L’enseignement-apprentissage du vocabulaire

D’après Polguère (2008), la notion de vocabulaire peut être étudiée sous deux volets: le vocabulaire d’un individu et le vocabulaire d’un texte. Le vocabulaire d’un individu « est le sous-ensemble du lexique d’une langue donnée contenant les lexies de cette langue que maîtrise l’individu en question » (Polguère, 2008, p. 73). Le vocabulaire d’un texte se définit par l’ensemble des mots utilisé dans un texte ou un ensemble de textes, un texte oral ou écrit ou un texte impliquant un locuteur unique ou un ensemble de locuteurs (Polguère, 2008). Tout comme la définition proposée par Polguère (2008), Legendre (2005) définit le vocabulaire d’un individu ainsi : «ensemble des mots que connaît un individu et dont il peut disposer pour entrer en communication avec autrui; bagage lexical d’un individu » (Legendre, 2005, p. 1449).

Considérant les définitions suggérées par ces auteurs, le vocabulaire est considéré comme étant le nombre d’unités (lexie ou mot) de la langue que maîtrise un individu. En opposition avec celle du vocabulaire, la notion de lexique d’une langue est plutôt définie par l’entité théorique qui correspond à l’ensemble des lexies de cette langue. En se référant à ces notions distinctes du vocabulaire et du lexique, il est impossible pour une personne de maîtriser tout le lexique d’une langue. Cependant, il lui est possible d’enrichir et d’augmenter son vocabulaire provenant de ce lexique.

L’ENSEIGNEMENT-APPRENTISSAGE DU VOCABULAIRE

L’apprentissage du vocabulaire peut être étudié sous différents angles. En effet, il peut être étudié à l’oral (mots entendus ou parlés) et à l’écrit (mots lus et écrits) (Kibby, 1995). Le langage, tout comme le vocabulaire, peut être également abordé sous le volet réceptif ou expressif (Graves, 2006; Hiebert & Kamil, 2005; Vadasy & Nelson, 2012). Le vocabulaire réceptif est celui compris à l’oral ou à l’écrit et le langage expressif est les mots produits à l’oral ou à l’écrit.

La connaissance d’un mot implique l’enseignement-apprentissage de plusieurs de ses facettes comme la forme, la signification et l’usage (Nation, 2001). En ce sens, la connaissance de la forme signifie connaître sa phonologie, son orthographe et sa morphologie. La signification, quant à elle, se rapporte à connaître les concepts du mot, mais aussi les associations entre d’autres mots. La connaissance des structures grammaticales, des autres mots qui peuvent l’accompagner et des contraintes (fréquence et registre de langue) reliées à son emploi font partie de l’usage du mot. Pour Vadasy et Nelson (2012), deux concepts sont à considérer pour qu’un énoncé soit lu ou entendu correctement : l’étendue (breadth) et la profondeur (depth) du vocabulaire. L’étendue du vocabulaire, associée au versant réceptif du langage, représente la quantité de mots que connaît un individu. La profondeur du vocabulaire réfère à la connaissance (signification) et à l’utilisation appropriée de mots (usage). Elle est également associée au versant expressif du vocabulaire. Plus précisément, Craik et Lockhart (1972) proposent une approche portant sur la profondeur du traitement. Ces derniers stipulent qu’un stimulus peut être analysé à deux niveaux de traitement différents : les niveaux superficiels traitent les caractéristiques physiques et sensorielles des mots. Les niveaux profonds exigent des analyses et des manipulations sur la signification ou des associations à des images et expériences passées qui se rattachent au stimulus (Craik & Lockhart, 1972). Cette approche démontre que plus le stimulus est analysé à un niveau profond, plus la rétention (la mémorisation) de ce dernier sera durable comparativement, à une analyse superficielle. À titre d’exemple, la mémorisation d’un mot aura plus d’impact si l’enseignante tient compte de la définition du mot ou d’une expérience liée à celui-ci, comparativement à la typographie (mot écrit en lettre majuscule) ou à la sonorité (mot qui rime avec un autre mot) que propose l’analyse superficielle. Bien que la définition et l’expérience reliées au mot soient d’une grande importance dans la mémorisation, la fréquence d’exposition d’un mot a aussi une influence sur sa rétention. Notamment, les auteurs (Graves, 2006; Vadasy & Nelson, 2012) affirment que la connaissance en profondeur d’un mot à l’écrit ou à l’oral s’améliore à la suite d’une exposition nouvelle et répétée. Plus spécifiquement, Nation (2001) souligne que l’acquisition d’un nouveau mot exige cinq à vingt rencontres avec le mot.

La connaissance de type production (1) réfère aux mots utilisés dans les productions orales et écrites (Kibby, 1995). À cet effet, les mots sont connus sous leur forme, leurs significations et leur usage. Ce type de connaissance peut être attribué à la notion de vocabulaire expressif. La connaissance de type reconnaissance (2) fait référence à un concept qui est connu, mais qui n’est pas employé à l’écrit ou à l’oral par l’individu, il est abordé souvent en termes de vocabulaire réceptif. La connaissance organisée sans mot approprié (3) est celle d’un individu connaissant bien un concept, mais qui ne sait pas le mot qui le représente (forme). À titre d’exemple, la plupart des enfants et adultes savent qu’ils possèdent deux petites lignes entre la partie inférieure du nez et la partie supérieure de la lèvre par conséquent, ils ne savent pas que le mot qui correspond à cette partie du corps est philtrum. La connaissance non organisée (4) réfère à un individu ayant une connaissance incomplète du concept (signification) et dont sa compréhension n’est pas globale. Par exemple, l’apprenant cherche le mot cadence dans le dictionnaire toutefois, plusieurs autres termes musicaux sont employés pour définir ce mot. L’apprenant est incapable de comprendre le concept cadence, car il ne maîtrise pas les autres mots relatifs à la musique. La connaissance immédiatement accessible (5) représente celle d’un individu ayant les connaissances sous-jacentes nécessaires pour comprendre le nouveau concept, mais dont un enseignement est nécessaire pour qu’il comprenne en profondeur le concept. Enfin, la connaissance potentiellement accessible (6) signifie qu’un individu doit recevoir un enseignement au sujet des concepts sous-jacents à l’apprentissage d’un concept complètement nouveau. Par exemple, un professeur de sciences doit enseigner le concept de chromosome, ce dernier doit d’abord expliquer les concepts sous-jacents comme l’ADN (acide désoxyribonucléique) et le gène avant de définir le mot chromosome.

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 PROBLÉMATIQUE
1.1 MISE EN CONTEXTE DE LA PROBLÉMATIQUE
1.1.1 L’IMPORTANCE DU VOCABULAIRE DANS L’APPRENTISSAGE DE LA LECTURE ET DE L’ÉCRITURE
1.1.2 LES DIFFICULTÉS LEXICALES DES ENFANTS AYANT UNE DYSPHASIE
1.1.3 L’APPRENTISSAGE DU VOCABULAIRE AUPRÈS DES ÉLÈVES AYANT UNE DYSPHASIE
1.2 QUESTION GÉNÉRALE ET OBJECTIFS DE RECHERCHE
CHAPITRE 2 CADRE THÉORIQUE
2.1 LA DYSPHASIE
2.1.1 VERS UNE DÉFINITION DE LA DYSPHASIE
2.1.2 DÉFINITION DE LA DYSPHASIE
2.1.3 L’APPRENTISSAGE DU VOCABULAIRE POUR LES ENFANTS AYANT UNE DYSPHASIE
2.2 LE VOCABULAIRE
2.2.1 L’ENSEIGNEMENT-APPRENTISSAGE DU VOCABULAIRE
2.2.2 ENSEIGNEMENT IMPLICITE DU VOCABULAIRE
2.2.3 ENSEIGNEMENT EXPLICITE DU VOCABULAIRE.
CHAPITRE 3 CADRE MÉTHODOLOGIQUE
3.1 L’APPROCHE ÉPISTÉMOLOGIQUE PRIVILÉGIÉE
3.2 LE DEVIS DE L’ÉTUDE
3.2.1 DESCRIPTION DE L’ENSEIGNANTE
3.2.2 DESCRIPTION DU MILIEU
3.2.3 DÉROULEMENT ET INSTRUMENTS DE COLLECTE DE DONNÉES
3.2.3.1 Entrevue semi-dirigée
3.2.3.2 Observation non-participante
3.2.3.3 Artéfacts
3.3 ANALYSE DES DONNÉES
3.4 LES CONSIDÉRATIONS ÉTHIQUES
CHAPITRE 4 LES RÉSULTATS
4.1 LES TYPES DE MOTS ENSEIGNÉS
4.1.1 MOTS DE LA SEMAINE
4.1.2 MOTS RENCONTRÉS ACCIDENTELLEMENT
4.2 LES PRATIQUES PÉDAGOGIQUES PRÉDOMINANTES
4.2.1 L’ENSEIGNEMENT SPONTANÉ NON PLANIFIÉ
4.2.1.1 Questionnement et discussion
4.2.1.2 La lecture interactive en dyade
4.2.1.3 Les jeux de table
4.2.1.4 Recours aux sens et à l’imagerie mentale
4.2.2 L’ENSEIGNEMENT EXPLICITE
4.2.2.1 Les cartes de mots numériques
4.3 LES ASPECTS DU VOCABULAIRE ENSEIGNÉ
4.3.1 LA FORME ORALE DU VOCABULAIRE
4.3.2 LA FORME ÉCRITE DU VOCABULAIRE
4.4 LES FACETTES DU VOCABULAIRE ENSEIGNÉ
4.4.1 LA FORME DES MOTS
4.4.2 LA SIGNIFICATION DES MOTS
4.4.3 L’USAGE DES MOTS
CHAPITRE 5 L’ANALYSE DES RÉSULTATS
5.1 CONSTAT 1 : COMBINAISON DE PRATIQUES D’ENSEIGNEMENT DU VOCABULAIRE
AUPRÈS D’ÉLÈVES DYSPHASIQUES
5.2 CONSTAT 2 : PRÉSENTATION DE NOUVEAUX MOTS RENCONTRÉS EN CONTEXTE
D’ENSEIGNEMENT EXPLICITE
5.3 CONSTAT 3 : TYPES DE MOTS ENSEIGNÉS EN CONTEXTE D’ENSEIGNEMENT
SPONTANÉ NON PLANIFIÉ ET D’ENSEIGNEMENT EXPLICITE 57
5.4 CONSTAT 4 : DIMENSIONS ET ASPECTS DU VOCABULAIRE SOLLICITÉS EN
FONCTION DE L’INTENTION PÉDAGOGIQUE
CONCLUSION

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