Un contexte pour un enseignement universitaire de qualité

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L’intérêt envers la pédagogie universitaire comme moyen d’accroissement de la qualité de l’enseignement supérieur

Un des moyens utilisés par les établissements d’enseignement supérieur leur permettant de faire face à la demande sociale pour une formation universitaire de qualité est un intérêt plus marqué pour un nouveau champ de pratique et de recherche autour de la pédagogie universitaire.
Selon Fanghanel (2007), pendant longtemps, l’enseignement au niveau universitaire a été tenu pour acquis et vu comme exempt de problèmes. Les professeurs, experts des domaines disciplinaires, étaient qualifiés de facto pour transmettre leurs connaissances. L’enseignement au niveau universitaire s’organisait essentiellement autour des disciplines qui définissaient leurs propres contenus et contraintes (Barbot et Massou, 2010; Loiola, 2001). Le professeur était le digne représentant disciplinaire détenteur des savoirs (Kember, 1997). C’était donc l’allégeance disciplinaire qui était au cœur de l’identité professionnelle d’un professeur universitaire. Autrement dit, les « professeurs chercheurs » étaient physiciens avant d’être professeurs de physique (Endrizzi, 2011). Cette façon de considérer l’enseignement s’inscrivait dans une vision positiviste qui valorise les connaissances disciplinaires, leur cumul et leur développement. Un bon chercheur ne peut être qu’un bon professeur, dans la mesure où il participe à la production de connaissances nouvelles et semble, a priori, bien placé pour en assurer ensuite leur transmission (Parmentier, 2006).
Le modèle pédagogique sous-jacent à cette vision se fonde sur la prémisse que les étudiants apprennent si on leur transmet des informations par le biais d’exposés en classe ou en ligne et qu’on les encourage à faire des exercices ou des laboratoires en classe (Ramsden, 2003). Or, il s’avère que l’enseignement universitaire est devenu une activité beaucoup plus complexe que par le passé (Fanghanel, 2007). De tout cela résulte un enseignement universitaire qui déborde des limites de la simple transmission des connaissances et où une révision en profondeur des méthodes pédagogiques est nécessaire (Parmentier, 2006; Quinlan et Berndtson, 2013; Rege Colet et Romainville, 2006).
Ce constat combiné aux exigences croissantes pour un enseignement universitaire de qualité a incité les établissements d’enseignement supérieur à s’intéresser à la pédagogie universitaire pour y trouver des pistes de solution. Cet intérêt pour la pédagogie universitaire provient des milieux anglo-saxons et de l’Amérique du Nord et remonte aux années 1960, mais a connu un essor dans les années 1990 (De Ketele, 2010; Parmentier, 2006). Le champ de la pédagogie universitaire tente de déterminer ce qui constitue un bon enseignement universitaire, comment le valoriser et comment obtenir un enseignement centré sur les étudiants et leurs apprentissages. Au fil du temps, différents moyens pour mettre en valeur cette pédagogie universitaire ont été observés et sont présentés dans ce qui suit.
Par exemple nous pouvons penser au mouvement du « Scholarship of Teaching and Learning (SOTL) » qui constitue une façon, initiée par Ernest Boyer en 1990, d’envisager l’excellence en mettant l’accent sur la recherche et l’avancement des connaissances de l’enseignement universitaire comme domaine d’expertise. Ce mouvement tente de mettre à profit les professeurs qui investiguent et publient des articles sur leur propre enseignement (Langevin et al., 2008). Le fruit de ces travaux peut même servir à une reconnaissance institutionnelle de la fonction « enseignement » dans les dossiers pour l’obtention d’une promotion ou d’un poste permanent (Lessard, 2007; Marshall et Pennington, 2009).
La création de l’Association internationale de pédagogie universitaire (AIPU) en 1980 représente un autre moyen de mettre en valeur la pédagogie universitaire et d’améliorer la qualité de la formation offerte dans les établissements d’enseignement supérieur. Par le biais de colloques, de revues, d’ateliers de formation et de rencontres scientifiques, cette organisation internationale vise à promouvoir la pédagogie pour améliorer l’enseignement et l’apprentissage, informer le corps enseignant et les établissements sur les résultats de la recherche en pédagogie universitaire, encourager la recherche et l’expérimentation en enseignement supérieur, favoriser la coopération interuniversitaire et contribuer à la formation pédagogique du corps enseignant de l’enseignement supérieur.

Le développement professionnel des professeurs

La création des centres de développement pédagogique représente une autre manifestation de l’accroissement de l’intérêt envers la pédagogie universitaire. Ces centres qui se sont développés depuis une trentaine d’années (Endrizzi, 2011; Organisation de Coopération et de Développement Économiques, 2012a; Poumay, 2010; Ricci, 2006), sont apparus dans les universités un peu partout dans le monde.
Au Canada, ces centres ont été créés pour répondre à l’insatisfaction des étudiants qui a émergé dans les années 60 (Endrizzi, 2011; Frenay et al., 2010). Selon Prégent, Fontaine et Wouters (1997), au Québec, c’est une recommandation, formulée en 1971, par la Conférence des recteurs et des principaux du Québec (CREPUQ) qui a conduit à la création des services de pédagogie universitaire dans la plupart des universités. Selon ces auteurs, « Les étudiants trouvaient l’enseignement universitaire fade et terne, l’enseignement ne favorisait pas des apprentissages autonomes et individualisés… ». De plus, des pressions s’exerçaient pour évaluer et réviser les cours ainsi que pour former les professeurs qui avaient peu d’intérêt pour la question pédagogique. Aujourd’hui, ce sont presque toutes les universités canadiennes qui offrent des services de soutien à leurs professeurs dans ces centres de développement pédagogique (Frenay et al., 2010; Knapper, 2013).
Les services offerts par les centres de développement pédagogique ont grandement évolué au cours des dernières décennies (Langevin et al., 2008). Aujourd’hui, les services offerts sont variés et leurs mandats varient selon les contextes organisationnels (Frenay et al., 2010). Ces centres proposent des activités de formation portant sur la pédagogie universitaire (Bédard, 2006; Knapper, 2013; Organisation de Coopération et de Développement Économiques, 2012a), offrent des services-conseils individualisés par le biais de conseillers pédagogiques (Frenay et al., 2010; Knapper, 2013; Picard et Torkia, 2007; Rege Colet, 2006), coordonnent et mettent en place des politiques éducatives qui définissent les orientations pédagogiques institutionnelles (Frenay et al., 2010), coordonnent et soutiennent l’innovation pédagogique par le biais de fonds spéciaux (Frenay et al., 2010; Frenay et Paul, 2006; Organisation de Coopération et de Développement Économiques, 2012a; Picard et Torkia, 2007), supervisent les mécanismes d’évaluation de l’enseignement (Picard et Torkia, 2007) et assument, en outre, le développement des technologies éducatives dans l’enseignement (Frenay et al., 2010). Certains de ces centres organisent et supervisent des programmes de formation ou de mentorat pour les professeurs novices (Bernatchez, Cartier, et Bélisle, 2010; Frenay et al., 2010; Knapper, 2013; Langevin et al., 2008; Organisation de Coopération et de Développement Économiques, 2012a).
Dans plusieurs pays, ces programmes de formation des professeurs universitaires sont vus comme ayant un rôle stratégique pour assurer un enseignement universitaire de qualité (Gosling, 2009). Il importe de mentionner qu’au Royaume-Uni, ces programmes sont accrédités par l’Higher Education Academy, une instance nationale qui voit au développement de l’excellence dans l’enseignement universitaire. Ainsi, dans certains pays comme le Royaume-Uni, la Norvège, l’Australie, ces formations pour l’enseignement universitaire sont obligatoires pour les nouveaux professeurs (Gibbs et Coffey, 2004; Hubball et Burt, 2006; Postareff, 2007; Sadler, 2008) alors que dans d’autres pays comme les Pays-Bas, la Suède, la Finlande, la France, la Nouvelle-Zélande, et dans la plupart des pays européens, ces formations ne sont pas obligatoires (Demougeot-lebel et Perret, 2011; Löfström et Nevgi, 2007; Postareff, 2007). Au Canada, malgré une recommandation formulée par une commission d’enquête commanditée par l’Association des universités et collèges du Canada constituée il y a plus de vingt ans, l’idée d’une formation pour les nouveaux professeurs n’a toujours pas été retenue (Knapper, 2013). Au Québec, il ne semble pas y avoir de stratégie planifiée au sein des établissements pour préparer les nouveaux professeurs à leur carrière en enseignement (Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université, 2006).
Étant donné que les établissements d’enseignement supérieur sont davantage sollicités afin d’assurer des acquis qui correspondent aux besoins de la société et que cette dernière appelle à des changements pour l’obtention d’un enseignement de qualité dans les établissements d’enseignement universitaire, une révision en profondeur des méthodes pédagogiques est décrite comme étant nécessaire par plusieurs auteurs (Parmentier, 2006; Rege Colet et Romainville, 2006). Cette amélioration de la qualité de l’enseignement passe par des moyens comme la mise en place de services de soutien et la formation des professeurs.

L’intégration des technologies de l’information et de la communication comme moyen d’accroissement de la qualité de l’enseignement supérieur

Une deuxième avenue de solution pour répondre aux besoins actuels d’amélioration de la qualité de l’enseignement supérieur consiste à miser sur l’intégration des technologies de l’information et de la communication (TIC).
Au cours des deux dernières décennies, nous pouvons affirmer que les TIC ont certainement contribué à des changements majeurs dans la société. À l’instar de Basque (2005), par TIC nous entendons les ordinateurs, la robotique, les téléphones cellulaires, les systèmes satellites, la vidéoconférence, la réalité virtuelle et surtout l’Internet. Au fil du temps, des développements ont rendu ces technologies plus compactes, plus rapides, plus puissantes et surtout moins coûteuses. Ce qui a eu pour effet que nous sommes maintenant appelés à vivre dans un environnement ayant une forte composante technologique, qui évolue rapidement (Organisation de Coopération et de Développement Économiques, 2010b) et dans lequel l’accès à l’information, la délimitation entre le travail et la vie personnelle, ainsi que les interactions entre les personnes ont énormément changé (Georgina et Hosford, 2009; Poteaux, 2013).
Une des façons pour les universités de survivre et d’assurer leur longévité consiste à changer et à s’adapter aux réalités sociales (Endrizzi, 2012). Dans ce sens, elles 17 n’échappent pas aux changements occasionnés par l’intégration des TIC dans toutes les sphères de la vie puisque la société et les étudiants s’attendent à ce que les universités utilisent les TIC (Amemado, 2010; Owen et Demb, 2004; Pelletier, 2009). Il n’est donc pas surprenant de constater que l’utilisation des TIC dans l’enseignement supérieur se soit considérablement accrue dans les 10 à 15 dernières années (Kirkwood, 2009; Vauffrey, 2011). On n’a qu’à penser à l’implantation des plates-formes de gestion des apprentissages (Learning management system), aux systèmes de visioconférences, au développement de l’apprentissage assisté par ordinateur ou de la formation en ligne (e-learning), etc.
Dans un contexte de concurrence intra-universitaire, tel que décrit dans la section 1.1.3, il n’est pas étonnant de constater que les universités voient dans l’utilisation des TIC une façon d’augmenter l’accessibilité aux études supérieures (Kirkwood, 2009), notamment par le développement de formations à distance ou en ligne. Les TIC sont alors identifiées comme des moyens permettant de répondre aux défis de la massification de l’enseignement supérieur et d’atteindre de plus vastes bassins de population étudiante (Means et al., 2010) tels que les étudiants étrangers et les adultes qui sont en processus de formation continue (Chirichilli, 2006; Kirkwood, 2009; Loisier, 2011; Owen et Demb, 2004; Stensaker, Maassen, Borgan, Oftebro, et Karseth, 2006).
Plus globalement, cette arrivée des TIC n’est pas sans conséquence non seulement pour les activités d’enseignement, mais aussi pour celles de recherche et de gestion des universités (Viens, Lepage, et Karsenti, 2010). L’analyse des impacts des TIC dans les universités peut être observée à différents niveaux, soit celui des institutions et celui des professeurs.

Les impacts sur les établissements

Au niveau des institutions et de leur fonctionnement, les TIC ont des impacts sur la culture organisationnelle. Elles deviennent de plus en plus le cœur des stratégies d’évolution et des projets d’établissement pour les universités. Les TIC ne se résument plus à un volet additionnel porté par les services de technologie des établissements d’enseignement (Albero et Charignon, 2008; Conférence des présidents d’université, 2009). Scott (2009) synthétise bien leurs impacts:
Modern universities are no longer held together by a shared academic culture (if that was never more than a myth) but by their management information systems. These systems have transformed institutional cultures in many ways. For example, the shift towards the so-called “entrepreneurial university” would not be possible unless institutions had reliable and sophisticated financial and other systems capable of managing and monitoring these new roles. Or to take another example, the development of elaborate quality assurance systems, the shift to a so-called “quality culture” which is such a pervasive characteristic of modern higher education systems, would also have been impossible without the application of technology. Finally, the rise of so-called “managerialism” (and the alleged decline of collegiality) also depends crucially on the capacity of university managers to access reliable, detailed and up-to-date data with minimum effort (Scott, 2009; p.71).
Cette perception d’utilité pour la gestion administrative va dans le même sens qu’Henri (2001) qui affirme que les TIC sont vues comme des moyens de réduire les coûts de l’éducation et augmenter son efficience. Ainsi, les TIC facilitent l’implantation d’une vision axée sur la gestion et le management qui s’inscrit dans l’université « de performance » de Skelton (2005).

Impacts sur les professeurs

Comme tous les employés au sein des universités, les professeurs subissent les effets de ces changements organisationnels. En plus de devoir les utiliser dans leurs tâches administratives et leurs activités de recherche, il est désormais attendu des professeurs qu’ils intègrent les TIC dans leur enseignement (Conseil supérieur de l’éducation, 2003; Tennant, McMullen, et Kaczynski, 2010). Il faut souligner que les possibilités pédagogiques qu’offrent les TIC sont diversifiées. Selon Basque (2005):
(…) les TIC permettent aux étudiants et aux professeurs non seulement de présenter et de prendre connaissance d’informations prenant divers formats médiatiques, mais également d’en rechercher, d’en produire, d’en communiquer, d’en analyser et d’en transformer. (Basque, 2005; p. 37).
De par ces possibilités, les TIC ont le potentiel d’aider les professeurs à transformer des pratiques trop centrées sur la salle de classe et ses étudiants en des pratiques ouvertes utilisant des contextes d’apprentissages plus vastes, des ressources facilement disponibles en ligne, des réseaux d’intervenants et des lieux virtuels (Germain-Rutherford et Diallo, 2006). Dans ce sens, les TIC permettent des activités de formation qui seraient difficiles à réaliser sans elles (Kirkwood, 2009). Par exemple, elles permettent d’offrir des formations plus flexibles et variées dans différents lieux et selon différentes modalités temporelles (Chirichilli, 2006; Kirkwood, 2009; Loisier, 2011). Ces nouvelles possibilités offertes par les TIC rendent envisageable, pour les établissements et leurs professeurs, de diversifier leurs méthodes pédagogiques employées (Conseil supérieur de l’éducation, 2003) sans diminuer les exigences de qualité (Chirichilli, 2006).
L’émergence des TIC dans l’enseignement combinée et appuyée par l’acceptation de théories de l’apprentissage déjà existantes, mais mises au goût du jour, fait en sorte que pour certains, une révolution pédagogique est attendue de leur arrivée (Massy et Zemsky, 2004). En effet, l’implantation des TIC est porteuse d’un discours d’innovation pédagogique où les étudiants sont mis au centre de leurs apprentissages (Germain-Rutherford et Diallo, 2006; Ottenbreit-Leftwich, Glazewski, Newby, et Ertmer, 2010) et se voient attribuer davantage de contrôle dans leurs apprentissages (Mahdizadeh, Biemans, et Mulder, 2008), s’engagent dans leurs apprentissages par des activités de recherche, de résolution de problèmes (Jonassen et Strobel, 2006), d’exercices et de simulations dans des contextes authentiques (Eteokleous, 2008; Germain-Rutherford et Diallo, 2006; Jonassen et Strobel, 2006) et entrent dans des communications synchrones et asynchrones avec leurs professeurs, leurs pairs ou d’autres acteurs afin de collaborer ou participer à des communautés d’apprentissages (Endrizzi, 2012; Vauffrey, 2011). Globalement, il existe un discours en faveur des TIC qui prône davantage des modèles pédagogiques centrés sur les étudiants (Langevin, 2007b). Toutefois, il appert que ce discours ne soit pas partagé par tous et que les utilisations des TIC dans l’enseignement ne se traduisent pas nécessairement par l’adoption de pratiques pédagogiques plus centrées sur les étudiants. En effet, malgré ce qu’avancent certains auteurs, de nombreuses recherches démontrent que les technologies utilisées n’influencent pas directement les pratiques d’enseignement. Autrement dit, leur adoption n’occasionne pas une « rupture profonde […] avec les approches traditionnelles ou comportementalistes de l’enseignement » (Larose, Grenon, et Lafrance, 2002). Il semble que les technologies sont intégrées pour améliorer les pratiques d’enseignement usuelles en enseignement supérieur, soit des pratiques d’enseignement magistrales (Lameul, Peltier, et Chalier, 2017; Massy et Zemsky, 2004).

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