Les principales propriétés des constructions transitives locatives standard

Les principales propriétés des constructions transitives locatives standard

Selon Maurice Gross (1975 ; 1988), l’étude du lexique et celle de la grammaire d’une langue naturelle sont indissociables. Il est donc nécessaire de les intégrer pour donner une description cohérente et complète du système syntaxique des phrases simples, à savoir des phrases qui sont composées du sujet, du verbe et des compléments essentiels, prépositionnels ou non. La description de tout verbe demande une séparation systématique de ses sens. Nous suivons le « principe d’expansion maximale » qui postule que l’emploi privilégié dans la représentation est celui qui comporte le plus grand nombre d’actants non pronominalisés et de prépositions. Pour chaque forme simple dont le sens est isolé, donc pour chaque emploi verbal, nous donnons une description syntactico-sémantique sous forme de tables du lexique-grammaire. Notre objectif est de décrire systématiquement les structures syntaxiques dans lesquelles entre un ensemble d’emplois verbaux grecs, ainsi que les noms et les prépositions avec lesquels ces emplois peuvent se combiner afin de former des phrases acceptables. Etant donné une phrase simple acceptable, deux types de propriétés1 nous intéressent : les propriétés qui concernent les éléments lexicaux (le lexique) et celles qui concernent les structures (la grammaire). Nous remarquons que toutes les propriétés figurant dans les tables sont en pratique des « propriétés complexes, dont le but est de vérifier si un verbe accepte une distribution donnée dans une construction donnée, et vice-versa » (BGL 1976 : 169).Dans ce chapitre, nous présenterons les propriétés morphologiques, syntaxiques et sémantiques que nous avons jugées utiles d’insérer dans nos tables du lexique-grammaire grec. Il s’agit : – des propriétés de distribution (ou distributionnelles), – des propriétés sémantiques, – des propriétés de structure (ou structurelles), – des propriétés de dérivation (ou dérivationnelles). Ainsi, en ce qui concerne les structures de base qui font l’objet de notre étude, à savoir les structures du type : N0 V N1 cor Loc N2 lieu N0 V N1 cor Loc N2 lieu Loc N3 lieu 2 nous préciserons, pour chaque emploi verbal, les distributions de ses actants syntaxiques (N0, N1, N2 et N3) et les interprétations sémantiques que ces derniers peuvent recevoir. Chaque phrase simple est, pourtant, susceptible d’avoir plusieurs formes différentes. Ainsi, nous décrirons les constructions dérivées de la construction de base par le biais de mécanismes de transformations, par exemple la pronominalisation, le passif, l’analyse en phrase avec un verbe-support et un nom prédicatif (nominalisation), les permutations, les effacements des compléments essentiels, etc. Ces constructions associées figurent en colonnes dans nos tables du lexique-grammaire. Pour que la description de chaque emploi verbal soit complète, nous devrions aussi décrire les propriétés particulières de chaque construction associée, comme par exemple, les propriétés des constructions passives, des constructions à verbe préfixé dérivé, etc. Dans le cadre de cette étude, nous nous limiterons à la description des propriétés concernant la construction de base, les propriétés particulières des constructions associées figurant dans nos tables feront l’objet d’études ultérieures.

Les propriétés de distribution

La notion de distribution est utilisée pour décrire la compatibilité sémantique entre le verbe et ses actants syntaxiques. La distribution se définit donc comme l’ensemble des mots équivalents, c’est-à-dire des mots qui peuvent se substituer l’un à l’autre et qui explicitent les intuitions sémantiques de compatibilité d’un mot avec un autre. Ces mots peuvent apparaître à la place d’un argument donné. L’étude de la distribution nous permet de préciser la nature des éléments lexicaux attachés à chaque verbe et susceptibles d’apparaître à gauche et/ou à droite de ce dernier. 

Les noms « humains » :Nhum

 En premier lieu, nous divisons les noms en deux catégories : les noms humains et les noms non humains. On peut aussi parler de noms animés et de noms non animés. Dans ce cas, les noms humains constituent une sous-catégorie des noms animés et nous pouvons distinguer entre noms animés humains et noms animés non-humains. Or, nous percevons souvent une certaine hésitation de la part des linguistes et des locuteurs sur le statut à donner aux animaux et aux plantes, qui peuvent être considérés comme des entités animées non humaines (cf. Flaux & Van de Velde 2000). En ce qui concerne les verbes que nous avons étudiés, nous avons observé qu’un verbe qui accepte comme sujet ou complément un substantif animé, accepterait aussi, à sa place, un substantif humain. En revanche, le cas inverse n’est pas toujours véridique : Ο Γιώργος ελευθέρωσε την τίγρη από το κλουβί N0 V N1 animé non-humain Loc N2 lieu (Georges a libéré le tigre de la cage) Ο Γιώργος ελευθέρωσε τη Ρέα από τη φυλακή N0 V N1 animé humain Loc N2 lieu (Georges a libéré Réa de la prison) mais : Mετέθεσαν (τον Γιώργο + *την τίγρη) στη Θεσσαλονίκη (On a déplacé (Georges + *le tigre) à Thessaloniki) Sur ce sujet, J. Dubois et alii (1966) soulignent que les noms humains « se caractérisent par une syntaxe différente des noms animés non-humains ». De plus, Gaston Gross (1995a : 76) mentionne que « le trait humain ne constitue pas une information suffisante pour décrire avec la précision voulue le comportement syntaxique, donc les emplois, des prédicats d’une langue naturelle ». Il serait alors nécessaire de recourir à des spécifications sémantiques plus précises, les classes d’objets (cf. G. Gross 1994). Au stade actuel de notre étude, nous avons décidé de nous limiter aux distributions concernant le couple sémantique « nom humain » et « nom non-humain » (Nhum / N-hum) .

Les V-n 

Certains verbes transitifs locatifs acceptent comme argument un substantif qui est en relation morphologique avec le verbe (V-n) (cf. BGL 1976 : 64-65 ; Guillet 1979, 1986). Harris (1964) définit le V-n comme un nom N lié à un verbe V selon une, au moins, des relations suivantes : (a) N = V et un suffixe nominal (b) V = N et un suffixe verbal10 Ici, comme dans Guillet, Leclère (1992), nous relions un verbe V et son dérivé V-n « uniquement lorsque ces deux termes seront intégrés simultanément dans des phrases ». Ainsi, pour les constructions que nous étudions, les relations entre un argument et V-n s’expriment par les constructions suivantes : i. N0 είμαι (être) V-n ii. N1 είμαι (être) V-n iii. N2 είμαι (être) V-n.Chacune d’entre elles sera illustrée par des exemples dans les paragraphes suivants. i. N0 είμαι (être) V-n. Le V-n apparaît en position sujet (N0 =: V-n). D’habitude, il s’agit d’un nom suffixé ou d’un nom « interne » qui dénote – sémantiquement – l’agent causatif. Par exemple : (Ο Γιώργος + η εταιρεία + η Γερμανία) εισάγει λάδι από την Ιταλία N0 V N1 cor Loc N2 source ((Georges + l’entreprise + l’Allemagne) importe de l’huile d’Italie) = (Ο Γιώργος + η εταιρεία + η Γερμανία) είναι ο εισαγωγέας λαδιού N0 être V-n ((Georges + l’entreprise + l’Allemagne) est l’importateur d’huile) ii. N1 είμαι (être) V-n. Le V-n apparaît dans la position du complément direct (N1 =: V-n). Ainsi, pour l’exemple : Ο Γιώργος αφισοκόλλησε την ανακοίνωση στους τοίχους του Πολυτεχνείου N0 V N1 cor Loc N2 source (Georges a affiché l’annonce sur les murs de l’Ecole Polytechnique) le nom « interne » au verbe αφισοκολλώ (afficher) est V-n =: αφίσα (affiche), qui constitue un classifieur morphologique (Nclass)12. La relation entre N1 et V-n s’exprime à l’aide de la construction en είμαι (être) : Η ανακοίνωση είναι μια αφίσα13 N1 être V-n (L’annonce est une affiche) Remarquons que lorsque le V-n apparaît dans la phrase sans être accompagné de modifieur, il est redondant et rend la phrase peu naturelle : ?*Ο Γιώργος αφισοκόλλησε αφίσες στους τοίχους του Πολυτεχνείου N0 V V-n1 cor Loc N2 dest (Georges a affiché des affiches sur les murs de l’Ecole Polytechnique) iii. N2 είμαι (être) V-n. Dans un complément prépositionnel locatif, le nom tête du groupe nominal introduit par la préposition peut être morphologiquement lié au verbe (N2 =: V-n).(1) ?*Ο Γιώργος αποθηκεύει το σιτάρι στην αποθήκη N0 V N1 cor Loc V-n2 dest (Georges entrepose le blé dans l’entrepôt) Bien évidemment, à la place du V-n nous pouvons trouver d’autres substantifs qui ont la même fonction que le V-n, selon le sens du verbe. Par exemple : (2) Ο Γιώργος αποθηκεύει το σιτάρι σε (σιλό + κοντέινερ) Ν0 V Ν1 cor Loc Ν2 dest (Georges entrepose le blé dans (un silo + un container)) Pour les distributions du N2 dans l’exemple (2), ci-dessus, il est accepté que : Το (σιλό + κοντέινερ) είναι μια αποθήκη N2 être V-n (Le (silo + container) est un entrepôt) Nous remarquons le caractère redondant du V-n, lorsque les deux éléments, V et V-n, sont simultanément intégrés dans la phrase (cf. exemple (1), ci-dessus). Cependant, la phrase peut devenir plus naturelle, lorsqu’un modifieur est inséré : Ο Γιώργος αποθηκεύει το σιτάρι στην αποθήκη του Αγροτικού Συνεταιρισμού N0 V N1 cor Loc V-n2 dest Modif (Georges entrepose le blé dans l’entrepôt de la Coopérative agricole) Notons également que pour certains verbes le V-n désigne l’« instrument » : Ο Γιώργος σκουπίζει τα χώματα από το σαλόνι με σκούπα N0 V N1 cor Loc N2 dest Prép V-n3 instr (Georges balaie la terre du salon avec un balai) Ce V-n « instrument » est précédé de la préposition με (avec). Comme nous l’avons déjà mentionné, le complément instrumental με Ν3 (avec N3) n’appartient pas à la structure de base des verbes transitifs locatifs standard. Nous soulignons enfin qu’un verbe peut être lié morphologiquement à un substantif qui désigne un « chemin » ou le lieu de parcours de l’objet en déplacement. Dans certains cas, ce nom est aussi interprété comme le « moyen » (cf. § 3.1.8.9). Par exemple : ∆ιοχετεύουν το νερό στη θάλασσα μέσα από οχετούς V N1 Loc N2 dest Prép V-n3 moyen /chemin (On canalise l’eau dans la mer par des canaux) .

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