Modèles de vision et synthèse d’images

De tout temps, l’homme a toujours cherché à transcrire graphiquement le monde qui l’entoure. Des premières peintures des hommes primitifs aux techniques les plus modernes, son but est resté le même : reproduire fidèlement ce qu’il voit avec ses yeux. L’avenement de l’informatique a permis l’émergence d’une nouvelle technique : la synthèse d’image. Elle consiste à obtenir une image par des moyens informatique en simulant la visualisation d’une scène à travers un dispositif optique. Des calculs complexes sont donc mis en oeuvre pour simuler les matériaux, l’éclairage et l’interaction de la lumière avec les objets. Les progrès dans ce domaine sont rapides, et il est aujourd’hui possible d’obtenir des images d’un réalisme confondant. Toutefois, les temps d’obtention sont encore élevés pour aboutir à un tel résultat. Parmi toutes les voies explorées visant à réduire le temps de calcul, il en est une dont l’exploitation est relativement récente : la prise en compte de la vision humaine.

Le but de la synthèse d’image est la conversion de la description symbolique et mathématique d’une scène en données numériques directement visualisables sur un moniteur ou tout autre dispositif de reproduction graphique. Plus pratiquement, ce processus peut être apparenté au maquettisme : après avoir conçu les plans d’une maquette, il est possible de la construire, de la peindre, puis de l’éclairer et la prendre en photo. Selon ce schéma, la création d’une image de synthèse peut se décomposer en trois phases principales : la modélisation géométrique des objets, la création de la scène, et le rendu.

La création d’une image commence donc par le passage d’une idée des objets de la scène à une modélisation mathématique de ces objets. Le problème est donc le suivant : comment représenter, dans la mémoire d’un ordinateur, les propriétés géométriques d’un objet (nous verrons ses propriétés physiques dans la section suivante) ? Dans cette section, nous présenterons trois méthodes de modélisation, choisies pour être particulièrement courantes et adaptées à nos travaux, mais il en existe évidemment beaucoup d’autres.

L’idée la plus naturelle, analogue à ce qui existe dans d’autres domaines scientifiques, consiste à modéliser un objet par la définition, l’équation ou le système mathématique le décrivant. Par exemple, une sphère peut être décrite par l’inéquation suivante : x² +y² +z² < R

R étant ici le rayon de ladite sphère. Cette représentation est très compacte et élégante mais présente néanmoins des défauts assez incontournables. Premièrement, si il est facile de représenter des objets géométriques simples comme un cube ou une sphère, il est beaucoup moins aisé de déterminer l’équation d’objets complexes comme une main humaine ou une clé a molette. Deuxièmement, il faut considérer le fait que nos objets sont modélisés dans le but d’être visualisés sur écran par la suite. Malheureusement, rendre directement visualisable une fonction mathématique peut être coûteux : par exemple, en utilisant le lancer de rayons, il faut, pour chaque pixel, savoir calculer avec précision l’intersection d’une droite avec notre objet (donc savoir trouver les racines de l’équation correspondante), ce qui n’est pas forcément trivial.

La représentation par arbre de construction (ou “Constructive Solid Geometry” (CSG))

Cette technique repose sur le fait qu’il est possible de représenter des objets complexes comme une composition d’objets simples appelés primitives : par exemple, une table n’est rien de moins que l’assemblage de cinq cubes préalablement déformés. Nous avons vu que la représentation implicite permettait de modéliser des objets basiques. Nous pouvons alors créer des objets plus complexes en utilisant des opérateurs booléens comme la réunion ou l’intersection sur les primitives. En pratique, un objet CSG se présente sous la forme d’un arbre dont les feuilles sont les primitives utilisées et dont les noeuds internes sont les opérateurs.

Cette technique s’avère performante en ce sens qu’elle permet de modéliser des objets complexes avec une taille des données très réduite. De par sa structure hiérarchique, elle permet aussi une modification locale de l’objet et est par conséquent très utilisée dans les logiciels de conception assistée par ordinateur. Notons que le lancer de rayon est particulièrement adapté à la visualisation d’objets CSG car il est possible de composer les intersections rayon/primitive pour obtenir les intersections rayon/objet. La CSG n’a toutefois pas que des avantages : il subsiste un grand nombre d’objets, notamment les objets “naturels”(arbres, montagnes, êtres vivants), qui restent assez difficilement modélisables en CSG car leur géométrie ne résulte pas vraiment de l’assemblage macroscopique de primitives simples.

La représentation par les bords

Il est aussi possible de représenter un objets en matérialisant la limite entre son intérieur et son extérieur. Cette frontière est délimitée par une série d’éléments géométriques plans (généralement des triangles) reliés entre eux par leurs bords. Cette méthode offre de nombreux avantages. Tout d’abord, le modèle obtenu est facilement et rapidement visualisable car la plupart des cartes graphiques actuelles prennent en charge l’affichage de triangles tridimensionnels. Cette structure est aussi aisément déformable, aussi bien localement que globalement. Enfin, n’importe quel objet continu est représentable de cette manière car ce procédé s’apparente à un échantillonnage, et il n’existe pas d’autre limite que la mémoire disponible. Mais c’est là le problème majeur : pour obtenir une représentation correcte d’un objet un tant soit peu complexe, un grand nombre de triangles est nécessaire.

Table des matières

1 Introduction
1.1 Objectifs
1.2 Organisation
2 Notions de base
2.1 Synthèse d’images : principes et méthodes
2.2 La Modélisation géométrique
2.2.1 La représentation implicite
2.2.2 La représentation par arbre de construction (ou “Constructive Solid Geometry” (CSG))
2.2.3 La représentation par les bords
2.3 La création de la scène
2.3.1 L’apparence des objets
2.3.2 La construction de la scène
2.4 Le rendu .
2.4.1 La radiosité
2.4.2 Le lancer de rayons
2.4.3 Un aspect important : l’obtention de l’image finale
2.5 Perception visuelle et synthèse d’images
2.5.1 Perception visuelle et modélisation géométrique
2.5.2 Perception visuelle et rendu
3 La perception visuelle
3.1 L’anatomie du système visuel
3.1.1 Le globe oculaire
3.1.2 La rétine
3.1.3 Les voies nerveuses et le cortex visuel
3.2 Caractéristiques
3.2.1 L’adaptation visuelle
3.2.2 La vision des contrastes
3.2.3 La vision des couleurs
3.3 Réflexions
4 Aspects Couleur
4.1 Notions essentielles de radiométrie et de photométrie
4.1.1 Radiométrie
4.1.2 Photométrie
4.2 Bases de colorimétrie
4.2.1 Hypothèses de base de la colorimétrie
4.2.2 Les fonctions colorimétriques
4.2.3 L’observateur standard CIE et l’espace colorimétrique CIE 1931 RGB
4.2.4 L’espace CIE 1931 XYZ
4.2.5 L’espace colorimétrique SML
4.2.6 L’(es) espace(s) colorimétrique(s) AC1C2
4.2.7 Colorimétrie des différences
4.2.8 L’espace CIELAB
4.2.9 Le modèle CIECAM97s
4.3 Reproduction de tons et Fidélité
4.3.1 Calibrage du dispositif de reproduction
4.3.2 Les opérateurs de reproduction de tons (ORT)
4.3.3 Fidélité et photo-réalisme
Conclusion

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