 agressions sexuelles s’étant déroulées dans les 12 derniers mois précédant le début de l’enquête, et ce, chez les personnes de 15 ans et plus, ce qui correspond à un taux de 1 977 incidents pour 100 000 personnes (Brennan & TaylorButts, 2008). Dans différents échantillons, les études sur la prévalence de l’agression sexuelle couvrant la vie entière suggèrent des taux variant entre 17,6 % et 27,6 % chez les femmes (Brickman & Briere, 1984 : 21%; Cloutier, Martin, & Poole, 2002 : 19%; Masho, Odor, & Adera, 2005 : 27,6%; Tjaden & Thoennes, 1998 : 17,6%) et 3 % à 12,9 % chez les hommes (Masho & Anderson, 2009 : 12,9%; Tjaden & Thoennes, 1998 : 3%). Pour ce qui est des agressions sexuelles étant survenues uniquement à l’âge adulte, c’est une prévalence de 22 % chez les femmes et 3,8 % chez les hommes qui a été trouvée dans un échantillon américain aléatoire stratifié issu de la population générale (Elliott, Mok, & Briere, 2004). Quant à l’agression sexuelle dans l’enfance, deux méta-analyses obtiennent des taux comparables de 18,0 % et 19,7 % pour les femmes ainsi que 7,6 % et 7,9% chez les hommes (Pereda, Guilera, Forns, & GómezBenito, 2009; Stoltenborgh, van Ijzendoorn, Euser, & Bakermans-Kranenburg, 2011). Il existe des variations plus ou moins importantes dans les écrits concernant les données de prévalence des agressions sexuelles, mais ce regard sur la situation permet de constater l’ampleur du phénomène. Ces données renforcent également l’importance que ce problème soit placé parmi les principales préoccupations de la société.

Table des matières

Introduction
Contexte théorique
Définition de l’agression sexuelle
Statistiques sur l’agression sexuelle
Réactions et séquelles associées à l’agression sexuelle
Modèles d’organisation des services destinés aux victimes d’agression sexuelle
Description des services offerts dans les centres désignés
État des connaissances sur l’expérience des victimes concernant les services
Objectif et questions de recherche
Méthode
Devis de recherche
Recrutement et participants
Outils de collecte de données
Déroulement
Stratégie d’analyse
Résultats
Renseignements sociodémographiques sur les participantes
Trajectoire des participantes
Éléments déclencheurs de la recherche de service
Trajectoire jusqu’à l’arrivée aux centres désignés
Recherche de services pour une agression sexuelle récente
Recherche de services pour une agression ancienne
Perception des services dans les centres désignés
Accueil
Explications concernant les étapes
Examens médicaux et médicolégaux.
Soutien émotionnel
Référence ou inclusion de partenaires dans l’intervention
Obstacles et difficultés perçus par les victimes
Manque de connaissances des ressources
Manque de ressources
Difficulté à aborder l’agression sexuelle
Crainte de se déplacer seul
Obstacle financier
Besoins ressentis
Besoin de soutien émotionnel
Besoin de soins médicaux et médicolégaux
Besoin d’être orienté dans les services et d’être guidé dans les démarches
Besoin de soutien pour les proches
Besoin d’aide matérielle
Perception des attitudes des intervenants
Disponibilité
Prendre au sérieux et croire la victime
Empathie
Offrir des choix
Être calme
Atténuer la culpabilité
Discrétion
Niveau de satisfaction
Suggestions des participantes pour améliorer les services
Discussion
Questions de recherche
Trajectoire des participantes
Besoins ressentis par les participantes
Attitudes appréciées et attitudes perçues négativement
Niveau de satisfaction
Suggestions pour améliorer les services
Forces et limites de l’étude
Principales retombées et applications
Conclusion

Cours gratuitTélécharger le document complet

 

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *