LA GALE AU COURS DE LA DEPIGMENTATION ARTIFICIELLE

LA GALE AU COURS DE LA DEPIGMENTATION
ARTIFICIELLE

La gale est une ectoparasitose de contamination interhumaine due à Sarcoptes scabiei, variété hominis. C’est une maladie cosmopolite et contagieuse. La prévalence mondiale est estimée à plus de 300 millions de cas par an [24]. Au cours de ces dernières années, une recrudescence de la gale est signalée un peu partout dans le monde. Ainsi, dans une revue récente, il est estimé une augmentation de l’incidence de la gale de 0,27% à 46% [47]. Dans les pays industrialisés, les épisodes épidémiques se manifestent surtout dans des institutions (collectivités, établissements de soins, maisons de retraite, … etc.) [6]. Dans les pays en voie de développement, elle constitue une priorité de santé publique au vu des prévalences élevées et des complications. C’est l’un des principaux motifs de consultations dans les centres de santé de soins primaires [41]. Dans ces pays, 4 à 27% de la population serait contaminée et même beaucoup plus chez les enfants [51]. Au Sénégal, au premier semestre de l’année 2010, 9559 cas de gale ont été enregistrés dans tous les centres hospitaliers de Dermatologie de la région de Dakar. Le manque d’hygiène, la promiscuité et le retard à la consultation entraînent la pérennisation de la gale et des complications. Le terrain est également un facteur favorisant important car pouvant déterminer la forme clinique. La gale norvégienne survient le plus chez les sujets immunodéprimés : infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) ou le Human T-cell Lymphotropic Virus de type 1 (HTLVI), traitement par des corticoïdes), les personnes âgées, grabataires, les lépreux et chez certains terrains favorisant (alcoolisme, diabète, troubles psychiatriques et neurologiques) [25]. La gale profuse est souvent la conséquence d’un diagnostic tardif, parfois d’un déficit immunitaire (VIH) voire de traitements par des corticoïdes locaux ou généraux. Des cas de gale sur des patients traités par une corticothérapie locale ont été décrits dans la littérature [68,62]. C’est une circonstance favorisante bien connue mais il s’agit de corticoïdes utilisés dans un but thérapeutique. Par ailleurs, l’utilisation à visée cosmétique de produits dépigmentants est une pratique courante au Sénégal où la prévalence est estimée à 52,7% [63]. A l’institut d’hygiène Sociale de Dakar sur une période de 10 mois en 2013, 300 cas de gale avaient été diagnostiquées soit une fréquence hospitalière de 20%, dont 20% sur un terrain de dépigmentation artificielle [66]. 3 Aussi dans une étude rétrospective de 10 ans en 2001, à l’hôpital Aristide Le Dantec, 126 cas de gale ont été enregistrés sur 475 cas de complications infectieuses liées à la DA, soit un pourcentage de 26,5% dont un cas de gale norvégienne avec un taux de 17,6% de complications [42]. Dans une autre étude portant sur dermocorticoïdes et DA, on retrouvait 23,46% de cas de gale [39]. Au Togo, 59% de cas de gale avaient été notés parmi les complications infectieuses de la DA [85]. Elle est également majorée dans une étude où plus de la moitié des patientes (58%) pratiquant la Dépigmentation Volontaire (DV) en était atteint à Dakar avec des lésions volontiers profuses, disséminées, crouteuses et hyperpigmentées [66]. C’est au vu de la fréquence, de la sévérité des formes cliniques impliquant des difficultés thérapeutiques, de la rareté des publications, qu’une étude sur la gale au cours de la DA a été réalisée. L’objectif était de déterminer les aspects cliniques, paracliniques, thérapeutiques et d’évaluer le coût du traitement. 

La gale est une ectoparasitose due à un acarien Sarcoptes scabiei, variété hominis, parasite humain obligatoire. Elle se caractérise par un prurit à recrudescence nocturne souvent à caractère familial entrainant des lésions de grattage non spécifiques à topographie évocatrice (espaces interdigitaux, emmanchures des aisselles, mamelons, ombilic, fourreau de la verge, faces internes des cuisses, fesses) et par des lésions spécifiques liées à la présence du sarcopte souvent difficile à repérer (sillons). C’est une maladie contagieuse. Par ailleurs elle est considérée comme une infection sexuellement transmissible mineure. La gale est une cause considérable de morbidité et de mortalité de par ses effets directs et ses complications [40]. Elle met en jeu le pronostic fonctionnel du patient avec un prurit souvent nocturne, insomniant et collectif qui entrave fortement la qualité de vie. Pour le pronostic vital, il est principalement mis en jeu par le risque de la glomérulonéphrite aiguë post-streptococcique et par l’augmentation du risque de maladie rénale chronique [26]. La gale a aussi un impact sur le plan économique du fait du coût élevé du traitement d’autant plus qu’elle survient dans un contexte de familles nombreuses. C’est pour relever tous ces défis qu’une alliance mondiale pour le contrôle de la gale a été mise sur pied : International Alliance for the Control of Scabies (IACS) en 2012. Elle regroupe des experts de diverses nationalités et se fixe comme missions : l’éradication de la gale. Ce réseau qui regroupe des chercheurs, cliniciens et experts de santé publique a obtenu une avancée notable qui est la reconnaissance de la gale comme Maladie Tropicale Négligée par l’Organisation Mondiale de La Santé (OMS). 2. Parasitologie [12, 22] La classification systémique de l’agent responsable de la gale est la suivante : – Règne : Animal. – Embranchement : Arthropodes. – Sous-embranchement : Chélicérates. – Classe : Arachnides. – Ordre : Acariens. – Sous-ordre : Acaridés. 6 – Famille : Sarcoptidés – Genre : « Sarcoptes ». – Espèce : «Sarcoptes scabiei ». – Sous-espèce : « Sarcoptes scabiei » variété « hominis ». Le sarcopte est un minuscule acarien non visible à l’œil nu. Il existe plusieurs sousespèces de ce parasite dont une seule est spécifique de l’homme : Sarcoptes scabiei var. hominis. Le corps du sarcopte est ovale, sans séparation entre le thorax et l’abdomen. L’adulte et la larve sont dotés respectivement de 4 et 3 paires de pattes. La femelle est la plus grosse et mesure en moyenne 0,35 mm de long alors que le mâle ne mesure que 0,25 mm et les œufs 0,15 mm. Figure 1 : Photo d’un Sarcoptes scabiei var. hominis [InVS 2008] Le seul réservoir de germe pour Sarcoptes scabiei est l’Homme, même s’il peut temporairement être porté par le chien. La survie du sarcopte hors de son hôte est difficile et ne peut durer que 1 à 4 jours. Une température basse et une humidité 7 élevée favorisent la survie du parasite. Il meurt quand la température est supérieure à 55°C (avec une survie de 10 minutes à 50°C) [61]. La gale est due à la présence de l’acarien femelle dans l’épiderme. La femelle adulte creuse un sillon dans la couche cornée de l’épiderme. L’orientation des ornements tégumentaires de la femelle sarcopte lui interdit tout mouvement de recul : elle est condamnée à avancer dans une galerie qui reste béante derrière elle et qui contient des excréments et des œufs (figure 2). Figure 2 : Galerie creusée par la femelle du sarcopte dans l’épaisseur de l’épiderme [Larousse internet] Après l’accouplement, la femelle commence à pondre dès le quatrième jour. Elle progresse de 2 à 3 millimètres par jour et pond 2 à 3 œufs par jour. Les œufs vont éclore pour donner naissance à des larves hexapodes très actives. Ces larves 8 subissent trois mues pour donner une nymphe octopode [90] puis un adulte en 10 à 20 jours. Les jeunes adultes remontent à la surface cutanée et s’y accouplent. Après l’accouplement, les femelles recommencent un nouveau cycle sur le même hôte ou sur un nouvel hôte [10]. Les mâles meurent après l’accouplement. Les formes infestantes sont les larves et les nymphes qui vivent à la surface de la peau mais aussi et surtout les femelles récemment fécondées qui n’ont pas encore pénétré dans l’épiderme. Le sarcopte femelle est un acarien cytophage, il se nourrit de lymphe ainsi que de cellules kératinocytaires les plus superficielles, dont il aspire le cytoplasme grâce à ses pièces buccales. 3. Données épidémiologiques 

Prévalence et incidence

 La gale est une maladie ubiquitaire. Elle touche des individus des deux sexes, de tous les âges, de tous les milieux sociaux et sur tous les continents [24]. Le nombre exact de personnes infectées par la gale n’est pas connu mais est estimé à plus de 300 millions de cas par an dans le monde [47]. Dans les pays en voie de développement, 4 à 27% de la population serait contaminée et même beaucoup plus chez les enfants [51]. Au Sénégal, l’incidence de la gale est peu appréciée. Elle n’est pas à déclaration obligatoire. En 2002, une prévalence hospitalière de 25% avait été retrouvée. A l’institut d’hygiène Sociale de Dakar sur une période de 1 an 300 cas de gale étaient diagnostiquées soit une fréquence hospitalière de 20% [63]. Dans les communautés aborigènes australiennes où la gale est endémique, sa prévalence était en 2000, de 50% chez les enfants et 25% chez les adultes [31]. En France, les études épidémiologiques qui ont été réalisées portent généralement sur des populations bien spécifiques. Une étude a montré que plus de 56% des patients en situation de précarité, se rendant en consultation de dermatologie de l’hôpital Saint-Louis, étaient atteints de gale [1]. En 1996, une autre étude a estimé que plusieurs centaines d’établissements pour personnes âgées avaient été confrontés à ce problème en une année en France [6]. Entre 2005 et 2009, en s’étant basé sur les ventes annuelles nationales de benzoate de benzyle et 9 d’ivermectine, le nombre annuel moyen de cas de gale était estimé à 337-352 cas/100000 habitants .

Facteurs favorisants

La gale est une pathologie cosmopolite qui touche toutes les populations mais certaines personnes semblent y être plus sensibles. 

 Facteurs génétiques

 Pour certains auteurs, il existerait une réelle prédisposition génétique à être infecté par le sarcopte. En effet, l’antigène HLA (Human Leucocyte Antigen) A11 serait significativement plus présent chez les personnes ayant la gale que dans le reste de la population [18]. Une hypothèse sur le fait que les personnes allergiques aux acariens soient plus susceptibles à l’infection par le sarcopte a également été émise. 

 Age 

Toutes les tranches d’âge peuvent être touchées. Cependant, dans les pays en développement, la prévalence chez les enfants est bien plus élevée que dans la population générale. Une étude récente faite à Dakar a retrouvé sur une période de 6 mois, une prévalence de 50% chez les enfants de 0 à 15 ans sur les 478 cas de gale enregistrés. Entre janvier 2006 et décembre 2010, une étude faite au département de Dermatologie-Vénérologie de Bangui a diagnostiqué 376 cas de gale soit une prévalence hospitalière de 5,88% dont 33% dans la tranche d’âge de 0-9 ans [59]. Dans les pays développés, la recrudescence de la gale est majoritairement observée chez les personnes âgées dans les maisons de retraites et les établissements de santé.

Conditions de vie 

Dans l’inconscient collectif, la gale reste une maladie liée à la précarité, à la promiscuité et au manque d’hygiène. En effet, la maladie est très fréquente chez les Sans Domicile Fixe (SDF). Une étude a montré que plus de 56% des patients en situation de précarité, se rendant en consultation de dermatologie de l’hôpital SaintLouis, étaient atteints de gale [1]. Le prurit était révélateur d’une gale ou d’une pédiculose voire des deux. Le manque d’hygiène, la promiscuité et le retard à la consultation entraînent la pérennisation de la gale et des complications. Ainsi une 10 étude faite sur les dermatoses des enfants vivants dans les écoles coraniques (Daaras) au Sénégal, où les conditions socio-économiques sont précaires, a retrouvé une prévalence de 13,33% [76]. Une bonne hygiène ne protègerait pas de la contamination par le sarcopte, elle peut donner une sémiologie atypique (gale des gens propres). Cependant, la promiscuité, le partage des lits et des habits sont des facteurs favorisants .

Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
REVUE DE LA LITTERATURE
1. Définition
3. Données épidémiologiques
3.1 Prévalence et incidence
3.2 Facteurs favorisants
3.2.1 Facteurs génétiques
3.2.2 Age
3.2.3 Conditions de vie
3.2.4Terrain
3.2.5 Transmission
3.2.5.1Transmission directe
3.2.5.2 Transmission indirecte
3.2.6 Les cycles épidémiques
3.2.7 Variations saisonnière
4. Physiopathologie- pathogénie
5. Clinique
5.1 Formes cliniques
5.1.1 Gale sur un terrain de dépigmentation artificielle
5.1.2 Formes symptomatiques
5.1.3 Formes selon l’âge
5.2.1 Complications
5.2.2 Evolution après traitement
6 Diagnostic
6.1 Diagnostic positif
6.1.1 Epidémiologie
6.1.2 Clinique
6.1.3 Paraclinique
6.2 Diagnostic différentiel
6.3 Diagnostic de retentissement
7 Traitement
7.1 Traitement curatif
7.1.1 Buts
7.1.2 Moyens
7.1.3 Indications
7.2. Traitement préventif
7.2.1 Prévention primaire
7.2.2 Prévention secondaire
DEUXIEME PARTIE NOTRE ETUDE
1. Objectifs
1.1 Objectif général
1.2 Objectifs spécifiques
2. Malades et méthodes
2.1 Définition de cas
2.1.1 Cas de gale
2.1.3 Guérison
2.1.4 Cas de récidive
2.2 Cadre d’étude
2.3 Type d’étude
2.4 Population d’étude
2.5 Critères d’inclusion
2.6 Technique de collecte des données
2.7 Outils de collecte
2.8 Ethique
2.9 Saisie et analyse des données
3. RESULTATS
3.1 Caractéristiques générales de notre population d’étude .
3.2 Etude descriptive
3.2.1 Répartition des patientes en fonction du mois de consultation
3.2.2 Répartition des patientes en fonction du lieu de recrutement
3.2.3 Caractéristiques sociodémographiques
3.2.3.1 Répartition des patientes selon l’origine géographique
3.2.3.2 Répartition des patientes selon le lieu de résidence .
3.2.3.3 Répartition des patientes selon l’âge
3.2.3.4 Répartition des patientes selon l’existence de profession
3.2.3.5 Répartition des patientes selon l’activité professionnelle
3.2.3.7 Répartition des patientes selon le nombre d’enfants
3.2.3.8 Répartition des patientes selon le type et le niveau de scolarisation
3.2.3.9 Répartition des patientes selon le niveau socio-économique
3.2.3.10 Répartition des patientes selon les déterminants du niveau socio économique
3.2.4 Enquête cosmétologique
3.2.4.1 Répartition des patientes selon la durée de la pratique de la dépigmentation artificielle
3.2.4.2 Répartition des patientes selon la motivation
3.2.4.3 Répartition des produits selon leurs noms commerciaux, leurs formes galéniques et leurs principes actifs
3.2.4.4 Répartition des patientes selon les types de produits utilisés
3.2.4.5 Répartition des patientes selon le nombre d’applications
3.2.4.6 Répartition des patientes selon l’heure de l’application
3.2.4.7 Répartition des patientes selon le nombre d’applications par période
3.2.4.8 Répartition des patientes selon l’utilisation de survêtements en nylon et de sachets en plastique après application à visée occlusive
3.2.4.9 Répartition des patientes selon le nombre de tubes utilisés par mois
3.2.4.10 Répartition des patientes selon l’application au cours de la grossesse et de l’allaitement
3.2.4.11 Répartition selon le coût de la dépigmentation par mois
3.2.5 Etude clinique
3.2.5.1 Répartition des patientes selon l’intensité du prurit
3.2.5.3 Répartition des patientes selon la topographie du prurit
3.2.5.4 Répartition des patientes selon la durée d’évolution de la maladie
3.2.5.6 Répartition des patientes selon l’itinéraire thérapeutique
3.2.5.7 Répartition des patientes selon le type de lésion
3.2.5.8 Répartition des patientes selon la forme clinique
3.2.5.9 Répartition des patientes selon la présence de complications
3.2.5.10 Répartition des patientes selon les types de complications
3.2.5.11 Répartition selon les autres lésions associées
3.2.6 Etude paraclinique
3.2.7 Retentissement
3.2.8 Traitement
3.2.8.1 Répartition selon le type de traitement
3.2.8.2 Répartition selon le type de cure
3.2.8.3 Répartition selon le délai de guérison
3.2.8.4 Répartition selon la récidive après traitement
3.2.9 Coût du traitement
3.2.9.1 Répartition selon le coût de la consultation
3.2.9.2 Répartition selon le coût des médicaments
3.2.9.3 Répartition selon le coût du transport
3.3 Etude analytique
3.3.1 Relation entre les caractéristiques sociodémographiques et l’enquête cosmétologique
3.3.1.1 Relation entre l’âge, l’origine géographique, le niveau de scolarisation en français, le niveau socioéconomique et la durée de pratique de la DA
3.3.2.2 Relation entre l’âge, l’origine géographique, le niveau de scolarisation en français, le niveau socioéconomique et la forme clinique
3.3.3 Relation entre l’enquête cosmétologique et la clinique
3.3.3.1 Relation entre l’utilisation de dermocorticoïdes et la présence de lésions spécifiques
3.3.3.2 Relation entre l’utilisation de tubes et la présence de lésions spécifiques
3.3.3.3 Relation entre l’utilisation de dermocorticoïdes et la forme clinique
3.3.3.4 Relation entre l’utilisation de tubes et la forme clinique
3.3.4 Relation entre formes cliniques, présence de complications et la durée
d’évolution .
3.3.5 Relation entre délai de guérison et formes cliniques
3.3.6 Relation entre le délai de guérison à J7, J15 et le type de traitement
3.3.7 Relation entre délai de guérison et type de cure
4 Discussion
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES

 

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