Théorie mathématique de la communication

Communication

Introduction

DÉF. 3.1 – Communication. Ensemble des actions qui donnent la possibilité à un agent de transmettre une information à un autre agent, par un langage articulé ou par d’autres codes. Il est intéressant de mettre en rapport cette définition avec celle de la coordination (page 10). Elles ont en commun « la transmission d’information entre agents par le biais d’un langage articulé ou par d’autres codes ». Pourtant on ne peut pas redéfinir la coordination en utilisant la notion de communication. La différence tient au fait que nous définissons la communication comme une action. Ainsi, la grenouille de l’exemple de la page 10 ne choisit pas d’arborer une couleur particulière pour dissuader les prédateurs1 , il ne s’agit pas d’une action de la part de la grenouille, bien qu’un signal soit transmit (on peut également se demander si une information est effectivement transmise, car cela impliquerait qu’une telle information soit présente « chez » la grenouille à l’origine). Il n’y a donc pas communication mais coordination, selon nos définitions. En restant dans le domaine des SMA, on peut noter que notre définition est en accord avec ce que dit Ferber [Ferber, 1994] : « La communication agrandit les capacités perceptives des agents en leur permettant de bénéficier des informations et du savoir-faire des autres agents ». On retrouve bien ici la notion de transfert d’information d’un agent à un autre Nous allons maintenant aborder la manière dont est analysée la communication dans d’autres domaines. Cette étude ne pourra être que partielle, tant la communication est une notion omniprésente

Théorie mathématique de la communication

 La figure 3.1 représente la manière dont Shannon et Weaver ont modélisé la communication dans leur théorie mathématique de la communication [Shannon et Weaver, 1949]. Dans leur modèle, une information présente chez l’émetteur est codée puis transmise par une suite de signaux sur un media approprié, le récepteur est capable de percevoir ces signaux puis de les décoder afin de reconstituer l’information Cette théorie est parfaitement adaptée aux transferts d’informations pair-à-pair entre des machines. Par exemple, pour transmettre le texte « Bonjour ! » d’un ordinateur à un autre, chaque lettre est codée sous une forme numérique, qui est transformée en une série de variations de tension sur une paire de fils de cuivre (par exemple). Ces variations sont perçues par l’ordinateur destinataire qui les transforme en code numérique par l’opération inverse, et ce code est utilisé pour afficher le message à l’écran. Notons au passage que la définition 3.1, que nous avons choisi d’adopter pour la communication, correspond à celle de Shannon et Weaver. 

Communication et éthologie 

L’éthologie est la science de l’étude du comportement des animaux (et par extension des humains). On considère généralement qu’elle a été fondée par Konrad Lorenz, Karl von Frisch et Nikolaas Tinbergen. L’éthologue se distingue du comportementaliste par le fait qu’il s’intéresse le plus souvent aux comportements innés plutôt qu’acquis et que le comportementaliste se consacre plus volontiers à des animaux « supérieurs » comme les mammifères. Une grande partie des travaux en éthologie sont consacrés à l’étude de la communication (danse des abeilles [Bonsels, 1912 ; Von Frisch, 1993], phéromones chez les fourmis), ce qui motive cette section dans laquelle nous comparons notre définition avec deux autres, issues de l’éthologie.

Définition de Wilson

DÉF. 3.2 – Communication [Wilson, 1975]. An action on the part of one organism (or cell) that alters the probability pattern of behavior in another organism (or cell) in a fashion adaptive to either one or both of the participants. Pour comparer notre définition de la communication (3.1) avec cette définition issue de l’éthologie, il nous faut d’abord la traduire dans nos termes : « Une action de la part d’un agent qui modifie le comportement d’un autre agent (sa séquence potentielle d’actions) de manière appropriée à l’un ou l’autre ». La définition de la communication de Wilson a de commun avec la nôtre qu’il doit s’agir d’une action de la part d’un agent. En revanche, il ne fait aucunement appel à la notion d’information ou de signal pour définir la communication. La définition de Wilson correspond pour nous plutôt à la notion d’interaction (Parunak et al. [Van Dyke Parunak et al., 2002] rejoignent en cela Wilson) à laquelle on ajoute une notion de bénéfice probable pour l’un ou l’autre des participants. 

Définition de Slater 

DÉF. 3.3 – Communication [Slater, 1983]. The transmission of a signal from one animal to another such that the sender benefits, on average, from the response of the recipient. 46 Chapitre 3. Communication En d’autres termes : « La transmission d’un signal, d’un agent à un autre, de manière à ce que la réaction du receveur soit en moyenne bénéfique pour l’émetteur ». Slater ne considère pas que la communication doit être une action, ainsi la livrée rouge vif de notre grenouille amazonienne est pour lui un exemple de communication (alors qu’elle est pour nous un exemple de coordination). En revanche, contrairement à Wilson, Slater fait explicitement appel à la notion de signal, et donc de transfert d’information présent dans notre propre définition. De plus, étant donné que nous nous intéressons à des agents rationnels, nous pouvons considérer qu’un agent effectue une action de communication dans son intérêt, et donc — s’il a été bien conçu — que selon toute probabilité il bénéficie de la réaction du récepteur, si un tel agent existe. C’est là le point qui empêche la définition de la communication de Slater de représenter un sur-ensemble de la nôtre. En effet notre définition parle de la possibilité de transmettre de l’information, ainsi nous considérons qu’une tentative de transmission d’information est une communication. Si l’on prend la définition de Slater au pied de la lettre, les phéromones que déposent les fourmis et qui indiquent le chemin des sources de nourriture ne deviennent communication que si une autre fourmi les détecte, ou de même, un document écrit2 ne devient communication que s’il est lu.

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