La place du secteur informel dans le développement

La place du secteur informel dans le
développement

Généralités sur le secteur informel

K. Hart est le premier à prononcer le terme secteur informel en 1971 avant que celui-ci ne soit vulgarisé par le rapport du BIT sur le Kenya en 1972. Il est né d’un constat selon lequel le chômage apparent progressait en proportion de l’écart croissant entre l’augmentation de la population en âge de travailler et la création d’emploi dans le secteur moderne. 

 Historique 

En langage courant, le terme de secteur informel est utilisé de deux manières. La première, pour désigner des activités illicites ou illégales d’un individu qui agissent dans un but d’évasion fiscale ou de contournement de la législation. La seconde réfère tout simplement aux petites entreprises qui ont recours à des modes de production et de gestion peu sophistiqués et fonctionne sans statut légal. Parfois, on utilise le terme secteur non structuré pour désigner le secteur informel. Entre 1991 et 1992, le BIT a utilisé l’expression « secteur non structuré »pour traduire « informel sector » qui a figuré dans des titres de programmes et réunions ainsi que dans les citations (rapport de la 90ème session du BIT, Genève 1991).

Les raison d’existence du secteur informel

 Le fait que la taille et l’utilité du secteur informel soit plus grande chez les pays pauvres que chez les pays riches relève de diverses raisons. L’objet du présent paragraphe sera donc d’étudier ses derniers. En effet, ce sont surtout des faits à caractère démographique, sociale, économique et psychologique qui ont conduit à la naissance et à l’évolution de l’économie informelle dans les pays du Tiers monde. 

L’explosion démographique 

Pour illustrer le phénomène d’explosion démographique, le cas de Madagascar est pris comme exemple. En effet, le pays est à forte croissance démographique, surtout dans les milieux ruraux4 . Dans ces milieux, la principale activité est l’agriculture. La majorité des gens pensent qu’il faudrait mettre au monde plus d’enfant pour avoir plus de main d’œuvre pour les aider dans leurs activités. Ce fait est d’ailleurs en conformité avec la pensée des physiocrates qui accordent beaucoup d’importance à cette croissance démographique car pour eux, seul l’homme est à l’origine de la richesse et cette richesse est créée à travers la production agricole. De même, pour les mercantilistes, particulièrement avec J. Bodin au 16ème siècle, qui affirmait qu’il n’est de richesses, ni de forces que d’hommes, c’est-à-dire que pour eux, seule une forte croissance démographique entraîne la croissance économique. 4 D’après l’enquête de l’INSTAT, la population malgache s’est accrue d’environ 18% entre 2002 et 2008, avec 12% pour les milieux ruraux. 

 L’exode rural 

Depuis les 30 dernières années, l’exode rural est devenu populaire à Madagascar5 , dont les migrants sont essentiellement des jeunes. Cette migration (définitive ou temporaire) peut être due par le sous emploi rural. Ces migrants sont donc venus en ville pour y chercher un appoint de ressources, ce qui aggrave le déséquilibre du marché de l’emploi urbain. Mais leur faible niveau d’instruction constitue une barrière importante qui les empêche d’intégrer le secteur formel moderne. D’ailleurs dans le cas des pays en développement comme Madagascar, le marché du travail présente encore un dysfonctionnement et ne crée pas assez d’emploi. Ce qui fait que plusieurs personnes se trouvent inoccupées dans les milieux urbains. Par conséquent, ils sont contraints de se tourner vers le secteur informel pour survivre même si ces emplois sont précaires et non protégés. 

 Le transfert excessif de la main d’œuvre du secteur primaire vers le secteur secondaire

 Le transfert excessif de la main d’œuvre du secteur agricole vers le secteur industriel peut aussi avoir des impacts indirects mais significatifs sur l’évolution du secteur informel. Rappelons la logique d’Arthur Lewis qui repose sur le dualisme sectoriel : d’un côté la société traditionnelle (large agriculture de subsistance et faible productivité) et de l’autre la société moderne (forte productivité mais de petite taille). Selon cette logique, il y a un surplus de main d’œuvre dans le premier secteur, dans ce sens que beaucoup de travailleurs ont un produit marginal nul. Ces derniers vont donc trouver d’autres emplois dans d’autres secteurs. En connaissant cela, les entrepreneurs dans l’industrie, vont profiter de cette situation pour attirer cette main d’œuvre en surplus dans le secteur agricole vers eux en offrant des salaires suffisamment élevés strictement supérieur aux salaires dans le secteur agricole. Par contre s’il n’y a plus de surplus dans le secteur traditionnel alors qu’il y a toujours transfert cela aura pour conséquence, d’une part, la réduction de la production totale du secteur agricole car ce sont les travailleurs à produit marginal positifs qui quittent le secteur, et d’autre part, quand l’emploi est saturé dans le secteur moderne, il pourrait s’en suivre que soit ces entreprises vont diminuer le salaire de ses employés pour réduire le chômage, soit accepter tout simplement l’existence des chômeurs. Par extension de cette logique d’A. Lewis, on constate 5 D’après l’enquête de l’INSTAT, la population des milieux urbains s’est accrue de 34% entre 2002 et 2008, ceci est en particulier dû à l’intensification de l’exode rural. 6 que dans le cas des pays en voie de développement comme Madagascar, ces chômeurs ne vont pas essentiellement revenir à nouveau dans le secteur traditionnel mais vont rester dans les grandes villes pour intégrer le secteur informel soit en travaillant à leur propre compte, soit pour des petits patrons du secteur informel. 

Le chômage

 Que ce soit le chômage volontaire ou le chômage involontaire, tous deux provoquent la prolifération des activités informelles. Mais une des causes majeures du chômage à Madagascar est la crise (économique et politique). En effet, en période de crise, comme il a été déjà dit plus haut, soit l’entreprise diminue le niveau de salaire, soit elle procède au licenciement d’employés et ceci afin de préserver le niveau de leur profit. Mais dans la réalité, il y a beaucoup de chance que les entreprises licencient des employés pour préserver ce niveau de profit. Cependant, il se trouve même que si la crise s’intensifie, des entreprises tombent en faillite, c’est le cas des entreprises franches et les entreprises bénéficiaires de l’AGOA (African Growth and Opportunity Act) à Madagascar. Par conséquent ces familles marginalisées de l’économie formelle (secteur moderne public et privé) développent des activités productives en dehors du domaine formel pour assurer leur survie dans un cadre approprié, essentiellement le cadre familial. Par ailleurs, pour un cas particulier, en période de crise, la productivité du secteur moderne chute à cause de la pénurie des intrants importés. Cette baisse aggrave la diminution de sa compétitivité résultant de la hausse du prix des intrants. De ce fait, les barrières à l’entrée dans les professions artisanales ayant des concurrents dans le secteur moderne se sont donc abaissées, facilitant par la suite la prolifération des entreprises informelles.

Diverses autres raisons 

 Evasion fiscale 

L’évasion fiscale peut être aussi une cause de l’informalité. Par définition l’évasion fiscale est le fait de fuir la fiscalité. Cette fuite peut se traduire en une migration vers des régions à faible taux de pression fiscale mais aussi en une migration vers des secteurs hors de portée de la fiscalité, tel que le secteur informel. En effet, connaissant le taux de pression fiscale du secteur moderne formel, certains entrepreneurs préfèrent agir dans l’ombre pour éviter de payer d’impôts et de diverses autres charges sociales, ceci dans le but de garder un 7 bon niveau de profit. Toutefois, le non déclaration de certains emplois ou certaines activités au sein d’une entreprise formelle fait aussi parti de l’informel6 , de même que les fraudes fiscales (modification des chiffres comptables dans le but d’être moins taxé). D’où l’informalité cachée, même au niveau de grandes entreprises formelles. Par ailleurs, concernant les petites activités commerciales urbaines, beaucoup de commerçants préfèrent ne pas payer de patente afin de gagner un surplus de profit. Par conséquent, ils préfèrent réaliser leur métiers sur les trottoirs ou bien d’une manière ambulante. C’est le cas, par exemple du commerce d’appareils électroniques, d’informatiques, de lingerie, de chaussures, de casquettes, de cd de films, d’album de musique, de logiciels dans les quartiers commerciaux d’Antananarivo (essentiellement dans les rues de Behoririka, Soarano, petite vitesse, Ambodifilao, Analakely, Isotry). 

 La multiactivité

 A cause de la faiblesse du salaire dans certaines branches du secteur moderne, des actifs de ce dernier mènent en parallèle une petite activité informelle pour y gagner un revenu supplémentaire. Tel est le cas de l’ouvrier de l’industrie de la construction, ou du BTP (Bâtiments et Travaux Publics) qui mène des activités personnelles informelles pendant le weekend. Il en est de même pour le cas de l’enseignant qui donne des cours particuliers le soir ou tout simplement d’un salarié du secteur formel qui est en même temps petit patron d’une unité de production informelle. 

 Une explication institutionnaliste

 Une autre explication de l’existence du secteur informel se réfère aux institutionnalistes de l’école autrichienne, principalement à Carl Menger. Si on rappelle sa théorie sur les origines des institutions, elles sont de 2 sortes : organique et pragmatique. Ce qui intéresse les analystes ici c’est le premier type d’institution qui est d’origine organique. Sa logique est comme suit : au début il y a les actions individuelles téléologiques c’est à dire des actions humaines orientées vers des objectifs d’intérêts individuels. Parmi ces actions, il y a les bonnes pratiques et les mauvaises pratiques qui ont été découvertes par les individus plus intelligents. Au début, ils ne les ont pas conçues pour le bien de la société mais seulement pour leur propre intérêt mais suite à un effet d’imitation de ces pratiques par les individus les  moins intelligents, ces pratiques sont devenues des institutions. De même, en se référant à cette théorie, la pratique des activités informelles peut être considérée comme une institution d’origine organique dans les pays du tiers monde. En effet, ces activités n’étaient pratiqués au début que par peu de gens (plus intelligents, créatifs et débrouillards) mais par la suite, quand les moins intelligents et les moins débrouillards ont remarqué qu’une activité informelle donnée est profitable, ces derniers les ont imité et ont pratiqué l’activité à leur tour. 

Table des matières

INTRODUCTION
I / Généralités sur le secteur informel
I-1/ Historique
I-2/ Quelques définitions du secteur informel
I-3/ L’Etat et le secteur informel
II/ Impacts du secteur informel sur le développement et les théories y afférent
II-1/ Les théories de l’économie informelle
II-2/ Le développement
II-3 / Impact socio économique de l’existence du secteur informel
III/ Le secteur informel à Madagascar
III-1/ La structure du secteur informel à Madagascar
III-2/ Les apports positifs du secteur informel et les perspectives à son égard
CONCLUSION

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