Quelles implications pour la prévision des crues

Quelles implications pour la prévision des crues

Introduction

De nombreux travaux ont montré que des modèles trop complexes et trop distribués ne permettaient pas de répondre aux objectifs et besoins des outils opérationnels de prévision (Restrepo 2010; Reed et al. 2004; Smith et al. 2012a). De ce fait, la plupart des systèmes opérationnels de prévision des crues utilisent aujourd’hui des modèles hydrologiques conceptuels, souvent globaux. Toutefois, il y a une tendance à aller vers des approches plus spatialisées (Koren et al. 2004; Cole and Moore 2009; Blöschl et al. 2008; Audard-Vincendon 2010) en raison de la disponibilité croissante de données d’observation à haute résolution. Nous avons pu montrer dans le chapitre 6 de cette thèse que l’utilisation de données de précipitation spatialisées en entrée d’un modèle hydrologique semi-distribué peut, dans certains cas, améliorer la précision des simulations de débit. Ces résultats doivent cependant être validés en prévision. En effet, le fonctionnement des modèles de prévision est très différent des modèles de simulation, notamment parce que les premiers assimilent les données d’observation de débit pour corriger les états internes et/ou sorties du modèle hydrologique pluie-débit (Reichle 2008). Nous nous intéressons dans ce chapitre à deux modèles pluie-débit de prévision développés à Irstea : GRP et TGR. Le modèle GRP (Tangara 2005; Berthet 2010) est un modèle qui a été développé pour la prévision des crues en temps réel et qui est actuellement utilisé dans plus de la moitié des Services de Prévision des Crues (SPC) français. GRP est un modèle pluie-débit global tandis que TGR (Munier 2009) est un modèle semi-distribué qui a été développé dans le but d’assimiler les observation de débits des points intérieurs des bassins. Dans ce chapitre, l’intérêt de la spatialisation des précipitations et d’une approche semi-distribuée pour la prévision des crues est analysée par rapport aux débits observés à l’exutoire et aux points intérieurs des bassins versants. La première partie présente les structures et le fonctionnement des deux modèles de prévision utilisés avant de détailler la méthodologie d’évaluation et de comparaison appliquée sur un sous-échantillon de 45 bassins versants. Dans la deuxième partie, nous présentons les résultats concernant l’impact de la spatialisation des données d’entrée de précipitation et la comparaison entre les deux approches de modélisation (globale et semi-distribuée) sur la prévision des débits aux points intérieurs et à l’exutoire des bassins versants

Modélisation hydrologique pluie-débit pour la prévision des crues 

Le modèle de prévision global GRP

Structure du modèle

Le modèle de prévision GRP est un modèle hydrologique conçu pour la prévision des débits à court terme. Des informations détaillées sur le modèle (notamment sa formulation mathématique), son mode de construction et son évaluation, sont fournis par Tangara (2005) et Berthet (2010). Nous présentons brièvement la structure et le fonctionnement du modèle ci-dessous. Figure 69 : Schéma structurel du modèle GRP GRP est un modèle continu, global avec une structure à réservoirs. Il se sert de l’historique des conditions météorologiques passées au-delà de l’événement en cours (notamment pour déterminer les conditions initiales d’humidité du bassin à l’instant de la prévision) et des conditions météorologiques futures pour calculer les débits à l’exutoire du bassin versant. Il nécessite l’estimation des trois paramètres TB (h), CORR (-) et ROUT (mm) et transforme la pluie en débit par étapes (Figure 69) :   • les précipitations P sont d’abord neutralisées par l’évapotranspiration potentielle E. • le reliquat éventuel de pluie Pn est divisé en deux parties en fonction du taux de remplissage du réservoir de production (de capacité fixe égale à 275 mm), une partie (Ps) alimentant ce réservoir et l’autre (Pn-Ps) alimentant l’écoulement. Le reliquat éventuel d’évapotranspiration potentielle En contribue à la vidange du réservoir de production par évapotranspiration réelle (Es). • une percolation issue du réservoir de production (Perc) va également alimenter l’écoulement. • la quantité d’eau totale allant alimenter l’écoulement (Pr) est multipliée par le facteur d’ajustement CORR, qui permet notamment de tenir compte d’éventuels échanges en eau avec des nappes profondes et/ou les bassins voisins. • le transfert de l’eau est assuré par l’hydrogramme unitaire (dimensionné par le paramètre TB) qui permet de tenir compte du décalage temporel entre pluie et débit, puis par le réservoir de routage non linéaire (quadratique) dont la capacité à une heure est dimensionnée par le paramètre ROUT. Le modèle ne présente qu’une seule branche d’écoulement, ce qui permet notamment d’avoir une relation univoque entre le débit simulé par le modèle et le contenu du réservoir de routage. Nous rappelons que le modèle GRP permet de prévoir des débits à l’exutoire du bassin sans représenter explicitement l’hétérogénéité spatiale des caractéristiques et des précipitations du bassin. Le bassin versant est considéré comme une seule entité, les données d’entrées de précipitation et d’évapotranspiration sont moyennées spatialement sur la surface du bassin et il n’est pas possible d’accéder aux prévisions de débit à l’intérieur du bassin. 

Méthode d’assimilation

Afin d’améliorer la précision des débits calculés aux pas de temps futurs, le modèle de prévision GRP exploite le débit observé à l’instant de prévision. Cette exploitation se fait par l’intermédiaire d’une procédure d’assimilation (ou de mise à jour) du dernier débit observé. Elle se déroule en deux temps : • une mise à jour directe du réservoir de routage du modèle : le niveau du réservoir est recalculé de manière à générer un débit égal au dernier débit observé à l’instant de la prévision. • une exploitation de l’erreur de prévision faite par le modèle au pas de temps précédant le pas de temps courant. Un coefficient est calculé : c’est le ratio entre le débit observé et le débit prévu à 1 heure de la dernière prévision, élevé à la puissance 0,45 (Berthet 2010). Les débits prévus aux pas de temps futurs sont multipliés par ce coefficient correctif. 220 Nous précisons que les autres états du modèle ne sont pas affectés par la mise à jour. Un seul état du système (celui le plus à « l’aval » du modèle : le niveau du réservoir de routage) est modifié à chaque instant de prévision. Pour un objectif de prévision, on peut considérer que cette mise à jour est partie intégrante de la structure. Dans ce cas, le dernier débit observé est une donnée d’entrée supplémentaire du modèle. De plus, il exploite l’erreur du modèle faite au pas de temps précédent, ce qui suppose la disponibilité également du débit observé précédent. 

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