Les différentes formes cliniques de psoriasis

Epidémiologie

Le psoriasis touche 2 à 3% de la population en France. Dans 30% des cas, des antécédents familiaux ont été mis en évidence chez les sujets atteints de psoriasis. 77% des patients considèrent que le psoriasis altère leur qualité de vie et seulement 25% des patients affirment être satisfaits de leur traitement.
Le psoriasis apparait aussi bien chez les hommes que chez les femmes et cela à n’importe quel âge de la vie. En fonction de l’âge d’apparition du psoriasis on parlera, soit de psoriasis de type 1, soit de psoriasis de type 2 :
 psoriasis de type 1 : il apparait le plus souvent avant 30 ans, la composante familiale est forte et l’évolution clinique plus sévère que le second.
 psoriasis de type 2 : l’apparition est plus tardive, en général après 50 ans, la composante familiale est faible et l’évolution clinique plus bénigne.
La prévalence du psoriasis varie significativement selon l’origine ethnique. En effet, le psoriasis touche plus fréquemment la population Européenne et Nord-Américaine que la population Africaine et Sud-Américaine.

Les différentes formes cliniques de psoriasis

En fonction de la topographie, de la morphologie, de l’étendue et de la gravité des lésions, le psoriasis est classé en différentes formes cliniques.

Les formes cliniques plus particulières du psoriasis

– Le psoriasis inversé ou psoriasis des plis, est un type de psoriasis où les lésions peuvent se situer au niveau des différents plis du corps : sillon interfessier, creux axillaires, creux poplités, pli inguinal ou sous mammaire, pli ombilical, ou encore au niveau des espaces interdigitaux plantaires. Les lésions sont le plus souvent formées d’une plaque rouge vif, brillante, peu ou non squameuse et à bordure bien dessinée. Dans certains cas, du fait de la macération, les lésions peuvent êtres suintantes et douloureuses.
– Le psoriasis du cuir chevelu et du visage : Le psoriasis du cuir chevelu touche 50 à 80% des patients psoriasiques. (15) Les plaques sont de tailles variables et peuvent dans certains cas recouvrir entièrement le cuir chevelu. Les lésions, bien délimitées et couvertes de squames sèches ou grasses, sont très souvent irritées, prurigineuses et bordées à la lisière du cuir chevelu.
Concernant le psoriasis du visage, celui-ci est plus rare et généralement discret. Chez les enfants il se situe principalement sur les paupières et la région périorale, et chez les adultes au niveau du front, des sourcils et des ailes du nez.
– Le psoriasis palmo-plantaire : Il est soit isolé, soit associé à d’autres localisations. Les lésions sont le plus souvent bilatérales, de contour arrondi, recouvertes de squames épaisses jaunâtres, sèches et dures.
– Le psoriasis des muqueuses : Ce type de psoriasis est assez rare. Il peut exister isolément ou accompagner une forme commune ou inversée. Cette forme de psoriasis concerne les muqueuses buccales (langue, gencive, face interne des joues), génitales (masculine et féminine) et peut également toucher l’appareil oculaire.
– Le psoriasis des ongles : Il est très fréquent (30 à 50% des cas) et s’associe le plus souvent à un psoriasis cutané. L’ongle présente alors un aspect décollé et sa surface est recouverte de petites dépressions punctiformes (aspect de dé à coudre).

Les formes graves du psoriasis

– Le psoriasis pustuleux : C’est une forme particulière de psoriasis, assez rare qui se traduit par la présence de pustules blanches-jaunâtres non infectieuses. L’éruption peut être localisée ou généralisée avec un risque d’altération de l’état général pouvant mettre en jeu le pronostic vital. (11) (16) Ce type de psoriasis fait souvent suite à l’utilisation prolongée de dermocorticoïdes forts.

– Le psoriasis érythrodermique : L’érythrodermie psoriasique est une forme grave de psoriasis survenant rarement. L’érythrodermie complique en général un psoriasis déjà installé. Cette complication découle de différents facteurs, essentiellement médicamenteux, comme par exemple l’arrêt brutal de la prise de corticoïdes par voie générale ou bien l’utilisation de traitements locaux trop agressifs. L’érythrodermie peut toucher la totalité de la surface cutanée. Ce type de psoriasis peut soit se manifester sous une forme sèche avec des squames tombant en abondance ; ou bien sous une forme plus sévère humide, prurigineuse et oedémateuse touchant la totalité du corps. L’état général est altéré et accompagné de trouble de la thermorégulation, de risque de surinfection et de déshydratation mettant en jeu le pronostic vital.

– Le psoriasis associé à un rhumatisme psoriasique : il s’agit d’un rhumatisme inflammatoire appartenant au groupe des spondylarthropathies touchant les articulations périphériques (doigts, orteils) et/ou la colonne vertébrale. (11) Dans la majorité des cas ce rhumatisme apparaît chez des personnes déjà psoriasiques, dans 15% des cas, de façon simultanée avec les atteintes cutanées, et dans 10% des cas, il apparaît plus rarement, avant l’apparition des atteintes cutanées. Les poussées rhumatismales et psoriasiques sont soit indépendantes, soit simultanées.

Histologie de la plaque de psoriasis

Anomalies de l’épiderme

Les anomalies au niveau de l’épiderme sont nombreuses : l’activité métabolique des cellules épidermiques est augmentée, la maturation des kératinocytes perturbée, les espaces intercellulaires sont élargis, les jonctions intercellulaires ainsi que les canaux membranaires présentent des anomalies perturbant les transferts et la communication intercellulaire.
Les plaques renferment une grande quantité de cellules cutanées non parvenues à maturité. En effet, chez les personnes atteintes de psoriasis, le renouvellement cellulaire est accéléré comparé à celui d’un individu sain. Les kératinocytes se renouvellent seulement en quelques jours (3 à 5 jours) au lieu des 3 à 4 semaines nécessaires à la maturation normale des kératinocytes. (16) Les kératinocytes migrent donc trop rapidement de la couche basale vers la couche cornée et n’ont ainsi pas le temps de perdre leur noyau (parakératose). L’hyperprolifération et la différenciation hâtive des kératinocytes de l’épiderme sont à l’origine de la formation des lésions psoriasiques. De plus, ces lésions s’accompagnent d’une réaction inflammatoire locale du fait de la production par les kératinocytes, de nombreuses cytokines, en particulier des interleukines 1, 6, et 8.
La plaque se caractérise également par un épaississement de la couche cornée (hyperkératose) et de la couche spineuse (hyperacanthose). La couche granuleuse est quant à elle nettement diminuée, voir absente dans certains cas (agranulose). L’épiderme passe alors sans transition, de la couche spineuse à la couche cornée.
A ces anomalies épidermiques s’associent des anomalies immunologiques. En effet, une augmentation du nombre de polynucléaires neutrophiles et de lymphocytes, au sein de la plaque de psoriasis, est observée. Ces cellules regroupées dans les espaces intercellulaires, sous la couche cornée, forment des pustules nommées « micro-abcès de Munro-Sabouraud » qui sont caractéristiques du psoriasis pustuleux.

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Facteurs génétiques

Le terrain génétique est une condition sine qua non au processus de déclenchement du psoriasis. En effet, dans un cas sur trois il existe des antécédents familiaux : la fréquence du psoriasis chez les enfants dont l’un des parents est atteint serait autour de 30% et autour de 60% lorsque les deux parents sont atteints de psoriasis. De plus, les études menées chez des jumeaux confirment également le rôle des facteurs génétiques : la concordance du psoriasis est de 72% chez les jumeaux monozygotes et de 23% seulement chez les dizygotes.
Au total, pas moins de 1300 gènes, dont l’expression est altérée, ont été mis en évidence par des analyses génomiques fonctionnelles à grande échelle. Ces altérations touchent des gènes codant pour diverses protéines impliquées dans la réponse immunitaire. (16) D’autre part, toutes ces analyses génétiques ont dévoilé l’existence de 19 loci de susceptibilité nommés PSORS au niveau de 18 chromosomes différents. (16) Parmi ces loci se trouve le plus impliqué dans l’apparition du psoriasis, le locus PSORS1. Ce locus se situe sur le chromosome 6, dans la région des gènes du CMH et constitue le déterminant majeur du psoriasis. Il serait responsable de la composante génétique du psoriasis dans plus de 50% des cas. (21) L’allèle HLA-CW6 est également très fréquemment retrouvé chez les patients atteints de psoriasis. Le risque de développer un psoriasis est dix fois plus élevé chez les porteurs de cet allèle.

Facteurs immunologiques

Les troubles immunologiques résultent de la présence de gènes de prédisposition et de l’activation par des facteurs environnementaux. De nombreuses cellules de l’immunité sont impliquées dans la formation des plaques de psoriasis. Les interactions entre les kératinocytes, les cellules dendritiques et les lymphocytes T induisent la pathologie et sont à l’origine de l’hyperprolifération épidermique ainsi que de l’inflammation. Il s’en suit un cercle vicieux d’activation cellulaire responsable de la chronicité des lésions cutanées. (19)

Les différentes anomalies rencontrées dans la plaque de psoriasis

– Infiltration et sécrétion de cytokines par les lymphocytes T dans la plaque de psoriasis : Les lymphocytes T jouent un rôle capital dans le déclenchement et le maintien de l’inflammation. La lésion psoriasique s’accompagne d’une extravasation et d’une accumulation de lymphocytes T CD4 activés dans le derme et d’une population de lymphocytes T CD8, à activité cytotoxique dans l’épiderme. (14) La sécrétion de plusieurs cytokines par les lymphocytes T est responsable de l’hyperprolifération des kératinocytes.

Mécanisme de formation des lésions

La formation de la plaque de psoriasis se déroule selon deux phases : une phase de sensibilisation et une phase d’expression de l’inflammation. (28) Cette formation se compose de plusieurs étapes successives comprenant l’activation de nombreuses cellules de l’immunité et la production d’un très grand nombre de cytokines par les kératinocytes, les cellules dendritiques et les lymphocytes T. Ces cytokines sont au centre de l’inflammation et de la prolifération excessive des kératinocytes. Le psoriasis est certainement la dermatose inflammatoire chronique associée à la plus importante production de cytokines et chimiokines, qui fait que l’on parle de véritable « tempête cytokinique ». (26) De ces processus inflammatoires en résultent une hyperplasie kératinocytaire, une augmentation du réseau vasculaire cutané et une infiltration de polynucléaires neutrophiles et de lymphocytes.

Thérapeutique

Les traitements du psoriasis ont pour but de soulager les symptômes, de contrôler les poussées et de prolonger les périodes de rémission mais ne permettent pas une guérison définitive de la maladie.
La stratégie thérapeutique sera spécifique à chaque patient et dépendra de l’étendue, de la gravité des plaques, de l’impact sur la qualité de vie mais aussi de la tolérance et des résistances éventuelles aux différents médicaments. Dans certains cas, lorsque la maladie impacte sur l’esthétique, la profession et/ou sur le plan social, une aide psychologique doit êtreenvisagée.
Le traitement se fait en deux temps. Tout d’abord par un traitement d’attaque visant à « blanchir » le psoriasis, puis par un traitement d’entretien, à posologie minimale efficace, visant à éviter les récidives. Le traitement d’attaque a pour but de faire disparaître les lésions et le traitement d’entretien d’éviter les rechutes. Pour les formes peu étendues les traitements locaux seront privilégiés et a contrario, dans le cas de psoriasis généralisé, on utilisera la voie systémique et/ou la photothérapie. Concernant les biothérapies, celles-ci sont envisagées en deuxième intention en cas d’échec ou de contre-indication aux autres traitements systémiques.

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