Le processus de degradation des ressources naturelles

Les facteurs anthropiques

Si aujourd’hui les ressources naturelles sont en état de dégradation aussi avancée, cela découle sans nul doute de l’oeuvre de l’homme. En effet, la dégradation des ressources naturelles constatée dans la  CR a une origine anthropique. Les populations locales ne cessent d’exploiter les écosystèmes en vue de satisfaire leurs besoins socio-économiques.
Les formes de dégradation imputables à l’homme sont déclinées ci-après.
* la forte demande en espace de culture qui se caractérise par une pression foncière exacerbée.
Cette pression humaine sur la ressource foncière se manifeste par les défrichements agricoles.
Ces derniers empiètent intensément les réserves forestières et affectent surtout le couvert végétal de la collectivité locale.
* Il s’en suit l’influence de l’élevage. Ainsi le manque d’espace pousse les éleveurs à abattre les arbres pour satisfaire les besoins alimentaires du bétail.
L’étroitesse des parcours pastoraux du à l’insuffisance des espaces constitue une forme de pression de cette partie insulaire du Delta du Saloum. Cette pression de l’élevage sur les ressources naturelles est surtout notée pendant la saison sèche où les animaux divaguent.
Cette importante charge pastorale enfreint largement la régénération naturelle des essences végétales parce que le manque de nourriture de bétail fait que les animaux piétinent les jeunes pousses comme les ditaax, les tamariniers, l’Adansonia digitata.
Les feux de brousse ne sont pas en marge dans le processus de dégradation. Ainsi, il est noté qu’à l’approche de l’hivernage, les populations locales désherbent le tissu végétal par les feux de brousse.
* Les facteurs les plus vulnérables pour ces écosystèmes sont représentés dans la localité par la coupe abusive et illicite de la mangrove. Cette déforestation excessive de la mangrove contribue considérablement à la disparition des espèces halieutiques du terroir communautaire. La raison évoquée par les populations est qu’il est injuste et inconcevable de laisser la mangrove intacte devant les besoins socio-économiques. Sa dégradation résulterait aussi des techniques rudimentaires de cueillette des fruits de mer par la coupe des racines aériennes de la mangrove pour récolter les « touffa ».
C’est fort de ce constat que les populations locales continuent de couper le bois de mangrove pour le bois de chauffe et le charbon de bois. Les essences forestières comme Cordyla pinnata, (Ndimb), Borassus aethiopium (Rônier) et Rhizophora racemosa sont aussi surexploitées pour la construction des pirogues.

CONCLUSION PARTIELLE

Les hommes ont une large part de responsabilité dans le processus de dégradation desressources naturelles dans la collectivité locale. Par contre, l’érosion côtière provoquée depuis la rupture de la pointe de Sangomar en 1987 assaille le plus les ressources naturelles. Cette situation a mis cette CR tout comme les autres dans une situation d’enclavement et d’isolation. Les populations locales continuent de déplorer l’enclavement dans lequel se trouvent actuellement les îles du Saloum.
Devant cette impasse, il est fondamental de mettre en oeuvre une stratégie d’exploitation rationnelle et durable de ces ressources qui serait profitable à la population actuelle et celle à venir. C’est pourquoi, il est opportun de penser à une étude sur la réglementation de l’accès aux ressources naturelles dans le contexte de décentralisation. Cette dernière a été initiée par l’ensemble des acteurs intervenant dans cette partie de la zone de transition qu’il semble important d’appréhender dans cette troisième partie.

DECENTRALISATION ET REGLEMENTATION DE L’ACCES AUX RESSOURCES NATURELLES

LE PROCESSUS DE DECENTRALISATION ET LE TRANSFERT DE COMPETENCES

Le processus de dégradation intense des ressources naturelles a été à l’origine de l’étude de la réglementation dans la CR de Dionewar. Cette étude se veut un cadre stratégique de sauvegarde et de préservation du reste de potentiel naturel dans la CR. Sa gestion rationnelle et durable pourrait permettre de satisfaire les besoins actuels et d’en réserver pour les générations futures. Elle est entre autres l’ensemble des mesures prises pour l’accès ou l’exploitation rationnelle et organisée des ressources végétales (mangrove et essences forestières), des ressources foncières et des ressources halieutiques dans cette partie du Delta du Saloum.
La réglementation tient alors sa faisabilité dans le processus actuel de décentralisation adopté par l’Etat du Sénégal depuis les indépendances. Elle nécessite une implication de l’ensemble des acteurs intervenant dans la dynamique des ressources naturelles. C’est exactement à partir des années 1970 que la politique de décentralisation a connu son effet à la suite de plusieurs événements qui ont convergé en faveur de sa mise en oeuvre.
Ces événements ont pour nom, la faillite des politiques d’ajustement structurel qui jusque là étaient gérées par l’administration centrale. Cette chute s’explique par la non implication des populations locales dans la gestion des affaires de leur localité.
Cependant, c’est à partir des années 1990 que le processus de décentralisation a été amorcé.
Celui-ci s’est renforcé par les fortes revendications des populations dans la participation des affaires locales. En ce moment, le gouvernement a senti la nécessité de redonner la parole aux collectivités locales avec l’accompagnement de plusieurs textes relatifs à la décentralisation.
Cette dernière qui est un volet important dans le processus d’aménagement du territoire s’articule à deux niveaux :
D’abord à un niveau national qui vise à une organisation administrative du territoire, elle a commencé par l’adoption de la loi 72 – 02 du 1er février 1972 portant création des CR. Cette réforme a été renforcée par la loi 96 – 06 du 22 mars 1996 portant code des collectivités locales. Ensuite, à un niveau secondaire où la décentralisation opte pour un développement local à la base. Cette politique remet en cause le principe de gestion centrale de l’Etat qui monopolisait toutes les décisions et où le citoyen n’était pas impliqué. Les collectivités locales décentralisées correspondent aux régions, aux communes et aux communautés rurales. La C.R. est constituée par un certain nombre de villages appartenant au même terroir, unis par des liens de solidarité résultant du voisinage, ayant des intérêts communs et capable ensemble de trouver les ressources nécessaires à leur développement.
Selon le même code des collectivités locales, celles-ci sont dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Elles s’administrent librement par des conseils élus au suffrage universel. C’est en ce sens qu’elles ont pour mission principale la mise en oeuvre des programmes et d’actions capables d’inciter le développement économique, éducatif, social, et culturel d’intérêt de la CR.
En effet, ce processus de décentralisation a été renforcé par la loi 96 – 07 du 22 mars 1996 avec le transfert de neuf (9) compétences qui jusqu’en ce moment étaient entre les mains de l’Etat.
Dans notre étude, deux compétences transférées à savoir l’environnement et la gestion des ressources naturelles et le domaine rural nous ont particulièrement intéressés. Par ailleurs, la pêche n’est pas une compétence mais elle est gérée de manière locale et conventionnelle dans cette CR.

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La gestion de l’environnement, des ressources naturelles et du domaine rural

Le décret 96 -1130 du 27 décembre 1996 portant application de loi de transfert de compétences aux régions, aux communes, et aux communautés rurales en matière de gestion et d’utilisation du domaine et le décret 96 – 1134 portant application de la loi de transfert de compétences aux régions, aux communes et aux communautés rurales en matière d’environnement et de gestion des ressources naturelles ont été les compétences concernées et qui touchent l’étude de la réglementation de l’accès aux ressources naturelles.
Pour mieux assurer une fonctionnalité et un bon suivi du processus de décentralisation, dans la CR de Dionewar, ces deux compétences sont pilotées par la commission environnementale et la commission domaniale dont il convient de les présenter ci-après. Les comités de plage se chargent quant à elles de l’exploitation rationnelle des ressources halieutiques et forestières.

La commission environnementale

Elle s’occupe de la gestion de l’environnement en général et de la préservation et de restauration des ressources naturelles en particulier. Son intervention s’articule à trois niveaux que sont:
D’abord le volet spatial : la commission lutte contre toute forme de pollution même si dans la collectivité il n’existe pas d’entreprises extractives ;

La commission domaniale

Elle se charge des questions foncières dans le terroir communautaire de Dionewar. Elle est par conséquent la commission qui suscite plus de problèmes. Cette situation résulte de l’étroitesse de l’espace où la demande de terres à usage d’habitation et de culture est plus forte que le potentiel disponible. On note aussi que l’affectation des terres concerne celles à usage d’habitation. Dans la CR, le système de gestion traditionnelle des terres de cultures prévaut jusqu’à présent mais cela n’empêche pas à la commission de s’occuper de la délimitation des parcours pastoraux. Rappelons que depuis l’année 2000, le service des Eaux et Forêts de concert avec la commission avaient réservé 50 m de largeur pour le passage des bêtes des lieux de pâtures aux lieux d’abreuvage.
Toutefois, à l’instar de la précédente, la commission connaît des problèmes particuliers. Ils ont pour nom, le manque de formation des élus locaux, la demande qui excède l’offre dont les conflits sont la résultante, le désengagement des représentants de l’Etat etc.

Les comités de plage

Ils sont les acteurs clés dans le processus d’exploitation et de réglementation des ressources halieutiques à Dionewar. Ils ont été créés en août 1996 pour les villages de Niodior et de Dionewar et en 2000 pour celui de Falia. Ils ont été formés à l’initiative des populations locales elles-mêmes constitués en majorité de pêcheurs et de collectrices des fruits de mer. Ils bénéficient d’un statut juridique avec l’arrêté sous-préfectoral n° 03 – 2003 qui les régit. Cette mise en place des comités de plage est surtout due à l’inquiétude des pratiques destructrices des espèces halieutiques. Cette situation est liée à l’exploitation abusive de ces ressources par les pêcheurs autochtones et des allochtones, principaux usagers de la mer. Ce sont dès lors des structures décentralisées qui ont décidé de prendre en charge la gestion des ressources halieutiques. Dans l’exercice de leur fonction, ils ont été appuyés et supervisés par les agents techniques de pêche et sont régis par la loi 98 – 32 du 14 avril 1998 portant code de la pêche.
La surveillance des ressources forestières a été due à l’importance économique que renferme cette filière. C’est pour cette raison que les comités de plage ont élargi leur fonction et au lieu de se limiter uniquement aux potentialités halieutiques, ils ont intégré les ressources forestières. A partir de ce moment, ils changent d’appellation et deviennent comités de surveillance. Il en existe un dans chaque village de la CR mais pour une coordination plus active des activités, ces trois comités sont regroupés en une structure mère qui pilote le travail au niveau communautaire.
Les missions qui leur sont assignés sont les suivantes :
– le respect du maillage des filets de pêche ;
– la vente des produits de cueillette ;
– la fixation des amendes en cas d’infractions ;
– la répression ;
– le contrôle de la qualité des espèces halieutiques ;
– le respect des périodes de fermetures des vasières et l’application de l’arrêté du gouverneur concernant la pêche crevettière ;
– le maintien de la salubrité et de la propreté des plages ;
– la surveillance de la nature des fruits sauvages (ditaax, pain de singe, tamarin etc.) et de la coupe de la mangrove ;

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