Modèle de gestion des signaux faibles

Un modèle de gestion des signaux faibles

Une démarche holistique

Notre travail se situe dans une entreprise industrielle. Très tôt, nous avons été amenés à rencontrer les personnes travaillant à la Direction Centrale ainsi que quelques responsables du service HSE de la chimie. Ces premiers échanges nous ont donné une idée de la complexité de cette entreprise. Comme nous le verrons plus tard dans la partie « 4. Etudes de cas », nos deux premières études, l’une pour découvrir les métiers de la pharmacie, l’autre pour suivre l’activité d’un responsable de service HSE de la chimie, nous ont rapidement guidé vers une approche holistique. Nous souhaitons comprendre comment sont gérés les signaux faibles pour pouvoir proposer une amélioration. Or ces signaux faibles prennent place dans une organisation, et c’est bien cette organisation, que nous avons du commencer par intégrer. Nous avons donc étudié Ambre BRIZON 53 Mines ParisTech l’organisation, ses principes, afin de connaître le prescrit avant d’appréhender la complexité de la réalité. Lorsque nous avons ensuite observé le travail du responsable du service HSE dans la chimie pour savoir comment il gérait ses signaux faibles au quotidien, nous menions encore un travail cherchant quelle était la place de ces signaux dans une activité quotidienne complexe. Par la suite, nous nous sommes focalisés logiquement sur les signaux faibles des opérationnels. Ce choix s’explique par l’origine de notre modèle : le terrain sur site de production industrielle. Mais il s’explique aussi par la dimension que nous souhaitons observer pour ces signaux : l’HSE. Cette dimension est créée à l’origine pour la santé et la sécurité des salariés. Cette idée de garder l’écoute sur le travail des opérateurs sera l’un des fils rouges de notre travail. Un signal faible n’est pas un signal devant être traité complètement en marge des autres évènements.

Au contraire, la richesse de son interprétation vient de cette mise en perspective par rapport à un contexte global. De plus un signal faible sera d’abord détecté par un individu. Ce cas nous oblige à nous intéresser à la psychologie individuelle. Mais le signal faible ne pourra aboutir à une action que grâce à la volonté d’un manageur. Cela nous oblige à nous intéresser à l’organisation, mais aussi à la psychologie des groupes. Nous voyons bien à travers ces deux illustrations que le management des signaux faibles ne peut se cantonner à une étude vue au travers du prisme d’un seul champ scientifique. Cette largeur de vision est d’autant plus nécessaire qu’elle sera mieux acceptée par le terrain, car elle prendra véritablement en compte les acteurs de terrain sans faire abstraction des éléments qui n’entreraient pas dans le champ scientifique retenu. Nous avons donc travaillé pour cette étude avec des personnes de la Direction Centrale, avec des hauts manageurs, des manageurs de proximité, et des opérateurs.

Une approche constructiviste

Notre démarche de recherche est également une démarche constructiviste. Partant de la base épistémologique en science de gestion, constituée des deux principaux courants positivisme, et constructivisme, nous avons essayé de nous positionner, et de positionner le travail des acteurs que nous avons suivi. Le positivisme est une philosophie qui fut essentiellement définie par Auguste Comte. Sa réflexion repose sur les règles des sciences dures (mathématiques, physiques, …) régissant notre univers. D’après lui ces règles s’appliquent donc également au domaine de la sociologie. Le positiviste cherche ainsi à comprendre comment fonctionne son univers, en se basant sur les observations du monde réel, en appliquant les règles définies par les sciences dures, mais n’en cherchant pas l’origine. Il fonctionnera par induction logique. Le positiviste peut donc, d’après ses auteurs, avoir une vision objective du monde, le « vrai » monde, c’est le principe d’objectivité.

Le positivisme repose également sur le paradigme de l’univers câblé. Idée selon Individual Organisation Problem Solving Modes Problem Taxonomy Societal Behavioral Empirical Conceptual Genesis Problem Solving Process Diagnosis Analysis Synthesis Group Society Ambre BRIZON 55 Mines ParisTech laquelle il existe des plans de câblage de l’univers permettant de comprendre la logique classique, naturelle (Le Moigne, 2002). Un point important du positivisme est que le facteur humain y est considéré comme un maillon faible du système (Journé, 1997). L’interprétativisme est un second courant proche du constructivisme, souvent présenté comme en étant extrait. Il se distingue essentiellement par sa recherche de compréhension du sens que construisent les acteurs pour façonner leur réalité sociale. Ce courant trouve une place dans notre travail étant donné notre sujet : les signaux faibles. Ces signaux nécessitent évidemment une première interprétation par les acteurs ; ce qui nous rapproche inévitablement de l’interprétativisme. Cependant, nous avons menez notre recherche avec les acteurs, comme nous le verrons dans la partie « 4. Etudes de cas », c’est pourquoi nous nous intéressons davantage au constructivisme. Le constructivisme est un courant de pensée selon lequel nos connaissances et représentations du monde sont le fruit de notre réflexion, de notre propre construction mentale. L’individu y est un acteur apprenant et réfléchissant perpétuellement afin de comprendre et de se représenter le monde qui l’entoure, de lui donner du sens. Il s’agit là d’une première différence avec le positivisme qui cherche à savoir « comment », le constructivisme cherche à savoir « pourquoi ». Ensuite cette construction du sens se fait activement par l’acteur, il ne la reçoit pas naturellement, passivement, comme dans le positivisme. Plusieurs études ont déjà été réalisées dans cette idée (par exemple Jacques et al., 2004, 2007, Journé, 1997). Comme le note Gatot (2000) : « L’épistémologie positiviste est une épistémologie de vérification des lois universelles qui déterminent le comportement du monde, tandis que l’épistémologie constructiviste est une épistémologie de l’invention, qui ambitionne de concevoir une connaissance projective (Le Moigne, 199426).

L’épistémologie constructiviste met en avant l’interaction du sujet observant et de l’objet observé, considérant la connaissance comme un construit plutôt qu’un donné. La connaissance est donc un processus avant d’être un résultat, le système observant se construisant en permanence dans et par l’interaction du sujet observant et du phénomène observé (Le Moigne, 199427). La nature de la connaissance produite est donc contextuelle pour les constructivistes, alors qu’elle est acontextuelle pour les positivistes (Girod-Séville et Perret, 199928). ».

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