Facteurs de risques des complications postopératoires

Les complications infectieuses et respiratoires sont les principales complications rencontrées après chirurgie thoracique, survenant dans environ 25 % des cas [91]. Ces complications sont bronchiques, parenchymateuses pulmonaires, ou pleurales.

Les principaux facteurs de risque associés aux complications postopératoires infectieuses ou respiratoires sont :
• l’âge élevé,
• la présence de comorbidités associées, notamment cardiovasculaires et neurologiques, et une altération de la fonction respiratoire préopératoire.
• Certains autres facteurs de risque sont plus discutés, comme la poursuite du tabagisme ou la présence d’une chimiothérapie préopératoire.

Pour cette dernière, la littérature est parsemée de séries plus ou moins grandes, plus ou moins anciennes, avec des protocoles de chimiothérapie souvent différents. Néanmoins, la présence d’une chimiothérapie préopératoire ou d’une radiochimiothérapie semble augmenter le risque de complications infectieuses et respiratoires.

En cas de pneumonectomie, les complications respiratoires étaient plus fréquentes chez les patients ayant reçu une chimiothérapie, sans différence en termes de mortalité [91], alors que cette dernière était plus élevée en cas de radiothérapie préopératoire [92, 93].

L’encombrement bronchique est le « primummovens » de la survenue de complications plus graves telles que pneumopathie ou insuffisance respiratoire aiguë.

Dans une série de 266 patients, Stephan et al. [91] retrouvaient trois éléments prédictifs de développement de complications postopératoires de la chirurgie thoracique:
• un score anesthésique élevé (score ASA ≥ 3), traduisant l’état clinique du patient et ses comorbidités ;
• un temps opératoire long (≥ 80 min), traduisant la complexité du geste chirurgical ;
• la nécessité de ventiler mécaniquement le patient plus de 48 heures en postopératoire.

La survenue de complications en postopératoire était associée à une surmortalité. Dans une étude prospective, Bonde et al. [95] ont montré que la poursuite du tabagisme, la présence d’une cardiopathie ischémique, d’une bronchite chronique (selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé [OMS]), ou un antécédent d’accident vasculaire cérébral étaient les principaux facteurs de risque de développer un encombrement bronchique après chirurgie thoracique. La mortalité postopératoire était accrue chez ces patients.

De nombreux autres facteurs de risque ont été identifiés dans diverses séries de la littérature [94]. Il existe une relation étroite entre l’étendue de la résection pulmonaire et la morbimortalité postopératoire. Une pneumonectomie entraîne une chute des volumes pulmonaires de 35 % environ, et une lobectomie de 10 à 15 % au maximum [95]. Pour une lobectomie, la video-assisted thoracoscopic surgery (VATS) entraîne des modifications postopératoires de la fonction respiratoire moindres qu’une thoracotomie, aussi bien en postopératoire précoce que 3 mois après l’intervention [10].

Enfin, La survenue des complications postopératoires est influencée par de multiples facteurs qui peuvent être liés au terrain des patients, à l’étiologie, à la chirurgie et à l’anesthésie. L’analyse de ces facteurs permet de proposer une meilleure prise en charge périopératoire des patients à risque et de diminuer la morbidité et la mortalité.

Les facteurs de risque lies au terrain

Age
Il existe de nombreuses controverses quant à l’implication de l’âge dans la survenue des complications respiratoires postopératoires. Un âge avancé était responsable d’une augmentation du risque des complications postopératoires [101]. Ceci s’explique par le fait que chez les sujets âgés, l’hypoxémie est plus prononcée et le syndrome restrictif postopératoire se normalise plus lentement. Ainsi il y’a une diminution de compliance pariétale et des propriétés élastiques du parenchyme pulmonaire, de la capacité résiduelle fonctionnelle, des réflexes de protection et de la réponse ventilatoire au CO2, une augmentation du volume de fermeture et de la sensibilité aux morphiniques. [6] Une étude menée par Gerald et al en 2006 indique que l’âge avancé est un important facteur de risque des complications postopératoires et ceci, indépendamment des conditions de comorbidité. [106] Licker et al ont aussi mentionné que l’âge avancé est associé à une morbidité et mortalité postopératoire élevée. [16] D’autres études, par contre, considère que l’âge en lui même n’apparaît pas comme un facteur de risque indépendant des complications postopératoires, si l’on tient compte des comorbidités qui y sont associées, et ne doit pas être pris seul en compte pour récuser un patient .

Dans notre étude, l’âge moyen des patients était de 44,7 ans. Un âge supérieur à 60 ans est observé chez 26,3% des patients dont 21,9% ont présenté des complications respiratoires postopératoires, il influence le taux de ces complications. Nos résultats rejoignent les données de la littérature.

Bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO)
La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladie chronique et lentement progressive caractérisée par une obstruction des voies aériennes non ou incomplètement réversible. [10]Les phénomènes inflammatoires entreprenant les voies aériennes participent à la définition de la maladie dont l’agent causal principal est le tabagisme. Le terme de BPCO regroupe deux entités bien connues : la bronchite chronique et l’emphysème. La spirométrie, et plus particulièrement le volume expiré maximal en une seconde (VEMS), permet d’évaluer la gravité de la BPCO.

De nombreuses études ont démontré que les BPCO constituaient le principal facteur de risque de complications postopératoires, multipliant par 1.79 le risque.

Kroenke a mentionné que la BCOP est un facteur de risque qui augmente significativement le taux de complications et de mortalité postopératoires.

Dans notre étude, 61 patients étaient porteurs de BPCO, soit un pourcentage de 15,3% dont 15 patients sont compliqués, soit un pourcentage de 24,5%. Elle augmentait l’incidence des complications postopératoires de la chirurgie thoracique, ce qui rejoint les données de la littérature.

Tabagisme :
Le tabagisme est un facteur augmentant de manière importante le risque de complications respiratoires postopératoires. Ceci a été démontré dans plusieurs études prospectives et pour divers types de chirurgie. [114,115] Il est important de noter que le tabagisme augmente le risque postopératoire, même en l’absence de pathologie respiratoire associée. Plusieurs études ont démontré que le tabagisme augmente de manière importante le risque de complications pulmonaires postopératoires en chirurgie thoracique.[116] Le tabagisme chronique entraine une hyperplasie des glandes bronchiques, augmente la sécrétion du mucus et la résistance des voies aériennes et du volume de fermeture, et altère la clairance mucociliaire et le transport de l’oxygène.

Dans notre étude, 110 patients étaient connus tabagiques chroniques, soit 27,5%, dont 24 patients ont présenté des complications postopératoires soit 21,8 %. Le tabagisme accroît considérablement le risque de ces complications. Nos résultats rejoignent les données de la littérature.

Tuberculose pulmonaire
La tuberculose pulmonaire, peut par la fibrose et par la création d’emphysèmes paracicatriciels et paralésionnels, être la cause d’une BPCO, et augmenter ainsi le risque de complications respiratoires postopératoires.

De nombreux auteurs ont conclu que la tuberculose pulmonaire augmente le risque de survenue des infections pulmonaires postopératoires et d’insuffisance respiratoire aigue.

Dans notre série, la tuberculose pulmonaire a été observée chez 74 patients soit 18,5 %, dont 17,6% ce sont compliquée, ce pourcentage peut être expliqué par notre contexte endémique. Elle influence la survenue des complications postopératoires en chirurgie thoracique.

L’obésité :
Il existe de nombreuses controverses quant à l’implication de l’obésité dans la survenue de complications postopératoires en chirurgie thoracique. L’obésité est définie par un Indice de Masse Corporelle (IMC) > 30 kg/m2. C’est un véritable problème de la santé publique en occident et en USA. [119] L’obésité peut causer un syndrome restrictif et une réduction des volumes pulmonaires. Ainsi, elle entraine une diminution de la capacité résiduelle fonctionnelle (surcharge pariétale thoracique et augmentation de la poussée abdominale). L’infiltration musculaire graisseuse serait à l’origine d’une diminution de la force musculaire avec diminution du volume courant, augmentation de la fréquence respiratoire, voire diminution de la capacité inspiratoire. Le volume de fermeture reste normal tandis que la capacité résiduelle fonctionnelle est abaissée.

Table des matières

INTRODUCTION
PATIENTS ET MÉTHODES
I. Critères d’inclusion
II. Critères d’exclusion
III. Critères d’évaluation
RÉSULTATS
I. Données épidémiologiques
1. Fréquence
2. Age
3. Sexe
II. Terrain des patients
1. Terrain respiratoire
2. Terrain cardio
-vasculaire
3. L’obésité
4. Le diabète
III. Diagnostic étiologique
1. Examens diagnostiques
2. Étiologies
IV. Évaluation des patients
1. Évaluation respiratoire
2. Évaluation cardio
-vasculaire
3 . Type de chirurgie thoracique
V. Anesthésie
1. Score d’ASA
2. Type d’anesthésie
3. Intubation
4. Types d’analgésie
5. Ventilation pulmonaire
6. Le temps opératoire
VI. Séjour en réanimation
1. La ventilation mécanique postopératoire
VII. Prise en charge postopératoire
1. Antibiothérapie
2. Drainage thoracique postopératoire
3. Kinésithérapie respiratoire
4. Analgésie postopératoire
VIII. Évolution
1. Durée d’hospitalisation
2. Évolution favorable
3. Évolution défavorable
DISCUSSION
I. Généralité
II. Données épidémiologiques
III. Les complications de la chirurgie thoracique
1. Les complications préopératoires
2. Les complications postopératoires
IV. Facteurs de risques des complications postopératoires
1. Les facteurs de risque lies au terrain
2. Les facteurs de risque étiologiques
3. Les facteurs de risque lies à la chirurgie
4. Les facteurs de risque lies à l’anesthésie
V. Prise en charge postopératoires
1. Prise en charge postopératoires précoce
2. Traitement des complications respiratoires
3. Traitement des complications cardio-vasculaire
4. Traitement des complications infectieuses
5. traitement des infections pariétales
VI. Prévention
1. Préparation préopératoire
2. Les stratégies préopératoires
3. Les stratégies postopératoires
CONCLUSION

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