La tectonique moderne et les minéralisations aurifères

La connaissance des caractéristiques physiques et chimiques des gîtes de type orogénique est cruciale étant donné la proximité du Front de Grenville et la présence de minéralisations dans des terrains de haut grade métamorphique. Par contre, il ne faut pas négliger l’hypothèse voulant que la minéralisation se soit mise en place dans un autre contexte. De ce fait, la problématique doit définir tous les milieux de mise en place, la nomenclature appropriée, les relations chronologiques et les relations spatiales qui serviront à classifier les minéralisations aurifères atypiques du secteur du Lac Dufresne.

La tectonique moderne et les minéralisations aurifères

Plusieurs auteurs proposent une relation entre la localisation des minéralisations aurifères et la tectonique des plaques (Goldfarb et al., 1998). L’examen de la distribution mondiale des gisements aurifères récents suffit à établir le lien entre les minéralisations et les ceintures orogéniques (Barley et al., 1992; Sawkins et al., 1990). La ceinture de feu du Pacifique est l’exemple actuel de la localisation de nombreux gisements aurifères (Berger et al., 1990; Carlile et al., 1994; Goldfarb et al., 1998; Panteleyev, 1986; White et al., 1995). Les gisements aurifères se développent soit dans les orogènes intérieurs lors de collisions entre continent continent, continent-arc ou arc-arc (Goldfarb et al., 1998; Kerrich et Cassidy, 1994), soit dans les orogènes périphériques lors de la subduction d’une croûte océanique le long de marge continentale ou insulaire (Kesler, 1997; Sillitoe et al., 1989). La relation entre la minéralisation et les zones de subduction et de collision tient de la forte activité magmatique et de l’activité tectonique qui caractérisent ces environnements. Les gisements de types épithermaux et porphyriques sont généralement associés au magmatisme calco-alcalin (Kirkham et al., 1995), tandis que les gisements aurifères de type filons de quartz-carbonates sont spatialement associés à des failles à mouvements inverses (Robert et al., 1995). Plusieurs études suggèrent que les ceintures de roches vertes d’âge précambrien se soient formées par l’amalgame d’arcs insulaires et de bassins arrière-arc (Chown et al., 1992; Jackson et Cruden, 1995). Les processus actuels pourraient donc être une fenêtre sur le passé et la tectonique des plaques telle que comprise aujourd’hui pourrait s’appliquer à l’Archéen.

L’application de la tectonique des plaques pour expliquer l’origine et l’assemblage tectono-stratigraphique des ceintures de roches vertes ouvre des possibilités quant aux différents environnements de minéralisation aurifère de l’Archéen (Barley et al., 1992; Groves et al., 1998). Toutefois, ces hypothèses sont remises en question par les travaux de Gapais et al. (2009) qui proposent des modèles de tectonique verticale pour les ceintures de roches vertes archéennes.

Niveau crustal et nomenclature

Les ceintures de roches vertes archéennes sont les hôtes de plusieurs types de gisements aurifères. Dans l’ancienne littérature, le nom de gîtes mésothermaux regroupe tous les gisements aurifères (Groves et al., 1989; Hodgson et al., 1993; Kerrich et al., 1990). Ce type de gisement réfère autant à des dépôts d’or primaire (lode gold), que d’or métamorphique, d’or seulement ou d’or de type orogénique (mother-lode). Ces minéralisations sont définies comme des systèmes de veines encaissées dans des failles situées dans des terrains métamorphisés. Le terme mésothermal est employé pour les classifier parce qu’ils se retrouvent généralement dans des régions métamorphisées au faciès des schistes verts qui est synonyme d’une profondeur d’enfouissement moyenne (Nesbitt et al., 1986). Les études de Groves (1993) et Groves et al. (1998) ont établi que les gisements aurifères pouvaient se rencontrer dans des roches métamorphisées à d’autres degrés qui correspondent à une variation de la profondeur du dépôt. Cette conception du modèle de continuum crustal de Groves a toutefois été remise en question par Phillips et Powell (2009).

La différenciation qui est actuellement favorisée, s’applique aux gisements aurifères appartenant aux environnements archéens et se classifient en fonction de la profondeur de mise en place de la minéralisation. Trois milieux sont reconnus : épithermal (<1 km), mésothermal (1-3 km) et hypothermal (>3 km) (Figure 1.4 (Poulsen et al., 1995). Le milieu épithermal renferme les gisements épithermaux et les minéralisations de sulfures massifs aurifères. Le gisement de Selbaie et le camp minier de Bousquet en sont respectivement des exemples (Larson et Hutchinson, 1993; Tourigny et al., 1993). Le milieu mésothermal comprend les gisements de types mantos, skarns et porphyrique. Ces gisements sont généralement associés à un centre volcanique felsique. Le camp minier d’Hemlo (Kuhns et al., 1994) et le gisement de Troilus (Fraser, 1993) sont interprétés comme des exemples de ces types de gisements. Enfin, le milieu hypothermal correspond aux gisements de filons de quartz-carbonates. La nature des roches encaissantes crée plusieurs variantes pour ce type de gisement. Dans le cas du gisement Campbell Red Lake, l’encaissant est une roche volcanique (Andrews et al., 1986); pour le gisement East Sullivan, ce sont des roches plutoniques (Assad, 1959); pour le gisement de Camlaren, ce sont des turbidites (Boyle, 1979) et pour le gisement de Lupin, c’est une formation de fer (Lhotka et Nesbitt, 1989).

Minéralisation aurifère et chronologie des événements
géologiques

Si les minéralisations aurifères peuvent être classifiées en fonction de leur profondeur de mise en place, cette tâche s’avère fastidieuse, voire impossible dans les terrains fortement métamorphisés et déformés. Il est souvent plus facile d’établir le lien temporel de la minéralisation dans l’histoire géologique d’une région. De ce fait, l’environnement géologique lors de la minéralisation est déduit et le type de minéralisation aurifère peut alors être ciblé. Pour déterminer la chronologie des événements, les relations impliquant la minéralisation, l’altération, le plutonisme, la déformation et le métamorphisme sont cruciales. La séquence géologique reconstruite, la minéralisation peut être classifiée comme étant synvolcanique / postorogénique ou syn- à tardi-déformation (Groves et al., 1998). Par contre, le contexte de zones de déformation peut rendre la classification d’une minéralisation difficile et parfois même mener à une mauvaise interprétation. Par exemple, une minéralisation synvolcanique peut être interprétée comme une minéralisation de type orogénique parce qu’elle se retrouve au sein d’une zone de cisaillement.

La minéralisation synvolcanique est associée dans le temps au volcanisme et/ou au plutonisme et doit être antérieure à la déformation ductile-fragile et au métamorphisme produit lors de la collision des arcs. Trois éléments peuvent être utilisés pour identifier ce type de minéralisation : le recoupement par des dykes ou des failles synvolcaniques (Gaboury et Daigneault, 1999), la réorientation des dykes ou des failles due à la déformation subséquente et/ou à un assemblage métamorphique atypique indiquant le métamorphisme d’une roche altérée antérieurement (Yeats et al., 1998). Par contre, la minéralisation syn- à tarditectonique est généralement associée spatialement à des structures régionales. Elle se retrouve à l’intérieur de failles ou de cisaillements et associée à des veines d’extension (Robert et Brown, 1986). Elle est associée à des intrusions syn- à tarditectoniques (Jebrak, 1992). La minéralisation tardi- à post-tectonique est caractérisée par une faible déformation des minéraux d’altération et des sulfures.

Une précision est ici apportée sur les appellations « synvolcanique » et « synà tardi- tectonique ». Les terrains métamorphisés et fortement déformés sont communément le résultat de plus d’un épisode de déformation (Chown et al., 1992). En plus, il est possible que les deux qualificatifs s’associent au même événement. Pour ce faire, le terme synvolcanique utilisé dans ce mémoire s’applique à un événement synchrone au volcanisme et est utilisé uniquement pour les événements antérieurs à la déformation régionale. Pour les termes syn- à tardi-tectonique, c’est la schistosité régionale qui sert de marqueur. Cette schistosité est dite principale parce qu’elle se retrouve dans toutes les unités lithologiques et est généralement synchrone au métamorphisme. Une minéralisation peut tout de même être tardidéformation mais avoir été reprise par une déformation secondaire, tardive à l’événement principal.

Table des matières

CHAPITRE I
1 INTRODUCTION
1.1 MISE EN CONTEXTE
1.2 LOCALISATION ET ACCÈS
1.3 HISTORIQUE DE L’EXPLORATION MINIÈRE DANS LE SECTEUR NORD-EST DU PLUTON DE LA
DAUVERSIÈRE
1.4 PROBLÉMATIQUE
1.4.1 La tectonique moderne et les minéralisations aurifères
1.4.2 Niveau crustal et nomenclature
1.4.3 Minéralisation aurifère et chronologie des événements géologiques
1.4.4 Magmatisme et minéralisation aurifère
1.4.5 Zone tectonique du Front de Grenville
1.4.6 Corridor de déformation du lac Dufresne
1.5 OBJECTIFS
1.6 MÉTHODOLOGIE
1.6.1 Approche régionale
1.6.1.1 Compilation et cartographie
1.6.1.2 Signature structurale du CDLD
1.6.1.3 Magmatisme felsique
1.6.2 Approche locale
1.7 GÉOLOGIE RÉGIONALE
1.7.1 Stratigraphie
1.7.2 Roches intrusives
1.7.2.1 Complexe du Lac Doré
1.7.2.2 Plutons synvolcaniques
1.7.2.3 Plutons syntectoniques
1.7.3 Géologie structurale
1.7.4 Géologie économique
CHAPITRE II
2 GÉOLOGIE DU SECTEUR DU LAC DUFRESNE
2.1 INTRODUCTION
2.2 ROCHES VOLCANIQUES
2.2.1 Description des unités.
2.2.1.1 Roches volcaniques mafiques
2.2.1.2 Roches volcanoclastiques
2.2.2 Géochimie
2.2.2.1 Géochimie des éléments majeurs
2.2.2.2 Rapport Zr/Y
2.2.2.3 Géochimie des éléments des terres rares
2.3 ROCHES INTRUSIVES
2.3.1 Descriptions des unités
2.3.1.1 Intrusions mafiques
2.3.1.2 Plutons felsiques
Pluton de La Dauversière
Pluton de Boisvert
Dykes felsiques
2.3.2 Géochimie
2.3.2.1 Géochimie des éléments majeurs
2.3.2.2 Rapport Zr/Y
2.3.2.3 Éléments des terres rares
2.3.2.4 Comparaison entre les deux plutons
2.3.2.5 Discrimination des dykes
2.4 SYNTHÈSE
2.4.1 Plutons
2.4.2 Dykes felsiques
CHAPITRE III
3 STRUCTURE
3.1 INTRODUCTION
3.2 DÉFINITION DES ÉLÉMENTS STRUCTURAUX
3.2.1 Schistosité principale
3.2.2 Linéation d’étirement
3.2.3 Clivages secondaires
3.2.4 Plissements
3.2.5 Rubanement
3.3 ÉCHELLE DE DÉFORMATION
3.4 VARIATION RÉGIONALE DE LA SCHISTOSITÉ PRINCIPALE ET DE LA LINÉATION D’ÉTIREMENT
3.5 SECTIONS STRUCTURALES
3.5.1 Section structurale no 1
3.5.2 Section structurale no 2
3.5.3 Le corridor de déformation du Lac Dufresne
3.6 ÉVOLUTION STRUCTURALE
CHAPITRE IV
4 ÉTUDE DE L’INDICE LAC DUFRESNE
4.1 INTRODUCTION
4.2 GÉOLOGIE LOCALE
4.2.1 Schiste à hornblende
4.2.2 Schiste à chlorite, séricite et hornblende
4.2.3 Schiste à biotite
4.2.4 Schiste à biotite et séricite
4.2.5 Hornblendite
4.2.6 Veine de quartz et tourmaline
4.2.7 Brèche minéralisée
4.3 GÉOLOGIE STRUCTURALE
4.3.1 Introduction
4.3.2 Trajectoire de la schistosité
4.3.3 Distribution de l’intensité de déformation
4.3.4 Genèse de la brèche minéralisée
4.3.4.1 Stade initial
4.3.4.2 Concentration de la déformation
4.3.4.3 Altération et début de la fragmentation
4.3.4.4 Perturbation des éléments planaires et propagation de la fragmentation
4.3.4.5 Perturbation de tous les éléments planaires
4.3.5 Sommaire
4.4 ALTÉRATION HYDROTHERMALE
4.5 MINÉRALISATION
4.6 EFFETS DE LA DÉFORMATION SUR LA MINÉRALISATION
4.7 RELATION DES DYKES FELSIQUES AVEC LA MINÉRALISATION
4.8 SYNTHÈSE
CHAPITRE V
5 SYNTHÈSE ET DISCUSSION

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