La définition du programme de réflexion

La définition du programme de réflexion

Le programme de réflexion, proposé par Resnick dans son ouvrage intitulé « Toward the thinking curriculum : Current cognitive research », est considéré comme une stratégie moderne qui se caractérise par un traitement éducatif permettant aux apprenants de développer leurs habiletés mentales : « treatment of subject matter is tailored to engage students in processes of meaning construction and interpretation that link symbols to their referents» (Resnick, 1989 : 13).

Le programme de réflexion est une méthode d’enseignement qui vise à développer les habiletés de réflexion. Il se fonde sur des stratégies d’enseignement afin de faire réfléchir les apprenants en traitant à la fois le contenu (avec tout ce qu’il comporte de réflexion en langue, des concepts, des réalités, des problèmes à résoudre, etc.), et les processus (avec tout ce qu’ils comportent de réflexion sur la langue cible, des compétences socioculturelles et sociolinguistiques, de pensée critique et créative, etc.). Il s’agit d’une démarche de perfectionnement des aptitudes qui sont nécessaires pour réaliser une fonction ou un rôle particulier. Cette démarche consiste à développer chez les apprenants l’estime de soi, le sentiment de confiance et de contrôle. Ce programme se fonde aussi sur des opérations cognitives qui dépassent les simples mémorisations des informations linguistiques, et franchissent les applications mécaniques des règles grammaticales. 

L’importance du programme de réflexion

 La maîtrise d’une imagination symbolique représente un facteur essentiel pour réaliser l’équilibre psychosocial dans la mesure où les activités symboliques renforcent la découverte d’une nouvelle culture attachée à la langue cible (Durand, 1964 : 115) : le programme de réflexion favorise la maîtrise de l’imagination symbolique qui implique une pratique active dans des contextes variés. Au sein du programme de réflexion, l’acquisition et la construction des connaissances ne s’opposent pas aux processus de réflexion, mais ils sont concomitamment enseignés. 

Les caractéristiques du programme de réflexion

 L’être humain agit généralement en fonction des problèmes qui se posent à lui (Meyer, 1982 : 122) : tout usage du langage est réponse à un certain problème, même lorsqu’il s’agit de l’exprimer. En ce sens, la communication orale s’effectue généralement en fonction de résolutions des problèmes, soit en expliquant le problème aux autres, soit en exprimant la résolution. Bien que le fonctionnement linguistique tout entier s’organise autour de l’évidence du moi (Lafont, 1978 : 178), et que le locuteur est le seul qui possède l’origo de l’acte d’expression orale, le sens du message relie les représentations du locuteur au monde grâce aux processus de réflexion. Le programme de réflexion ne sépare pas le contenu des matières de leurs processus d’enseignement. Le contenu est enseigné à travers des processus utilisés dans la vie quotidienne (par exemple, la prise de décision, la résolution des problèmes et l’évaluation, etc.). Le programme de réflexion favorise les sentiments de l’efficacité et de la confiance chez les apprenants à travers des contenus qui permettent d’autoréguler leur propre apprentissage. À cet égard, on apprend au moment où on planifie, évalue, analyse, raisonne, construit un sens ou résout des problèmes. Le programme de réflexion se caractérise, comme le montre Resnick (1989), d’un apprentissage profond. C’est-à-dire que les apprenants ont l’occasion de développer une profonde compréhension du contenu et des processus en apprenant la façon d’organiser les informations. Le programme de réflexion se concrétise par des tâches proches de la vie quotidienne : il incite les apprenants à une réflexion holistique proche de la vie quotidienne à travers des processus significatifs qui favorisent la prise de décision, la résolution des problèmes, et des stratégies qui développent les compétences communicatives. 

Les habilités de réflexion

 Une habileté se définit, selon le dictionnaire Larousse (2014 : 564), comme une « qualité de ce qui est fait avec adresse, intelligence ; ingéniosité ». Il s’agit de la capacité à exécuter un acte avec adresse et intelligence (Lipman, 2006 : 160). Apprendre consiste à maîtriser une habileté cognitive (Poirier Proulx, 1999 : 74). Les habiletés de réflexion s’identifient en deux niveaux (Romano, 1992) : un niveau micro représenté par les habiletés fondamentales, et un niveau macro qui s’effectue par les habiletés métacognitives. Ces habiletés se fonctionnent en harmonie et en processus liés les uns aux autres (voir figure 10).La figure ci-dessus montre que les habilités de réflexion d’ordre supérieur commencent à partir du niveau macro. Or, « metacognition refers to higher order thinking skills that involve active control over the thinking processes involved in learning » (Petroselli, 2008 : 64). Une habileté métacognitive se définit « as consisting of the awareness and executive control of cognition » (Taupin, 2008 : 9). Il s’agit d’ensemble des processus de réflexion qui représente les habiletés d’ordre supérieur (Brookhart, 2010 : 39- 60) : la pensée analytique, critique et créative. L’élève devient actif lorsqu’il analyse, critique et crée (Conklin, 2012 : 21). En ce sens, les habiletés métacognitives, étant d’ordre supérieur, permettent aux apprenants de gérer les habiletés fondamentales (Sorel, 1994 : 330). 

 La pensée analytique

L’existence d’un problème signifie qu’il y a un écart entre une situation présente et un but à atteindre (Proulx, 1999 : 27) : il s’agit de savoir-faire intellectuel qui repose sur des processus cognitifs. Or, les affordances qui désignent toutes les possibilités d’action sur les objets, et qui représentent des indices, aident à traiter les informations posées, et trouver finalement des solutions (Richard, 2004 : 244). D’ailleurs, l’erreur n’est pas forcement due à l’inattention des apprenants, mais plutôt à une interprétation incorrecte (Resweber, 1996 : 103) : le transfert analogique, qui consiste à transférer des connaissances obtenues d’un problème que l’on a déjà résolu afin d’en servir pour résoudre un autre nouveau, représente une stratégie de résoudre des problèmes en essayant d’apprendre par erreurs. À cet égard, la prise de décisions vise à adopter des idées précises ou sélectionner un type d’action parmi différents alternatives (Costermans, 1998 : 40). La prise de décisions consiste à la construction des réseaux sémantiques : grâce aux stratégies organisationnelles de réseaux sémantiques, on peut comprendre comment les concepts sont liés les uns aux autres, et comment on peut organiser les informations lors d’apprentissage (Reed, 1999 : 319). Selon Lafortune, et al, (2000), la pensée analytique implique la prise de conscience et incite l’apprenant à prendre en charge le contrôle de ses processus mentaux en effectuant un dialogue intérieur ou un processus d’auto-questionnement. Elle aide à comprendre la dynamique de l’apprentissage (Paris et Ayres, 2000 : 172). Elle exploite toutes capacités des élèves à comprendre les savoirs acquis et saisir leurs applications (Ouellet, 1983 : 379). 

La pensée critique

 La pensée critique est une pensée raisonnable qui repose sur des raisons acceptables afin d’atteindre et obtenir des conclusions logiques (Stratton, 1999 : 10). Elle est une pensée réflexive qui demande une forte implication personnelle, et repose sur une recherche active gérée par la conscience que l’on gère pour réaliser un objectif ou s’orienter vers une décision (Pigallet, 1998 : 127). De plus, elle désigne une activité intellectuelle consciente qui vise à savoir les causes et les conséquences des pensées (Pallascio et Lafortune, 2000 : 3). Elle s’inscrit dans une perspective intra-subjective où on accepte toute interprétation et toute opinion sans les mettre en sarcasme (Daniel et al, 2005 : 16). En ce sens, le développement de la pensée critique signifie l’émancipation et l’autonomie chez les apprenants dans la mesure où on vise à améliorer leurs expériences individuelles à travers de construction des connaissances, et non pas de leurs transmissions. 

La pensée créative

 La pensée créative s’appuie sur une capacité de restructurer les idées et de prendre des risques dans un état d’alternance entre la divergence des idées et leur intégration (Henri et Lundgren-Cayrol, 2001 : 147). Elle représente une technique qui vise à contextualiser et conceptualiser les sens (Henri et Lundgren-Cayrol, 2001). C’est pourquoi, la pensée créative ne suit pas des règles déjà déterminées, elle suit plutôt des règles générales que les apprenants doivent les individualiser dans la mesure où il faut d’abord analyser la situation de communication orale, puis réfléchir afin d’inventer des nouvelles idées, ensuite faire un tri ou sélectionner les idées qu’on estime qu’elles seront plus utiles et écarter finalement les autres qui sont moins utiles (Oléron, 1964). La créativité consiste davantage à inciter les apprenants à adopter de nouvelles façons d’agir (Micaëlli et Fougères, 2007 : 27).  

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