L’efficacité de la politique monétaire de la banque centrale

La dichotomie classique

Dans le Traité d’économie politique (1803), Jean-Baptiste Say affirme que la monnaie n’est qu’une voile qui masque la réalité des échanges. En définitive un produit s’est échangé contre un produit. La monnaie n’est donc qu’un intermédiaire des échanges dont il convient de ne pas tenir compte pour comprendre la réalité des échanges. Ainsi cela conduit à la formulation de la loi des débouchés selon laquelle il ne peut pas y avoir de surproduction puisque l’offre crée sa propre demande. « Un produit terminé offre, dès cet instant, un débouché à d’autres produits pour le montant de sa valeur » (Giles J, 1997).
En effet cette approche est reprise par David Ricardo, dans Des principes de l’économie politique et de l’impôt publiés 1817.Pour Ricardo, les prix relatifs sont déterminés par la quantité de travail incorporé dans chaque produit (valeur-travail). Donc l’augmentation de la quantité de monnaie est sans effet sur les prix relatifs.
Et même pour John Stuart Mill, en 1848, dans les Principes d’économie politique, il reprend cette analyse qui dénie à la croissance du stock de monnaie toute influence sur la production ou le commerce et la limite à un impact inflationniste.

Monnaie et l’équilibre général

Dans Eléments d’économie pure, publié en 1876, Léon Walras, l’un des chefs de file du courant néoclassique, construit un équilibre général, représenté par un système d’équation rendant compte de l’ensemble des prix relatifs, défini comme une situation où tous les marchés sont en équilibre. La construction de cet équilibre général ne nécessite pas la prise en compte de la monnaie et, lorsque celle-ci est introduite dans le système, elle ne modifie pas l’équilibre des prix relatifs. Partons d’un équilibre général sans monnaie et introduisons la monnaie. L’une des marchandises participant à cet équilibre, l’or par exemple, se voit ainsi attribuer le rôle de monnaie. Une partie de l’or étant désormais destinée à des fins monétaires, il devient plus rare pour les autres marchandises. Autrement dit, les prix de toutes les marchandises exprimés en or, marchandise retenue comme monnaie, diminuent lorsque l’or se raréfie. L’équilibre est préservé et Walras peut conclure à la validité de la théorie quantitative : «Toute augmentation ou diminution dans la quantité de la marchandise monnaie a pour effet une augmentation ou une diminution sensiblement proportionnelle dans les prix».

Le monétarisme de Milton Friedman

Milton Friedman montre donc qu’une variation de la quantité de monnaie entraine une variation du revenu réel et une variation de prix .Lorsque un revenu s’élève d’un pourcentage, seule une partie correspond à un gain de pouvoir d’achat tandis que l’autre ne fait que suivre la hausse de prix. Le taux de croissance de revenu monétaire englobe le taux de croissance de revenu réel et le taux de croissance des prix. Ce taux de croissance du revenu monétaire correspond à celui de la quantité de la monnaie, créée par les autorités monétaires et demandée par les agents économiques. Dès lors, c’est le taux de croissance de la masse monétaire qui englobe le taux de croissance du revenu réel et le taux de croissance des prix.
Par conséquent, tout accroissement de la quantité de monnaie supérieur à celui de revenu réel correspond à un supplément d’inflation.
L’inflation a ainsi une origine monétaire. Si le pouvoir politique veut lutter contre elle, il doit suivre la «règle monétaire» préconisé par Friedman, c’est-à-dire décréter, si possible dans la constitution, que la masse monétaire doit varier à taux constant, égal au taux de croissance à long terme de la production nationale. De nombreux auteurs appartenant à la mouvance monétariste ont théorisé cette relation entre monnaie et prix. C’est sur ces raisonnements d’inspiration quantitativiste que s’appuient les banques centrales lorsqu’elles tentent de lutter contre l’inflation en prenant des mesures destinées à limiter la création monétaire.

Les instruments indirects de la politique monétaire

Pour maitriser les normes de crédit, les banques centrales utilisent désormais des instruments qui agissent sur la liquidité des banques, c’est-à-dire sur la somme de leurs avoirs en monnaie banque centrale, pour parvenir à piloter l’évolution des taux d’intérêt et la création monétaire. Il s’agit donc d’un contrôle indirect.
Si la banque centrale estime que la croissance de la masse monétaire est excessive, elle réduit la liquidité bancaire en augmentant les besoins en monnaie banque centrale ou en les renchérissant, notamment en asséchant le marché interbancaire et/ou en augmentant le coût du refinancement. Réciproquement, si la banque centrale estime que la création monétaire est insuffisante, elle augmente la liquidité bancaire en diminuant les besoins en monnaie banque centrale ou en les rendant meilleur marché, notamment en apportant des liquidités sur le marché interbancaire et/ou en diminuant le coût du refinancement. Ces instruments sont les plus adoptés par les banques centrales, ce sont le taux de réescompte, l’Open market, la réserve obligatoire et la politique de taux directeur.
Le taux de réescompte : Lorsque les banques n’ont pas suffisamment de liquidité, elles peuvent se refinancer auprès de la banque centrale en réescomptant les effets de commerce qu’elles possèdent moyennant un taux de réescompte. Donc cette pratique met directement en relation les banques et la banque centrale par la reconnaissance de dette.
« À mesure que se développait l’usage de la monnaie scripturale émise par les différentes banques, la banque centrale est devenue la « banque des banques », c’est-à-dire l’agent de leur refinancement. De ce fait, elle exerce une action directe sur leur liquidité… » (Diatkine S.). En modulant le taux et le niveau d’escompte, la banque centrale influe sur la création monétaire et sur le niveau de liquidité de l’économie nationale.
Cette technique n’est plus efficace car le système est coûteux, et lorsque les banques ont besoin de liquidité, elles vont s’adresser au marché interbancaire (en empruntant de la monnaie centrale aux banques excédentaires moyennant le paiement d’un intérêt) au lieu de la banque centrale. Cependant, ce taux de réescompte reste un indicateur monétaire très important car il est un reflet de l’état de liquidité de l’économie.
L’open Market : L’opération d’open market (Open market opération, BCE, 2004): est donc une opération réalisée à l’initiative de la banque centrale sur les marchés de capitaux, qui implique l’une des transactions suivantes : achat ou vente ferme d’actifs (au comptant ou à terme); achat ou vente d’actifs dans le cadre d’un accord de pension; prêt ou emprunt contre des actifs admis en garantie; émission de certificats de dette de banque centrale; reprises de liquidité en blanc ; ou swaps de change euros contre devises.

L’efficacité des politiques monétaires contestée par les monétaristes et les nouveaux classiques 

Trois critiques à l’égard des politiques monétaires conjoncturelles : La politique monétaire expansive se traduit par une accélération de l’inflation. Cela se produit à long terme selon Friedman du fait de l’illusion monétaire.
La politique monétaire conjoncturelle se heurte selon Friedman au problème des délais: si les cycles d’activité sont courts et que les délais d’efficacité de la politique monétaire sont longs alors une politique monétaire contra-cyclique risque de se retrouver pro-cyclique.
Les monétaristes critiquent le choix du taux d’intérêt nominal comme objectif intermédiaire de la politique monétaire, dans la mesure où le taux d’intérêt nominal se compose de deux éléments : la rémunération d’un placement et l’inflation anticipée.
Or lorsque le taux d’intérêt nominal varie, il est impossible de savoir si c’est la rémunération ou l’inflation anticipée qui sera modifiée.
Pour les classiques la politique monétaire doit s’appliquer sur un principe réglementaire et non discrétionnaire :
On retrouve ici le débat sur la crédibilité. Pour que les agents croient à la désinflation et modifient leurs anticipations il faut que la décision gouvernementale soit irréversible.
À défaut la révision de la politique monétaire dans le but de combattre le chômage aura deux conséquences :
le chômage ne baissera que momentanément, du fait de l’effet de surprise dont sont victimes les agents. perte de crédibilité pour l’avenir. Une politique monétaire n’est crédible que si elle respecte la condition de cohérence intemporelle des choix. Cette crédibilité peut s’acquérir : Une première solution consiste à rendre la Banque centrale indépendante, ce qui évite de voir apparaître des cycles politico-économiques. L’inflation est d’autant plus faible que la Banque centrale est indépendante. Ce modèle d’indépendance des Banques centrales connait une grande audience. Une seconde solution consiste à fonder la crédibilité de la Banque centrale non sur son indépendance, mais sur des règles de comportement. Selon Kenneth Rogoff (1985), il convient de nommer à la tête d’une Banque centrale une personnalité conservatrice, ayant une forte aversion pour l’inflation. Par ailleurs en adoptant un système à changes fixes, un pays peut importer la crédibilité de ses partenaires en matière de lutte contre l’inflation.

Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE I : LA CONTRIBUTION DE LA POLITIQUE MONETAIRE SUR LA STABILITE DE PRIX 
Chapitre 1 : LA RELATION ENTRE LE PRIX ET LA MONNAIE
Section 1 : L’analyse préclassique et classique
1. La genèse de la théorie quantitative
2. La dichotomie classique
Section 2 : Monnaie et prix dans l’analyse néoclassique 
1. Monnaie et l’équilibre général
2. L’équation quantitative de la monnaie d’Irving Fisher (1911)
3. L’équation quantitative de Cambridge
Section3 : Le renouveau de la théorie quantitative
1. Don Patinkin et l’effet d’encaisse réelle
2. Le monétarisme de Milton Friedman
Conclusion du chapitre 1
Chapitre 2 : LE MECANISME DE LA POLITIQUE MONETAIRE VERS LA STABILITE DE PRIX
Section 1 : Les instruments de la politique monétaire pour stabiliser le prix 
1. L’instrument direct de la politique monétaire
L’encadrement du crédit
2. Les instruments indirects de la politique monétaire
Le taux de réescompte
L’open Market
La réserve obligatoire
Remarque : La politique de taux directeur
Section 2 : L’efficacité de la politique monétaire selon les keynésiens et les monétaristes et nouveaux classiques
1. L’efficacité des politiques monétaires conjoncturelles chez les keynésiens
2. L’efficacité des politiques monétaires contestée par les monétaristes et les nouveaux classiques
Conclusion du chapitre 2
PARTIE II : ANALYSE DE L’EFFICACITE DE LA POLITIQUE MONETAIRE DE LA BANQUE CENTRALE DE MADAGASCAR (Banky Foiben’i Madagasikara_BFM) de 2013 à 2017
Chapitre 1: LE CADRE DE LA POLITIQUE MONETAIRE DE LA BFM 
Section 1 : la mission de la banque centrale de Madagascar
Section 2: Les instruments de la politique monétaire de la BFM
Le taux directeur
Le coefficient des réserves obligatoires (RO)
Les interventions sur le marché monétaire
Chapitre 2: ANALYSE DE LA POLITIQUE MONETAIRE DE LA BANQUE CENTRALE (entre 2013 et 2017) 
Section 1 : Observation des données empiriques : le taux d’inflation et la masse monétaire en circulation
Section 2 : l’analyse de la politique monétaire de la BFM entre la période de l’étude et leurs efficacités
CONCLUSION

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