Les signaux de domination et les relations d’exploitation

Les signaux de domination et les relations d’exploitation

Nous considérons qu’il existe trois types d’acteurs, qui agissent selon des stratégies propres et dont les actes influencent la conformation et le devenir des territoires. Ce sont les acteurs globaux (ou transnationaux)6, l’État et les acteurs locaux des territoires7 eux-mêmes. Dans les espaces périphériques du monde, il existe aussi une catégorie hétérogène d’acteurs d’interface que constituent les Organisations Non Gouvernementales ONG . L’impact de leur action sur les territoires peut tre non négligeable, mais leurs signaux s’avèrent souvent brouillés. Ils feront donc l’objet d’un traitement spécifique. Les stratégies des acteurs majeurs s’expriment à travers des relations réciproques et des signaux ou des informations qu’ils s’envoient mutuellement. Si des objectifs poursuivis par chaque groupe d’acteurs débouchent sur une certaine cohérence stratégique, la nature des signaux et les types de relations qu’ils induisent dépendent des rapports de force et des tactiques guidées par des cycles conjoncturels (politiques, sociaux, économiques). On distingue : Les signaux de domination et les relations d’exploitation : Les entreprises exploitent les ressources et/ou les qualités organisationnelles des territoires et profitent de toutes les externalités, créées intentionnellement pour elles ou non. Dans un contexte de déploiement du capitalisme mondialisé, les entreprises transnationales peuvent compter sur une idéologie néolibérale, historiquement triomphante, largement diffusée par des canaux médiatiques et académiques et mises en œuvre par les institutions internationales comme la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI). Les signaux de domination émis par les entreprises s’expriment aussi, dans un contexte de hiérarchie spatiale mondiale, sur un espace périphérique dont les productions marchandes ne sont pas destinées à satisfaire les besoins locaux, mais sont dirigées vers des marchés mondiaux qu’elles maîtrisent Adda, 1998 ; 49).

Les signaux de pression et les relations de conflit : Chaque groupe d’acteurs possède ses propres capacités de pression : les entreprises à travers leur savoir-faire technologique, leur maîtrise du marché et leur puissance économique ; les institutions internationales en s’appuyant sur leur puissance financière ; les sociétés territorialisées par leurs capacités de mobilisation ; l’État gr ce à la détention des moyens matériels et immatériels de coercition et par l’usage d’une violence légitimée. La plupart des signaux de pression convergent vers l’État parce qu’il possède les clefs juridiques et institutionnelles de l’organisation territoriale. L’État subit toutes sortes de pressions que ce soit par le haut ou par le bas. Il y répond différemment en fonction de qui exerce la pression et en fonction de son intensité. Mais l’État possède aussi quelques moyens de pression surtout vis-à-vis des territoires. Les signaux de séduction et les relations de coopération ou de convention : Aux pressions de la sphère globale, l’État a pu répondre par des politiques de capitalisation et de désengagement du secteur productif. Il tâche aussi de répondre aux attentes des bailleurs de fonds en menant des politiques de maîtrise des grands indicateurs socio-économiques (maîtrise budgétaire, taux de croissance économique, etc.), souvent en réduisant ses dépenses sociales (éducation, santé, politique de relance, etc.). Il peut aussi, à l’inverse, envoyer des « signaux négatifs » (réglementation contraignante, nationalisation) propre à éloigner les investissements. Vis-à-vis des sociétés locales, la réponse aux pressions se trouve dans les politiques de décentralisation, dans l’aménagement du territoire et dans la mise en œuvre de la participation dans le cadre de nouveaux pactes de gouvernance. Le territoire, de son côté, essaie d’attirer des entreprises ou de susciter leur création afin de générer des activités, des emplois et des revenus.

Les acteurs et les flux d’informations qui les lient constituent un système idéel exposé dans la figure n° 1.1. Les couleurs permettent de distinguer la nature des signaux envoyés ainsi que leur signification. On distingue ainsi les signaux de pression convergeant vers l’État flèches de couleur orange). Il y répond plutôt par des signaux de séduction (flèches de couleur verte). Mais il arrive aussi à l’État d’inverser les signaux de pression lorsqu’il se sent en état de force. Les messages de pression de l’État vis-à-vis des acteurs globaux sont souvent tactiques et ne perdurent jamais. Pragmatisme politique et économique oblige, ce sont plutôt les signaux de séduction couleur verte qui finissent par s’imposer. En revanche, vis-à-vis des territoires, l’État n’hésite pas à utiliser des signaux contradictoires : des signaux de pression qui se traduisent par des politiques territoriales autoritaires ou par des épisodes répressifs vis- à-vis des contestations, et des signaux de séduction, par les politiques d’aménagement du territoire et de décentralisation. La relation État – Territoires est assurément la plus complexe et la plus passionnante à analyser.

 

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