Interventions pharmacologiques, un modèle curatif

Interventions pharmacologiques, un modèle curatif µ

La médecine moderne a développé des procédés utiles pour réduire la douleur. Malgré leur efficacité, deux problèmes découlent de leur utilisation: (1) la dépendance des patients face aux procédés et (2) les complications. Le modèle médical pour réduire ou éliminer la douleur à l’accouchement consiste en une méthode pharmacologique à partir d’une procédure analgésique appelée péridurale. L’analgésie lombaire par péridurale, lorsqu’administrée dans des conditions idéales, permet de réduire de 100% la douleur dans 85% des cas [15]. Le taux de morbidité et de mortalité étant très faible ( <1: 200 000), cette intervention est considée sécuritaire [17].

La dépendance 

Du point de vue de la parturiente, peu de préparation préalable à la péridurale est nécessaire. Cette intervention agit à titre curatif pour réduire la douleur et la femme n’est pas enrichie d’un nouveau mode de gestion de la douleur qu’elle pourra intégrer à son quotidien. Pour réduire sa douleur, elle dépend entièrement de la méthode pharmacologique et sa désolation est grande lorsque la péridurale échoue ou ne donne pas les résultats escomptés [48]. De plus, une fois qu’elle est administrée elle réduit de façon importante le rôle du partenaire.

Les complications 

Selon Paull [56], les complications qui peuvent cependant survenir et leur incidence sont: l’hypotension (<2%), les convulsions (1: 20 000), les maux de tête (25-80% ), les maux de dos (5-30%), les vomissements et nausées Gusqu’à 30%), une dépression respiratoire néonatale Gusqu’à 60%) et maternelle (1: 1000). La péridurale semble également avoir un effet sur le déroulement du travail et de l’expulsion. Son rôle précis n’est pas clair [17]. Lowensohn [35] a remarqué une dépression significative de l’utérus chez les femmes ayant reçu une péridurale, pouvant ainsi ralentir ou cesser le travail. Lorsque qu’administrée pendant la deuxième phase de l’ accouchement (phase active) elle semble diminuer la volonté et la capacité des femmes à expulser et peut empêcher ou ralentir la descente du foetus dans l ‘utérus et sa rotation finale. Ceci augmente les interventions vaginales (forceps, épisiotomie) et les accouchements par césarienne [17]. Pauli [56] affirme que peu importe comment est envisagée cette intervention, dès qu’elle a lieu, il ne s’agit plus d’un accouchement normal. La femme ne peut plus se déplacer aussi facilement et est confinée au lit, à l’intraveineuse, à un monitoring foetale, à des prises de tension artérielle régulières et possiblement à un cathéter. Il considère que cette intervention ne doit être dictée que par des besoins médicaux et non dans le seul but de rendre plus confortable la parturiente. Il suggère que les intervenants favorisent l’utilisation de techniques qui minimisent les interventions technologiques compliquées. Alors que certains Centres hospitaliers offrent systématiquement à la parturiente une péridurale et ont un taux d’utilisation élevé (Hôpital Royal Victoria pour 1993-94: 54,6%) [61], d’autres préfèrent que la femme utilise des moyens non pharmacologiques pour soulager la douleur. C’est notamment le cas des Centres hospitaliers régionaux où s’est déroulée cette recherche: Centre hospitalier HotelDieu d’Amos pour 1993-94: 0,7%; Centre hospitalier de Rouyn-Noranda: 4,3% [61].

Interventions non pharmacologiques, un modèle préventif

La base des interventions en période prénatale réside dans la prévention et la promotion de la santé. Les apprentissages faits par le couple pour s’ajuster à la période de transition que sont la grossesse et l’accouchement les aident à mieux se préparer aux changements de rôles auxquels ils feront face après la naissance. Les interventions préventives visant la structuration cognitive et l’apprentissage de techniques pour moduler la douleur par des procédés non pharmacologiques sont essentielles pour augmenter leur pouvoir d’auto-contrôle face à la douleur en général et pour favoriser la participation du père pendant la grossesse et l’accouchement. Pour être efficaces, ces techniques doivent être pratiquées et maîtrisées par le couple avant la naissance. Les programmes préventifs prénatals favorisent la promotion de la santé en intervenant sur la personne sans symptôme dans le but d’augmenter ses compétences et habiletés à gérer les stress de la vie [63]. L’accent est mis soit sur la modification d’un milieu générateur de stress, soit sur le renforcement de l’aptitude de l’individu à faire face au stress [12]. La perspective écologique explique le phénomène de l’adaptation et de l’inadaptation bio-psycho sociale, i.e. la capacité de l’être humain à s’adapter aux sources de stress. Elle justifie les interventions préventives en mettant l’accent sur la gestion des transitions et des tâches que le couple et la famille auront à faire dans le but de s’ajuster aux exigences du nouveau cycle de vie familiale [8,13].

Selon ce modèle, le changement crée un stress, qui demande une adaption et un changement de rôles. Si cette adaptation s’opère de façon efficace, l’estime de soi de la personne sera meilleure et la perception qu’elle se fait de la vie sera plus positive [13].

Lorsque le couple a développé des stratégies pour gérer ces changements et sources de stress (par des programmes de prévention primaire en prénatalité, par exemple), il saura s’adapter aux changements de rôles. Il s’agit pour la femme d’être capable de gérer la douleur et l’événement de stress qu’est l’accouchement et pour le partenaire, de savoir accompagner et soutenir efficacement sa partenaire lors de l’accouchement. L’estime de soi est renforcée (je suis fière de moi et de mon ou ma partenaire) et la perception de l’ événement est davantage positive. La manière dont les parents sauront s’ajuster psychologiquement après la naissance sera donc en partie déterminée par la manière dont la première partie de la vie familiale a été vécue [ 40]. Le Ministère de la Santé et des Services Sociaux [60], renforce et favorise le même concept quand il met en relation la préparation adéquate du couple à la naissance et la possibilité qu’aura l’enfant de forger avec ses parents et son entourage un environnement qui lui permettra de grandir et de développer toutes ses potentialités. Il soutient que si les pères sont intégrés dans la préparation prénatale, ils risquent d’être davantage impliqués dans les soins de l ‘enfant et de la famille après l ‘accouchement.

Programmes d’interventions en prénatalité 

Les années 1960 sont marquées par des changements importants dans la façon d’accoucher des femmes. Elles veulent de l’information sur la grossesse et l’accouchement, être davantage consultées, impliquées et éveillées et réclament la présence de leur partenaire [9,49]. C’est par le biais des cours de préparation à la naissance (childbirth training) que les couples tentent de développer leurs compétences et habiletés [23].

Chaque continent a développé une méthode pour aider les couples à se préparer à la naissance et à gérer la douleur. La méthode la plus connue et répandue aux États Unis et en Europe est sans doute celle du Dr Lamaze, suivie de celle du Dr Dick Read, les tenants de l’accouchement sans douleur [73]. Le Dr Lamaze, originaire de France, s’est inspiré, au milieu des années 1940, des études du Russe, Velvovsky [68]. Ravi des résultats obtenus par ce scientifique, il entreprend d’enseigner aux femmes françaises et à leur partenaire, les rudiments d’une méthode visant le développement de l’auto-contrôle par la structuration cognitive, la connaissance de l’anatomie féminine, les respirations, les exercices et la relaxation. Marjorie Karrnel [31] a fait connaître cette méthode aux américains qui lui donnèrent comme nom la méthode psychoprophilactique. Depuis, la France a remplacé cette méthode par la sophrologie [29]. Au Québec, les CLSC ofrent des rencontres prénatales axées sur les habitudes de vie (alimentation, soins du bébé, changements physiologiques, interventions médicales). À part la méthode Bonapace de préparation à la naissance, aucune autre méthode structurée vise la réduction de la douleur lors de l’accouchement.

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I PROBLÉMATIQUE
1.1 Interventions pharmacologiques, un modèle curatif
1.2 Interventions non pharmacologiques, un modèle préventif
1.3 Programmes d’interventions en prénatalité
1.4 Retombées des programmes prénatals préventifs
1.5 Bases neurophysiologiques des procédés non pharmacologiques
1.6 Mesure de la douleur
1.7 Traitement proposé
1.8 But de la recherche
CHAPITRE II MÉTHODOLOGlE
2.1 Sujets
2.2 Schéma quasi-expérimental
2.3 Entraînement
2.4 Mesure de la douleur
2.5 Analyses statistiques
CHAPITRE III RÉSULTATS
3.6 Approche conventionnelle versus P.A.N
3.7 La douleur et les stades du travail
3.8 Effet de la parité sur la perception de la douleur
3.9 Les deux composantes de la douleur
3.10 Les interventions médicales
CHAPITRE IV DISCUSSION
4.1 Prédiction et variabilité de la douleur
4.2 Approche conventionnelle versus P.A.N
4.3 Utilité de la recherche
4.4 Limites de la recherche
4.5 Conclusion
CONCLUSION

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