Le manioc, quelques connaissances de base
Définitions
Plusieurs définitions ont été données au manioc mais l’idée générale est la même. Selon le dictionnaire universel : le manioc est un arbrisseau, cultivé dans les pays tropicaux dont les feuilles sont comestibles et la racine tubérisée riche en amidon est consommée bouillie ou séchée. Il fournit divers produits : farine, semoule (attiéké, gari), fécule (tapioca), pâtes etc.
D’après certains auteurs, le manioc est une euphorbiacée pluriannuelle du genre Manihot dont la distribution à l’état sauvage est limitée au continent Américain. Le nom de l’espèce cultivée est Manihot esculenta. Le manioc mesure 1 à 4 mètres de hauteur et présente plusieurs types architecturaux liés à ses modes de ramifications. La tubérisation de ses racines se déroule sur des cycles de 6 mois à 3 ans suivant la variété et le milieu. La plante est adaptée à des conditions écologiques et des modes de culture très diversifiés et manifeste une forte variabilité dans les caractères de reconnaissance variétale. (Charrier André et Al. 1997).
Origine et culture
Le manioc (Manihot esculenta) est originaire d’Amérique latine et des régions australes et occidentales du Mexique.
Il a été introduit en Afrique vers la fin du 16 ième siècle et s’y est promptement adapté aux pratiques culturales traditionnelles des régions tropicales.
Ce tubercule féculent pousse sous les tropiques presque exclusivement dans les plaines les plus chaudes (zone ne dépassant pas 2000 m d’altitude) et bénéficiant de précipitations annuelles comprises entre 200 et 2000 mm. Il ne supporte pas le gel mais s’adapte bien à la sécheresse.
C’est ainsi qu’il est devenu un aliment de base des populations tropicales.
Importance et utilisations
Le manioc est, en général, directement utilisé pour l’alimentation humaine dans les pays producteurs après des transformations de caractère encore artisanal. Il se consomme simplement bouilli, lorsqu’il s’agit de variétés douces, mais, plus généralement, et en particulier lorsqu’il s’agit de maniocs amers, sous forme des diverses préparations que l’on appelle en Afrique : gari, attiéké, chikwangue, foufou, et en Amérique, d’où elles sont originaires : farinhade raspa ou kwako, farinha de agua, etc.
Le manioc est également utilisé dans l’alimentation animale. Dans les pays producteurs, on donne aux animaux des épluchures ou du manioc sec sous différentes formes, cossettes ou farines. Mais c’est dans des pays non producteurs, et en particulier en Europe, que l’utilisation du manioc pour l’alimentation animale s’est fortement développée. C’est cet usage qui est à l’origine de la quasi- totalité des échanges internationaux des produits qu’il donne.
Le commerce international de manioc sec sous forme de farines ou plus généralement de comprimés représente entre 10 et 15% de la production mondiale. Ce commerce peut être schématisé comme suit (1984) :
• importations en milliers de tonnes d’équivalents de racines fraîche totales : 14 500 dont Europe occidentale (CEE) : 12 200.
• exportations en milliers de tonnes d’équivalent de racines fraîche totales : 14 500 dont Thaïlande : 13 600
On voit que la plus grande partie du commerce mondiale du manioc sec se fait entre la Thaïlande et l’Europe. Les autres pays exportateurs sont l’Indonésie dont la part dans le commerce mondiale tend à décroître et des pays d’Amérique latine pour de faibles quantités. Les autres importateurs sont de plus en plus asiatiques et notamment la Chine. Les autres produits du manioc, donnant lieu à des échanges internationaux, sont essentiellement la fécule (ou amidon) et les fécules transformées comme le tapioca ; ils ne représentent que 1 à 2% de la production mondiale.
Avec le développement économique des pays producteurs, on doit s’attendre à ce que ces pays industrialisent de plus en plus leurs fabrications autrefois artisanales, sans doute pour satisfaire des demandes extérieures, mais surtout et de plus en plus pour fournir leur propre marché intérieur en produits alimentaires de qualité.
Le développement économique crée de nouveaux consommateurs et une demande pour de nouveaux produits; il tend aussi à diminuer le nombre des producteurs et oblige ceux-ci à accroître leur travail. Pour cela ils doivent cultiver mieux, utiliser des techniques plus efficaces et être bien informés de celles-ci. (P.silvestre, 2000).
La plante et ses principales caractéristiques
la classification botanique
Le manioc est un arbuste, une plante à tubercules présentant du latex dans toutes ses parties. Il a une structure chromosomique de 2n = 36. Les tubercules se développent par épaississement secondaire des racines adventives. C’est au niveau des ces dernières que se trouvent les organes de réserve du manioc. Généralement, les tubercules sont au nombres de 5 à 10 par plante, de forme cylindrique et se terminant en pointe avec 15 à 100 cm de longueur. Leur peau présente une couleur variable (blanche, brune, rose ou rouge) et une chair blanche jaune ou rougeâtre avec un axe principal. Les branches présentent des cicatrices foliaires noueuses. Les feuilles sont à pétioles de 15 à 30 cm, de couleur verte ou rouge, à limbe palmipartite à 3 ou 9 lobes. Les graines sont ellipsoïdes, caroncules de 1 cm. Les fruits sont dans une capsule déhiscente à ailes minces avec une inflorescence de fleurs mâles et femelles.
la croissance et le cycle végétatif
la croissance
Chez le manioc, la floraison est fréquente et régulière pour quelques couvertures, mais rare ou non existante dans d’autres. Il est monoïque et dans chaque inflorescence les fleurs femelles s’ouvrent d’abord, alors que les fleurs mâles ne s’ouvrent qu’environ une semaine plus tard.
Les boutures plantées sous des conditions favorables se développent et produisent des racines adventives au bout d’une semaine. Dans les semaines suivantes, le système racinaire se développe.
La superficie foliaire approche de son maximum en quatre – cinq mois. La floraison débute quelques semaines après la plantation, en fonction du couvert végétal et du milieu. Elle se poursuit de façon intermittente pendant le reste de la vie de la plante. La formation de tubercules se fait quelques sept semaines après la plantation. Le processus de tubérisation implique le déclenchement d’un épaississement secondaire au niveau de quelques racines adventives jusqu’alors fibreuses de nature. Les racines se gonflent et rapidement la majeure partie du renflement de la racine est occupée par la matière qui forme la chair du tubercule. Chez la plupart des couvertures végétales, le nombre de racines adventives qui se développent en tubercule est restreint. Et au delà des six à neuf premiers mois suivant la plantation, il ne se formera plus de racines tubéreuses. Généralement, moins de dix racines fibreuses par plante deviennent tubéreuses, mais continuent leur fonction d’absorption nutritive. La racine tubéreuse du manioc ne présente ni bourgeons, ni yeux et il ne s’en développera aucun sur quelque partie que ce soit du tubercule.
les différentes variétés de manioc
Plusieurs variétés sont cultivées dans le monde. On en compte plus d’une centaine dans certaines régions. Selon leur teneur en toxine, on distingue deux types de manioc cultivés à travers le monde. Il s’agit du manioc doux et du manioc amer : le manioc doux : il est caractérisé essentiellement par une faible teneur en acide cyanhydrique (HCN) comprise entre 0,5% et 0,8% et donne des rendements pouvant atteindre 25 à 30 tonnes/ha.
Ce type de manioc présente un cycle court, c’est-à-dire que la maturation se fait à partir de 6 mois jusqu’à 9-12 mois. le manioc amer : il est caractérisé par des teneurs plus élevées en acide cyanhydrique (HCN) souvent compris entre 0,8% et 1,5%, mais il est plus productif avec des rendements pouvant atteindre 40 tonnes/ha et contient des réserves plus importantes en amidon. Ces caractéristiques le destinent aux transformations industrielles. Enfin, il est important de signaler que, quelque soit le caractère réputé doux ou amer des variétés de manioc, leurs racines contiennent toutes une quantité de HCN. D’autre part, l’acide cyanhydrique ne se trouve jamais à l’état libre mais combiné avec un sucre sous forme d’un composé insoluble et non toxique (glucoside cyanogénétique). En fonction de la teneur en HCN provenant de la décomposition enzymatique (hydrolyse) du glucoside cyanogénétique, les variétés peuvent être classées en quatre groupes. Variétés douces (0,003 à 0,013% de HCN ou 3 à 13 mg / 100 g de pulpe fraîche) ; variétés peu amères (0,003 à 0,018% de HCN) ; variétés amères (0,008 à 0,04% de HCN) et variétés très amères (0,0275 à 0,050% de HCN). (Thottapilly et al. 1992)
la composition chimique de la plante
Le manioc contient beaucoup de fécule, peu de protéines, presque aucune matière grasse, peu de vitamines et beaucoup d’eau. Néanmoins, il a une teneur en protéines extrêmement basse et sa consommation en tant que nourriture de base en aliment carbohydratés s’associe communément à une déficience en protéines. La composition des racines de manioc présente une assez grande variabilité en fonction des clones, de la période de culture et des techniques culturales utilisées. Il a été rapporté que les teneurs en matières sèches, protéines, cendres, amidon et cellulose sont élevées lorsque la récolte est faite en saison sèche (mars) sur des parcelles irriguées qu’en hivernage (août).
les cochenilles farineuses
La cochenille farineuse est un insecte de la famille des arthropodes. Elles sont recouvertes de soies blanchâtres à aspect cotonneux. Les cochenilles farineuses sont considérées comme d’importants ravageurs d’arbres fruitiers, de plantes ornementales ainsi que de plantes vivrières. La cochenille farineuse présente des sensilles olfactives et gustatives sur les antennes et le labium. Cet insecte s’attaque à l’extrémité des jeunes rameaux qui se déforment et dépérissent. Les feuilles sont petites et vrillées, et les entre-noeuds courts.
Le comportement alimentaire de la cochenille farineuse a permis de confirmer le caractère phloémophage de la nutrition, avec un trajet principalement intercellulaire des stylets avant l’atteinte du ploéme. Lors de la progression des stylets dans les tissus de la plante, la salive de l’insecte dégrade la pectine des parois pecto-cellulosiques et n’agit pas sur la cellulose. L’insecte prélève la sève et affaiblit la plante jusqu’à ce qu’elle dessèche complètement. Cet insecte se propage notamment par les vents, des branches infectées ou par les feuilles de manioc cueillis comme légumes. La cochenille farineuse cause des dommages aux récoltes surtout durant la saison sèche que durant la saison pluvieuse. De plus, elle nuie aux plantes en sols pauvres et secs, sablonneux qu’en sols humides et plus fertiles. Elle est aussi la cause de la réduction du rendement de la plante en feuilles et en racines (forte diminution de la production de tubercules).
les maladies
la mosaïque africaine
La mosaïque africaine a été décrite pour la première fois en 1894 et se retrouve en Afrique partout où le manioc est cultivé. C’est une maladie qui est causée par des germinivirus transmis par un insecte vecteur : la mouche blanche (Bemesia tabaci, Gennadius) qui les transmet aux boutures.
La maladie est observée au niveau des jeunes feuilles. Ces dernières présentent des tâches jaunes ou vert pâle, avec un recroquevillement de celles-ci qui restent petites avec une déformation du limbe foliaire. Les tubercules diminuent de volume et sont moins nombreux ; le diamètre de la tige et la taille de la plante sont également réduits (rabougrissement de la plante dans certains cas). La mosaïque africaine se propage soit par l’intermédiaire de la mouche blanche (Bemesia tabaci) qui se nourrit sur les plantes qui inocule les plantes saines, soit par des boutures infestées et utilisées pour planter un nouveau champ.
La fréquence de la maladie dépend de la quantité d’inoculum qui, à son tour, dépend du nombre et de l’activité des vecteurs (Bemesia tabaci). L’infestation varie avec le degré de résistance des plants individuels ce qui fait que les symptômes de la maladie diminuent au fur et mesure que les plants avancent en âge. La température influence l’apparition des symptômes de la mosaïque africaine (pour des températures élevées, on a un arrêt du développement ; mais pour une baisse des températures il y a la présence des symptômes de la maladie). En cas d’infestation par la mouche blanche, l’importance des dégâts dépend du stade de croissance de la plante au moment de la contamination. Il n’y a pas de diminution significative du rendement lorsque l’infection a lieu plus de 120 jours après la plantation, mais les cultures à partir des boutures issus de ces plants infestés auront bien sûr des rendements médiocres.
la bactériose
La bactériose du manioc a été introduite en Afrique au début de ce siècle, en provenance du Brésil. Ses atteintes sont restées limitées et sporadiques jusqu’à la flambée de 1970, au Zaïre. Depuis, la maladie a gagné rapidement de nombreuses régions où elle cause aujourd’hui d’énormes dégâts. La sensibilité du manioc à la bactériose diffère d’une variété à l’autre. C’est actuellement l’une des maladies les plus graves du manioc en Afrique. Elle est causée par une bactérie. Celle ci provoque sur les feuilles des taches angulaires qui brunissent. Avec l’extension de la maladie à toute la plante, des lésions chancreuses apparaissent sur les tiges dont les extrémités se dessèchent et meurent.