Diagnostic des anomalies moléculaires de l’hémophilie A

Diagnostic des anomalies moléculaires de
l’hémophilie A

Définition 

L’hémophilie A est une maladie hémorragique héréditaire due à un déficit en facteur VIII de la coagulation qui relève d’une triple définitions : – Clinique, par l’expression d’un syndrome hémorragique caractéristique, associant des hémorragies extériorisées ou internes. – Génétique, par sa transmission récessive liée au sexe (au chromosome X). – Biologique, par un déficit quantitatif et/ou qualitatif en facteur VIII. Elle est transmise par les femmes appelées conductrices selon un mécanisme récessif lié au chromosome X (16). 

Epidémiologie – Dans le monde

L’hémophilie est une affection ubiquitaire avec une incidence d’un cas pour dix-mille naissances. Dans le monde, un garçon sur 5000 naissances de sexe masculin est atteint d’hémophilie A (17). – Au Sénégal : L’incidence de l’hémophilie est de 1,95 cas pour cent mille naissances de sexe masculin. Ainsi pour une population de 12 millions d’habitants le nombre total d’hémophiles attendus serait de 1200, alors que seuls 140 hémophiles sont répertoriés, soit moins du 1/10 des hémophiles attendus .

 Rôle du facteur VIII dans l’hémostase 

Le facteur VIII de la coagulation circule dans le plasma sous forme liée à une protéine de transport, le facteur Von Willebrand (VWF). Son rôle est fondamental pour que le phénomène de coagulation puisse se dérouler de façon efficace. Ainsi, en cas de diminution, l’hémostase au niveau d’une brèche vasculaire traumatique ne peut avoir lieu de façon correcte, et le saignement chez l’hémophile est donc la conséquence d’un tel phénomène. Si ce saignement est extériorisé, il est donc simplement prolongé par rapport à un sujet normal. L’importance de cette tendance hémorragique est globalement assez bien corrélée au taux du facteur de coagulation déficitaire dans le plasma. Dans une même famille, la sévérité du déficit est identique d’un membre à l’autre de la famille. La coagulation est le deuxième temps de l’hémostase, processus permettant de maintenir le sang à l’état fluide dans les vaisseaux. C’est un phénomène complexe déclenché dans l’organisme par l’activation du facteur VII au contact d’un récepteur cellulaire, le facteur tissulaire. Le facteur VII devient alors le facteur VII activé qui active soit directement le facteur X en facteur X activé, soit le facteur IX en facteur IX activé. Le facteur IX activé seul est peu efficace, il a besoin pour augmenter son action de la présence de facteur . Le complexe (facteur IX activé + facteur VIII activé) active lui aussi le facteur X en facteur X activé. La suite de la coagulation permet de générer un caillot de fibrine qui vient consolider le premier thrombus blanc formé au cours de l’hémostase primaire. Le fait qu’il existe deux voies, d’une part une voie directe d’activation du facteur X par le facteur VII et d’autre part une voie indirecte passant par le complexe anti hémophilique, explique pourquoi dans la vie de tous les jours, l’hémophile ne saigne pas en permanence : la coagulation reste possible (Figure 1). Figure 1 : Rôle du facteur VIII dans l’hémostase 

 Diagnostic de l’hémophilie

 Diagnostic clinique

 Les manifestations hémorragiques de l’hémophilie sont très variables et leur fréquence est fonction de la sévérité du déficit. Les hémarthroses représentent 70 à 80% des manifestations hémorragiques suivis des hématomes 10 à 20%, les autres saignements extériorisés entre 5 et 10%, puis les hémorragies du système nerveux central plus rares inférieures à 5%. Selon son siège l’hémorragie peut être grave voire menaçante pour le pronostic vital (18). Plusieurs complications sont associées à l’hémophilie : – A court terme les complications à redouter sont la déglobulisation et la compression vasculo-nerveuse d’où l’intérêt d’une prise en charge adéquate des hémorragies aigues chez l’hémophile. – A moyen et long terme, l’évolution est émaillée de complications engageant surtout le pronostic fonctionnel des hémophiles. Ces complications chroniques sont l’Arthropathie hémophilique chronique, la pseudotumeur hémophilique et les Séquelles rhumato-orthopédiques (synovite, amyotrophie, paralysie). Ces différentes séquelles sont souvent responsables d’un handicap fonctionnel (19). Les complications liées au traitement sont d’ordre infectieux (transmission du VIH, VHB et VHC), d’ordre immunologique (développement d’inhibiteurs anti FVIII) (20, 21). IV.2. Diagnostic biologique de l’hémophilie Le TCA (Temps de Céphaline + Activateur) est allongé de manière isolé. Ce TCA allongé est corrigé par adjonction de plasma témoin (Test de correction). L’hémostase primaire est normale (numération des plaquettes et temps de saignement sont normaux). Le temps de Quick (qui explore la voie extrinsèque) est normal. Le temps de thrombine et le taux de fibrinogène sont normaux. Le dosage du facteur VIII confirme le diagnostic et montre une diminution du taux de facteur qui est inférieur à 30%. Selon le taux de facteur VIII résiduel, on distingue l’hémophilie A majeure (taux < 1 %), modérée (taux entre 1 et 5%) et mineure (taux entre 6 et 30%). 6 V. Génétique moléculaire de l’hémophilie A 

 Bases moléculaires de l’hémophilie A

 Le gène du facteur VIII est situé sur le bras long du chromosome X (Xq28). Un seul allèle est donc présent chez l’homme et deux chez la femme. Les femmes conductrices sont en général non symptomatiques, bien que certaines puissent présenter un taux de facteur VIII abaissé en dessous de la valeur médiane théorique de 50% (22, 23). Elles peuvent transmettre l’anomalie génétique à leur descendance. Celle-ci va alors toucher 1 garçon sur 2 et 1 fille sur 2. Les enfants d’un garçon hémophile seront tous indemnes de la maladie s’ils sont de sexe masculin et ses filles seront toutes des conductrices (Figure 2). . Figure 2 : Transmission génétique de l’hémophilie (père hémophilie, mère conductrice) On sait aujourd’hui déterminer par des techniques de génétique moléculaire les mutations du gène du facteur VIII, et l’on se sert de cette information pour rechercher les conductrices dans une famille ou réaliser un diagnostic anténatal (9). Il faut toutefois savoir que dans près d’un tiers des cas, une mutation spontanée provoque une hémophilie, aucun cas n’étant connu préalablement dans la famille .

 Le gène du facteur VIII (Figure 3)

 Cloné en 1984, il est situé sur la 8éme bande de la 2éme région du bras long du chromosome X (Xq28). Il représente environ 1% de ce chromosome. Il est composé de 186 000 paires de bases, dont 26 exons représentant 9 kb et 25 introns représentant 117 kb. Les 26 exons du gène s’étendent sur 186 kb et codent une protéine de 2351 acides aminés structurée en domaines de trois types (A, B et C). La libération du peptide signal, puis l’activation par différents facteurs de la coagulation aboutissent à la formation du facteur VIII activé. Son inactivation est induite par la thrombine et la protéine C activée.

La protéine 

Le facteur VIII est synthétisé principalement dans le foie mais la rate et les reins pourraient aussi en produire. C’est un facteur thermolabile qui se retrouve dans les euglobulines. Il est cryoprécipitable non absorbable sur l’hydroxyalumine ou sur le sulfate de baryum et est consommé pendant la coagulation. Dans le plasma, il est associé au facteur Von Willebrand qui est synthétisé par les cellules endothéliales. Le facteur VIII circule dans le plasma associé par une liaison non covalente au facteur Von Willebrand qui le protège d’une protéolyse rapide. Sa demi-vie est de 10 à 16 h. C’est une glycoprotéine de masse moléculaire de 170 à 330 kd selon le degré d’hydrolyse du domaine B, sa séquence comprend 2332 AA et comporte 25 sites de glycosylation. Il comprend : – Un domaine «A» avec 3 zones (A1, A2, A3) homologues à la céruléoplasmine, et comportant 330 acides aminés chacun. – Un seul domaine «B» central (980 acides aminés), principal site de liaison des hydrates de carbone, – Un domaine «C» avec deux zones de 150 AA, sites de liaison des phospholipides. La séquence peut être schématisée ainsi : A1, A2, B, A3, C1, C2.  

Table des matières

Introduction
Première partie : Généralités sur l’hémophilie A et ses bases moléculaires
I. Définition
II. Epidémiologie
III. Rôle du facteur VIII dans l’hémostase
IV. Diagnostic de l’hémophilie
IV.1. Diagnostic clinique
IV.2. Diagnostic biologique
V. Génétique moléculaire de l’hémophilie A
V.1. Bases moléculaires de l’hémophilie A
V.1.1. Le gène du facteur VIII
V.1.2. La protéine
V.2. Anomalies moléculaires du gène du facteur VIII9
V.2.1. Les délétions et insertions
V.2.2. Les anomalies ponctuelles
V.2.3. Les anomalies d’épissage
V.2.4. Les inversions
V.3. Diagnostic moléculaire de l’hémophilie A
V.3.1. Techniques d’extraction de l’ADN à partir de produits sanguins
V.3.2. La technique de PCR
V.3.3. La technique Southern Blot
V.3.4. Les techniques de séquençage
A. Séquençage selon la méthode de Maxam-Gilber
B. Séquençage selon la méthode de Sanger
C. Le séquençage par hybridation
D. Le pyroséquençage
V.3.5. Les techniques Microarray
A. CGH-Array (Comparative Génomique Hybridation Array)
B. SNP-Array (Single Nucleotid Polymorphism Array)24
V.3.6. La technique MLPA (Multiplex Ligation-dependent Probe Amplification)
Deuxième partie : Travail personnel
I. Objectifs de l’étude
II. Population d’étude
II.1. Les hémophiles
II.2. Les conductrices potentielles
III. Méthodes
III.1. Type et période d’étude
III.2. Cadre d’étude
III.3. Les prélèvements.
III.3. Les techniques réalisées
III.3.1. Diagnostic de l’hémophilie
III.3.2. Confirmation de l’hémophilie
III.3.3. Dosage des inhibiteurs
III.3.4. Analyses moléculaires.
A. Extraction des ADN par le kit Quiagen Blood Kit Maxi®
B. Technique utilisée : PCR Long rang (LR-PCR
C. Stratégie d’étude moléculaire de l’hémophilie A
D. Recherche de l’inversion du gène du facteur VIII au niveau de l’intron 22
E. Recherche de l’inversion du gène du facteur VIII au niveau de l’intron 1
F. Séquençage des 26 exons du gène du facteur VIII
G. Dépistage des conductrices
III.4. Considérations éthiques
IV. Résultats
IV.1. Répartition des patients selon l’âge et la forme cliniqu
IV.2. Répartition des conductrices selon l’âge
. IV.3. Les différents types d’anomalies moléculaires retrouvées
IV.4. Prévalence des inhibiteurs anti facteurs VIII
IV.5. Dépistage des conductrices
V. Commentaires
Conclusion
Références

 

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