Expériences antérieures et modèles d’ouverture de l’ADN à travers un nanopore

Expériences antérieures et modèles d’ouverture de l’ADN à travers un nanopore

L’ADN double brin est trop large pour rentrer dans le canal transmembranaire de l’alpha hémolysine. Toutefois, deux études publiées en 2001 ont permis de montrer que l’ADN double brin peut passer au travers du nanopore s’il est dénaturé [129, 54]. Dans ces études, de courtes molécules d’ADN double brin (hairpins de 3 à 8 paires de bases, totalement hybridées sans partie simple brin) sont transloquées à travers l’hémolysine. La translocation de ces molécules s’effectue en deux étapes (voir figure 3.1) :Après une durée variable, de quelques millisecondes à quelques secondes, un court pic de diminution de courant est observé avant que le courant électrique ne retrouve son niveau initial. Cette étape est interprétée comme la dénaturation de l’ADN suivie de la translocation de la molécule sous forme simple brin à travers le canal transmembranaire de l’alpha hémolysine. Le temps de résidence de l’ADN dans le vestibule augmente avec la longueur d’appariement de l’ADN. Ce temps est d’une milliseconde en moyenne pour les duplex de 3 paires de bases, et de quelques secondes pour les duplex de sept paires de bases. Cette cinétique de dissociation de courtes molécules d’ADN peut être décrite par une réaction à une étape, où le temps de résidence correspond au saut à travers une barrière ∆G Dans ces expériences, les molécules ne pénètrent pas dans le canal de l’alpha hémolysine, elles restent dans la partie vestibulaire de l’alpha hémolysine (cf figure 3.1). Le courant élec- trique permet de sonder le passage de la molécule, mais la différence de potentiel n’exerce pas ou peu de force sur la molécule. L’accord entre les temps de dissociation calculés dans les expériences et en solution [115, 133] suggère de plus qu’il n’y a pas d’interaction majeure entre l’ADN et l’alpha hémolysine.

Il est difficile d’ouvrir des molécules de ce type plus longues que 8 paires de bases : le temps moyen de dézippage devient trop grand. En effet, ces ADNs sont “coupés nets”, c’est- à-dire qu’ils n’ont pas d’extrémité simple brin qui dépasse contrairement à ce qui est montré figure 2.1. Le potentiel appliqué n’est pas traduit en terme de force appliquée sur l’ADN. Dans les expériences suivantes, une “poignée” simple brin dépasse des molécules d’ADN, ce qui permet d’ouvrir des molécules plus longues et de contrôler en partie la force à l’origine de la dénaturation de l’ADN.Si l’on ajoute une poignée simple brin le long des duplex d’ADN, il est possible d’ouvrir de plus longs duplex d’ADN [86, 117, 93]. La partie double brin de la molécule est coincée dans le vestibule tandis que la poignée, généralement un complexe poly A de 30 paires de bases, s’insère dans le canal transmembranaire de l’alpha hémolysine, là où le champ électrique est le plus intense (voir figure 2.1). Une force mécanique est alors exercée sur le duplex via la force électrophorétique exercée sur la poignée, comme montré sur la figure 2.1 en introduction.

Les cinétiques d’ouverture des duplex d’ADN peuvent être interprétées selon un modèle de Kramers dont la barrière énergétique effective de dézippage ∆Gest biaisée par la différence de potentiel appliquée de part et d’autre de la membrane. Il est nécessaire d’introduire un coefficient Q, qui représente la charge effective de la portion d’ADN “tirée” par la différence de potentiel. Cette charge effective est de l’ordre de l’électron (1.13e, cf [86]). Si l’on suppose que la force est appliquée uniquement sur les 12 paires de bases de la poignée simple brin d’ADN située dans la partie transmembranaire du pore, là où le champ électrique est le plus intense, nous trouvons une charge effective par paire de base de 0.1e. Cette valeur relativement faible montre que la charge négative de l’ADN dans le canal est contrebalancée par des contre-ions positifs et par les groupements polaires de l’alpha hémolysine.La distribution des temps de passage est approximativement exponentielle dans toutes ces expériences. Finalement, elles peuvent s’intégrer dans un modèle de Kramers modifié, où le temps de dézippage est le temps de passage d’une barrière d’énergie ∆G. Cette barrière est réduite par le voltage U, proportionnellement à la charge effective Q.

 

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