L’émergence de la communication financière dans les sociétés françaises cotées
L’émergence puis l’affirmation d’un nouveau concept
Le changement de terminologie observé au milieu des années quatre-vingt (de la publicité à la communication) n’est toutefois pas propre à la publicité financière. C’est l’univers de la publicité dans sa globalité qui est concerné. Mattelart (1990, p. 82)4 fait notamment remarquer qu’en décembre 1988, « l’association des agences de conseils en publicité » (AACP) s’est métamorphosée en association des agences de conseils en communication (AACC) ». Il assimile ce changement à « une opération de chirurgie esthétique loin d’être innocente ». Le recours à l’étymologie (Rey et al., 1998)5 s’avère utile, si ce n’est indispensable, pour comprendre ce qui différencie les deux concepts que sont la publicité et la communication. Il ressort de ce détour étymologique que la publicité défend une logique purement informationnelle à la différence de la communication qui défend une logique relationnelle.
Publicité et logique informationnelle
Le verbe publier trouve son origine dans le latin publicare, dérivé lui-même de publicus qui signifie « rendre (quelque chose) propriété de l’Etat » et « rendre public ». Il prend divers sens particuliers à savoir : « mettre à la disposition du public », « montrer au public », « exposer, étaler (des livres) », d’où « faire paraître un écrit ». En 1265, le verbe publier au sens de « rendre public » acquiert un sens spécial à savoir celui d' »annoncer officiellement ». Toutefois, même s’il prend d’autres sens, l’idée omniprésente reste celle de « rendre public ». Son substantif, le mot publicité est enregistré pour la première fois en 1689. Il prend alors un sens juridique, celui d' »action de porter à la connaissance du public ». La publicité a pour objectif d’informer. Le mot publicité désigne ensuite le « fait d’exercer une action sur le public à des fins commerciales ». Ce dernier sens constitue une restriction du sens juridique. La publicité a certes pour objectif d’informer mais ceci dans le but d’influencer. Brunereau et Mathiaud (1975)6 s’interroge d’ailleurs sur l’utilisation du terme publicité financière. Ils se posent ainsi la question de savoir s’il s’agit d’un anachronisme de parler de « publicité financière ». En d’autres termes, la publicité financière a t-elle uniquement pour objectif d’informer les milieux financiers, ou alors la publicité financière se rapproche t-elle de la publicité commerciale et dans ce cas elle a également pour objectif d’influencer ? Si le mot publicité signifie à l’origine « rendre public », sans aucune connotation commerciale, Brunereau et Mathiaud (1975)7 montre que la publicité financière s’apparente à la fin des années soixante et au début des années soixante-dix à un « marketing financier » (marketing du titre). Brunereau et Mathiaud (1975)8 n’utilisent toutefois pas encore en 1975 l’expression de communication financière.
Communication et logique relationnelle
Le verbe communiquer, quant à lui, a été emprunté au latin communicare qui signifie d’abord « avoir part, partager », et se rapproche donc du sens du verbe communier à savoir « être en relation avec ». Quant à son substantif, le mot communication, il est emprunté au dérivé latin communicatio, qui signifie « mise en commun, échange de propos, action de faire part ». Le concept a été introduit dans la langue française avec le sens général de « manière d’être ensemble ». La relation est donc une composante clé de la communication. Ainsi, au regard de l’étymologie du mot communication, nous avons eu l’intuition au début de notre recherche que le passage de la publicité financière à la communication financière pouvait se traduire par l’intégration d’une logique relationnelle qui serait venu compléter la logique informationnelle présente dans la publicité financière. Autrement dit, le changement de terminologie opéré au milieu des années quatre-vingt serait le reflet de l’intégration d’une logique relationnelle, ce qui reviendrait à penser que la communication financière, contrairement à la publicité financière, participe au dynamisme de la relation entre l’entreprise et son public. Dans le cadre de notre recherche, nous nous sommes basée sur un public particulier à savoir les actionnaires, car ce public représente le destinataire historique de la publicité financière et de la communication financière.
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