LIEN ENTRE LA RELATION ET LE CONTEXTE DE L’INTERVENTION

LIEN ENTRE LA RELATION ET LE CONTEXTE DE L’INTERVENTION

Nous ferons part dans cette section de nos observations relatives au milieu dans lequel se déroule l’intervention, au type de client, à la durée et à la source de l’intervention.

Le milieu TI ne semble pas y avoir de lien entre le milieu dans lequel prend place l’intervention et la relation consultant-client observée. Puisque, sauf une exception, toutes les interventions analysées se sont déroulées dans un contexte organisationnel et qu’une variété de styles ont été utilisés, on peut affirmer que le style d’intervention n ‘est pas a priori déterminé par le milieu de l’intervention. Ceci n’exclut pas toutefois la possibilité qu’un style donné convienne davantage à un certain milieu; notre corpus d’analyse ne nous fournit cependant pas la possibilité de vérifier cette hypothèse.

Le type de client

La première constatation que l’on puisse faire lorsqu’on met en parallèle le type de client et la relation obtenue est que, dans les deux cas où nous avons fait appel au style de dégradation (contre), il s’agissait d’une intervention à l’intérieur d’un C.A.M.O.. L’insatisfaction engendrée par ces deux 109 interventions nous amène à questionner notre façon d’intervenir dans pareil contexte. Pour Claude Paquette, il est difficile d’attribuer des principes et des valeurs au style d’intervention de dégradation. Ce style apparaîtrait lorsque les réseaux sociaux sont autoritaires et hiérarchisés et traduirait une «négation du pouvoir d’influence de l’intervenant au profit d’une influence plus institutionnalisée ». Notre expérience nous amène toutefois à nuancer cette affirmation. L’intervenant ne choisit peut-être pas ce type de relation parce qu’il correspond à certaines de ses valeurs.. Cependant, l’adoption de ce style résulte d’une réaction de l’intervenant aux pressions exercées par l’environnement. En nous appuyant su r le modèle général du fonctionnement de la personne, nous pouvons soutenir que les composantes de la personnalité de l’intervenant déterminent si oui ou non le consultant acceptera d’agir dans ce contexte. On peut supposer par exemple qu’un intervenant qui manifeste un plus grand besoin de sécurité matérielle aura plus de difficulté à refuser un mandat extérieur qu’une autre personne chez qui ce besoin est moins vif. La hiérarchie des valeurs individuelles peut également expliquer la réaction de l’intervenant. Datns le cas intitulé «Le président du C.A.M.O.» par exemple, on pourrait croire que le respect des engagements pris face à notre mandant représentait à ce moment une valeur plus importante que la qualité de l’intervention, ce qui nous a conduit à réaliser le mandat malgré nos réserves.  TI n’en demeure pas moins que ce type de relation génère une certaine tension chez le consultant. D’une part, le consultant est conscient que la tâche qu’il s’apprête à réaliser est plus ou moins pertinente. D’autre part, il est également conscient des pressions du milieu et nourrit des craintes face aux conséquences qu’impliquerait son refus d’y accéder. Il doit donc adopter un comportement lui permettant de résoudre ce conflit mais comme on l’a vu, le compromis qui en résulte risque de ne satiisfaire pleinement ni l’intervenant ni le client, d’où la relation de dégradation. Le tableau récapitulatif indique d’autre part une constante dans une relation de type suppléance : dans les dE?UX cas, nous avons utilisé ce style auprès de dirigeants d’entreprises. Ce: type de relation est sans doute attribuable, du moins en partie, à la perception que nous avions de notre client. Nous discuterons davantage de ce phénomène important dans une prochaine section. 

La durée de l’intervention 

Notre analyse n’a pas décelé de lien évident entre la durée de l’intervention et le type de relation observé. Nous devons mentionner toutefois que les deux interventions de type interactionnel avaient une durée relativement courte. Les résultats générés par ces deux expérimentations nous laissent croire que le style interactionnel est un style particulièrement bien adapté aux interventions ponctuelles réalisées dans un court délai. Par ailleurs, 111 ce fait confirme qu’il est possible d’établir avec le client une relation véritablement productive, même dans un court laps de temps.

La source d’intervention

 Pour l’étude du paramètre source d’intervention, nous avons distingué «l’origine de la demande», c’est-à-dire la personne qui a formulé une demande d’intervention, du «mode d’analyse de la demande», c’est-à-dire la façon dont la demande initiale a été traduite en mandat concret d’intervention. Cette distinction nous est apparue nécessaire pour refléter le processus de consultation où le consultant prend d’abord connaissance de la demande du client et examine la pertinence de formuler un projet d’intervention. Comme ort le constate, ce n’est pas tant l’origine de la demande que son mode d’analyse qu’il faut mettre en rapport avec la relation obtenue. En effet, quatre (4) interventions découlaient d’une demande du client; pourtant, la relation observée dans ces expérimentations était soit de type interactionnel, soit de type suppléance. On remarque par contre que la relation interactionnelle a été précédée par une analyse conjointe de la demande du client alors que la relation de suppléance s’est bâtie . uniquement sur l’analyse de la consultante. On peut se demander s’il y a un lien de cause à effet entre les variables mode d’analyse et style de relation et dans l’affirmative, . quelle est la direction de cette relation. Est-ce notre style d’in1tervention qui nous amène vers un mode donné d’analyse des besoins ou l’inverse? Claude Paquette remarque que : Le style dominant s’observe beaucoup dans le démarrage même de l’intervention. C’est à ce moment du processus de 1 ‘intervention que le style apparaît le plus clairement. L’intervenant déclenche son intervention de la façon qui lui · semble la plus appropriée2. « ..• qui lui semble la plus appropriée»… Cette expression renvoie à plusieurs notions que nous avons explorées dans l’analyse de nos expérimentations. ll nous parait évident quel aperception du consultant face à la problématique soumise, et face au client surtout, détermine la place qu’il laissera à ce dernier dans l’analyse de la demande. Ainsi, dans le cas 1, nous avons perçu chez notre cliente une certaine connaissance du secteur touristique dans lequel se situait notre intervention. Nous avons donc été plus réceptive à sa vision de la problématique et l’avons ainsi laissée participer à l’analyse de la demande. Au contraire, dans le cas de l’entreprise en crise (cas 2), le client nous semblait avoir épuisé sans succès toutes ses ressources personnelles pour le redressement de son entreprise. Nous ne l’avons donc pas encouragé à plus d’implication dans l’analyse du problème. Deuxièmement, nous croyons que le consultant enclenche son travail en s’appuyant sur sa connaissance des procédés d’intervention mais aussi, en référant à sa conception de la consultation .et du rôle du consultant. C’est ainsi par exemple que notre vision trop idéalisée du consultant peut nous avoir amenée à prétendre qu’il appartenait au consultant, et à lui seul, de prendre en charge l’analyse de la demande initiale, comme toute la démarche d’ailleurs, parce que le client était incapable de le faire lui-même, d’où l’établissement d’une relation de suppléance. 

Troisièmement

On peut poser comme hypothèse que les V.A.A.B. du consultant jouent ùn rôle de premier plan lorsqu’il s’agit d’amorcer une intervention. En voici quelques illustrations. Nos valeurs déterminent par exemple sur quoi nous mettrons l’emphase au moment de l’analyse de la demande du client : est-ce la préservation de l’image du consultant toutpuissant ou plutôt, la connaissance de l’être humain qui «se cache» derrière le dirigeant d’entreprise? Nos besoins entrent aussi en ligne de compte : cherchons-nous par le biais de cette intervention à relever un défi professionnel ou sommes-nous en quête d’une relation interpersonnelle enrichissante? Nos attitudes nous prédisposent aussi à certains comportements. Nous sommes peut-être plus favorable à une grande implication du client lorsque nos attitudes envers lui sont positives. À l’inverse, nous sommes davantage tentée de tenir à l’écart un client pour qui nous nourrissons une attitude négative. Que dire des attentes maintenant? Certainement que notre façon de négocier (ou non) le mandat d’intervention dépend des avantages · anticipés de tel ou tel comportement. Ainsi, lorsque nous croyons que le client apportera un éclairage nouveau sur la situation problématique, nous sollicitons davantage sa participation à l’analyse de la demande initiale. On constate encore ici à quel point notre personnalité et ses composantes peuvent influer sur un aspect aussi technique que l’analyse de la demande initiale et conséquemment, sur la relation consultant-client. Le lien entre savoir-être et savoir-faire commence ici à se dessiner. Il apparaît maintenant que les gestes que nous posons lors d’une intervention (notre savoir-faire) ne sont jamais déconnectés d’une réalité personnelle à l’individu. Il nous semble impossible qu’un consultant puisse appliquer machinalement les techniques proposées dans les volumes sur la consultation. Il y met toujours un peu de lui-même, son utilisation des techniques  ce qu’il est et ce qu’il vit face à une situation. Voilà pourquoi l’utilisation de techniques ne conduit pas nécessairement aux résultats prévus, pourquoi l’application d’un même procédé à des moments différents donne un produit différent, pourquoi deux consultants recourant à une même approche obtiennent des relations 115 différentes avec leurs clients. C’est là croyons-nous que se trouve tout l’intérêt de la relation d’aide : dans la possibilité de personnaliser les outils _ à notre disposition. Mais c’est également ce qui rend plus difficile l’apprentissage du métier.

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