Emergence d’un locus producteur de piRNAs par un phénomène de paramutation

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Biogenèse des piRNAs germinaux

La régulation des ETs « germinaux » se fait dans les cellules nourricières et l’ovocyte qui contiennent un cytoplasme syncytial commun (Figure 4). Cette régulation se fait par une classe de petits ARNs récemment découverte, appelés piRNAs (pour « Piwi-interacting RNAs »). Les piRNAs sont générés entre autres par les protéines de la famille PIWI (Piwi Aub et AGO3) (Figure 6) et sont des petits ARNs de 23-28nt (Brennecke et al. 2007).
Cette régulation passe par la production de transcrits précurseurs de piRNAs issus d’une transcription atypique des clusters de piRNAs, régions génomiques riches en séquences d’ETs dégénérées (Senti and Brennecke 2010 ; Mohn et al. 2014 ; Zhang et al. 2014). Ces précurseurs de piRNAs seront ensuite clivés en piRNAs primaires et pris en charge par les protéines Piwi et Aub. Il a été observé une amplification des piRNAs dits secondaires dans un mécanisme appelé cycle Ping-Pong entre les protéines Aub et AGO3. Les piRNAs chargés par Piwi vont être capables de rentrer dans le noyau pour permettre d’une part la répression des ETs actifs et d’autre part l’entretien de clusters de piRNAs. Nous verrons ici plus en détails chacune de ces étapes ainsi que les diverses protéines qui interviennent à chaque étape.

Les clusters de piRNAs et la production des transcrits précurseurs de piRNAs

La cartographie des piRNAs sur le génome montre qu’ils proviennent de deux types de régions génomiques. Les principales sont des régions spécifiques appelées clusters de piRNAs, qui contiennent de nombreux fragments d’ETs délétés et dégénérés. Ces régions sont définies par leur sens de transcription et leurs protéines associées. Il existe deux types de clusters de piRNAs : les clusters dits bidirectionnels et les clusters dits unidirectionnels (Figure 7). Les clusters de piRNAs sont préférentiellement localisés dans des régions hétérochromatiques péricentromériques et subtélomériques des chromosomes. Ils contiennent de nombreux fragments d’ETs et peuvent être considérés comme un catalogue des séquences d’ETs qu’il est nécessaire de réguler. Ceci signifie qu’en l’absence d’un fragment d’un ET donné dans l’un des clusters, celui-ci peut échapper à la répression (Khurana et al. 2011). Le second type de régions produisant des piRNAs provient de gènes codants (Brennecke et al. 2007 ; Robine et al. 2009 ; Saito et al. 2009) et de copies euchromatiques d’ETs. L’argument le plus direct provient de l’élément I de la famille des LINEs. En effet, l’élément I est présent dans le génome au niveau du cluster de piRNAs, ainsi que sous forme de copies euchromatiques actives. Les séquences de ces différentes copies de l’élément I sont très divergentes, ce qui a permis l’identification de piRNAs spécifiques des copies actives de l’élément I (Brenneke et al. 2008).
Il s’agit du profil de piRNAs (23-30nt) issus du cluster 20A (cluster 2), cluster flamenco et du cluster 42AB représentés en gris. Pour faire une comparaison des profils, les banques ont été normalisées à 1 million de petits ARNs de 23-30nt issus de séquences répétées. Les banques des piRNAs somatiques ont été faites sur les cellules OSS qui sont des cellules en culture dérivées de cellules somatiques folliculaires (a et b) alors que les banques des piRNAs germinaux ont été faites sur des embryons très jeunes possédant un cytoplasme d’origine germinale (c et d). (a) Ce graphique montre que les clusters 20A et flamenco produisent des piRNAs uniquement sens dans les cellules somatiques alors que le cluster 42AB (b) ne produit pas de piRNAs. (c) Ce graphique montre que dans les embryons précoces, il y a production de piRNAs par le cluster 20A et pas par le cluster flamenco. Donc flamenco est un cluster spécifique des cellules folliculaires somatiques alors que le cluster 20A s’exprime dans les deux tissus et produit toujours des piRNAs uniquement sens. Par contre, le cluster 42AB produit des piRNAs sens et antisens uniquement dans les tissus germinaux. Cela montre que ce cluster est spécifique de la lignée germinale. (Senti and Brennecke 2010)
– Les clusters bidirectionnels germinaux:
La majorité des clusters dans la lignée germinale est bidirectionnelle, ce qui signifie qu’ils sont transcrits dans les deux sens (Figure 7 et 8). Le cluster principal est le cluster 42AB qui contient entre autres une séquence altérée de l’élément I (Brennecke et al. 2007). Il a été montré par des expériences de ChIP-seq que les clusters bidirectionnels sont des régions hétérochromatiques riches en marque H3K9me3 et pauvre en marque H3K4me2 (Mohn et al.2014) (Figure 8). La marque H3K9me3 est établie par la protéine Eggless qui est une histone méthyltransférase (Rangan et al. 2011). Il a été montré, toujours par ChIP seq, que la protéine Rhino (protéine homologue de HP1 qui est une protéine chromatienne) est présente spécifiquement sur les clusters bidirectionnels (Vermaek et al. 2005 ; Klattenhoff et al. 2009 ; Mohn et al. 2014 ; Zhang et al. 2014) (Figure 8).
(A) Expérience de RNA Fish (hybridation in situ fluorescente) en vert des clusters 42AB bidirectionnel et 20A unidirectionnel (encore appelé cluster 2) en colocalisation avec la protéine de fusion Rhino-GFP en rouge. Rhino colocalise avec les ARNs du cluster 42AB mais pas avec ceux du cluster 20A. (B) Expériences de DNA (en rouge) et RNA (en vert) Fish du cluster 42AB. Les ARNs du cluster 42AB colocalisent avec le cluster 42AB. (C-D) Expériences de RNA-seq (total RNA et cap-seq), ChIP-seq de l’ARN polII, H3K4me2, H3K9me3 et Rhino ainsi que séquençage à haut débit des piRNAs en contexte sauvage et mutant pour rhino pour les clusters 20A (C) et 42AB (D). En (C) analyse concernant le cluster 20A qui est le cluster unidirectionnel de référence, localisé sur le chromosome X situé à proximité du gène Cyp6t. Le RNA-seq nous montre qu’il y a production uniquement du transcrit sens et le Cap-seq qui permet de visualiser la localisation de la coiffe des transcrits naissants, nous montre que ce cluster produit des transcrits sens coiffés. Les analyses de ChIP-seq des protéines ARN polII, H3K4me2, H3K9me3 et Rhino nous montrent un enrichissement de l’ARN pol II et H3K4me2 au début du cluster 20A. Concernant la marque H3K9me3, il y a un enrichissement de part et d’autre des bornes du cluster. Il n’y a pas d’enrichissement de Rhino. Le profil de piRNAs montre la présence de piRNAs sens uniquement en contexte sauvage et ce profil est peu affecté en contexte mutant pour rhino. Le dernier module nous montre que le cluster 20A est composé essentiellement d’ETs à LTR et la présence de quelques LINEs. En (D) il s’agit de la même analyse faite sur le cluster 42AB qui est le cluster bidirectionnel de référence, localisé sur le bras droit du chromosome 2. Ce cluster est localisé à proximité du gène bin3 et Pld. Le RNA-seq nous montre que le cluster 42AB est effectivement transcrit dans les deux sens mais de façon faible. Nous n’observons pas d’enrichissement de la coiffe au niveau du cluster 42AB contrairement au gène adjacent. Cela signifie que les transcrits issus du cluster 42AB ne sont pas coiffés. Les ChIP-seq de l’ARN polII et H3K4me2 ne présentent pas non plus d’enrichissement au niveau du cluster 42AB contrairement aux gènes adjacents. Par contre, il y un fort enrichissement en marque H3K9me3 et en Rhino. L’analyse des piRNAs montre la présence de piRNAs sens et antisens en contexte sauvage qui sont perdus en contexte mutant pour rhino. Nous constatons également que le cluster 42AB est composé essentiellement de LINEs et ETs à LTR avec la présence de quelques transposons, alors que les régions adjacentes en contiennent très peu. L’ensemble de ces résultats montre que les clusters 42AB bidirectionnel et 20A unidirectionnel ont des signatures transcriptionnelles différentes. (Mohn et al. 2014)
La protéine Rhino est une protéine hétérochromatique composée de trois domaines : un domaine CD (pour « chromo domain ») en N terminal qui lui permet des interactions avec la chromatine (elle se lie aux marques H3K9me2/3), un domaine hinge au centre et un domaine CSD (pour « chromo-shadow domain ») en C terminal. Bien qu’il y ait transcription de ces clusters, le ChIP seq de l’ARN polII ne révèle pas un fort enrichissement de l’ARN PolII sur les clusters mais on trouve un fort enrichissement sur les promoteurs adjacents au cluster (Mohn et al. 2014) (Figure 8). Les travaux de Mohn montrent la présence d’un complexe de protéines spécifiques aux clusters bidirectionnels appelé le RDC complexe. En effet, il a été montré la présence sur la chromatine de la protéine Rhino qui reconnait les marques H3K9me2/3 par le biais de son domaine CD mais également que la protéine Rhino est elle-même liée au niveau du domaine CSD à la protéine Deadlock au niveau de son domaine N terminal (Klattenhoff et al. 2009 ; Mohn et al. 2014). La protéine Deadlock a été identifiée comme impliquée dans la biogenèse de piRNAs lors d’un crible par RNAi réalisé dans le but d’identifier de nouveaux facteurs impliqués dans la biogenèse de piRNAs germinaux (Czech et al. 2013). Il a été montré que le knockdown de deadlock diminue la quantité de piRNAs sens et antisens des clusters bidirectionnels mais pas des clusters unidirectionnels. Cela montre que cette protéine a une action spécifique aux clusters bidirectionnels. De plus, il a été montré que cette protéine colocalise avec la protéine Rhino (Czech et al. 2013 ; Mohn et al. 2014). La protéine Deadlock est composée d’un domaine N terminal et C terminal. La protéine Deadlock interagit avec la protéine Cutoff. Cutoff est homologue à la protéine Rai1 chez la levure, la protéine Dom3Z chez les métazoaires et DXO chez la souris. Ces protéines sont connues pour avoir un rôle dans le contrôle qualité des extrémités 5’ des transcrits naissants (ARNm) en se liant aux ARNm et en les dégradant (Jiao et al. 2010 ; Jiao et al. 2013) ainsi que dans la terminaison de la transcription (Kim et al. 2004). Néanmoins l’activité exonucléase 5’ vers 3’ de Rai1/DXO n’est pas conservée dans Cutoff (Chen et al. 2007 ; Pane et al. 2011). Les expériences d’immunofluorescence montrent que ces trois protéines sont présentes spécifiquement dans les noyaux des cellules germinales, forment des focis et colocalisent toutes les unes avec les autres (Pane et al. 2011, Mohn et al. 2014).
Le complexe RDC est donc spécifique des clusters bidirectionnels et pourrait bloquer la terminaison de la transcription des gènes adjacents aux clusters de piRNAs ce qui permettrait à l’ARN polII de transcrire ces clusters (Figure 9) (Mohn et al. 2014). Une seconde hypothèse, avancée par les travaux conjoints de Mohn et Zhang, est que ce complexe pourrait également favoriser l’absence d’épissage des transcrits précurseurs de piRNAs (Figure 9). De plus, la protéine Cutoff pourrait interagir avec l’extrémité 5’ des transcrits précurseurs de piRNAs et empêcher leur dégradation par les protéines Rat1/Xrn2 et/ou bloquer le recrutement à l’extrémité 5’ du complexe de coiffe (CBC pour « cap-binding complexe »). Tout ceci conduirait à une transcription non-canonique des clusters de piRNAs (Figure 9).
La recherche de nouvelles protéines impliquées dans la voie des piRNAs a permis d’identifier la protéine UAP56 (Zhang et al. 2012 et Zhang et al. 2014). UAP56 (Hel25E) est une protéine possédant un domaine DEAD box qui permet la fixation des ARNs. Elle est impliquée dans le remodelage de la chromatine (Eberl et al. 1997), dans l’export des ARNm hors du noyau (Gatfield et al 2001) ainsi que dans la régulation l’épissage alternatif via la splicesosome (Park et al. 2004 ; Katzenberger et al. 2009). De plus, des femelles hétéro- alléliques pour UAP56 sont stériles et montrent des défauts dans la localisation asymétrique des ARNm (Eberl et al. 1997 ; Meignin and Davis 2008) tout comme certaines protéines de la voie des piRNAs. Des expériences d’immunofluorescence montrent qu’UAP56 est nucléaire et colocalise avec les foci de Rhino (Zhang et al. 2014). En perte de fonction pour rhino, une réduction drastique de la présence d’UAP56 est observée dans le noyau. De plus, la perte de fonction pour UAP56 affecte la localisation des autres protéines de la voie des piRNAs dans le nuage, à l’exception de Piwi, ainsi qu’une baisse des piRNAs germinaux et plus particulièrement ceux issus des clusters bidirectionnels. Le nuage est une région cytoplasmique qui entoure le noyau d’apparence plus dense et qui contient les protéines de la voie des piRNAs (Eddy EM, 1974 et 1975 ; Lim et al. 2007 ; Olivieri et al. 2010). L’ensemble de ces résultats montre qu’UAP56 est impliquée dans la biogenèse de piRNAs germinaux et plus particulièrement des précurseurs de piRNAs issus de clusters bidirectionnels. L’effet de la perte de fonction d’UAP56 sur la localisation des ARNm suggère que cette protéine pourrait intervenir dans le transport des précurseurs de piRNAs pour les amener dans le cytoplasme, et plus particulièrement dans le nuage (Pane et al. 2007). Mais il reste encore de nombreuses questions quant à la spécification de précurseur de piRNAs. Il a longtemps été proposé qu’une protéine particulière pourrait rendre ces transcrits spécifiques et reconnus comme précurseur de piRNAs.
Il a été montré qu’il y a des défauts d’épissage de précurseurs de piRNAs qui sont dépendants des protéines Rhino, Cutoff et UAP56 (Zhang et al. 2014 ; Figure 10). Des expériences de RT q-PCR spécifiques des sites d’épissage montrent que les précurseurs de piRNAs ne sont pas épissés contrairement aux transcrits des gènes codants. Ils décrivent un très bel exemple du locus sox102F qui est composé de séquences uniques et produit quatre transcrits distincts dans les cellules somatiques (Figure 10). Dans les cellules germinales, par contre, ce même locus produit des piRNAs. En contexte mutant pour rhino et cutoff, il y a non seulement perte de la production de piRNAs mais également une augmentation de transcrits au niveau des exons en adéquation avec le profil d’un gène codant. Des expériences de RT q-PCR sur les sites d’épissage montrent qu’en ovaire, il y a plus de transcrits de sox102F non épissés qu’épissés par rapport aux carcasses (tissus somatiques de référence). Par contre en mutant rhino et cutoff, il y a plus de transcrits de sox102F épissés.
(A) et (D) montrent les profils de ChIP-seq de Rhino et de RNA-seq en contexte sauvage, mutant pour cutoff et rhino pour les clusters 42AB et sox102F. Rhino est présent sur le cluster 42AB et sur le cluster sox102F au niveau des régions transcrites. Le profil RNA seq, en contexte sauvage, montre qu’il y a des transcrits sens et antisens qui sont perdus sauf pour certaines petites régions pour le cluster 42AB en contexte mutant pour cutoff et rhino. Par contre, ils sont réduits sur le cluster sox102F sauf au niveau des introns de ce gène inséré en sens inverse dans génome. Il y a une augmentation des transcrits antisens au niveau des introns de ce cluster. (B) Il s’agit d’un zoom du cluster 42AB sur une région contenant un intron. En contexte sauvage, il y a une transcription faible mais quasi-continue de la région. Alors qu’en contexte mutant pour cutoff et rhino, il y a une plus forte transcription de cette région mais avec un trou qui correspond à la présence de l’intron. En (C) et (F), il s’agit d’une analyse par RT q-PCR de la région d’épissage de l’intron révélé en (B) sur 42AB et d’une région de sox102F contenant un intron. Le ratio transcrits épissés/non épissés est calculé. En (C) concernant le cluster 42AB, il y a plus de transcrits non-épissés dans les deux fonds génétiques sauvages en ovaire par rapport à la carcasse. Par contre, il y a plus de transcrits épissés dans les mutants cutoff et rhino. En (F) concernant le cluster sox102F, on retrouve les mêmes résultats qu’en (C) pour le cluster 42AB. (E) montre les profils des petits ARNs respectivement du cluster sox102F en contexte sauvage et mutant pour cutoff et rhino. Il y a production de petits ARNs sens et antisens tout le long du cluster en contexte sauvage. En contexte mutant pour cutoff et rhino, il y a réduction des petits ARNs sens et anti-sens mais il y a présence de quelques petits ARNs antisens spécifiquement au niveau de la jonction de deux exons. (Zhang et al. 2014)
Un modèle est alors proposé par cette équipe qui permettrait d’expliquer comment les précurseurs de piRNAs peuvent être distingués des autres transcrits. En effet, l’une des grandes énigmes de cette voie de piRNAs est de savoir comment les précurseurs de piRNAs sont différenciés des autres et conduits dans le nuage pour y être clivés en piRNAs. Ce modèle propose que la présence de Rhino sur les clusters de piRNAs permette le recrutement de Cutoff et donc la formation du complexe RDC. Cutoff pourrait interagir avec l’extrémité des transcrits naissants et à la place du complexe CBC. Ensuite, il y aurait recrutement de UAP56 et l’absence du complexe CBC qui aurait pour conséquence le non-épissage des transcrits. Ces transcrits chargés par Cutoff et UAP56 seraient reconnus comme précurseurs de piRNAs (Figure 11).
Figure 11: Modèle du rôle du Rhino, Cutoff et UAP56 dans la biogenèse des piRNAs. (En haut) Séquence d’ADN contenant un intron. Cette région est transcrite et génère un transcrit sur lequel il va y avoir recrutement du complexe CBC au niveau de l’extrémité du transcrit naissant. Cela aura pour conséquence le recrutement d’UAP56 qui permettra l’épissage de l’intron, puis il y aura un relarguage d’UAP56. Ensuite, il y aura recrutement de eIf4E qui permettra d’initier la traduction du transcrit. (En bas) Même séquence d’ADN avec présence de Rhino. Cela aura pour conséquence le recrutement de Cutoff qui bloquera le recrutement du complexe CBC. UAP56 sera recrutée mais l’absence du complexe CBC bloquera l’épissage de l’intron et cela aura pour conséquence une stabilisation de UAP56 sur le transcrit. Le complexe transcrit, Cutoff et UAP56, pourrait être à l’origine de la spécificité des précurseurs de piRNAs. (Zhang et al. 2014)
Il a été montré qu’au sein de la lignée germinale, il y a deux populations de clusters : les clusters dépendants de Rhino et les clusters indépendants de Rhino (Mohn et al. 2014). Le cluster référence des clusters indépendants de Rhino est le cluster 2 qui est unidirectionnel. Mais les données suggèrent qu’il y aurait également des clusters bidirectionnels indépendants de Rhino (Mohn et al. 2014). Une comparaison moléculaire d’un cluster bidirectionnel dépendant de Rhino et d’un cluster bidirectionnel indépendant de Rhino, telle qu’elle a été menée dans la figure 8, peut apporter beaucoup de réponses.
– Les clusters unidirectionnels germinaux
Concernant les clusters unidirectionnels, il y en a un seul référencé et appelé cluster 2 (Brennecke et al. 2007) (Figure 7). Il est localisé dans la région péricentromérique du chromosome X au site cytologique 20A. Il est composé de fragments d’ETs dégénérés et tous insérés en antisens. Ce cluster n’est pas sensible à Rhino c’est-à-dire qu’il n’est pas observé de baisse de la production des piRNAs en condition mutant pour rhino bien que ce mutant affecte la localisation d’Aub et AGO3, ainsi que de Piwi, mais uniquement très précocement (Klattenhoff et al. 2009 ; Mohn et al. 2014 ; Figure 8). De plus, des expériences de ChIP-seq de Rhino montrent qu’il y a peu ou pas de Rhino sur le cluster 2 (Klattenhoff et al. 2009 ; Mohn et al. 2014 ; Figure 8). L’étude de la signature transcriptionnelle du cluster 2 (Figure 8 : cluster 20A) montre que ce cluster est différent du cluster bidirectionnel 42AB. L’analyse de RNA-seq montre la présence de transcrits uniquement sens au début et à la fin du cluster 2 et l’analyse de Cap-seq montre la présence d’un transcrit coiffé issu de la transcription du cluster mutant pour cutoff et AGO3, il y a une baisse de la production des piRNAs issus du cluster 2 (Klattenhoff et al. 2009 ; Pane et al. 2011). Il semblerait que les protéines Cutoff et AGO3 aient un effet sur la biogenèse générale des piRNAs germinaux (Li et al. 2009 ; Pane et al. 2011). En effet, des expériences d’immunomarquages de chambres ovariennes en contexte mutant pour AGO3 montrent que les protéines Aub et Vasa ne sont plus présentes dans le nuage et que Piwi n’est plus présent dans le noyau contrairement au phénotype sauvage (Li et al. 2009). Concernant le mutant cutoff, il y a perte des protéines AGO3, Aub, Vasa et Tejas (Figure 6) dans le nuage, alors que la localisation de Piwi ne semble pas être affectée (Pane et al. 2011). Ces résultats semblent contradictoires car les travaux de Klattenhoff en 2009 montrent qu’en contexte mutant pour rhino, les 3 protéines Piwi, Aub et AGO3 impliquées dans la biogenèse des piRNAs ont également leurs localisations cellulaires perturbées. Néanmoins, l’absence de Rhino sur ce cluster ne change pas le fait que le cluster 2 est localisé dans une région hétérochromatique enrichie en protéines telles que HP1. En effet, il a été montré par ChIP-seq que les régions riches en ETs sont enrichies en marques H3K9me3 dans les ovaires et HP1 dans les ovaires et dans les têtes (Moshkovich et al. 2010 ; Rangan et al. 2011).
L’ensemble de ces résultats suggère que les modèles proposés précédemment pour les clusters bidirectionnels, concernant le blocage de la terminaison de la transcription et du recrutement du complexe CBC (Figure 9), ne soient pas valables pour le cluster unidirectionnel germinal puisque ce cluster possède une transcription canonique. De plus, les travaux de Zhang en 2012 sur la caractérisation de la protéine UAP56 dans la biogenèse des piRNAs montrent que cette protéine n’est pas impliquée dans la biogenèse des transcrits issus du cluster 2. Ceci implique également que le modèle proposé en Figure 11 n’est pas valable pour le cluster 2. En effet, s’il n’y a pas la présence du complexe RDC pour bloquer le recrutement du complexe CBC au niveau de la coiffe des transcrits naissant, UAP56 sera recrutée par le complexe CBC, ce qui impliquera que l’épissage se fera normalement, conduisant à un relargage d’UAP56. Il n’y aurait donc pas non plus de recrutement de Cutoff au niveau de la coiffe des transcrits naissants ni de stabilisation de la protéine UAP56 sur ces transcrits. Les transcrits précurseurs de piRNAs issus du cluster unidirectionnel germinal sont donc différents de ceux issus des clusters bidirectionnels.
Les modèles proposés par Mohn (Figure 9) et Zhang (Figure 11) permettent de proposer que la présence des protéines Cutoff et UAP56 au niveau des transcrits issus des clusters bidirectionnels serait suffisante pour définir ces transcrits comme transcrits précurseurs de piRNAs par la machinerie de piRNAs. Mais ces différences de profil transcriptionnel soulèvent une question : comment les transcrits issus des clusters unidirectionnels sont-ils reconnus en tant que précurseurs de piRNAs dans les tissus germinaux ? Ces résultats mettent le doigt sur l’une des énigmes de ces voies de piRNAs : quelles sont la ou les protéines qui permettent de donner à un transcrit le statut de précurseur de piRNAs ?

La biogenèse des piRNAs primaires

La biogenèse des piRNAs se fait donc à partir des précurseurs de piRNAs qui sont des ARNs simple brin contrairement aux autres voies de petits ARNs : les miRNAs et les endo-siRNAs (voir partie 3 e) qui sont générés à partir d’un précurseur double brin par les protéines Dicer (Kim et al. 2009). Les piRNAs sont associés aux protéines de la sous-famille PIWI qui qui fait partie de la famille ARGONAUTE. Les piRNAs ont une taille comprise entre 24 et 29nt chez la drosophile contrairement aux miRNAs qui ont une taille de 22-23nt et aux endo-siRNAs qui ont une taille de 21nt. Cette différence de taille est peut-être due à l’empreinte laissée sur les ARNs précurseurs par les protéines associées lors de la biogenèse des piRNAs. En effet, la protéine fixée à un transcrit va protéger de la dégradation par des nucléases, la séquence du transcrit recouverte par la protéine. Nous verrons ici comment sont générés les piRNAs dit primaires ainsi que les protéines impliquées, bien que cette étape de biogenèse soit encore très peu connue (Figure 12).
Figure 12 : Modèle de la biogenèse de piRNAs primaires et secondaires chez la drosophile en contexte germinal.
(A) Biogenèse des piRNAs primaires chez la drosophile. Le cluster de piRNAs produit un transcrit qui va être clivé par la protéine Zucchini pour être chargé ensuite par les protéines PIWI : Piwi et Aub. La protéine Hen1 va permettre la 2’O-methylation de l’extrémité 3’ après la dégradation en 3’ par une ou des protéines inconnues. Les piRNAs 2’O-méthylés et chargés par les PIWI protéines sont appelés piRNAs primaires. (B) Biogenèse de piRNAs secondaires chez la drosophile : les piRNAs chargés par Aub vont reconnaître un transcrit complémentaire et Aub va cliver l’extrémité 5’ de ce transcrit qui va être pris en charge par la protéine AGO3. Il y a ensuite dégradation de l’extrémité 3’ et 2’-O-methylation pour générer un piRNA secondaire. Ce piRNA secondaire chargé par AGO3 pourra à son tour reconnaître un transcrit complémentaire, le cliver à l’extrémité 5’. Ce transcrit sera alors pris en charge par Aub, l’extrémité 3’ va être dégradée et 2’-O-méthylée et générer ainsi des piRNAs secondaires chargés par Aub. Il y aura ainsi amplification des piRNAs secondaires. Les piRNAs primaires chargés par Piwi vont eux entrer dans le noyau pour aller réprimer les séquences homologues cibles. (Ishizu et al. 2012)
Il a été montré que les clusters de piRNAs en contexte germinal, qu’ils soient unidirectionnels ou bidirectionnels, produisent des transcrits simple brin appelés précurseurs de piRNAs. Ces longs transcrits vont être conduits jusqu’aux pores nucléaires probablement par la protéine UAP56 mais il y a sûrement d’autres protéines impliquées et non identifiées.
Une fois arrivés aux pores nucléaires, ces précurseurs de piRNAs vont passer dans le cytoplasme dans une région subcellulaire optiquement dense et diffuse appelée le nuage. Une des premières protéines décrites dans le nuage est la protéine Vasa qui est requise pour le développement de la lignée germinale et dans la production des piRNAs (Hay et al. 1990, Lasko and Ashburner, 1990 ; Liang et al. 1994 ; Pane et al. 2007 ; Figure 5). Il s’agit d’une protéine possédant un domaine DEAD (box helicase) qui est un motif de fixation des ARNs (Linder and Jankowsky, 2011). La protéine Vasa serait donc capable de fixer les précurseurs de piRNAs afin qu’ils soient clivés tout comme il l’a été montré chez Bombyx mori (Xiol et al. 2014). Il y a d’autres hélicases présentes dans le noyau pouvant intervenir également telles que SpnE dont les mutants affectent la biogenèse des piRNAs (Vagin et al. 2004 ; Figure 6). Les facteurs responsables du clivage et de la dégradation des extrémités 5’ et 3’ sont encore inconnus mais il a été montré que la protéine Zucchini pouvait être un bon candidat pour le clivage des précurseurs de piRNAs (Nishimasu et al. 2012). En effet, basée sur des études cristallographiques, la structure de la protéine Zucchini chez la drosophile révèle une activité endonucléase contrairement aux articles précédents qui proposaient Zucchini comme étant une phospholipase (Huang et al. 2011). Zucchini a été montrée comme étant associée aux précurseurs de piRNAs et capable de générer des extrémités 5’ mono-phosphate, qui sont l’une des caractéristiques des piRNAs matures (Ipsaro et al. 2012 ; Nishimasu et al. 2012 ; Figure 12-A). La particularité de Zucchini est que cette protéine est localisée sur la membrane des mitochondries. Des travaux de Pane en 2007 ont montré que Zucchini est localisée dans le nuage. La question est : quelle est l’implication de la mitochondrie et son rôle potentiel dans la biogenèse des piRNAs ? L’une des hypothèses est que les mitochondries pourraient fournir l’ATP nécessaire aux hélicases telles que Vasa pour clamper les transcrits (Xiol et al. 2014).
Ces résultats montrent que Zucchini serait l’endonucléase qui permettrait de faire le clivage 5’ des précurseurs de piRNAs et ainsi de générer des pré-piRNAs. Ces pré-piRNAs seraient chargés par les protéines Piwi et Aub dans le nuage à l’aide des protéines Shutdown et Hsp83, qui sont des protéines co-chaperones dont la perte de fonction conduit à des défauts de localisation des protéines de la voie des piRNAs (Schüpbach and Wieschaus 1991 ; Olivieri et al. 2012 ; Specchia et al. 2010 ; Figure 12-A). Le mécanisme d’action de ces protéines reste encore inconnu. Les travaux de Pane en 2007 ont montré l’existence d’une interaction physique entre Zucchini et Aub. Il est possible que la formation d’un complexe avec ces protéines permette le recrutement des protéines Piwi et Aub. Car ce n’est qu’une fois les pré-piRNAs chargés par Piwi ou Aub, qu’il y aurait dégradation de l’extrémité 3’ par une ou plusieurs protéines inconnues (Figure 12-A). Les cribles menés pour la recherche de nouveaux gènes impliqués dans la voie des piRNAs n’ont pas permis d’identifier de nucléase. Il est possible que cette fonction soit effectuée par plusieurs nucléases différentes, il y aurait donc redondance ce qui ne permettrait pas d’isoler les nucléases impliquées (Czech et al. 2013 ; Muerdter et al. 2013). Une fois la dégradation de l’extrémité 3’ faite, la protéine Hen1 qui est une RNA méthyltransférase va venir modifier l’extrémité 3’ en effectuant une 2’-O-methylation (Horwich et al. 2007 ; Saito et al. 2007 Figure 12-A). Cette modification est, selon les espèces, également présente sur les siRNAs mais pas sur les miRNAs (Horwich et al. 2007). Néanmoins, l’importance de cette modification reste incertaine car en contexte mutant pour le gène Hen1, il n’y a pas de phénotype particulier détecté (Horwich et al. 2007 ; Saito et al. 2007). Il a été observé un biais de séquences des piRNAs chargés par Piwi et Aub. En effet, la majorité des piRNAs chargés par Piwi et Aub ont un Uracile en position 1 à l’extrémité 5’ (Brennecke et al. 2007 ; Figure 12). A ce jour ce biais n’est pas expliqué. Il est possible que cela provienne du clivage de Zucchini qui cliverait préférentiellement après une uridine ou des protéines PIWI qui se fixerait préférentiellement à un pré-piRNA commençant par une uridine. Cette dernière hypothèse est supportée par des travaux sur les protéines ARGONAUTE qui montrent que le site actif de fixation d’ARNs nécessite une spécificité du nucléotide en 5’ (Frank et al. 2010 et 2012).
A l’issue de l’ensemble de ces modifications, nous obtenons donc des piRNAs primaires chargés par Piwi ou Aub. D’autres protéines identifiées lors de cribles se trouvent être impliquées dans la biogenèse des piRNAs primaires mais leur rôle précis est encore inconnu. C’est le cas de la protéine Armitage qui est une RNA helicase (Tomari et al. 2004 ; Saito et al. 2010 ; Olivieri et al. 2010 ; Figure 6). En contexte mutant pour Armi, la localisation de Piwi est affectée mais pas celle d’Aub et AGO3 (Saito et al. 2010). Ces données suggèrent que la protéine Armi serait impliquée dans le chargement des pré-piRNAs par Piwi. Cette fonction serait possible grâce à la présence de Vreteno, une protéine à domaine Tudor dont la perte de fonction conduit à une perturbation de la production des piRNAs primaires et la localisation de Piwi, Aub et AGO3 (Olivieri et al. 2010 ; Handler et al. 2011 ; Zamparini et al. 2011 ; Figure 6). Cette protéine interagit physiquement avec Piwi, Aub et AGO3 et Armitage dans les cellules nourricières. (Figure 6). L’ensemble de ces données permet de proposer que ces protéines sont impliquées dans le recrutement de Piwi et Aub sur les pré-piRNAs.
Comme nous venons de le voir, il existe de nombreuses inconnues dans cette partie de la biogenèse des piRNAs. Cependant, le fait que les piRNAs primaires soient chargés par Piwi ou Aub va orienter leur devenir. En effet, les piRNAs chargés par Piwi vont être capables de rentrer dans le noyau pour aller agir sur les copies euchromatiques des ETs ou sur les clusters producteurs de piRNAs (Figure 12-B). Par contre, les piRNAs chargés par la  protéine Aub vont rentrer dans une boucle d’amplification appelée cycle Ping-Pong et générer les piRNAs secondaires (Figure 12-B).

La biogenèse des piRNAs secondaires

Les piRNAs primaires chargés par Aub vont permettre la production de piRNAs secondaires à l’aide de la troisième protéine PIWI : AGO3. Ces deux protéines Aub et AGO3 sont spécifiques de la lignée germinale et sont localisées dans le nuage (Brennecke et al. 2007). Elles possèdent toutes les deux une activité endonucléase tout comme Piwi.
Cependant, l’activité endonucléase de Piwi n’est pas indispensable (Saito et al. 2006 et 2009 ; Brennecke et al. 2007 ; Gunawardane et al. 2007 ; Li et al. 2009 ; Malone et al. 2009 ; Figure 6, 12 et 13). Ce sont les activités endonucléases d’Aub et AGO3 qui permettent de générer les piRNAs secondaires.

Table des matières

Introduction générale
I/ Les éléments transposables
1/ La classification des éléments transposables
A/ Les ETs de classe I
B/ Les ETs de classe II
II/ Régulations des éléments transposables par les petits ARNs non-codants
1/ Régulations germinales par les piRNAs : petits ARNs non-codants de la lignée germinale chez la drosophile
A/ Présentation de la lignée germinale de la drosophile
a/ L’appareil génital de la drosophile femelle
b/ L’unité structurelle de développement pour l’ovocyte : le follicule ovarien
c/ Le développement de la chambre ovarienne
B/ Biogenèse des piRNAs germinaux
a/ Les clusters de piRNAs et la production des transcrits précurseurs de piRNAs
b/ La biogenèse des piRNAs primaires
c/ La biogenèse des piRNAs secondaires
C/ Répression des ETs euchromatiques par les piRNAs germinaux
a/ Régulation Post-transcriptionnelle : PTGS
b/ Régulation transcriptionnelle : TGS
c/ Maintien des clusters de piRNAs
2/ Régulations somatiques par les petits ARNs non-codants chez la drosophile
A/ Biogenèse des piRNAs somatiques folliculaires
a/ Les clusters de piRNAs et la production des transcrits précurseurs de piRNAs
b/ Biogenèse des piRNAs primaires somatiques
B/ Mécanismes de répression folliculaires des éléments Transposables..
C/ Biogenèse des siRNAs : petits ARNs non codants dans les tissus somatiques
D/ Mécanisme de répression somatiques des éléments Transposables
E/ siRNAs produit par les clusters de piRNAs
F/ piRNAs like dans les tissus somatiques
III/ Clusters de piRNAs transgéniques : outils pour l’étude de l’émergence de loci producteurs de piRNAs
1/ Mécanisme de répression de transgènes par les piRNAs : Le Trans-Silencing Effect (TSE)
2/Propriétés génétiques et moléculaires du TSE
IV/ Phénomène de paramutation lié à l’effet maternel du TSE
1/ Définition de la paramutation
2/ La paramutation au locus Booster B1 chez le maïs
3/ La paramutation au locus Kit chez la souris
V/ Présentation du sujet
Résultats
VI/ Emergence d’un locus producteur de piRNAs par un phénomène de paramutation
1/ Présentation des lignées T-1 et BX2
2/ Article: « Paramutation in Drosophila linked to emergence
of piRNA-producing locus » (de Vanssay et al. 2012)
3/ Extra-View: « piRNAs and epigenetic conversion in Drosophila. »
VII/ Etudes des propriétés fonctionnelles et moléculaires d’un locus producteur de piRNAs paramuté
1/ « Paramutation in Drosophila involves the primary and secondary piRNA pathways and can induce a rapid spreading within a locus for piRNA production capacity »
VIII/ Emergence d’un locus producteur de piRNAs par un phénomène environnemental
1/ Activation du locus BX2 par la chaleur
2/ Propriétés fonctionnelles et moléculaires d’un locus activé par la chaleur
Discussion
Conclusion
Références Bibliographiques

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