Soudabilité des aciers inoxydables

Soudabilité des aciers inoxydables

Les aciers inoxydables sont des aciers fortement alliés basés sur les systèmes Fe-Cr, Fe-Cr-C et Fe-Cr-Ni. Pour être qualifié d’inoxydable, un acier doit (Lippold et Kotecki, 2005) :
• Être constitué majoritairement de fer;
• Ne pas contenir plus de 1,2 % massique de carbone;
• Contenir au minimum 10,5 % massique de chrome.

Il est à préciser que la teneur minimale en chrome d’un acier inoxydable se situe généralement plus près de 12% massique puisqu’une partie du chrome libre tend à s’associer avec le carbone pour former des carbures réduisant ainsi la proportion de chrome disponible pour former une couche passive (Cr2O3) continue sur toute la surface du matériau.

Contrairement à la classification standard des aciers qui repose sur la composition chimique, les aciers inoxydables sont classés selon leur structure cristalline. Ils peuvent être divisés en cinq grandes familles parmi lesquelles on retrouve les aciers: ferritiques, martensitiques, austénitiques, austéno-ferritiques (duplex) et les aciers inoxydables à durcissement structural (PH pour Precipitation Hardening). Ces familles se distinguent par les phases qui composent leur microstructure. En fonction de la nature et de la proportion des éléments d’alliages à partir desquels sont élaborés ces aciers, une structure cristalline sera privilégiée par rapport à l’autre après refroidissement. En effet, certains éléments dits gammagènes tendent à favoriser la formation d’austénite (γ) tels que : le nickel, le carbone, le manganèse, le cuivre et l’azote. Les éléments alphagènes, quant à eux, auront pour effet de favoriser la formation de ferrite (α ou δ) : le chrome, le molybdène, le silicium, le niobium, le vanadium, le titane et l’aluminium. Plusieurs travaux dont ceux de Schaeffler et Espy ont permis l’élaboration de formules empiriques qui permettent de déterminer les indices de chrome équivalent (Creq) et de nickel équivalent (Nieq) en pondérant l’effet gammagène (par rapport au nickel) ou alphagène (par rapport au chrome) des différents éléments d’alliage qui entrent dans la composition chimique des aciers inoxydables (Espy, 1982).

Du point de vue du soudage, il est primordial de connaître le type d’acier inoxydable à assembler puisque chacune de ces grandes familles comporte des particularités métallurgiques qui leur sont propres. À cet effet, Bystram (Bystram, 1961) a identifié quatre zones de risques majeurs sur le diagramme de Schaeffler  soit ; le risque de fissuration à chaud, le risque de fissuration à froid, le risque de fragilisation par grossissement de grains et le risque de fragilisation par précipitation de la phase sigma (σ). Cet outil, permet notamment d’identifier les risques potentiels et les précautions à prendre en fonction de la valeur du Creq et du Nieq du métal de base et du métal d’apport à assembler. En règle générale :

• Les aciers inoxydables austénitiques posent un risque de fissuration à chaud au soudage notamment à cause d’impuretés dans le métal de base comme le soufre et le phosphore. La ségrégation interdendritique de ces impuretés tend à abaisser la température de solidification du film liquide subsistant entre les dendrites de solidification. Le retrait au refroidissement, engendré par le coefficient de dilatation thermique élevé de ce type d’acier, vient séparer les grains de part et d’autre du film liquide ce qui engendre la formation de fissures au centre des cordons.

• Les aciers inoxydables martensitiques posent un risque potentiel de fissuration à froid dû à la nature dure et fragile de la martensite et de la faible solubilité de l’hydrogène au sein de cette structure cristalline. S’il y a présence d’hydrogène dissout en quantité suffisante dans le joint soudé, combiné à des contraintes résiduelles de tension, il y a un risque de voir le joint se fissurer après refroidissement à température ambiante. La fissuration peut parfois se produire plusieurs jours suivant l’opération de soudage. La dureté de la martensite étant principalement fonction de la teneur en carbone de l’alliage, les précautions métallurgiques à prendre varieront essentiellement en fonction de cette teneur.

• Les aciers inoxydables ferritiques posent un risque de fragilisation par grossissement des grains en zone affectée thermiquement (ZAT) dû à l’apport d’énergie thermique lié aux opérations de soudage. Ce phénomène est causé par l’absence de transformation à l’état solide. Les seuls moyens de limiter le grossissement des grains de ferrite δ étant de limiter l’énergie de soudage ou de favoriser la recristallisation des grains de ferrite en procédant à un martelage entre passes, rendent les opérations de soudage particulièrement délicates sur ce type d’acier.

• Les aciers inoxydables austéno-ferritiques (duplex), comme certains alliages ferritiques et austénitiques, sont constitués en grande proportion d’éléments d’addition; ce qui les rendent susceptibles de former différents composés intermétalliques et phases secondaires. S’ils sont chauffés et maintenus suffisamment longtemps dans l’intervalle de température 300 °C-1000 °C, il est possible que des composés intermétalliques comme la phase sigma (σ) ou la phase khi (χ) précipitent aux joints de grains ou à l’intérieur des grains de ferrite (Redjaïmia et al., 2004 ; Hsieh et Wu, 2012). Ces précipités tendent à fragiliser la microstructure de l’acier inoxydable duplex et sont à éviter (Lippold et Kotecki, 2005, p.237).

• Les aciers inoxydables à durcissement structural ont la particularité de contenir des éléments d’alliages (titane, cuivre ou béryllium) permettant de former de fins précipités au cours d’un traitement thermique. Cette précipitation, généralement combinée à une transformation martensitique, leur permet d’obtenir une résistance mécanique élevée (plus de 1520 MPa pour certains alliages) (Lippold et Kotecki, 2005, p.265). Du point de vue de la soudabilité, les aciers inoxydables à durcissement structural peuvent être divisés en deux catégories : les aciers à transformation martensitique directe et les aciers à transformation martensitique indirecte. Les aciers à transformation martensitique directe peuvent poser un risque de fissuration à froid et doivent, autant que possible, être soudés avant le durcissement par précipitation pour éviter de remettre en solution les précipités et ainsi garantir de bonnes caractéristiques mécaniques. Les aciers à transformation martensitique indirecte doivent, quant à eux, être soudés après le traitement d’hypertrempe et avant le traitement de déstabilisation de l’austénite. La structure avant soudage est alors austénitique et peut poser un risque de fissuration à chaud (Roguin, 2017, p.120).

Soudabilité des aciers inoxydables duplex 

Considérés comme ayant une bonne soudabilité, les aciers inoxydables austéno-ferritiques (duplex) sont des aciers dont la microstructure, à température ambiante, est principalement constituée d’un mélange d’austénite et de ferrite (ISO 15156-3, 2011). Basée sur le système quaternaire Fe-Cr-Ni-N, la composition chimique est ajustée pour obtenir 50 % de ferrite et 50 % d’austénite à température ambiante. Les alliages duplex se solidifient d’abord en ferrite et dépendent d’une transformation partielle à l’état solide de la ferrite en austénite pour équilibrer la proportion volumique des deux structures cristallines. La nuance standard la plus répandue UNS S32205 (X2CrNiMoN 22-5-3, EN 1.4462) contient 22-23 % de chrome, 4,5- 6,5% de nickel, 3,0-3,5 % de molybdène, 0,14-0,20 % d’azote et un maximum de 0,03 % de carbone (ASTM A240, 2004). Afin de bénéficier de la résistance mécanique de la ferrite tout en conservant la ductilité et la résistance à l’impact de l’austénite, il est primordial de retrouver ces deux phases en proportion volumique équivalente (50/50) ou au minimum de conserver la teneur en ferrite entre 30 % et 65 % (API 938C, 2011). C’est d’ailleurs l’une des principales difficultés rencontrées lors du soudage des duplex de conserver une proportion équivalente de ferrite et d’austénite, notamment dans la zone affectée thermiquement, et d’éviter la formation de phases délétères, telles que les composés intermétalliques et les nitrures (Ramkumar et al., 2014).

Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE
1.1 Soudabilité des aciers inoxydables
1.2 Soudabilité des aciers inoxydables duplex
1.2.1 Équilibre des phases δ/γ
1.2.2 L’azote dans les aciers austéno-ferritiques
1.2.3 Métal d’apport enrichi de nickel
1.2.4 Formation de composés intermétalliques et de phases secondaires
La phase σ et la phase χ
Nitrures et carbures
1.2.5 Transformation martensitique induite par la déformation
1.2.6 Fragilisation à 475 °C
1.3 Soudabilité des aciers inoxydables martensitiques
1.3.1 Généralités
1.3.2 Précautions au soudage
1.3.3 La ferrite δ dans les aciers inoxydables martensitiques
1.3.4 L’austénite résiduelle et reformée dans les aciers inoxydables martensitiques à bas carbone
1.3.5 Fragilisation par l’hydrogène
1.4 Assemblage hétérogène duplex-martensitique
1.5 Traitements de parachèvement applicables aux assemblages soudés
1.5.1 Parachèvements permettant d’améliorer la géométrie du joint soudé
1.5.2 Parachèvements modifiant le champ de contraintes résiduelles
Traitement thermique de relaxation de contraintes
Traitement thermique de revenu
Le martelage
CHAPITRE 2 DÉMARCHE EXPÉRIMENTALE
2.1 Essais préliminaires
2.2 Dépôts E2209 sur acier UNS S41500
2.3 Martelage du dépôt E2209
CHAPITRE 3 ARTICLE: MICROSTRUCTURE, MECHANICAL PROPERTIES AND HAMMER PEENING EFFECT ON RESIDUAL STRESS OF DISSIMILAR CLADDING BETWEEN E2209 DUPLEX AND S41500 MARTENSITIC STAINLESS STEELS
3.1 Introduction
3.2 Methodology
3.2.1 Materials and welding procedures
3.2.2 Cooling rate
3.2.3 Metallurgical characterization
3.2.4 Mechanical characterization
3.2.5 Residual stress measurements
3.2.6 Hammer peening process
3.3 Results and discussion
3.3.1 Chemical composition of fusion zones
3.3.2 Metallurgical characterization
Fusion zone
δ/γ phase proportion
Base metal, heat affected zone and fusion line
Hammer peened specimens
3.3.3 Cooling rate
3.3.4 Mechanical behavior
Tensile and toughness properties
Microhardness profiles
Hammer peening effect on hardness
Residual stress
3.4 Conclusion
CONCLUSION 

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