Les maladies surrénaliennes du furet

Présentation clinique des maladies surrénaliennes

Symptômes communs aux deux sexes

Symptômes cutanés

Alopécie bilatérale et symétrique

L’alopécie est le signe clinique le plus fréquemment rencontré chez les furets souffrant de maladie surrénalienne. Des études de ROSENTHAL et al. (1993) sur 50 cas et de WEISS et SCOTT (1997) sur 56 cas puis de WEISS et al. (1999) sur 94 cas rapportent une fréquence comprise entre 82 et 86 % pour ce symptôme49,71,72. Une étude plus récente de SWIDERSKI et al. (2008) sur 130 cas rapporte une fréquence de 61 %62.
La perte de poils démarre généralement à la fin de l’hiver ou au début du printemps par la base de la queue et les lombes et s’étend crânialement sur l’ensemble du corps de manière bilatérale (cf. figures 10,11 et 12) . On observe occasionnellement une régression spontanée des symptômes à l’automne puis une réapparition à nouveau le printemps suivant de manière plus étendue et plus intense pour à nouveau régresser à l’automne suivant. Cette séquence peut se répéter pendant une période de 2 à 3 ans puis une alopécie étendue, la plupart du temps symétrique et bilatérale, devient permanente. Elle s’étend sur tout le corps. La tête est généralement épargnée. Les poils encore présents sont très faciles à épiler9,18,44,48,61.
Figure 10 : Alopécie de la base de la queue et des lombes chez un furet atteint de maladie surrénalienne (Avec l’aimable autorisation du Dr Bulliot)
Figure 11 : Alopécie symétrique bilatérale chez un furet atteint de maladie surrénalienne (Avec l’aimable autorisation du Dr Bulliot)
Figure 12 : Alopécie du tronc chez un furet atteint de maladie surrénalienne (Avec l’aimable autorisation du Dr Bulliot)

Prurit

Selon les études, le prurit est observé dans 8,5 à 40% dans cas de maladie surrénalienne49,71,72. Il accompagne généralement l’alopécie, mais peut quelques fois être le seul signe clinique. Le prurit est le plus fréquemment observé sur le dos entre les épaules et la zone prurigineuse apparaît érythémateuse48,61.
Ce prurit ne répond à aucune médication (antihistaminiques, corticoïdes ou shampooing antiprurigineux) et disparaît généralement après la surrénalectomie48,61,72.

Autres symptômes cutanés

En association avec l’alopécie, on observe souvent des modifications de la peau.
Celle-ci devient plus fine et perd de la souplesse. Elle prend une allure de papier crépon59.
La peau peut présenter des comédons et des plaques érythémateuses. Le cou et la queue peuvent être kératoséborriques. Cet état est dû à une augmentation de la sécrétion des glandes sébacées et apocrines glandulaires59.
Un cas est rapporté présentant une télangiectasie cutanée diffuse sur l’ensemble du corps et de la tête apparue avant le début de la perte de poils73.

Léthargie et atrophie musculaire

En fonction des études, la léthargie est présente chez un nombre plus ou moins important de furets. Les études de WEISS rapportent une incidence comprise entre 63 et 68 %71,74 alors que l’étude plus récente de SWIDERSKI rapporte une incidence de seulement 3 % pour la léthargie62.
La léthargie correspond à une diminution du temps passé à jouer au profit du temps passé à dormir. Cependant ce critère est très subjectif, les propriétaires ne le rapportant pas toujours lors de l’anamnèse et l’attribuant plutôt à l’âge de leur furet. Ils sont cependant souvent surpris du regain d’activité rapide de leur furet après surrénalectomie72.
L’atrophie musculaire est rapportée chez 50 à 56 % des furets dans les 2 études de WEISS. Elle peut être plus ou moins sévère en fonction des cas. Elle est visible au niveau de la colonne vertébrale, du bassin et des cotes qui deviennent saillants. Les muscles temporaux peuvent aussi être touchés ainsi que les muscles des membres postérieurs. L’atrophie musculaire peut également toucher les muscles de la sangle abdominale, ce qui entraîne une distension abdominale72,74.
Le poids corporel est redistribué avec une augmentation de la masse graisseuse et une diminution de la masse musculaire.

Polyuro-polydypsie

Contrairement au chien chez lequel l’atteinte surrénalienne entraîne fréquemment l’apparition d’une polyuro-polydypsie, ce symptôme n’est que très peu exprimé chez le furet. Les études rapportent une fréquence de ce symptôme variant de 1 à 8 %. La polyuro-polydypsie n’est donc pas un signe d’appel chez le furet49,62,71,72.

Anomalies de la palpation abdominale

À la palpation abdominale, il est possible de noter la présence d’une masse au niveau du pôle crânial du rein gauche. La surrénale droite est plus difficile à palper du fait de sa position anatomique (sous un lobe hépatique). Cette anomalie à la palpation est rapportée
dans 34 % des cas dans l’étude de ROSENTHAL et al. et seulement dans 1 % des cas dans l’étude de SWIDERSKI et al.49,62.
Une splénomégalie est souvent rapportée chez les furets souffrant de maladie surrénalienne. Les 2 études de WEISS rapportent une fréquence de splénomégalie comprise entre 68 et 87 %71,72. Certains auteurs supposent que cette splénomégalie n’est aucunement liée à la maladie surrénalienne et est une découverte fortuite. D’autres pensent qu’il existe un lien entre les deux18,25. La plupart des cas de splénomégalie sont dus à une hématopoïèse extramédullaire. Plus rarement, la splénomégalie a une origine néoplasique. Les tumeurs les plus fréquentes sont le lymphosarcome et l’hémangiosarcome. Une hyperplasie nodulaire est également possible.

Autres signes

Une hyperplasie mammaire avec des nodules multilobés est parfois rapportée chez le mâle et chez la femelle34.
Des vomissements sont rapportés chez 1 % des furets atteints dans l’étude de WEISS et SCOTT. Cependant, le faible pourcentage pour ce signe clinique peut amener à penser qu’il n’y a pas de lien avec la maladie surrénalienne71.
SWIDERSKI et al. rapportent de la diarrhée chez 2 % des furets et de l’anorexie chez 1 % des furets de leur étude62.

Symptômes spécifiques à la femelle

Les femelles présentent une vulve hypertrophiée dans 47 à 89 % des cas lorsqu’elles souffrent de maladies surrénalienne. L’hypertrophie de la vulve est plus ou moins développée en fonction des cas. La vulve peut être simplement élargie, ou turgescente et œdématiée ressemblant à la vulve d’une furette en œstrus18,25,28,48,49,61,62.
Un écoulement séro-muqueux peut être présent. Seule l’étude de ROSENTHAL et al. s’est intéressée à ce signe clinique et le rapporte chez 66 % des furettes49. FOX et al. (1987) rapportent un cas présentant des écoulements vulvaires purulents et hémorragiques9.
Un examen cytologique peut montrer une vaginite localisée. La peau périvulvaire apparaît sombre et congestionnée et les poils entourant la vulve prennent un aspect collé et poisseux9.

Symptômes spécifiques au mâle

Deux symptômes peuvent être rapportés chez le mâle lors de maladie surrénalienne :
– Des problèmes urinaires de type strangurie et dysurie ;
– Un retour à un comportement de mâle entier chez un furet castré

Problèmes urinaires de type strangurie et dysurie

Des problèmes de type strangurie et dysurie sont rapporté chez 1 à 19 % des furets atteints de maladie surrénalienne selon les études. Il faut donc penser à la maladie surrénalienne si l’on rencontre ce type de problème chez un furet de 4 à 6 ans car cela peut être l’unique signe clinique exprimé18,25,28,48,49,61,62.
Les problèmes urinaires peuvent se manifester de plusieurs façons. On peut observer une obstruction partielle ou complète, une strangurie, une pollakiurie ou encore une incontinence. La stase urinaire est favorable aux infections et à la formation secondaire de cristaux. A la palpation, la vessie peut être distendue, douloureuse et être vidangée facilement s’il n’y a pas d’obstruction. Une hyperplasie de l’urètre pelvien et/ou de la prostate sont à l’origine de ces problèmes urinaires4,7,27,33,50.
Deux études se sont intéressées à la relation entre la maladie surrénalienne et l’atteinte de l’appareil uro-génital chez le furet.
L’étude de LI et al. rapporte 6 cas de furets stérilisés présentant des anomalies de l’appareil urogénital associés à un carcinome pour 5 furets et à une hyperplasie surrénalienne pour le dernier. Les kystes sont d’origine mésodermique et sont localisés sur la face dorsale de la vessie au niveau du trigone vésical et sur la prostate27.
L’étude de COLEMAN et al. rapporte 6 cas de kystes prostatiques chez des furets chez lesquels une atteinte des surrénale de type carcinome surrénalien pour 3 d’entre eux et hyperplasie surrénalienne pour l’un d’entre eux a été également rapportée. Ces furets présentent des kystes prostatiques ou paraprostatiques7.
L’origine de l’atteinte de l’appareil uro- génital n’est pas claire. L’hypothèse retenue est que les hormones stéroïdes produites par les surrénales en grande quantité chez les furets atteints de maladie surrénalienne entraîne la prolifération du tissu prostatique. En effet, les hormones sexuelles sont connues pour affecter le développement du tractus uro-génital. De plus, les problèmes urinaires se résolvent au bout de quelques jours après la surrénalectomie7,27.

Reprise du comportement sexuel chez le mâle castré

La reprise du comportement sexuel chez le mâle se manifeste par une tentative d’accouplement avec des femelles ou des mâles. On peut observer l’agrippement des congénères au niveau du cou caractérisant un comportement sexuel chez des mâles castrés. On peut également observer une augmentation de l’agression envers les congénères ou le propriétaire. Ce critère est cependant plus subjectif et n’est pas toujours remarqué par les propriétaires. Il est surtout remarqué chez des furets auparavant calmes et présentant progressivement des signes d’agression envers leur propriétaire et/ou d’autres animaux de la maison alors qu’aucun problème social n’était connu avant2,33.
La fréquence de reprise du comportement sexuel chez le mâle castré est comprise entre 15,5 % et 19 % selon les études. La fréquence des agressions est comprise entre 1 et 8,5 % selon les études49,62,71,72.
L’étude de WEISS et SCOTT rapporte que 100 % des mâles présentant un retour au comportement sexuel mâle présentaient un carcinome surrénalien à l’histologie et conseille la chirurgie sans délai sur les furets présentant ce signe clinique du fait de la fréquence importante de tumeurs malignes associées71.

Tableau récapitulatif des principaux symptômes rencontrés chez les furets atteints de maladie surrénalienne

Tableau 1 : Incidence des principaux symptômes rencontrés chez le furet lors de maladie surrénalienne49,62,71,72

Maladies intercurrentes

L’étude de WEISS et al. rapporte l’incidence des maladies intercurrentes chez des furets atteints de maladie surrénalienne. Les maladies rapportées sont :
– Une splénomégalie dans 68 % des cas (l’étude de WEISS et SCOTT rapportent ce signe clinique dans 87 % des cas.) ;
– Un insulinome dans 21 % des cas (l’étude de WEISS et SCOTT rapporte ce signe clinique dans 27 % des cas) ;
– Une cardiomyopathie dans 7 % des cas (l’étude de WEISS et SCOTT rapporte ce signe clinique dans 10 % des cas) ;
– Un trichobézoard dans 4 % des cas ;
– Un lymphome dans 2 % des cas ;
– Une insuffisance rénale dans 2 % des cas ;
– Un hématome splénique dans 2 % des cas.
Il convient donc d’explorer tous ces organes lors d’atteinte surrénalienne chez le furet par la réalisation de bilans sanguins (numération de formule sanguine et examen biochimique), d’une échographie abdominale et cardiaque et de l’observation directe des organes si la surrénalectomie est pratiquée71,72.

Diagnostic

Diagnostic différentiel

Le diagnostic différentiel concerne principalement les signes cliniques d’appel de la maladie surrénalienne, c’est-à-dire l’alopécie, le prurit, la vulve hypertrophiée chez la femelle, la dysurie/strangurie chez le mâle

Alopécie

L’alopécie est rencontrée dans de nombreuses maladies. Il convient donc de caractériser l’origine de cette alopécie et de ne pas se précipiter sur un diagnostic de maladie surrénalienne.
L’alopécie peut tout d’abord être physiologique et correspondre à une alopécie saisonnière, qui touche plus souvent les mâles. Elle touche principalement la base de la queue et apparaît au printemps pour disparaître à l’automne3,6,8,41,44.
De nombreux parasites entraînent une alopécie chez le furet. Il peut s’agir de dermatophytoses (teignes), d’infection à Malassezia pachydermatis ou encore de démodécie. L’examen cutané doit donc faire intervenir un raclage cutané, un calque cutané, un trichogramme, un examen à la lampe de Wood et une culture fongique afin d’écarter les origines parasitaires si l’alopécie est le seul signe clinique présenté par le furet3,41.
L’alopécie peut également avoir pour origine une atteinte tumorale. Chez le mâle, les tumeurs testiculaires, en particulier les sertolinomes, peuvent être à l’origine d’une alopécie qui peut être importante. Ces tumeurs sont cependant rares car les furets mâles sont souvent castrés. D’autres tumeurs telles que les tumeurs des cellules de la granulosa, les lutéomes, les fibrosarcomes du restant ovarien ou encore les lymphomes cutanés sont possibles44.
Le stress peut être à l’origine d’une alopécie brutale due à un effluvium télogène. Les follicules en phase anagène arrêtent brutalement de croître sous l’effet du stress. L’ensemble du pelage se retrouve en phase télogène et tombe en 2 à 3 mois, puis un nouveau cycle reprend3,59.
Une carence en biotine peut être à l’origine d’une alopécie générale. Elle est souvent le résultat d’une consommation trop importante d’œufs crus dont le blanc contient de l’avidine qui complexe la biotine1,35.
L’hyperoestrogénisme peut entraîner une alopécie symétrique bilatérale chez les femelles. Il peut être rencontré chez les furettes non stérilisées ou les femelles stérilisées présentant un reliquat ovarien après une ovariectomie6,8,26,44,61.

Hypertrophie vulvaire

L’hypertrophie vulvaire est rencontrée chez la furette en cas d’hyperœstrogénisme qui peut être rencontré chez la femelle non stérilisée ou en cas de présence d’un reliquat ovarien chez une furette stérilisée.
L’hyperœstrogénisme résulte d’un oestrus prolongé chez une furette non stérilisée ou d’un retour en oestrus chez les femelles stérilisées. Il se manifeste par une hypertrophie vulvaire souvent accompagnée par des sécrétions vulvaires, une anorexie, une léthargie et une alopécie symétrique et bilatérale. L’hyperœstrogénisme peut entraîner une anémie par aplasie médullaire s’il se prolonge dans le temps pouvant à terme entraîner la mort de la furette6,8,26,44.
Ces hypothèses peuvent être exclues par différents examens complémentaires :
– Injection d’hCG (analogue de la LH entraînant l’ovulation s’il existe un follicule ovarien mûr) qui permet la disparition des symptômes en cas d’hyperoestrogénisme. Le protocole correspond à 2 injections de 100 UI en intramusculaire à 8 à 10 jours d’intervalle ;
– Échographie abdominale ;
– Hémogramme et myélogramme dans les cas avancés.

Prurit

Le prurit peut avoir pour origine de nombreuses ectoparasitoses, des dermatophytoses, des hypersensibilités, des tumeurs testiculaires41.

Dysurie/Strangurie

Les troubles de la miction peuvent avoir plusieurs origines29,33,48 :
– Des calculs. Ils sont rares chez le furet et quand ils se développent, on les trouve communément dans la vessie et ils ne sont que rarement à l’origine d’une strangurie. On peut les mettre à l’évidence grâce à une radiographie car ils sont la plupart du temps radioopaques ;
– Une infection urinaire, rare chez le furet ;
– Une tumeur de l’urètre ;
– Un développement du tissu prostatique entourant l’urètre pouvant avoir pour origine une hyperplasie, un kyste, une tumeur ou une infection de la prostate (une échographie de la prostate peut aider au diagnostic) ;
– Un traumatisme.

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