Santé et recours aux soins des jeunes en insertion socio-professionnelle

Santé et recours aux soins des jeunes en insertion
socio-professionnelle

Les trajectoires d’insertion des jeunes à leur sortie de formation initiale

L’insertion dans l’emploi des jeunes est marquée non seulement par un chômage élevé mais aussi par des allers-retours fréquents entre emploi et chômage. Sept ans après leur sortie de formation initiale en 2004, 85% des jeunes sont en emploi et 68% occupent un emploi à durée indéterminée. Entre 2004 et 2011, ils connaissent des trajectoires d’entrée dans la vie active qui peuvent être regroupées en trois grandes catégories (Boisson-Cohen et al. 2017 ; Couprié et Dzikowzski 2015) : – stabilisation rapide : un tiers des jeunes connaît un parcours relativement linéaire, aboutissant à une stabilisation rapide vers un emploi à durée indéterminée ; – stabilisation tardive ou différée : un autre tiers parvient à un emploi stable après un parcours plus difficile ; – instabilité ou retrait de l’emploi : le dernier tiers connaît durablement une insertion précaire composée d’une succession d’emplois à durée déterminée ou de périodes récurrentes et prolongées de chômage.

Les facteurs d’hétérogénéité à l’égard de l’emploi chez les jeunes

Si la situation des jeunes sur le marché du travail est marquée par un chômage élevé, ce constat doit être nuancé car la catégorie « jeunes » ne recouvre pas une réalité unique. Différents facteurs expliquent l’hétérogénéité des situations chez les jeunes : le niveau de diplôme et la spécialité de formation, mais également des caractéristiques socio-démographiques comme le lieu d’habitation, 33% 17% 18% 12% 9% 6% 4% Ils se sont stabilisés rapidement en EDI Ils se sont stabilisés en EDI de façon différée Ils se sont satbilisés en EDI tardivement Ils se sont maintenus durablement en contrat à durée déterminée Ils ont décroché de l’emploi Ils ont connu des périodes de recherche d’emploi persistantes ou récurrentes Ils ont passé une ou plusieurs longues périodes en dehors du marché du travail Introduction 31 l’origine migratoire ou encore le genre. Enfin, le capital social1 détermine aussi en partie leur insertion dans l’emploi. 1. Le diplôme et le domaine de formation La situation des jeunes vis-à-vis de l’emploi dépend en premier lieu de leur qualification. Bien que chaque génération qui entre sur le marché du travail soit toujours plus diplômée que la précédente, la situation des moins diplômés se dégrade toujours plus relativement, et ce phénomène s’est amplifié avec l’effet de la crise de 2008 (Boisson-Cohen et al. 2017). Encadré 2 : Les enquêtes « Génération » du Céreq À la fin des années 1990, l’État, avec l’appui du ministère de l’Éducation nationale, a lancé les enquêtes « Génération ». Il s’agit d’un vaste programme d’étude au long cours basé sur des cycles de trois ans. Ce travail est confié depuis plus de 15 ans au Céreq, dont la mission de service public est d’étudier l’accès à l’emploi des jeunes et leur trajectoire professionnelle, en fonction de la formation suivie et d’autres caractéristiques individuelles (genre, origine sociale, etc.). L’enquête porte sur un échantillon représentatif de l’ensemble des jeunes quittant le système éducatif une année donnée. En effet, analyser l’insertion des jeunes ayant le même âge sur le seul critère du niveau de diplôme peut être restrictif car la qualité de l’insertion dépend aussi de l’ancienneté des jeunes sur le marché du travail et celle-ci diffère à un âge donné selon le niveau de diplôme. La plupart des chiffres de ce chapitre sont issus de l’enquête Génération 2010, qui correspond à la sixième enquête Génération : au printemps 2013, le Céreq a interrogé un échantillon national de 33 500 jeunes sortis de leur formation initiale en 2009-2010 sur leurs premiers pas dans la vie active. Ces 33 500 jeunes qui ont répondu sont représentatifs des 708 000 qui, cette année-là, ont quitté pour la première fois le système éducatif, à tous les niveaux de formation (Bernot-Caboche 2018 ; Insee 2011 ; Joseph et Rouaud 2014).

L’origine migratoire, le territoire et le genre 

Le diplôme n’explique pas tout : l’insertion professionnelle des jeunes reste aussi très liée à l’origine sociale et/ou géographique, et dans une moindre mesure au genre. Les difficultés d’accès à l’emploi peuvent relever de discriminations (liées à l’origine ou au quartier de résidence par exemple), d’un moindre capital social ou d’un moindre capital économique (rendant par exemple, la mobilité domiciletravail plus difficile). Les jeunes issus de l’immigration ont ainsi plus souvent des difficultés d’insertion professionnelle que les jeunes sans ascendance migratoire directe. Ces difficultés sont plus marquées pour les enfants ayant deux parents immigrés, et en particulier les descendants d’immigrés d’Afrique. Par exemple, le taux de chômage chez les jeunes de moins de 25 ans d’origine africaine dépasse les 40%, soit presque le double du taux des jeunes sans ascendance migratoire directe. Au sein de la population générale, un jeune sortant de formation initiale en 2004 a passé en moyenne 11 mois au chômage au cours des sept premières années de vie active. Si cette durée est peu corrélée au sexe, les disparités selon l’origine migratoire des deux parents sont d’un ordre de grandeur comparable à celles qui sont reliées au niveau de diplôme. Par exemple, un individu dont les deux parents sont nés à l’étranger passe en moyenne 7 mois de plus au chômage qu’un individu dont les deux parents sont nés en France (Couprié et Dzikowzski 2015). Ces difficultés sont en partie liées aux parcours scolaires et aux processus d’orientation des descendants d’immigrés. En effet, plus souvent sans diplôme à la fin de leur scolarité que les jeunes dont les deux parents sont nés en France, ils obtiennent en moyenne des niveaux de diplôme moins élevés et, pour les descendants d’immigrés d’Afrique et de Turquie, dans des filières souvent moins porteuses en matière d’insertion professionnelle (moins d’apprentissage par exemple) (Boisson-Cohen et al. 2017). Ces difficultés d’insertion des jeunes issus de l’immigration sont en partie expliquées par le parcours scolaire, mais pas seulement. Parmi les jeunes de moins de 30 ans, le risque de chômage est plus élevé pour les jeunes descendants d’immigrés africains toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire même lorsque les effets liés à l’âge, au diplôme, à l’origine sociale ou au lieu de résidence sont neutralisés (Odds ratio à 1,9 par rapport à un jeune sans ascendance migratoire). Il en est de même pour les jeunes résidant en moyenne ou grande agglomération du nord de la France et en zone urbaine sensible (ZUS) (Odds ratio respectivement à 1,4 et à 1,5).Les jeunes résidant en zone urbaine sensible3 à la fin de leurs études sont désavantagés dans l’accès à l’emploi. Trois ans après la fin de leurs études, leur taux de chômage est de 34%, soit supérieur de douze points à celui des jeunes qui ne résidaient pas dans ces territoires (22%). Ces difficultés touchent particulièrement les hommes. Les jeunes qui résidaient dans une ZUS à la fin de leurs études en 2010 présentent un profil socio-démographique spécifique. Ils sont plus souvent d’origine sociale modeste (32% déclarent avoir un père ouvrier contre 23% des autres jeunes). Leurs deux parents sont plus souvent nés à l’étranger (39% contre 11%). Ils sont moins diplômés que les autres jeunes (29% sortent du système éducatif sans aucun diplôme contre 16% chez les jeunes non issus des ZUS ; 28% ont un diplôme de l’enseignement supérieur contre 41% dans le reste de la population). Les jeunes de ZUS s’estiment plus souvent victimes de discrimination (19%) que les autres (11%), et ce, quel que soit le profil socio-démographique ou le parcours scolaire. Ces difficultés accrues dans l’accès à l’emploi sont notamment dues aux origines plus populaires et aux parcours scolaires en moyenne plus courts des jeunes ayant grandi en ZUS. A niveau de diplôme similaire, les jeunes de ZUS étaient systématiquement plus exposés au chômage. Cependant, les études semblent réduire significativement les écarts : plus le niveau de diplôme est élevé, moins les écarts sont grands entre résidents ZUS et résidents hors-ZUS (Joseph et Rouaud 2014). 

Table des matières

Résumé
Abstract
Remerciements
Table des matières
Acronymes
Liste des publications en lien avec la thèse
Introduction
I. La jeunesse dans les années
A. Qui sont les jeunes ?
B. Quelques chiffres sur la jeunesse en France dans les années
C. Que partagent les jeunes ?
D. Les inégalités sociales chez les jeunes
II. L’emploi des jeunes
A. La situation des jeunes sur le marché du travail
B. Un taux de chômage élevé et une forte sensibilité à la conjoncture économique chez les jeunes
C. Les trajectoires d’insertion des jeunes à leur sortie de formation initiale
D. Les facteurs d’hétérogénéité à l’égard de l’emploi chez les jeunes 
E. Certaines difficultés d’insertion relèvent de facteurs externes au marché du travail et aux compétences des jeunes
F. Les NEETs
III. Les Missions locales et l’accompagnement des jeunes
A. Quarante ans de politique d’emploi en faveur des jeunes – Une succession de dispositifs
B. Les principes fondateurs et l’histoire du réseau des Missions locales
C. Le réseau et l’organisation des Missions locales en France
D. Qui sont les jeunes reçus par les Missions locales ?
IV. La santé des jeunes
A. Généralités
B. La santé mentale, le suicide et le mal-être chez les jeunes
C. La santé des jeunes et les politiques de santé publique
D. Les comportements de santé des jeunes
E. Les inégalités chez les jeunes concernent aussi la santé
V. Objectifs de la thèse
Méthodologie générale – Le projet Presaje
I. Justification de l’étude
II. Les objectifs de l’étude
III. L’intervention
IV. Sélection des Missions locales
V. Critères d’éligibilité des participants et caractéristiques de la population d’étude
VI. Analyses
Chapitre 1 – Un état de sante dégradé et un moindre recours aux soins des jeunes en insertion
Chapitre 2 – La proposition d’une consultation de médecine sociale et préventive améliore les entrées
en mesure et les comportements en santé des NEETs suivis en Mission locale
I. Les effets de l’intervention du groupe « assistant social »
II. Les effets de l’intervention du groupe « médecin »
Discussion
I. L’aller-vers
A. Définition et concept de « l’aller-vers » (ou outreach)
B. Naissance de « l’aller-vers »
C. Les actions « d’aller-vers » sont surtout destinées aux personnes précaires
D. Les raisons du non-recours à l’offre sociale
E. Les objectifs de « l’aller-vers »
II. La mise en perspective des essais contrôlés randomisés en économie du développement
III. L’évaluation des politiques d’emploi en faveur des jeunes
Conclusion et perspectives
Bibliographie
Table des tableaux
Table des figures
Table des encadrés
Table des illustrations
Annexes
Annex
Annexe
Annexe

projet fin d'etude

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