Les polymères utilisés pour traiter les pigments

Les polymères utilisés pour traiter les pigments

Choix des polymères et données fournisseurs

 Rappelons qu’il existe trois grandes familles de traitements de surface par des macromolécules : les traitements hydrophobes (silicones, silanes), les traitements hydrophiles, celluloses, et ceux qui sont à la fois hydrophobes et lipophobes, perfluoro alkyl silanes. En théorie, rien ne s’oppose à toute combinaison pertinente dans le but d’obtenir certaines propriétés particulières. Mais dans la majorité des cas, aucun traitement n’est applicable à tous les pigments, puisque la nature de la surface de ceux-ci change. Par exemple la macromolécule qui réagit avec le bleu de Prusse ne traitera pas l’alumine. Notre objectif est de trouver un traitement unique permettant de rendre moins hydrophile un grand nombre, si ce n’est l’ensemble des pigments autorisés. Il faut donc choisir une macromolécule possédant les groupements fonctionnels susceptibles de réagir à la fois avec les divers types de sites réactionnels potentiellement présents sur les surfaces de pigments, et de se comporter comme moins hydrophile envers le milieu dispersant. Les polymères retenus dans cette étude sont deux copolymères produits par la société Sensient comportant des fonctions acide carboxylique, et esters méthylique et éthylique (Tableau III.1). Le choix s’est porté plus particulièrement sur deux d’entre eux, les polymères A et B, dénommés ainsi pour raison de confidentialité. Nous avons reporté, dans le tableau III.1, la masse atomique ainsi que les rapports molaires de l’oxygène par rapport au carbone qui serviront pour les analyses de surface, par spectrométrie de photoélectrons (XPS) et par spectrométrie de masse. La liste des monomères présents n’a été fournie que dans le cas du polymère A, pour le polymère B l’information est manquante. Les masses molaires ainsi que les principales propriétés physiques des émulsions sont issues des données du producteur de ces polymères (tableau III.2) et nous avons mesuré le pH de la solution.Les deux polymères ont des masses molaires très proches et sont fournis sous la forme d’émulsion dans l’eau avec une concentration massique nominale de 30%. Les émulsions ne comportent pas de tensio-actifs, point qui est essentiel pour la suite de l’étude, mais certainement une base pour atteindre un pH légèrement basique alors que les molécules comportent des fonctions acide. L’aspect semble directement lié à la formation d’une émulsion qui provoque une diffusion de la lumière. Si les masses molaires sont très proches, avec la même concentration, la viscosité est très différente. Ce comportement est paradoxal et nécessite de vérifier les données fournies.

Caractérisation des polymères 

La composition et la structure chimique des émulsions ont été étudiées pour approfondir la parenté des deux émulsions et détecter des différences expliquant cette forte variation de viscosité. 

Concentration des émulsions 

D’abord, nous avons vérifié la concentration massique des émulsions, par suivi de la masse de chacune des émulsions au cours d’un étuvage de longue durée à 75°C, dans une étuve ventilée. Nous avons déposé une masse connue d’émulsion dans une boite de Pétri en verre, sans couvercle, et mesuré la perte de masse en fonction du temps (fig. III.1).Pour des temps longs, de 6 heures jusqu’à 100 heures, les masses ne diminuent plus, les polymères sont apparemment déshydratés ce qui permet de vérifier que les concentrations massiques mesurées correspondent bien aux valeurs nominales. Elles sont bien de 30% massique pour les deux polymères. Par contre la vitesse de déshydratation est beaucoup plus rapide pour le polymère B que pour le polymère A (fig. III.1). Ceci pourrait provenir d’une différence de coefficient de diffusion de l’eau qui après s’évapore, mais il n’en est rien semble t-il. En effet, au cours de la déshydratation, l’émulsion se transforme progressivement en un film solide et cassant qui dépend de la nature du polymère. Le polymère B forme un film homogène de faible épaisseur (100 µm à partir d’une émulsion d’épaisseur 300 µm) alors que le polymère A se présente sous la forme d’un agglomérat d’épaisseur 400 µm, correspondant à l’épaisseur initiale. Un calcul de coefficient de diffusion, en appliquant la deuxième loi de Fick, ne donne pas de différence significative pour le coefficient de diffusion apparent. La principale cause sur la vitesse d’évaporation de l’eau est la différence de viscosité des émulsions. Si les différences de viscosité ne sont pas dues à une différence significative de masse molaire ou de concentration, elle devrait donc être due à une différence de structure chimique.

Analyse RMN en solution

Ces polymères ont un comportement ressemblant beaucoup à celui des polymères associatifs, mais dans un domaine concentré (30% en poids), alors que les polymères associatifs sont généralement décrits dans le domaine dilué (1 à 5 %). Ces polymères sont souvent constitués de monomères acryliques (acide acrylique et acrylates de méthyle ou d’éthyle), comme les polymères que nous étudions ici. Pour confirmer la nature des monomères, leur proportion et leur distribution le long de la chaîne on a fait appel à la RMN du proton (1H) et du carbone 13 (13C). Ces analyses ont été réalisées au service central d’analyse du CNRS à Vernaison avec un spectromètre Bruker Avance 400. Les enregistrements ont été effectués dans de l’acétone deutérée. Le polymère B a été concentré afin de pouvoir enregistrer un spectre. Les résultats sont les suivants : la nature des monomères est la même, mais seuls l’acrylate d’éthyle et le méthacrylate de méthyle ont pu être détectés, les bandes de résonance de l’acide méthacrylique se superposant malheureusement à celles du solvant (acétone) (1,8-1,9 ppm en 1H et 16,8-20 ppm en 13C). Les intensités des bandes de résonance de l’acrylate d’éthyle (EA) et du méthacrylate de méthyle (MMA) ont permis de déterminer leur fraction relative, sachant qu’un aromatique monosubstitué est également présent dans le mélange (tableau III.3).L’acrylate d’éthyle est majoritaire, surtout dans le polymère A. Comme l’émulsion de polymère B a dû être concentrée, cela signifie que les acrylates dans l’émulsion d’origine sont moins nombreux dans le B que dans le A. Par conséquent, le complément constitué par l’acide méthacrylique doit être plus important dans le polymère B que dans le polymère A. Si l’analyse bibliographique des polymères associatifs était directement applicable à ces solutions concentrées, le polymère contenant la plus grande fraction de groupements acide devrait présenter une plus forte viscosité. Nous observons l’inverse. Nous ne pouvons quantifier la fraction d’acide dans les deux polymères car les évolutions de viscosité décrites en fonction de la fraction d’acide méthacrylique sont décrites pour des concentrations 45 inférieures à 5%, donc dans le domaine dilué et elles ne sont pas transposables à notre domaine expérimental. 

Caractérisation par spectrométrie infrarouge

 Nous avons vu que la spectroscopie infrarouge est une méthode classique pour caractériser, les fonctions chimiques présentes dans les matériaux organiques et les traitements des pigments (Annexe 6). Les deux polymères ont été caractérisés à l’état solide, sous forme de film, par spectrométrie infrarouge. Un spectromètre Nicolet 510P, avec un détecteur DTGS, a été utilisé principalement en transmission classique et dans quelques cas avec le dispositif thunderdome pour des mesures en mode ATR. Les échantillons sont préparés par dépôt des deux émulsions, sous la forme de films liquides minces, sur des lames de verre. L’eau est éliminée par un chauffage à 75°C pendant une heure dans une étuve. Cette durée est suffisante en film mince alors qu’une durée plus importante était indispensable pour l’analyse de perte de poids en plus forte épaisseur. Ensuite ces deux échantillons sont analysés en utilisant le système thunderdome, en réflexion. Cette configuration a été préférée pour enregistrer les fonctions à l’état initial (fig. III.2). 

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