Enjeux de la fabrication additive avec des matériaux cimentaires pour la construction

Enjeux de la fabrication additive avec des matériaux cimentaires pour la construction 

Afin de répondre aux besoins toujours grandissants de l’industrie de la construction, de nouvelles techniques voient le jour. La fabrication additive se voit portée à l’avant de la scène pour ses capacités à fabriquer des formes complexes rapidement et de façon précise, le tout contrôlé par ordinateur. De plus, ces techniques ont le potentiel de supprimer l’utilisation de coffrages et avec elle les heures de travail nécessaires à leur fabrication et leur mise en œuvre. Étant donné que l’utilisation de coffrages représente 35% à 60% des coûts de l’ossature d’une structure en béton (Lloret et al., 2015) et que, bien que parfois réutilisables, ceux-ci finiront irrémédiablement par être des déchets, une solution sans coffrages semble indiquer une amélioration sur le plan économique et écologique. Il en va de même sur le plan humain où les difficultés et les dangers pour la santé seraient supprimés durant cette phase de la production. Ainsi l’industrie du futur semble s’orienter sur la numérisation des techniques de fabrication (Bos, Wolfs, Ahmed, & Salet, 2016; De Schutter et al., 2018).

Prenant son inspiration dans les techniques d’impression appliquée aux matériaux plastiques, l’impression 3D de matériaux cimentaires pour la construction est tout d’abord pensée par déposition de matière via une buse et un système de pompage du matériau de construction à travers des tuyaux. Cette méthode d’extrusion est la plus utilisée dans les publications scientifiques à ce jour. C’est le cas des travaux de plusieurs auteurs (Kazemian et al., 2017; Le, Austin, Lim, Buswell, Gibb, et al., 2012; Le, Austin, Lim, Buswell, Law, et al., 2012; Panda, Paul, Mohamed, Tay, & Tan, 2018; Perrot, Rangeard, & Courteille, 2018; Weng, Li, Tan, & Qian, 2018; Zhang, Wang, Lin, & Zhang, 2018; Y. Zhang et al., 2018). Enfin, dans leur travail (Rouhana, Aoun, Faek, El Jazzar, & Hamzeh, 2014) proposent l’étude d’une technique d’extrusion en montrant son potentiel à réduire les déchets et le temps lors de la construction d’un bâtiment.

La fabrication additive par extrusion peut alors être utilisée pour imprimer des parois entre lesquelles un vide est laissé afin de venir couler du béton  ou encore des parois avec une structure interne . Les travaux de Gosselin et al. (2016), Bos et al. (2016), Buswell, Leal de Silva, Jones, et Dirrenberger (2018) ou encore Gosselin et al. (2016) présentent des états de l’art et donnent un aperçu de ces techniques de fabrication en proposant des exemples issus de l’industrie et de travaux de recherche.

Une autre technique consiste à injecter un liant sur un lit de sable déposé entre chaque nouvelle couche. Cette technique permet dans une certaine mesure la fabrication de structure en porte à faux, puisque le sable non lié sert de support aux couches supérieures. En effet, la pièce est retirée du lit de sable à la fin de la fabrication. Cette technique a été développée par Cesaretti, Dini, De Kestelier, Colla, et Pambaguian (2014) et se nomme D-Shape.

Enfin, le « Slipforming », utilisée principalement pour la fabrication de silo ou autres structures de grande envergure est remis au goût du jour à plus petite échelle. Les innovations en robotiques permettent de repenser l’utilisation de coffrages coulissants en une buse mise en mouvement suffisamment lentement pour laisser le temps au matériau de supporter la structure apparaissant au fur et à mesure au dessus (Lloret et al., 2015). Cette technique permet de s’affranchir des problèmes liés à l’impression par extrusion comme une mauvaise liaison entre les différentes couches imprimées.

Lorsqu’il est question d’un matériau destiné à l’impression 3D, les caractéristiques liées à son état frais sont déterminantes pour sa mise en œuvre, trop fluide lors de l’extrusion il ne maintiendra pas la forme qu’on souhaite lui donner ou s’effondrera (Le, Austin, Lim, Buswell, Gibb, et al., 2012) et trop sec il risque de boucher la buse et de ne pas permettre la liaison entre les différentes couches imprimées (Le, Austin, Lim, Buswell, Law, et al., 2012; Panda et al., 2018). Enfin, contrairement à l’impression de polymère thermoplastiques qui durcit en se refroidissant, les matériaux cimentaires durcissent suite aux réactions chimiques qui ont lieu pendant l’hydratation du ciment. Dans un premier temps, le matériau reste dans un état thixotropique, c’est la période dormante. Durant cette période les liaisons que le matériau crée sont considérées réversibles (Roussel, Ovarlez, Garrault, & Brumaud, 2012). Il peut ainsi développer une résistance au repos, mais retrouver son état fluide lorsqu’une contrainte lui est appliquée (Qian & Kawashima, 2018). Finalement les réactions d’hydratation s’accélèrent et entraînent la prise du ciment (Marchon et al., 2018). Pour l’impression 3D, contrôler les propriétés à l’état frais et l’hydratation du ciment semble alors être un enjeu prépondérant. Pour cela le recours aux adjuvants devient indispensable.

Adjuvants pouvant être mis à profit 

Le béton étant le matériau de construction le plus utilisé au monde avec environ trois tonnes par personne et par an il doit être fabriqué au regard des enjeux apportés par le développement durable. Avec approximativement 8% des émissions globales de CO2 (John, Matschei, & Stephan, 2018), l’industrie du ciment est une des principales causes de pollution due au secteur de la construction. Réduire la quantité de ciment dans la formulation d’un béton est une réponse à cet enjeu. En effet de cette façon le matériau atteindra de meilleures performances ce qui permettra la diminution de la quantité nécessaire pour répondre au même cahier des charges. Ainsi, une réduction du rapport eau sur ciment permet de répondre aux conditions de performances à l’état durci tout en diminuant la quantité de ciment utilisée au total dans la fabrication d’une structure. En effet en optimisant la forme la quantité de matière première nécessaire sera réduite. Les propriétés à l’état frais sont alors touchées. C’est aussi le cas lorsque des ajouts cimentaires sont utilisés pour remplacer une partie du ciment. La fumée de silice par exemple a tendance à augmenter la stabilité du mélange (Benaicha et al., 2015). Cette section présente des adjuvants pouvant avoir une influence sur les propriétés des matériaux cimentaires à l’état frais. Elle ne prétend pas être une liste exhaustive. De plus, l’intérêt porté ici est avant tout aux propriétés apportées la pâte de ciment à l’état plastique. Leurs effets sur la chimie de la pâte de ciment seront réservés à d’autres étudiants.

Les superplastifiants 

Les superplastifiants (SP) sont des adjuvants ayant pour but premier de rendre le mélange plus maniable. Ils deviennent indispensables lorsque le rapport eau/liant est grandement réduit (Gosselin et al., 2016). Un SP a finalement pour but de rendre le mélange plus fluide donc de diminuer sa viscosité ainsi que son seuil de cisaillement (Banfill, 2006). L’utilisation de SP pour l’impression 3D offre l’opportunité de diminuer la quantité de liquide tout en conservant la même maniabilité (Marchon et al., 2018). Les caractéristiques mécaniques du mélange sont alors améliorées tout en permettant son extrusion. Différentes forces sont en jeux lorsque l’on parle de particules, il s’agit des forces colloïdales. Pour de courtes distances, les grains de ciment vont être attirés les uns vers les autres de par les forces de Van der Waals et vont former des amas appelés des « flocs ». Afin d’empêcher ces phénomènes, il est nécessaire de forcer ces grains à s’éloigner. Les SP jouent ce rôle en étant adsorbés à la surface des grains avec une charge négative, ils augmentent les effets électrostatiques et créent des encombrements stériques répulsifs. Ceci a pour effet d’éloigner les grains de ciment les uns des autres (Hot, 2013).

Les accélérateurs

Les accélérateurs permettent d’accélérer la prise de la pâte de ciment. En augmentant la vitesse d’hydratation du ciment, il est commun d’avoir une diminution de la durabilité et de la résistance à long terme de l’ouvrage. Les molécules pour accélérer la prise sont à base de sels de calcium. De plus son usage avec un superplastifiant ou un entraîneur d’air n’a pas d’effet négatif connu (Aïtcin, 2016). Quand il s’agit de béton projeté, des sels d’aluminium et des silicates sont utilisés, qui ont des mécanismes d’action différents. En effet lors de la projection du béton, celui-ci est fluide et on souhaite qu’il devienne assez visqueux pour former une couche solide homogène rapidement. Les produits les plus intéressants sont les sels d’aluminium sans alcali, ceux-ci ne posent pas de problème de santé et sécurité de plus ils n’entraînent pas de réduction de la résistance sur le long terme d’après (Aïtcin, 2016). Ces accélérateurs, appelés accélérateurs de durcissement, permettent donc l’augmentation rapide de la résistance du matériau cimentaire par opposition aux accélérateurs de prise qui eux vont .

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTÉRATURE
1.1 Enjeux de la fabrication additive avec des matériaux cimentaires pour la construction
1.2 Adjuvants pouvant être mis à profit
1.2.1 Les superplastifiants
1.2.2 Les accélérateurs
1.2.3 Les cristaux de CSH
1.2.4 Les agents modificateurs de viscosité
1.2.5 Les nano argiles
1.3 Principes de la rhéologie
1.4 Le seuil d’écoulement dynamique
1.4.1 Principe de fonctionnement d’un rhéomètre concentrique
1.4.2 Détermination du seuil d’écoulement dynamique
1.4.3 Système de mesure à bille (BMS)
1.4.4 Les modèles rhéologiques adaptés aux matériaux cimentaires
1.5 Le seuil d’écoulement statique
1.5.1 Mesure par taux de cisaillement constant
1.6 Mesure par variation du couple
1.7 Détermination de la viscosité
1.8 Analyse des propriétés des matériaux cimentaires à l’état frais
1.8.1 Test d’affaissement du béton
1.8.2 Test d’affaissement de la pâte de ciment ou « mini-slump »
1.8.3 Le test d’étalement pour le mortier
1.9 Impression 3D avec les matériaux cimentaires
1.9.1 Formulations pour les matériaux cimentaires d’impression 3D
1.9.2 Critère et analyse d’imprimabilité
1.9.3 Exemple d’applications
1.10 L’apprentissage automatique ou « machine learning »
1.11 Résumé de la revue de la littérature
CHAPITRE 2 ARTIFICIAL NEURAL NETWORK FOR THE PREDICTION OF THE FRESH PROPERTIES OF CEMENTITIOUS MATERIALS
2.1 Avant-propos
2.2 Résumé
2.3 Abstract
2.4 Introduction
2.5 Materials and methods
2.5.1 Materials and admixtures properties
2.5.2 Mixing procedure
2.5.3 Mini-slump test
2.5.4 Rheological measurements
2.5.4.1 Calibration
2.5.4.2 Procedure for cement pastes
2.5.5 Mix design of the cement pastes
2.5.6 Yield stress measurement of the mortar
2.5.7 Analysis of the results
2.5.8 Artificial Neural Network (ANN)
2.6 Results and discussion
2.6.1 Viscosity of cement paste
2.6.2 Specific Rebuilding Energy (SRE)
2.6.3 Dynamic yield stress and mini-slump
2.6.4 Critical yield stress determination
2.6.5 Yield stress prediction with Artificial Neural Network
2.6.6 Mini-slump prediction with ANN
2.6.7 Simulation of new mixes and correlation between the neural networks
2.7 Summary and conclusions
2.8 Acknowledgment
CONCLUSION

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