Problématique environnementale liée au rejet d’eaux usées dans les milieux naturels 

Problématique environnementale liée au rejet d’eaux usées dans les milieux naturels 

 Historique et problématique générale des rejets anthropiques

 L’eau est une ressource vitale pour l’homme. Les rivières en particulier ont joué un rôle très important dans le développement des villes et des activités agricoles puis industrielles en tant que ressource, voies de transport, source d’énergie (Postel & Richter, 2003), mais aussi en tant que milieu récepteur de différents types de rejets. En effet, les rivières ont toujours été le milieu de rejet privilégié des eaux usées humaines. L’homme rejette ses déchets, en particuliers liquides (eaux usées), dans les rivières qui l’entourent comme les égyptiens et les romains le faisaient déjà il y a deux mille ans (Lofrano & Brown, 2010). Cependant, au fil du temps les rejets ont augmenté en volume et leur composition s’est diversifiée en même temps que l’industrie s’est développée. Aujourd’hui, on estime que « 80% des eaux fluviales servent à transporter des déchets vers l’océan » (Encyclopédie Universalis). De manière générale la composition des eaux rejetées par l’homme diffère de celle d’un cours d’eau à l’état « naturel ». Les eaux usées émises par l’homme peuvent contenir des éléments présents naturellement dans les cours d’eau, comme de la matière organique, certains métaux, des nutriments (UNEP, 2008). Cependant, globalement, les concentrations de ces composés sont plus élevées dans les eaux de rejets que dans le milieu naturel (les concentrations dépassent les Normes de Qualité Environnementale (NQE)). Ceci est d’autant plus vrai pour les rejets industriels avec la mise en place récente de réduction des consommations d’eau qui ont pour effet de concentrer la pollution si ces mesures ne sont pas associées à la mise en place de technologies propres. Par ailleurs, les eaux de rejets peuvent également contenir des molécules ou composés créés par l’homme (produits ou sous-produits chimiques) qui ne sont pas assimilables par les écosystèmes (Encyclopédie Universalis). Ceci implique que des modifications d’écosystèmes peuvent apparaitre à de très grandes distances des rejets, c’est par exemple le cas des Polluants Organiques Persistants (POP) (Wenning & Martello, 2014), (Jones & de Voogt, 1999). Ainsi, au contact de ces effluents, les écosystèmes se modifient, puis se détériorent. La détérioration des écosystèmes fluviaux, étroitement connectés avec l’ensemble de l’hydrosphère, menace l’ensemble de la ressource en eau, notamment en eau douce, pour 14 l’eau potable et l’alimentation, ainsi que pour l’industrie. Ces préoccupations ont poussé l’homme à traiter ses eaux usées, seulement à partir du 20°siècle dans la plupart des pays (Lofrano & Brown, 2010). La règlementation sur les rejets et le traitement des eaux usées est devenue de plus en plus importante et complète dans les pays développés. Pour autant, l’état des masses d’eau dans le monde (y compris en Union Européenne où la règlementation environnementale est une des plus contraignantes) continue à se détériorer du point de vue qualitatif (Postel & Richter, 2003), (Cundy, 2001). Localement, le traitement des eaux usées par des filières de traitement a tout de même permis d’améliorer la qualité des rejets pour les paramètres classiques (principalement le carbone, l’azote et le phosphore) (Agence de l’Eau Adour-Garonne, 2013). Pour évaluer l’état des écosystèmes aquatiques sur son territoire, identifier les écosystèmes dégradés à restaurer ainsi que ceux qui ne le sont pas afin de les protéger, l’Europe a mis en place une règlementation communautaire : la Directive Cadre sur l’Eau.

Surveillance et protection de la ressource en eau : contexte européen et application au niveau national 

La Directive Cadre sur l’Eau

 Adoptée par le parlement européen le 23 octobre 2000, la DCE établit un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau. Elle fixe entre autres les objectifs suivants :  « la prévention de toute dégradation supplémentaire, la préservation et l’amélioration de l’état des écosystèmes aquatiques,  la promotion d’une utilisation durable de l’eau fondée sur la protection à long terme des ressources en eau,  la réduction progressive des rejets, émissions et pertes de substances prioritaires et l’arrêt ou la suppression progressive des rejets, émissions et pertes de substances dangereuses prioritaires,  la réduction progressive de la pollution des eaux souterraines et la prévention de leur aggravation, afin de contribuer à un approvisionnement suffisant en eau de bonne qualité pour une utilisation durable, équilibrée et équitable de l’eau. » 15 En particulier, un des objectifs mis en avant par la DCE pour les états membres est l’atteinte d’ici 2015 du bon état écologique et chimique pour tous les cours d’eau. Dans ce cadre, les états membres doivent recenser leurs bassins hydrographiques afin de créer des « districts hydrographiques » contenant un ou plusieurs bassins hydrographiques. Pour ces districts hydrographiques, une autorité compétente doit être désignée afin de veiller à l’application des règles prévues par la DCE. Si un bassin hydrographique s’étend sur plusieurs états, un district hydrographique international doit être créé. En France par exemple, c’est le cas pour le bassin Rhin-Meuse, qui fait partie du district hydrographique international du Rhin, regroupant sept états (Liechtenstein, Autriche, Allemagne, France, Luxembourg, Belgique et Pays-Bas), et de celui de la Meuse (partie faîtière) (France, Luxembourg, Belgique, Allemagne et Pays-Bas).

Les échelles de gestion de la ressource en eau en Europe : du bassin hydrographique à la masse d’eau

 En application de la DCE, le territoire français est divisé en six bassins hydrographiques (France métropolitaine), comme le montre la Figure 3 :  Artois-Picardie,  Seine-Normandie,  Loire-Bretagne,  Adour-Garonne,  Rhin-Meuse,  Rhône-Méditerranée et Corse. Pour chaque bassin hydrographique, un plan de gestion et un programme de mesure doivent être élaborés afin de définir les objectifs à atteindre et les actions nécessaires. En France, un Schéma Directeur d’Assainissement et de Gestion des Eaux (SDAGE) est ainsi élaboré pour les six bassins hydrographiques. Les SDAGE sont apparus en France en 1992 en application de la Loi sur l’eau. Modifiés en 2004, ils sont aujourd’hui les outils d’application de la DCE. Ces documents décrivent les priorités de la politique de l’eau par bassin hydrographique pour six ans. Le SDAGE « définit les orientations fondamentales d’une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau. Il fixe les objectifs de qualité et de quantité à atteindre pour chaque cours d’eau, plan d’eau, nappe souterraine, secteur littoral. Il détermine les dispositions nécessaires pour prévenir la détérioration et assurer l’amélioration de l’état des eaux et des milieux aquatiques. » (Agence de l’eau Loire-Bretagne 2010). Il contient également « un 16 programme de mesures, qui précise les actions (techniques, financières et règlementaires) » à mettre en place pour atteindre les objectifs de qualité fixés précédemment. Afin de permettre une gestion plus locale de l’eau, une politique uniforme à l’échelle d’un bassin n’étant pas forcément adaptée, la mise en place de Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE) est encouragée. Le SAGE a alors la responsabilité de définir à l’échelle d’une unité hydrographique plus réduite (bassin versant…) les mesures les plus adaptées en matière de politique sur l’eau. Tout comme le SDAGE, le SAGE est un document à valeur règlementaire. Ceci signifie que les actions, les financements et les décisions prises par les organismes publics et les collectivités locales doivent être compatibles avec ce dernier. Chaque bassin hydrographique regroupe ainsi plusieurs bassins versants, comprenant plusieurs cours d’eau, eux même divisés en masses d’eau (Figure 4). Les masses d’eau (portions de rivières) ont été définies de manière à présenter des caractéristiques homogènes du point de vue biologique, physico-chimique et morphologique (ONEMA, 2013). Un dispositif de surveillance a été mis en place sur l’ensemble des bassins hydrographiques afin de contrôler les progrès vers le bon état des masses d’eau, conformément à la DCE qui demande à tous les états membres de suivre la qualité des eaux sur leur territoire.

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