La manipulation d’un objet

La manipulation d’un objet

La manipulation d’un objet peut se définir comme étant un mouvement multi-séquentiel effectué par le membre supérieur. Cette interaction se décompose en trois phases ; l’atteinte, la saisie et la manipulation de l’objet à proprement parler [69]. Dans le cadre de cette thèse nous nous intéressons uniquement à cette phase de manipulation à proprement parler, en effet il s’agit de la phase mettant en œuvre les différents chargements mécaniques sur les doigts. ehension L’étude de la préhension en vue de la manipulation d’objets a fait l’objet de nombreux travaux depuis les années 50 [73, 99, 55]. L’ensemble des activités de préhension de la main peut être classifié en seulement deux catégories fondamentales d’interactions. Ces deux catégories ont été identifiées, décrites et analysées pour la première fois par l’anatomiste britannique John Napier en 1956 [73]. Il nomma ces deux catégories prise de force et prise de précision. D’un point de vue anatomique, lors d’une prise de force, l’objet est pincé entre la paume et les doigts en flexion (Figure 1.1 en haut). Lors d’une prise de précision, l’objet est pincé entre les faces palmaires des doigts et du pouce en opposition [73] (Figure 1.1 en bas). Ainsi, contrairement aux prises de force, la paume de la main n’est pas mise en œuvre lors d’une prise de précision, la seconde différence anatomique est l’utilisation systématique du pouce opposable. Le terme ”prise de précision” est parfois utilisé à la place de ”prise de précision du bout des doigts” (fingertip precision grip), c’est-à-dire mettant uniquement en œuvre la face palmaire des phalanges distales des doigts [31]. Ainsi, les prises de précision ne mettent pas en œuvre nécessairement uniquement le bout des doigts, des objets de grandes dimensions seront saisis par une prise de précision mettant en œuvre l’ensemble des doigts et du pouce. Certains types d’actions particuliers mettront également en œuvre le cˆoté du doigt, on peut ici citer l’exemple typique de la prise d’une clef D’un point de vue fonctionnel, ces deux types de prises, de précision et de force, sont différents. Au cours d’une prise de précision, les caractéristiques dominantes seront la mobilité et la précision. Au contraire, la caractéristique dominante des prises de force est l’application d’une force au détriment de la mobilité [70]. Cependant, bien que le meilleur choix de prise pour la manipulation semble être la prise de précision, ce choix sera fonction de l’objet. Pour un objet lourd par exemple l’opérateur mettra en œuvre une prise de force.

 Prises de précision

C’est donc la catégorie des prises de précision, et plus particulièrement les prises de précision du bout des doigts qui constitue ici notre domaine d’étude. Nous allons maintenant étudier ce type de prises plus en détails, en termes de classification, de forces générées, ainsi que de chargements mécaniques. De nombreuses études ont été réalisées visant à caractériser les forces mises en œuvre lors de prises de précision, ces prises mettent en œuvre de la part des doigts un ensemble de forces générant un équilibre mécanique [49]. En terme d’ordre de grandeur, on peut considérer comme pic de force le plus élevé 40N pour la paume et 10N pour le bout du doigt qui permettent de réaliser plus de 90% des activités de manipulation, des forces plus importantes ne peuvent être appliquées pendant une longue période [39, 54]. La classification de la manipulation fait l’objet de très nombreuses publications sous la forme.

Nouvelle proposition de classification

Nous proposons ici une réflexion sur la décomposition en sollicitations élémentaires (compression, cisaillement) des sollicitations complexes issues de la manipulation. L’idée de sollicitation 8 CHAPITRE 1. ETAT DE L’ART simple vise ici à différencier les différentes sollicitations générées par les différents objets, notamment par leur rayon de courbure, que l’opérateur sera amené à manipuler. Influence du rayon de courbure Nous considérons ici un problème simple en 2 dimensions, si l’on considère des objets relativement basiques, définis par la primitive géométrique élémentaire d’une sphère, on peut se ramener ici à la variation d’un unique paramètre, le rayon de courbure. Cette idée est illustrée sur le schéma en figure 1.3, avec une vue en coupe d’un doigt, et différentes allures d’objets qui viendront en contact sur ce doigt. Ce schéma est à titre illustratif, et représente un objet dont la face en contact avec le doigt est plane (s’assimilant ici à un rayon de courbure infini), et un objet dont le rayon de courbure serait très faible (au regard de l’anthropométrie du sujet). On peut ici considérer sans plus de démonstrations que la nature même de la sollicitation mécanique appliquée sur le doigt variera d’un contact plan à une indentation ponctuelle. Si l’on transpose ces observations en 3 dimensions, le cas formulé en 2 dimensions de l’indentation se divise selon que l’objet ait une dimension prépondérante ou non. Dans ce cas l’objet s’apparentera à un corps unidimensionel générant une sollicitation de compression sous ligne de chargement (tableau 1.1). Nous parlons ici de rayons de courbure par volonté d’établir une réflexion très généraliste, un objet ayant une arête saillante est assimilé à un rayon de courbure très faible, et génèrera une sollicitation de compression sous ligne de compression. 

Variation de l’angle de contact

 L’évaluation d’une gamme de sollicitations mécaniques ne se limite pas uniquement à la courbure des faces des objets. En effet, si l’on considère deux objets sensiblement différents ayant cependant des faces planes, la stratégie de saisie mise en œuvre par le sujet influera également sur le contact mécanique. On peut observer en Figure 1.4 deux représentations de prises de manipulation fine issues de Feix et al 2016 [30](l’exemple proposé est ici dépendant de la représentation proposée par l’auteur pour ces deux types de prises, il n’est proposé ici qu’à titre purement illustratif). En poursuivant un raisonnement similaire au paragraphe précédent, on peut considérer le schéma en figure 1.4 représentant ainsi un contact plan pour différents angles de contacts. Ce raisonnement peut également être transposé en 3 dimensions et intégrer une variation de l’angle de contact autour de l’axe longitudinal du doigt, venant solliciter les cˆotés du doigt. 

Applications de ces observations à une classification existante

La classification des prises, notamment des prises de manipulation fine a jusqu’ici été réalisée en termes de stratégie de préhension et de zones anatomiques en contact avec l’objet. Ce critère de classification s’avère pertinent pour les approches de modélisation axées sur la commande et la stratégie de préhension. Cependant, cette classification trouve ici ses limites au vu de notre approche. Nous avons défini précédemment deux paramètres qui nous semblent mieux adaptés à une approche de classification en vue d’une étude purement mécanique. La représentation proposée dans cette figure est uniquement à titre illustratif, les 6 prises issues de Feix et al 2016 [30] que nous avons choisi de représenter ici sont positionnées de manière relative les unes par rapport aux autres, aucune quantification n’est proposée ici. La prise numérotée n˚22 sur la figure 1.5 met en œuvre l’adduction du pouce lors de la prise associée à un objet aux faces planes, cette prise va générer ici un contact plan avec un faible angle de contact. La prise n˚9 palmar pinch, représentant un objet de taille plus modeste ayant également des faces planes (et donc au même niveau que la précédente en terme de courbure), va mettre en œuvre un angle de contact plus important. On peut également observer la prise tip pinch n˚24 qui va générer un angle de contact maximal (au vu des représentations utilisées ici) avec un objet de trés faible rayon de diamètre générant une sollicitation sous ligne de chargement. On retrouve ce même type de sollicitations pour la prise de précision d’un disque (n˚12) avec un angle de contact moins important. On retrouve enfin à un niveau moyen sur l’axe des rayons de courbure, deux prises de sphères mettant en oeuvre des angles de contact très différents. La réflexion présentée ici n’a pas vocation à constituer à ce stade une nouvelle taxonomie des prises de manipulations, elle est de plus très dépendante des représentations proposées par les auteurs dont les travaux sont utilisés ici. Une même prise représentée par un autre auteur mettra un objet sensiblement différent en œuvre par exemple, générant selon nos critères une prise totalement différente. La figure 1.5 est donc présentée ici uniquement dans l’objectif d’illustrer nos propos. Mais, cette analyse nous permet d’exprimer notre problème en termes mécaniques, et de déterminer notre cadre de travail.

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