Les microalgues comme source d’énergie

Les microalgues comme source d’énergie

La fin de la dernière décennie fut marquée par le constat mondial d’un épuisement de plus en plus imminent des ressources fossiles, qui sont d’une importance capitale pour l’économie actuelle (Shafiee et TopaI, 2009). Bien qu’il semble que la récente exploitation de réserves non-conventionnelles de gaz et de pétrole repousse ce délai, elles n’en sont pas moins limitées (Hook et Tang, 2013). En raison de cet éventuel épuisement des ressources fossiles, plusieurs industries cherchent à sécuriser leur approvisionnement énergétique pour le futur. Point de départ pour la recherche de sources renouvelables, cette motivation rejoint par le fait même les préoccupations environnementales actuelles. Ainsi, la culture intensive de microalgues à des fms énergétiques semble être une avenue prometteuse pour répondre à ces besoins grâce à leur productivité élevée en termes de biomasse et leur teneur en lipides (Mata, Martins et al., 2010). D’autant plus que divers types de carburants peuvent être produits avec la biomasse al gale : du combustible à partir de la biomasse sèche (Pittman, Dean et al. , 20 Il), de 1 ‘huile brute par liquéfaction hydrothermale (L6pez Barreiro, Prins et al. , 2013), du biodiesel à partir de l’huile extraite (Demirbas et Fatih Demirbas, 2011), ou encore du biogaz par méthanisation de la biomasse résiduelle (Chisti, 2007; Singh et Gu, 2010; Pittman, Dean et al. , 2011) en sont des exemples.

La cohabitation: approche avantageuse pour la production de microalgues

Bien que ne procurant pas pour le moment une rentabilité concurrentielle aux ressources fossiles, la recherche très active dans le domaine des algocarburants contribue constamment à l’améliorer (Ziolkowska et Simon, 2014). Estimé à 6,00 $ en 2011 par la compagnie Oilgae (Oilgae, 2011), le coût de production d’un gallon (US) de diesel serait maintenant passé à 2,28 $ selon les estimations de la compagnie Originoil (Ziolkowska et Simon, 2014). Cette dernière estimation concerne des productions de microalgues riches en huiles dans des eaux usées chargées en nutriments.

L’implantation de concepts intégrés de culture d’ algues dans des industries existantes est une voie de développement favorisant leur rentabilité (McGinn, Dickinson et al. , 20 Il ; Lohrey et Kochergin, 2012). Par exemple, le recyclage des eaux usées (Pittman, Dean et al. , 20 Il) et de certains résidus contenant des nutriments (Perez-Garcia, Escalante et al. , 20 Il) ainsi que l’utilisation de chaleur résiduelle émanant des procédés de production en usine (Xu, Brilman et al. , 20 Il) diminuent les coûts de production liés à la culture d’ algues. Le gaz carbonique (C02) de leurs effluents gazeux peut aussi être utilisé par les algues comme source de carbone, ce qui contribue à la réduction des gaz à effet de serre émanant du système (Brennan et Owende, 2010; Hundt et Reddy, 2011 ; Rosenberg, Mathias et al., 2011). D’autre part, le remplacement d’ une partie des carburants et combustibles fossiles utilisés dans les procédés de production de l’ industrie par un biocarburant, un biogaz ou une bioénergie à base de biomasse algale produite sur place diminue les coûts liés à la consommation de carburant. La cohabitation d’une production de microalgues avec une industrie offre ainsi plusieurs avantages.

Projet dans lequel s’intègre l’étude 

Comme d’ autres industries, la compagnie Rio Tinto Alcan (RTA) a entrepris d’étudier la possibilité d’utiliser de la biomasse pour remplacer une partie de l’ énergie et des carburants fossiles utilisés en usine. Devant la possibilité de valoriser ses résidus ainsi que de réduire ses empreintes carbone et énergétique, la compagnie a choisi d’ évaluer la faisabilité de produire de la biomasse algale. C’ est ainsi que RTA, la Chaire de recherche industrielle en environnement et biotechnologie (CRIEB) de la Fondation de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et la compagnie Alga-Labs (Montréal, QC) ont lancé en mai 2011 un projet sur la culture intensive de microalgues à haute valeur calorifique intégré à une usine RTA au Québec. Ce projet, s’ échelonnant sur quatre ans, visait à développer un procédé de culture de microalgues dans les eaux usées de l’industrie en bassin extérieur adjacent à l’usine, sur une superficie minimale et viable économiquement. La cohabitation d’une production de microalgues et de l’usine RTA permettrait l’utilisation des eaux usées et de résidus comme milieu de culture, des effluents de CO2 comme source de carbone, et de chaleur résiduelle émanant des procédés pour maintenir la température des bassins.

Plusieurs auteurs ont exposé les bénéfices que pouvait procurer la production de microalgues à des fins énergétiques dans des eaux usées autant en ce qui concerne la rentabilité que les bienfaits environnementaux (Chinnasamy, Bhatnagar et al. , 2010; Park, Craggs et al. , 2011; Pittman, Dean et al. , 2011 ; Abdelaziz, Leite et al. , 2013 ; Borowitzka et Moheimani, 2013). Bien que la concentration en carbone, azote et phosphore dans les eaux usées industrielles soit plus faible que dans celles provenant du secteur agricole, alimentaire ou du traitement municipal, diverses études ont démontré qu’elles pouvaient supporter la croissance d’algues. Par exemple, Chinnasamy, Bhatnagar et al. (2010), qui ont étudié en laboratoire un consortium d’algues composé de Chlamydomonas globosa, Chlorelia rninutissima et Scenedesmus bijuga, ont estimé qu’une productivité en biomasse de 17,8 tonnes haI anI pourrait être atteinte dans des eaux usées d’industries de fabrication de tapis. Ces eaux usées contenaient des produits chimiques de procédés, des pigments et divers éléments inorganiques comme de l’ azote, du phosphore et des métaux en faibles concentrations (Pittman, Dean et al. , 20 Il). La productivité obtenue pourrait, selon les auteurs, soutenir une production de biocarburant à base d’algues. De plus, une étude de Tarlan, Dilek et al. (2002) a révélé la capacité d’un consortium de plusieurs espèces d’algues à croître dans des eaux usées d’industries papetières et à réduire leur charge en nutriments. Une autre étude (Lim, Chu et al., 2010) visant la phycoremédiation d’effluents issus d’une usine de textile a démontré le potentiel de la souche Chlorelia vulgaris UMACC 001 pour la production de biomasse à des fins énergétiques dans ces eaux usées. Le taux de croissance spécifique rapporté dans le milieu composé d’eaux usées à 80 % (0,21 Il -jour-I ) était similaire à celui obtenu dans le milieu standard Bold Basal (0,28 Il -jour-I ). Wu, Chen et al. (2012) ont également démontré la faisabilité de produire de la biomasse avec la souche Chlamydomonas sp. TAI-2 dans des eaux usées d’une composition complexe provenant d’un parc industriel. L’ objectif était de produire du biodiesel tout en les épurant, par la diminution de la charge en azote et en phosphore. Dans ce même but, plusieurs études ont aussi été réalisées sur les eaux usées produites lors de l’ extraction de gaz de schale (Hamawand, Yusaf et al. , 2014). Leur concentration élevée en sodium pourrait être réduite par un enrichissement en acide acétique, qui réagirait avec le sodium pour former de l’ acétate de sodium, subséquemment consommé comme source de carbone par les microalgues.

Très peu d’ études ont toutefois été publiées sur l’utilisation des eaux usées d’aluminerie pour produire des microalgues. Les recherches concernant celles-ci portent principalement sur la toxicologie. Ces eaux usées contiennent de l’ aluminium et du fluorure qui peuvent avoir un effet néfaste sur la croissance des microalgues, mais qui peuvent également représenter un avantage pour la culture sous des conditions non aseptiques, si les souches sont robustes et résistent à ces facteurs toxiques. Une étude de Rai, Husaini et al. (1998) s’ est penchée sur l’ effet des composés à base de fluor et d’ aluminium sur une espèce de Chlorella. Les résultats démontrent que l’algue peut absorber ou adsorber ces composés et que la dynamique des échanges dépend de la concentration de chacun ainsi que des phosphates. La prise de nutriments et la photosynthèse pouvaient toutefois être perturbées par la présence d’ aluminium et de fluorure.

Néanmoins, soulignons l’ étude en cours du Centre de recherche industrielle du Québec (CRIQ), en collaboration avec l’Institut national d’optique (INO) et Aluminerie Alouette. Elle porte sur le développement d’un système « maximisant le processus de photosynthèse à l’aide d’un système de captage et de redistribution de la lumière naturelle dans un bassin d’une profondeur supérieure à 30 cm » (CRIQ, 2014). Cette étude s’insère dans un programme de recherche axé sur la bioséquestration et valorisation énergétique du dioxyde de carbone par les microalgues dans un contexte climatique canadien. Financé par différents ministères et organismes, il découle de l’Action 20 du Plan d’ action québécois sur les changements climatiques 2006-2012 (Économie, Innovation et Exportation Québec, 2011). Cependant, cette étude porte sur les gaz et non sur les effluents d’une aluminerie.

Table des matières

CHAPITRE 1 INTRODUCTION
1.1 Les microalgues comme source d’énergie
1.2 La cohabitation: approche avantageuse pour la production de microalgues
1.3 Projet dans lequel s’intègre l’étude.
1.4 Problématique
1.5 Besoin en nutriments des microalgues pour la production de biomasse et
de lipides
1.6 Source de carbone organique alternatif
1.7 Objectifs de l’étude
CHAPITRE II MIXOTROPHIC CULTIVATION OF AN ALGAE-BACTERIA CONSORTIUM IN ALUMINIUM SMELTER WASTEWATERS (QUEBEC, CANADA): A HIGH CONCENTRATION IN NITROGEN INCREASES LIPID PRODUCTION
Abstract
Introduction
Materials and methods
Strain and culture
Biomass concentration and productivity
Neutral lipids concentration and productivity
Consortium integrity
Fatty acids profile
Experimental design and statistical analysis
Results
Experimental design
Biomass productivity
Lipids productivity
Integrity index
Correlations
Fatty acids profile
Discussion
Lipids and biomass productivities
Integrity index
Fatty acid profile
Conclusion.
Acknowledgements
References
Tables
Captions and figures
CHAPITRE III USE OF AL TERNATIVE ORGANIC CARBONE SOURCES IN MIXOTROPHIC CULTURE OF ALGAE-BACTERIA CONSORTIUM USING INDUSTRIAL W ASTEW A TERS
Abstract
Introduction
Materials and methods
Strain and culture
Composition of alternative sources of organic carbon
Experiments
Analyses
Biomass
Neutrallipids
Integrity of the consortium
Lipid profile.
Statistics
Results
Discussion
Conclusion
Acknowledgements
References
Tables
Captions and figures
CHAPITRE IV CONCLUSION

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