LES FROMAGES A PATES MOLLES

LES FROMAGES A PATES MOLLES

Importance du marché des fromages en Europe et en France 

Le fromage est l’un des plus anciens moyens de conserver le lait et des preuves de l’existence de sa fabrication ont été attestées depuis le sixième millénaire avant notre ère (Salque et al, 2012). L’Europe produit annuellement 9 millions de tonnes de fromage (50% de la production mondiale) (Eurostat, 2013). La France quant à elle se situe au deuxième rang européen des pays producteurs de fromage – entre respectivement l’Allemagne et l’Italie – avec 1,9 millions de tonnes fabriquées chaque année soit un peu plus de 20 % de la production de l’Union Européenne et 10% de la production mondiale. Le chiffre d’affaires 2011 de l’industrie fromagère (hors fromages frais) s’élève à plus de 6,35 milliards d’euros dont 2,1 milliards concernent les fromages à pâtes molles. La balance commerciale de la France concernant les échanges de fromage est largement bénéficiaire avec un excédent de 1,7 milliard d’euros pour l’année 2012, dont 78 % de l’export et 96 % de l’import s’effectue avec d’autres pays de l’Union Européenne (CNIEL, 2013). Les français consomment chaque année un peu plus de 26 kg par habitant et par an, ce qui en fait le plus grand consommateur de l’Union. La France est réputée comme étant le « pays du fromage » pour sa consommation certes, mais aussi du fait de la diversité de son offre. Elle dénombre en effet plus de 1000 sortes de fromages dont 45 bénéficiant d’une « Appellation d’Origine Contrôlée » (AOC) ou d’une « Appellation d’Origine Protégée » (AOP) (CNIEL, 2013). Concernant les fromages à pâte molle en particulier, leur consommation représente 25 % de la consommation totale de fromage, juste après les pâtes pressées cuites. 

Technologie des fromages à pâte molle 

Les fromages à pâte molle sont définis dans la norme internationale Codex Alimentarius (CODEX STAN A-6-1973. Adopté en 1973. Révision 1999. Amendé en 2006, 2008, 2013) comme étant tous les fromages dont l’extrait sec dépasse 67 % durant la période de saumurage. En France, cette catégorie renferme aussi bien les produits traditionnels qui bénéficient du label AOC/AOP, souvent produits à partir de lait cru, que des produits industriels plus modernes et plus standardisés (Figure 1). Selon la conduite de l’affinage, deux types de croûte peuvent se développer sur les fromages à pâte molle permettant de diviser cette famille en deux sous-familles : les pâtes molles à croûte fleurie (ex. Brie, Camembert, Coulommiers) et les pâtes molles à croûte lavée ou croûte morgée (ex. Epoisses, Livarot, Maroilles, Munster). Malgré l’hétérogénéité des fromages à pâte molle, plusieurs points communs caractérisent la fabrication de ces fromages (Figure 2). 

L’ensemencement et la coagulation 

La coagulation est une étape de transformation chimique majeure du lait, conduisant à la séparation des fractions solubles et insolubles du lait. Elle peut être de type enzymatique (présure), lactique ou mixte (bactéries et présure). La coagulation enzymatique fait intervenir la présure, préparation enzymatique issue de la caillette (4ème poche de l’estomac) du veau. La présure se compose essentiellement de chymosine, enzyme protéolytique spécifique des liaisons phénylalanineméthionine de la caséine. (Alais, chap. 21, 1975). La coagulation lactique implique des bactéries lactiques (Lactic Acid Bacteria, LAB) qui fermentent le lactose – principal glucide du lait – en acide lactique. Cette flore lactique est naturellement présente dans le lait par contamination au moment de la traite dans la méthode traditionnelle. De manière à mieux maîtriser le développement de cette flore le lait peut aussi être pasteurisé puis ensemencé avec une culture de ferments lactiques préalablement préparée (Alais, chap. 21, 1975). Dans le cas des fromages à pâte molle, cette coagulation est dite « mixte » puisque la température du milieu (28 à 35 °C) et le pH de l’emprésurage (6,3 et 6,4) permettent à la fois l’action des enzymes et le développement des bactéries lactiques. Certaines technologies ajoutent aussi les ferments d’affinage à cette étape de la fabrication (Cogan et al., 2014, chap. 10). Fromage affiné pH = 6,3 Bactéries lactiques acidifiantes et présure – Production d’acide lactique – Création d’un gel lactique Levures acidophiles et alcalinisantes – Utilisation du lactate – Formation de métabolites alcalins – Désacidification de la surface Bactéries d’affinage acido-sensibles, aérobies et aromatisantes – Utilisation du lactate et des acides aminés libérés – Développement d’un arôme et d’une couleur caractéristiques Lait Caillés acides moulés Caillés démoulés et salés en saumure Caillé tranché aux couteaux 0 pH = 4,7 pH = 6 pH = 7,4 AFFINAGE 

L’égouttage et le tranchage 

A la coagulation du lait, s’ensuit un phénomène spontané d’expulsion de l’eau contenue dans le gel laitier appelé synérèse. Cette synérèse consiste en une contraction du réseau de caséines renfermant les globules gras et expulsant le lactosérum. L’égouttage peut se faire spontanément après moulage du caillé dans des moules perforés, mais également par pressage et/ou cuisson. Avant d’être moulé, le caillé est tranché en grains plus ou moins gros, afin d’augmenter la surface d’égouttage. Ce sont ces étapes de tranchage et d’égouttage qui vont conditionner en grande partie l’extrait sec du fromage et donc sa structure finale. Le type de pâte fromagère est très souvent lié à la façon dont a été menée cette étape. 

Le salage et l’affinage 

L’étape de salage est destinée à protéger le caillé contre l’installation de micro-organismes indésirables ainsi qu’à favoriser l’égouttage par drainage du sérum. Il contribue également à la formation de la croûte. Par la régulation de l’activité de l’eau (aw), le sel module le développement des micro-organismes et favorise les activités enzymatiques au cours de l’affinage. Le salage peut être effectué par immersion dans une solution de saumure (NaCl) concentrée, à sec par frottement à la surface, ou encore par incorporation du sel dans le caillé broyé. La plupart des fromages à pâte molle ont une teneur finale en NaCl comprise entre 1,5 et 2,0 %. L’affinage correspond donc à une succession de transformations biochimiques, réalisées à la fois par des enzymes déjà présentes dans le lait ou le caillé, et par des enzymes synthétisées par le microbiote qui se développe au cours de la maturation (bactéries, levures et/ou moisissures) (Choisy et al, 1997a ; Mahaut et al., 2000). Le temps d’affinage varie en moyenne de 12 à 45 jours suivant les fromages et les qualités organoleptiques désirées. Cette étape est d’autant plus importante concernant les fromages à pâte molle que la grande majorité de la typicité des fromages obtenus dépend du développement de la flore aérobie de surface lors de l’affinage, celle-ci intervenant tardivement (Brennan et al., 2004). Sur le plan chimique, il s’agit d’une série de transformations que sont : glycolyse des sucres résiduels, protéolyse des caséines, et lipolyse. Ces réactions libèrent respectivement des acides volatiles, des acides aminés, et des acides gras volatiles, responsables de l’arôme du fromage. Les différentes populations de micro-organismes évoluent en étroite interaction au long de l’affinage, de manière concourante ou successive. On distingue donc plusieurs microflores, ayant chacune un rôle spécifique.  

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