Démarche diagnostiques au laboratoire de Parasitologie-Mycologie

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Origine

Les dermatophytes à l’origine des TCC peuvent être divisés en trois groupes en fonction de leur origine ou de leur hôte de prédilection (Tableau I). Les dermatophytes zoophiles sont d’origine animale, les dermatophytes anthropophiles sont d’origine humaine et que les dermatophytes géophiles proviennent du sol.

Les espèces anthropophiles

Ce sont des parasites obligatoires de l’homme qui ont une transmission interhumaine, soit par contact direct, soit indirect par l’intermédiaire d’objets souillés (linge de toilette, vêtements et chaussures peuvent également transporter des spores) ou la fréquentation des lieux publics contaminés tels qu’une salle de bain familiale, les salles de sports, les piscines [27,28]. Les dermatophytes anthropophiles, bien adaptés à l’homme, donnent des lésions discrètes habituellement bien tolérées ou ignorées et sont très fréquents en pathologie humaine. La contamination se fait par les spores (arthrospores), très résistantes, qui sont présentes sur les lésions elles-mêmes, mais également dans les débris d’ongles, de squames, de cheveux. Ces spores peuvent survivre des mois voire des années dans le milieu extérieur, en particulier dans l’environnement des malades, ce qui contribue à leur re- contamination [27]. La contagiosité au sein de la famille ou de la collectivité d’enfants nécessite des contacts répétés avec la source infestante. Des objets contamines (peignes, brosses, foulard, etc.) sont souvent à l’origine des épidémies. Les poux, en se déplaçant d’une tête d’enfant à une autre tête, emportent avec eux des spores fongiques et participent à la contamination. Certains sports, comme la lutte favorisant le contact de la tête avec différentes parties du corps, sont aussi des facteurs de dissémination des dermatophytes anthropophiles [28,29].

Les espèces zoophiles

Ces parasites des animaux sont transmis accidentellement à l’homme par l’intermédiaire des animaux d’élevage ou de compagnie. Les dermatophytes zoophiles sont des espèces peu ou pas adaptées à l’homme. Ils donnent des lésions plutôt bruyantes (inflammatoires) et mal supportées. La contamination provenant des animaux est cependant rare. Elle se fait de façon accidentelle dans un contexte professionnel chez les éleveurs, vétérinaires, personnelles des abattoirs. Par exemple, Trichophyton verrucosum est transmis par les bovins atteints de dartre [1] . Les animaux sauvages sont rarement impliqués, ils contaminent les enfants lors des jeux dans la nature ou les adultes pendant les travaux de jardinage. Le plus souvent l’infection se fait par l’intermédiaire des poils infectés déposés sur le sol. Les animaux de compagnie sont sujets aux teignes à Microsporum canis. Ils présentent des lésions (plaques d’alopécie prédominant sur la face, les pattes) ou sont très souvent porteurs sains [30]. Les animaux malades vont entrainer des épidémies familiales (teignes tondantes du cuir chevelu chez les enfants, associées à des épidermophyties bien dessinées, folliculites, sycosis de la barbe chez les adultes, rarement des teignes du cuir chevelu chez les femmes âgées). Les espèces les plus fréquemment pathogènes sont M. canis (chat et chien), T. mentagrophytes (bovin, ovin) et T. verrucosum (bovins atteints de dartre). D’autres espèces, M. praecox (cheval), T. erinacei (hérisson), M. equinum (très fréquent chez le cheval), T. gallinae (oiseau), M. nanum (porc) sont rarement rencontrées du fait d’une moindre virulence, d’une moins bonne affinité pour la kératine humaine (la plupart des dermatophytes ont un substrat privilégié) et des conditions de rencontre beaucoup plus limitées. Leur rôle est plus important en pathologie humaine que les champignons d’origine tellurique. Ils sont plus fréquents en Europe et en Amérique, plus rare en Afrique [1].

Les espèces telluriques

Elles vivent dans le sol et sont transmises à l’homme à l’occasion de travaux de jardinage ou par l’intermédiaire d’animaux. Sur certains sols enrichis en kératine animale (cours de ferme, étables, etc.), on trouve des dermatophytes qui dégradent la kératine déposée par les animaux (poils, fragments de corne, de sabots, plumes, etc.). Peu agressifs, ils sont rarement impliqués en pathologie humaine mais entraînent des manifestations inflammatoires intenses favorisant leur élimination. Ce sont essentiellement Nannizzia gypsea (ex M. gypseum) et N. fulva (ex M. fulvum). Certaines espèces telles que T. ajelloi, fréquentes dans le sol, ne sont jamais pathogènes [1].

Mode de contamination

Selon la source d’infection, trois types de teigne sont généralement distingués selon que la transmission soit interhumaine, zoophile ou tellurique.
– Contamination interhumaine
C’est la plus fréquente, causée par des dermatophytes anthropophiles dont les représentants les plus fréquemment retrouvés sous les tropiques sont : T. tonsurans, T. soudanense, T. violaceum, T. schoenleinii et M. langeronii. L’infection touche surtout les familles nombreuses vivant dans des conditions d’hygiène précaire et de grande promiscuité. Les épidémies sont surtout intrafamiliales et M. audouinii a pu être cultivé à partir de peignes, de brosse, de literie, de vêtements, de meubles ou même de dos des sièges dans un théâtre, contaminés par des cheveux parasités. Dans certains cas, l’infection par les dermatophytes peut être perpétuée à l’intérieur de la famille par des porteurs « dits sains » car ils sont totalement asymptomatiques ou d’une génération à l’autre par des personnes adultes ayant une infection non reconnu du cuir chevelu [31].
– Contamination zoophile
Ces infections résultent presque toujours d’un contact direct (caresses) avec un animal porteur du champignon. Dans un grand nombre de cas, il s’agit d’un animal familier. A travers le monde l’agent le plus fréquent reste M. canis, il est transmis dans la majorité des cas par des chatons de 2 à 3 mois. Des animaux à poil peuvent aussi en être responsables : hamster, lapins, lionceau, … [22,32]. D’autres dermatophytes zoophiles tels que T. mentagrophytes peuvent être responsables de teignes du cuir chevelu chez l’homme. Si les chiens et les chevaux sont connus comme des animaux contaminateurs, de nouveaux animaux familiers sont également responsables de la transmission de ces champignons comme des lapins nains, des souris et autres petits rongeurs. Les animaux peuvent être porteurs des lésions, comme la « dartre des veaux » ou être porteurs asymptomatiques comme c’est souvent le cas. Dans certains cas, la transmission est indirecte par d’autres animaux ou par des supports sur lesquels des animaux infectés se sont frottés. C’est le cas d’infections dues à T. verrucosum, à T. erinacei et même à M. canis. Des poils infectants, parasités par M. canis, peuvent être trouvés sur des sièges, des tapis, et même des pull-overs rangés dans une armoire.
– Contamination tellurique
Sur certains sols riches en sources de kératine animale (cours de ferme, étables…), on trouve des dermatophytes telluriques. Ils sont rarement impliqués en pathologie humaine. Ce sont essentiellement N. gypsea, et N. fulva comme cités plus haut. D’autres dermatophytes telluriques peuvent être isolés et sont encore moins fréquents en pathologie. La contamination est habituellement directe à partir de la terre et se produit à l’occasion de lésions de grattage ou à la suite d’un traumatisme du cuir chevelu. Elles parasitent accidentellement l’homme à la suite d’une blessure tellurique [22].

Répartition géographique

Bien que les dermatophytes aient généralement une distribution cosmopolite, certaines espèces sont limitées à une localisation géographique spécifique [33]. Par exemple, T. concentricum, l’agent responsable de tinea imbricata, est endémique du Pacifique Sud et de certaines régions d’Amérique du Sud et a rarement été isolé en Europe. Un résumé des isolats cliniques récupérés d’un laboratoire de référence a montré que T. rubrum reste le dermatophyte pathogène le plus répandu. Il a aussi été noté une incidence accrue de cette espèce dans l’onychomycose (tinea unguium), l’épidermophytie (tinea corporis), l’intertrigo du pli inguinal (tinea cruris), l’atteinte dermatophytique des mains (tinea manuum) et des pieds (tinea pedis) [34]. Des rapports ont montré que T. tonsurans étaient le principal organisme causal infectant les enfants atteints de TCC (tinea capitis) aux États-Unis, atteignant des proportions presque exclusives et confirmant les données d’une enquête de deux décennies (1961-1980) menée à Chicago [32,34]. De même, T. tonsurans est le dermatophyte prédominant qui infecte les cheveux et le cuir chevelu des enfants au Canada, remplaçant T. verrucosum, M. canis et M. audouinii. Inversement, M. canis est plus répandu en Europe, bien que la plus forte augmentation de ces dernières années ait été observée chez T. tonsurans. Ce dernier avec M. canis sont tous deux couramment trouvés à Porto Rico et en Amérique du Sud. Au Moyen-Orient, les organismes prédominants sont M. canis, T. tonsurans et T. violaceum, tandis que T. violaceum est signalé dans plus de 90% des cas de tinea capitis en Afrique (Figure 3). De même, le principal agent infectieux chez les enfants atteints de tinea capitis en Inde et au Népal est également T. violaceum [35].

Table des matières

Remerciements et Dédicaces
Hommages
Illustrations
Introduction
Première partie : Rappels bibliographiques
1. DÉFINITION
2. ÉPIDÉMIOLOGIE DES TEIGNES DU CUIR CHEVELU
2.1. AGENTS PATHOGÈNES : LES DERMATOPHYTES
2.1.1 Taxonomie et classification
2.1.2 Morphologie
2.1.3 Origine et mode de contamination
2.1.3.1 Origine
2.1.3.2 Mode de contamination
2.1.4 Répartition géographique
2.2. FACTEURS FAVORISANTS
2.3. CLINIQUE
2.3.1 Les teignes tondantes
2.3.1.1 Teignes tondantes microsporiques
2.3.1.2 Teignes tondantes trichophytiques
2.3.2 Teignes suppuratives ou kérion de Celse
2.3.3 Teignes faviques ou favus
2.4. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DES TEIGNES DU CUIR CHEVELU
2.4.1 Interrogatoire
2.4.2 Prélèvement
2.4.2.1 Matériel de prélèvement
2.4.2.2 Examen à la lumière de Wood
2.4.2.3 Modalités de prélèvement
2.4.3 Examen direct
2.4.3.1 Le parasitisme endothrix
2.4.3.2 Le parasitisme endo-ectothrix
2.4.3.3 Le parasitisme favique
2.4.4 Culture
2.4.4.1 Milieux de culture et ensemencement
2.4.4.2 Identification morphologique des dermatophytes
2.4.4.3 Apport de la biologie moléculaire
2.4.4.4 Identification des dermatophytes par MALDI-TOF MS
2.5. TRAITEMENT
2.5.1 But
2.5.2 Moyens thérapeutiques
2.5.2.1 Antifongiques locaux
2.5.2.2 Antifongiques généraux ou systémiques
2.5.3 Indications
Deuxième Partie : Travail PERSONNEL
1. CADRE D’ETUDE
1.1. L’HÔPITAL ARISTIDE LE DANTEC (HALD)
1.2. LE LABORATOIRE DE PARASITOLOGIE ET MYCOLOGIE DE L’HALD
2. TYPE ET PERIODE D’ETUDE
3. POPULATION D’ETUDE
3.1. CRITÈRES D’INCLUSION
3.2. CRITÈRES DE NON INCLUSION
4. MATERIELS ET METHODES
4.1. MATÉRIEL D’ÉTUDES
4.2. MÉTHODES D’ÉTUDE
4.2.1 Démarche diagnostiques au laboratoire de Parasitologie-Mycologie
4.2.1.1 Le prélèvement
4.2.1.2 L’examen direct
4.2.1.3 La culture
4.2.1.4 La préparation des cultures positives pour identification
4.2.1.5 L’identification des dermatophytes
4.2.2 La collecte des données
4.2.2.1 Définition de cas
4.2.2.2 Analyse statistique
5. RÉSULTATS
5.1. CARACTÉRISTIQUES DE LA POPULATION D’ÉTUDE
5.2. PRÉVALENCE DES TEIGNES DU CUIR CHEVELU ET SON ÉVOLUTION SELON
LES ANNÉES D’ÉTUDE
5.3. RÉPARTITION DES CAS DE TEIGNES DU CUIR CHEVELU SELON LES DONNÉES
SOCIODÉMOGRAPHIQUES ET CLINIQUE
5.3.1 Répartition des cas de teigne selon l’âge et sexe
5.3.2 Répartition des cas de teigne du cuir chevelu selon l’origine géographique des patients
5.3.3 Répartition des cas de teigne du cuir chevelu selon la durée de mycose
5.4. RÉSULTATS MYCOLOGIQUES
6. DISCUSSION
Conclusion
Références

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