Le profil des vidangeurs manuels

Le statut matrimonial

Les résultats des enquêtes révèlent que les vidangeurs sont majoritairement mariés. Par conséquent ils ont sous leur responsabilité un nombre important de personnes parfois plus d‟une quinzaine qu‟ils doivent loger, nourrir, habiller, éduquer avec tout ce que cela comporte comme charges. Si l‟on s‟en tient au tableau 11, parmi eux 80,8 % sont mariés dont 3,9 % en régime de polygamie contre seulement 19,2 % de célibataires.

L’identité géographique des vidangeurs

L‟origine géographique et le lieu de résidence permet d‟appréhender l‟identité géographique des vidangeurs. Les résultats d‟enquête montrent que même s‟ils résident tous dans la Commune de Malika (80,8 %) et ses environs (Yeumbeul, Keur Massar, Thiaroye etc ), ils sont originaires pour la plupart de régions autres que Dakar et parfois même de la sous région (voir figure 9). Venus à Dakar à la recherche d‟emploi, ils ont été amenés, la conjoncture aidant, à pratiquer la vidange comme activité. La région la plus représentée est Louga (23,1%) suivie de Thiès, Fatick et St-Louis (7,7% des vidangeurs recensés chacune). Les autres zones pourvoyeuses sont Diourbel, Kaolack, Ziguinchor, Kolda et même la Guinée (3,9% chacune).
En ce qui concerne les vidangeurs natifs de Dakar, ils ne font que 34,6 % du total. Cela semble du au fait que la vidange est perçue par beaucoup comme une activité socialement dégradante de sorte que bien des gens nourrissent le complexe de l‟exercer. Le fait de la pratiquer comme métier loin de son environnement proche permet d‟échapper au regard social pesant des siens.

Le niveau de formation des vidangeurs

Le niveau d’instruction

Les vidangeurs manuels sont des gens d‟un niveau d‟instruction généralement bas (figure 10). Seuls 30,8 % déclarent avoir été à l‟école et parmi eux 26,9 % sont de niveau élémentaire et seuls 3,9% de niveau secondaire. Le reste est analphabète (38,4%) ou issu de l‟enseignement coranique (30,8%). Ce constat si caractéristique des milieux sociaux défavorisés traduit les difficiles conditions dans lesquelles se trouvent les familles d‟origine des vidangeurs.

Le niveau de qualification professionnelle

Le niveau d‟étude relativement bas des vidangeurs manuels ne signifie pour autant pas une absence de qualification professionnelle. Le tableau 12 laisse apparaitre qu‟une bonne part (73,8%) a été formée à des métiers aussi divers que la maçonnerie, la menuiserie métallique, la menuiserie bois et la peinture. On remarque toutefois que la formation au niveau des structures formelles fait défaut puisque l‟écrasante majorité des vidangeurs déclare avoir étéformée (94,74%) au niveau des ateliers du secteur informel contre seulement 5,26 % qui sont passés par les établissements d‟enseignement technique et de formation professionnelle.

La vidange manuelle dans la vie active des vidangeurs

Les facteurs du choix de la profession de vidangeur

Ce sont les difficultés qu‟ils rencontrent dans la satisfaction de leurs besoins, même primaires, qui ont poussé beaucoup de personnes à exercer la vidange manuelle. 73,1% des vidangeurs sont dans cette situation (figure 11) dont 46,2% estiment la pratiquer à cause de l‟insuffisance des revenus tirés de leur métier et 26,9 % parce qu‟ils n‟ont pas subi de formation. Le reste justifie leur entrée dans la corporation par l‟impossibilité à trouver du travail après formation (15,3 %), la perte d‟emploi (7,7%) ou leur admission à la retraite 3,9%.

La place de la vidange dans les activités des vidangeurs

Les résultats de l‟étude font ressortir que le statut de la vidange manuelle en tant qu‟activité n‟est pas le même selon les vidangeurs (figure 13). Si pour certains (23%) elle constitue leur unique activité, pour d‟autres elle est activité principale (23%) ou secondaire (54%) exercée parallèlement à d‟autres occupations. Il s‟agit principalement d‟occupations relatives aux travaux de construction comme la maçonnerie (53,8%), la peinture (11,5%) et le moulage de briques (3,9%) auxquelles s‟ajoutent de petits métiers tels que le lavage de voiture (3,9%) et le gardiennage (3,9%). Ce constat prouve que la vidange manuelle occupe une place très importante dans la vie active des personnes qui la pratiquent. Elle constitue en effet la principale sinon l‟unique occupation d‟au moins 46 % d‟entre elles. Ce qui veut dire qu‟elle est leur seule ou leur plus importante source de revenus. Par conséquent même si elle représente pour 54% une activité d‟appoint pour trouver des ressources supplémentaires, sa contribution à la satisfaction des besoins de nombreux ménages ne souffre d‟aucun doute.

Les conditions d’exercice de la profession de vidangeur manuel

Les conditions matérielles

L‟étude des conditions matérielles de la vidange montre que les vidangeurs se servent d‟outils de travail mais aussi de substances (produits chimiques) pour exécuter les tâches de vidange.

Les outils de travail

Deux types d‟outils sont utilisés par les vidangeurs lors de la vidange (figure 14). Le premier type est constitué par les outils servant au travail opérationnel de vidange. Ce sont des outils rudimentaires dont les plus utilisés sont les pelles (96,2%) pour le creusage et la fermeture du trou ainsi que le curage des fosses; les seaux (92,3%) et les cordes (65,4%) pour l‟extraction de la boue. Le reste comprend les pioches (23%) et les échelles (11,5%) qui sont peu utilisées du fait de la présence d‟un sol sableux facile à creuser pour les unes et à la faible profondeur des fosses pour les autres. Le deuxième type concerne quant à lui les outils de protection et de sécurité. En dehors des gangs et des bottes que portent respectivement 50% et 38,5% des vidangeurs, leur niveau d‟utilisation reste très bas. Cela est illustré par les masques et les combinaisons utilisés seulement à hauteur de 11,5% pour les uns et de 7,7% pour les autres. Ce qui expose les vidangeurs à des risques d‟accidents et de contamination. Il convient par ailleurs de noter que ces outils n‟appartiennent pas toujours aux vidangeurs. Certains, au nombre de 46,2 %, sont, en effet, obligés de les louer ou de les emprunter.

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Les substances utilisées

Plusieurs substances sont utilisées par les vidangeurs lors des opérations de vidange. Leur usage est fonction des étapes du processus de vidange.

Avant la vidange

Les substances employées avant la vidange sont sensées modifier la qualité de la boue. Il s‟agit principalement de l‟eau de javel, du pétrole, du grésil et de l‟hydroxyde de calcium communément appelé la chaux [CA(OH2)]. Le procédé consiste à verser un à deux litres (ou un à deux kilogrammes) d‟un de ces produits ou de leur mélange dans la fosse quelques heures avant le démarrage du processus.
Les effets attendus sont: l‟élimination des microbes afin de se protéger contre les maladies, la liquéfaction de la boue pour faciliter le travail et la neutralisation de l‟odeur nauséabonde en vue de réduire les nuisances olfactives. Le tableau 13 fait la synthèse de l‟utilisation de ces produits et des effets de leurs actions sur la boue tels que perçus par les vidangeurs.

Après la vidange

Les vidangeurs ont tous tendance, au terme de la vidange, à utiliser des antiseptiques et des détergents. Le procédé consiste à se laver et à faire le linge avec de l‟eau javellisée et du savon afin de tuer tout germe qui aurait été à leur contact. Certains, pour minimiser d‟avantage les risques, s‟enduisent les mains d‟eau de javel et parfois même de grésil quelques minutes avant le bain. La figure 15 renseigne à suffisance sur le degré de conscience des vidangeurs interrogés face aux risques sanitaires inhérents à leur activité.

Les conditions organisationnelles

L’inexistence de cadre organisationnel

L‟un des aspects caractéristiques des vidangeurs manuels est leur manque d‟organisation. Aucune structure sensée les regrouper n‟existe à Malika. Cette situation s‟explique par: l‟ignorance par bon nombre d‟entre eux des enjeux liés à une éventuelle structuration autour d‟un cadre formel; la méconnaissance des procédures à mettre en oeuvre soulignée par la plupart des vidangeurs rencontrés; et le déficit d‟attention et d‟encadrement dont ils font l‟objet de la part des pouvoirs publics .Toutes choses qui prouvent que la vidange manuelle est encore loin d‟être une priorité dans les politiques d‟assainissement et de GBV.

Les conditions favorables à la création d’un cadre organisationnel

Même si le cadre organisationnel des vidangeurs fait défaut, les conditions favorables à sa mise en place existent. Elles peuvent être analysées à deux niveaux : la vidange en équipe et la collaboration entre vidangeurs ou équipes de vidangeurs.

La vidange en équipe

Elle concerne 57,7 % des vidangeurs de la commune de Malika, lesquels sont organisés en groupes de deux ou trois personnes (voir tableau 14) qui se partagent les différentes tâches. Le travail se fait alors à la chaîne et les montants perçus sont généralement partagés de manière équitable. Bien exploitée, cette vidange en équipe pourrait, compte tenu du nombre important de vidangeurs qu‟elle mobilise, servir de base à un éventuel processus de structuration.

Les tâches préparatoires

Les tâches préparatoires correspondent aux opérations effectuées avant le démarrage de la vidange proprement dite. Ces opérations sont successivement l‟ouverture du trou de récupération des boues et l‟introduction de substances chimiques dans la fosse.
L’ouverture du trou de récupération des boues se fait de manière rudimentaire à l‟aide de pelles et parfois de pioches. Ce qui explique la fatigue fréquente notée chez les vidangeurs de même que les courbatures et autres douleurs lombaires. Le trou ainsi creusé peut avoir une profondeur d‟un à plus de deux mètres pour un diamètre souvent supérieur à un mètre. Sa localisation est, selon le voeu des clients et la disponibilité de l‟espace, à l‟intérieur de la concession ou dans la rue.
L’introduction dans la fosse de substances chimiques est une pratique très fréquente chez les vidangeurs manuels. Ces substances dont les effets recherchés sur la boue sont évoqués dans le tableau 13 sont sensées faciliter les tâches opérationnelles de vidange et protéger les opérateurs contre la contamination par les germes pathogènes. Elles exposent toutefois les vidangeurs à des risques chimiques dont l‟ampleur et la nature restent à déterminer. Les plus utilisés sont l‟eau de javel, le pétrole lampant, le grésil et l‟hydroxyde de calcium.

L’évacuation et le dépotage de la boue

Une fois le seau rempli, son contenu est immédiatement versé dans le trou situé souvent à quelques mètres de la fosse. Ce qui oblige les vidangeurs à effectuer des va-et-vient qui rendent leur travail plus dur. Le lieu de dépotage qui est parfois à plus de dix mètres de la fosse demeure par excellence la rue (photo 3). Le pourcentage de vidangeurs ayant déclaré qu‟il leurs arrive d‟y dépoter la boue est estimé à 80,8% d‟après les résultats d‟enquête. A coté il ya la cour des concessions qui est utilisé comme lieu de dépotage par 38,5% des vidangeurs interrogés.
Cette situation ainsi décrite prouve si besoin en est que la vidange manuelle est une activité à risques non seulement pour les opérateurs qui la pratiquent mais aussi pour les ménages qui sollicitent leur service.

Les impacts environnementaux

La dégradation du cadre de vie

Elle constitue l‟un des aspects les plus répréhensibles de l‟activité au regard des dispositions légales et aux attributions des agents du Service National d‟Hygiène. Celle – ci modifie négativement le cadre de vie et donne une image assez hideuse des rues où jonchent les trous immondes de boue. Cette situation indispose considérablement les chefs de ménages dont 95,8 % disent être gênés par ses effets notamment en termes de dégradation esthétique, de mauvaise odeur, de prolifération des mouches et des moustiques (figure 18). Elle explique par ailleurs le fait que 71,6% des ménages se font vidanger la nuit d‟après l‟enquête.

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