Vers une micro-usine automatique et modulaire

Vers une micro-usine automatique et modulaire

Microproduit

Un microproduit se caractérise tout d’abord par son enveloppe dimensionnelle dont la taille de ses largeur, hauteur et profondeur est comprise entre un micromètre et un millimètre. Ainsi, son volume minimum est de l’ordre du micromètre cube alors qu’au maximum, il vaut un millimètre cube. Notons au passage qu’il existe donc un facteur 109 , soit un milliard entre ces deux volumes. Un tel microproduit remplit une -voire plusieurs- fonction mécanique, électrique, optique, fluidique ou encore chimique et biologique. A ce titre, il arrive qu’il soit obtenu par l’agrégation de ce que l’on convient d’appeler des microcomposants, voire parfois des micro-sous-assemblages. La conception d’un microproduit à partir de plusieurs microcomposants est, à l’heure actuelle, généralement imposée par la provenance de différentes technologies. A titre d’exemple, la production à partir de « wafer » permet d’obtenir des microcomposants de géométries planes, fins, qui, par assemblage, permettent d’obtenir à leur tour des micro-objets spatiaux que l’on appelle alors « en deux dimensions et demi ». Cependant, l’indispensable opération d’assemblage, pourtant aisément concevable à échelle humaine, requiert une réelle aptitude à la micromanipulation dès que l’on passe à l’échelle microscopique nécessite obligatoirement une assistance pour agir et capter des informations.De tels microsystèmes sont communément appelés des « MEMS » ou « MOEMS », par la communauté scientifique du domaine : MEMS pour Micro-Electro-MechanicalSystems, MOEMS pour Micro-Opto-Electro-Mechanical-Systems. Une extension à l’échelle de taille inférieure amène la communauté scientifique à découvrir un nouveau champ technologique, celui des NEMS – pour Nano-ElectroMechanical-Systems -. Deux champs spécifiques sont également à rapprocher des MEMS : les « BioMEMS » s’intéressent aux MEMS qui interagissent avec le monde biologique du vivant, animal ou végétal, et la microfluidique consiste à mettre en œuvre des MEMS qui conditionnent des liquides -également transposables à des gaz via quelques évolutions- [Bay05, Com05]. En ce qui concerne les MEMS, de nombreux travaux permettent de mesurer des caractéristiques des actuels microproduits. Les microcomposants provenant éventuellement de différentes technologies ou de technologies planes obtenues par strates font appels à diverses solutions d’assemblage leur assurant des liaisons à amplitude de déplacement finie, sans jeu, grâce à d’importantes déformations ou à une solidarisation par collage.

Spécificités de la manipulation dans le micromonde 

L’importance du facteur d’échelle est une des clefs de l’appropriation du micromonde par l’être humain qui n’y est naturellement pas préparé. Le facteur d’échelle est un ratio qui se définit sur une unique dimension lorsqu’on agrandit ou réduit un objet, si bien que pour une surface, par principe bidimensionnelle, l’intervention du ratio apparaît au carré, et, pour un volume forcément en trois dimensions, c’est au cube qu’agit le facteur d’échelle. Prenons, par exemple, un chat adulte de taille moyenne. Ce félin, long d’environ une cinquantaine de centimètres et large d’une dizaine, pèse en moyenne cinq kilogrammes. Nous pouvons estimer à vingt cinq dm² la surface de sa peau (ndr : vingt cinq dm² de douceur de fourrure ! ). Tout d’abord, grossissons le cinq fois dans toutes les directions. Nous obtenons alors un « bestiau » long de deux mètres cinquante, large de plus de cinquante centimètres, pesant cent-vingt-cinq fois plus que notre matou, soit la maudite masse de six cent vingt-cinq kilogrammes pour une superficie de fourrure seulement vingtcinq fois plus importante, de six cent vingt-cinq dm². Ensuite, rétrécissons notre mammifère d’un facteur d’échelle de cinq. La longueur de cette nouvelle « bestiole » sera bien entendu cinq fois plus petite, à savoir une dizaine de centimètres de long pour deux petits centimètres de large, alors que sa masse est réduite d’un facteur cent vingt-cinq ; il atteint juste quarante grammes pour une surface de peau de un dm². A travers ces trois mammifères, le minou, le bon vieux nounours polaire menacé par notre réchauffement malgré son record de poids à plus de 1100 kg, et le sympathique lémurien, ou encore l’écureuil voire la chauve-souris – ou pourquoi pas… l’incroyable gecko -, nous ne pouvons que constater l’impact énorme de la relation de variation du volume par la surface. Alors que ce ratio est cinq fois plus important pour l’ours que pour le chat, il l’est cinq fois moins pour la chauve-souris que pour ce même chat. En conséquence, alors que l’ours polaire est massif, lourd et utilise son poids pour faire céder la glace et ainsi écraser puis dévorer les phoques surpris en plein repos, le chat compte quant à lui sur sa vitesse et son agilité pour tromper les petits rongeurs. Et notre bestiole, qu’elle soit lémurien – tel le colugo -, écureuil – tel l’écureuil volant de la famille des Pteromyinae -, ou chauve-souris – de l’ordre des  chiroptères -, a développé d’énormes aptitudes à se déplacer dans le fluide environnant, ce fluide gazeux : l’air… – ce formidable et juste mélange vital composé entre autre de 21% de di-oxygène, de 78 % d’azote, de moins de 1% d’argon et juste ce qu’il faut de CO2, moins de 0,04 %… juste ce qu’il faut pour l’instant, mais c’est un autre débat ! -. Cette évolution du ratio de variation du volume par la surface a permis à notre bestiole de chasser les insectes et surtout de se déplacer voire de fuir par les airs soit en « vol plané » pour les lémuriens, écureuils ou autres geckos, soit encore en « vol actif » pour les belles chauve-souris capables de vaincre la pesanteur en l’air, mais finalement incapables de se mouvoir sur leurs pattes, tellement la nature a parié sur leur légèreté, si ce n’est en rampant lentement ce qui leur confère une extrême vulnérabilité. Si nous avons introduit ici le gecko qui est un reptile et non pas un mammifère, c’est pour une autre de ses prouesses dans le micromonde : la présence de ses « spatulæ » (sur ses « setæ », eux-même sur ses « lamellæ») qui exploitent les forces surfaciques de Van der Waals et lui autorisent l’ascension de surfaces lisses [Aut00, Aut02]. De telles prouesses sont prises en exemple par le domaine de la robotique bio-inspirée [San08].

Système de production dédié au micromonde 

Un système de production adapté aux microproduits doit principalement disposer d’une aptitude à la productivité, nécessitant une disponibilité importante, un volume de production conséquent et une grande fiabilité. Un système de production dédié au micromonde a pour finalité la mise en œuvre d’une production à partir d’un petit volume de pièces prototypes, et jusqu’à sa fiabilisation, une robustesse du procédé adapté à une série beaucoup plus grande. Prenons comme exemple le milieu de l’horlogerie mécanique : l’existant fait état d’assemblage manuel ou partiellement automatisé sur certains composants standardisés. Ces interventions manuelles nombreuses pour l’assemblage d’un mécanisme complet requièrent savoir-faire et disponibilité qui justifient en grande partie la situation de ces mécanismes dans le domaine du luxe. A contrario, la microélectronique, à l’image des composants intégrés ou des cartes électroniques de type circuits imprimés – dont les séries de production sont généralement très grandes -, est principalement dotée de lignes d’assemblage dédiées et peu enclins à accueillir de nouvelles technologies pour l’essai d’une petite série de prototypes. Compte-tenu du contexte actuel, national et mondial, où l’énergie est au cœur de l’équilibre économique et à l’origine d’une importante lutte d’influence, nous devons plus que jamais développer des techniques à faible consommation. En effet, d’une part, le baril de pétrole atteint périodiquement des valeurs jusque-là jamais vues, et d’autre part, la pollution engendrée par la combustion des énergies fossiles remet en cause l’équilibre planétaire qu’il soit climatique et biologique, mais également à fort impact sanitaire et social dans les pays les plus pauvres. Par ailleurs, la signature du « pacte écologique » de M. Nicolas Hulot par des millions de Français oriente principalement le débat énergétique vers une consommation raisonnée et une réduction des gaspillages pour limiter au plus juste la production d’énergie. A ce titre, le concept de système de production dédié au micromonde que nous proposons est en phase avec le besoin exprimé par l’actuelle conjoncture. Du point SAMMI, AS2M, femto-st Eric Descourvières 27 de vue purement énergétique, l’adaptation du système de production à la taille du produit permet une réelle diminution de l’impact de ces nouvelles technologies en terme de pollution, réduction du gaspillage : la consommation énergétique d’un robot industriel classique de « pick and place » n’est-elle pas sans commune mesure avec celle utilisant une technologie piezo ou AMF ? Certes les amplitudes de déplacements sont généralement moindres, mais justement bien suffisantes pour une application d’ordre microscopique. La consommation énergétique principale d’un robot industriel traditionnel est imputable aux actionneurs qui accélèrent et décélèrent les masses importantes de sa propre structure en regard des composants manipulés, donc à la partie opérative. Dans une cellule de production micro, la consommation d’énergie est équilibrée entre la partie commande et celle opérative, voire inversée – …du moins pour l’instant encore -. Actuellement, l’industrie du petit s’appuie sur une production de masse pour laquelle les lignes de production sont dédiées, souvent longues et énergivores. La ligne illustrée par la figure 2.12 mesure 40 m et chaque bras robotisé pèse 250 kg.

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