Localisation et description des dispositifs expérimentaux

Localisation et description des dispositifs expérimentaux

L’étude prenait place dans la Forêt d’enseignement et de recherche Simoncouche (48°13’N, 71°15’W) (SIM) dans la réserve faunique des Laurentides ainsi que dans les Monts-Valin, près du lac Bernatchez (48°515 N, 70°20′ W) (BER) (ANNEXE A). Les deux sites s’inscrivent dans la zone de la forêt boréale, dans le domaine de la sapinière à bouleau jaune et dans des peuplements d’EPN matures. Les températures annuelles moyennes sont de 1.9 et 0.2°C à SIM et BER, respectivement (Rossi et al. 2011). Les deux dispositifs ont été implantés en 2007. L’objectif était alors d’y étudier les effets du réchauffement du sol et des dépôts d’azote atmosphérique sur les EPN matures. Pour chaque site, une section de 60 X 60 m a été délimitée dans une zone homogène (forêt équienne d’EPN) et divisée en 12 parcelles de 12 X 12 m chacune. Dans chaque parcelle, un arbre représentatif de la taille et de l’état de santé du peuplement y a été choisi (Lupi et al. 2012).

Les traitements ont été appliqués autour de cet arbre. Durant neuf (9) années consécutives, soit de 2008 à 2016, deux (2) traitements ont été appliqués sur les dispositifs. Les traitements H et NH consistaient à augmenter la température du sol de 4°C par rapport à la normale, à l’aide de câbles chauffants installés dans le sol entre les couches organiques et minérales, dans l’horizon fibrique (F), où la majorité des racines de l’EPN sont installées (Ruess et al. 2003). Les câbles étaient placés en spirale dans un rayon d’environ deux mètres autour de l’arbre sélectionné avec un espacement de 30 cm entre chaque rangée de câbles (Figure 1). Le sol était chauffé à partir de la première semaine d’avril et pour une période d’environ 100 jours (ANNEXE B), ce qui correspondait à la période de production cellulaire des arbres (Thibeault-Martel et al. 2008). Des câbles non-chauffants (pas raccordés à la source de courant) ont été placés de la même façon, autour des arbres pour les traitements non-chauffés. Les traitements N et NH apportaient une dose d’azote trois fois plus élevée que les précipitations normales (ANNEXE C).

Deux millimètres de précipitation étaient appliqués, de façon hebdomadaire, de juin à septembre, à l’aide de gicleurs installés au-dessus de la canopée. Les parcelles qui ne recevaient pas le traitement N étaient arrosées avec une solution dont la composition correspondait à la pluie normale (ANNEXE D). Les précipitations reçues couvraient une superficie de trois mètres de rayon autour de l’arbre sélectionné. Pour des raisons techniques (bris), les témoins et les traitements N n’ont pas été réalisés au site BER pour les années 2015 et 2016. Les traitements ont été attribués aléatoirement à chaque parcelle expérimentale. Il s’agissait donc d’un dispositif factoriel à deux facteurs de deux niveaux et à trois répétitions. Au début de l’été 2015 (le 11 juin à SIM et le 17 juin à BER), des semis d’EPN et de SAB de trois ans de type PFD (plants de forte dimension, cavités de 310 cm3 chacune) ont été intégrés au dispositif. Chaque parcelle expérimentale a été divisée en 4 sous-parcelles de 3 m2 (Figure 2) et 5 semis de la même espèce ont été plantés en quinconce dans chacune des sous-parcelles. Un protocole randomisé a été utilisé pour déterminer la position de chaque espèce dans les sous-parcelles. Un total de 20 semis (10 EPN et 10 SAB) ont été plantés dans chacune des 24 parcelles expérimentales (480 semis au total).

Photosynthèse

Dans chaque parcelle expérimentale, trois (3) semis de chaque espèce ont été sélectionnés aléatoirement (6 semis par parcelle, 72 par site, total de 144 semis). Le taux photosynthétique a été mesuré sur ceux-ci avec un système portable pour photosynthèse (Li-Cor 6400XT) et une chambre opaque pour conifères (6400-22L) (Li-Cor Inc., Lincoln, NE, USA). Les mesures ont été réalisées à chaque mois pendant la période de juin à septembre 2016. Pour chacune des dates d’échantillonnage, les taux photosynthétiques moyens ont été calculés selon trois mesures prises avec intervalles de 30 secondes et normalisés. Selon la surface foliaire échantillonnée, deux méthodes ont été utilisées (selon l’espèce) pour déterminer la surface foliaire. Pour les EPN, la surface foliaire a été mesurée en récoltant les aiguilles utilisées pour les mesures de photosynthèse. Les aiguilles ont ensuite été disposées sur une feuille blanche accompagnée d’une échelle puis prises en photo à l’aide d’un appareil photo numérique (Nikon D200) et d’un objectif pour macrophotographie (Nikkor 40 mm, f/2.8). Chez les SAB, la faible quantité de rameaux par plants ne permettait pas d’en faire la récolte.

Donc, la section de la tige ayant été utilisée a été prise en photo directement sur le terrain sur une feuille blanche munie d’une échelle également. Les photos ont ensuite été traitées avec le logiciel Image J (Image J 1.47, Softonic Internacional S. A.), qui calculait, selon une distance connue (échelle), la surface verte présente sur la photo, après un ajustement des niveaux de couleurs, de saturation et de brillance afin d’obtenir une estimation de la surface foliaire spécifique. Afin de vérifier l’existence d’une corrélation entre le taux photosynthétique des semis et la lumière reçue, des valeurs relatives de transmission lumineuse ont été récoltées. Une photo hémisphérique, représentant l’ouverture du couvert à l’emplacement de chaque semis pour lequel la photosynthèse a été mesurée, a été prise à l’aide d’un appareil photo numérique (Nikon Coolpix 950) et d’un objectif fish-eye (Nikkor FC-E8 7.2mm). Les photos ont été prises à 92 cm du sol. Elles ont ensuite été analysées avec le logiciel Gap Light Analyzer version 2 (Institute of Ecosystem Studies (IES), Millbrook, New York). Ce logiciel crée un modèle de radiation solaire qui prend en compte les caractéristiques physiques et géographiques de la parcelle échantillonnée (correction magnétique, latitude, longitude, élévation, orientation) et les patrons saisonniers d’ensoleillement (Frazer et al. 1999). Un niveau d’opacité est attribué à chacune des images et le logiciel calcule le pourcentage de transmission total (direct et diffus) ayant atteint le semis durant la saison de croissance en cours.

Gel et mortalité

Après la plantation, en juin 2015, les froides températures ont eu pour effet de détruire les tissus méristématiques de certains bourgeons encore en dormance. En effet, les températures de la fin du mois de juin 2015 avoisinaient le point de congélation. L’épaisse couche d’humus du site BER (De Barba et al. 2015) a pu agir comme un tampon en atténuant les variations de température de l’air. Ceci pourrait expliquer la plus faible proportion de semis affectés par le gel sur ce site. Les SAB se sont montrés moins tolérants que les EPN au gel. Il a été démontré que le SAB montre une réaction rapide aux variations de température durant la période de production cellulaire (Deslauriers et Morin 2004). De plus, la distribution nordique de l’EPN peut faire qu’il tolère mieux les basses températures. La survie de plusieurs semis, particulièrement les SAB, a été compromise par un choc de plantation. En effet, à la plantation d’un semis, le feuillage est immédiatement soumis à un appel d’eau provenant de l’atmosphère. Cependant, l’accès à l’eau est limité par le contact entre le sol et le système racinaire qui n’est pas encore pleinement établi (Grossnickle 2005). Un stress hydrique peut alors affecter le plant au niveau de sa croissance et de sa survie (Margolis et Brand 1990). Une espèce tolérante à l’ombre telle que le SAB peut montrer une faible habileté à l’acclimatation, mais offre une productivité maximale en présence de conditions de lumière optimales. Au contraire, l’EPN montre une meilleure habileté à s’adapter à de faibles niveaux de lumière, d’humidité et de nutriments (Margolis et Brand 1990). Pour ces raisons, les EPN semblent s’être mieux adaptées à leur environnement par rapport aux SAB. Également, chacun des semis (EPN et SAB) a eu à subir l’effet du choc de plantation, peu importe le traitement.

Phénologie

L’étude de cette variable avait pour but de déterminer si les traitements H et N pouvaient avoir une influence sur le développement des bourgeons de semis des EPN et des SAB, dans deux sites situés à différentes latitudes en forêt boréale. L’hypothèse selon laquelle les traitements H et N pourraient modifier la phénologique des bourgeons est acceptée en partie. En effet, le début du débourrement des bourgeons des EPN et des SAB de BER ont été accélérés par le traitement H. De Barba et al. (2015) ont observé des résultats semblables sur une étude menée dans les mêmes sites d’études, mais sur des EPN matures. En effet, dans cette étude, le site BER a montré des différences significatives pour les traitements H et N (le traitement H hâtait le processus de débourrement des bourgeons alors que le traitement N le retardait). Les bourgeons ont montré dans tous les cas, un développement rapide jusqu’au stade 6 puis un ralentissement du stade 6 au stade 7. Le stade 7 implique l’élongation complète des cellules des aiguilles et nécessite plus de temps. En moyenne, le débourrement des bourgeons des semis ayant reçu le traitement H a commencé avant le débourrement des semis recevant le traitement témoins pour les deux espèces et les deux sites.

Ceci suggère l’existence d’une interaction physiologique entre les racines et la partie aérienne de l’arbre, au printemps. Ces résultats permettent d’appuyer l’hypothèse avancée par De Barba et al. (2015) selon laquelle la hausse des températures du sol permettrait d’activer le processus d’absorption d’eau et d’éléments minéraux des racines et leur transport jusqu’aux parties aériennes. En effet, l’expérience de Bergh et Linder (1999) a démontré que le chauffage du sol permettait de tripler le flux de sève quotidien chez des épinettes de Norvège. Parmi les hormones transportées dans ce flux, on peut compter les cytokinines qui sont des hormones produites dans les racines et responsables de la levée de dormance. Au contraire, un surplus d’azote peut produire une limitation de la production de cytokinines au profit d’acide abscissique, une hormone qui quant à elle envoie un signal de prolongation de la dormance (Omarov et al. 1999). Dans les endroits où les températures annuelles moyennes sont plus faibles, les plantes peuvent être plus sensibles à de légères augmentations des températures (De Barba et al. 2015). De plus, pour les régions situées à de plus hautes latitudes, la disponibilité de l’eau liée au dégel tardif des sols peut jouer un rôle majeur affectant la croissance des végétaux (Rossi et al. 2011). Ceci peut expliquer la réponse phénologique positive observée pour les deux espèces suite au chauffage du sol pour le site d’étude aux températures annuelles plus faibles (BER).

Table des matières

REMERCIEMENTS
AVANT-PROPOS
TABLE DES FIGURES
TABLE DES TABLEAUX
LISTE DES ABRÉVIATIONS, DES SIGLES ET DES ACRONYMES
1 INTRODUCTION
1.1 Objectif
1.2 Hypothèses
2 MÉTHODOLOGIE
2.1 Localisation et description des dispositifs expérimentaux
2.2 Variables mesurées sur les semis
2.2.1 Gel
2.2.1 Phénologie
2.2.2 Photosynthèse
2.2.4 Croissance
2.2.5 Biomasses
2.2.6 Anatomie cellulaire
2.2.7 Analyses chimiques foliaires
2.3 Analyses statistiques
3 RÉSULTATS
3.1 Mortalité
3.2 Gel
3.3 Prédation
3.4 Phénologie
3.5 Photosynthèse
3.6 Hauteur et diamètre
3.6.1 Croissance annuelle en hauteur
3.6.2 Croissance latérale des SAB
3.6.3 Croissance en diamètre
3.7 Biomasses
3.8 Anatomie cellulaire
3.9 Analyses chimiques foliaires
4 DISCUSSION
4.1 Gel et mortalité
4.2 Phénologie
4.3 Photosynthèse
4.4 Croissance
4.5 Biomasses
4.6 Anatomie cellulaire
4.7 Analyses chimiques foliaires
4.9 Relation entre les variables étudiées
4.10 Limites de l’étude
5 CONCLUSION
RÉFÉRENCES
ANNEXE A : Localisation des sites d’étude
ANNEXE B : Date de début et de fin du traitement H
ANNEXE C : Date de début et de fin du traitement N
ANNEXE D : Concentration des ions présents dans les pluies artificielles
ANNEXE E : Températures journalières de l’air en 2015 et 2016
ANNEXE F : Corrélation entre le taux photosynthétique et l’ouverture de la canopée
ANNEXE G : Composition chimique des aiguilles des semis

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