Mise en œuvre d’une modélisation micromécanique

Il existe actuellement une grande variété de procédés de mise en forme par déformation plastique des métaux. L’emboutissage, le tréfilage, le filage, le forgeage et le laminage sont ainsi utilisés pour la production de composants métalliques de structure. Ces procédés présentent différents avantages en tant que moyens de fabrication :
– cadences de production très élevées,
– réduction des coûts sur la production en grande série,
– taux de déchets faibles comparativement à l’usinage.

De surcroît, ces procédés ont l’intérêt de produire des composants avec des caractéristiques mécaniques améliorées par le processus de fabrication. L’écrouissage développé au cours de la déformation augmente la dureté des pièces déformées. Par ailleurs, l’optimisation dimensionnelle des outillages permet d’obtenir des produits avec un état de surface et une précision tels que les opérations definition disparaissent.

Cependant, la mise au point du processus de fabrication longue et parfois hasardeuse augmente les temps et les coûts de fabrication au détriment de la qualité et du prix de revient. Elle nécessite souvent de nombreux ajustements des outillages qui sont effectués en se fondant sur le savoir-faire des régleurs. Pour être compétitives, les entreprises recourent à des outils de simulation numérique. La définition des outillages et des conditions opératoires des gammes est effectuée virtuellement. Concomitamment, des travaux de recherche sont nécessaires pour améliorer en amont le potentiel des outils numériques. La simulation numérique implique de nombreux domaines ([1], [2]) comme l’étude du comportement des matériaux, la mécanique des milieux continus, le développement de méthodes numériques, l’étude du frottement…

Les modèles micromécaniques ont la particularité d’être définis à une échelle intermédiaire, à savoir, ils définissent un comportement moyen local qui doit être généralement intégré pour obtenir un comportement à une échelle supérieure. Par ailleurs, des résultats provenant d’échelles inférieures sont utilisés pour définir les relations de comportement ou des paramètres de ces modèles. Il est donc important de bien situer cette échelle de description parmi celles disponibles.

Un modèle de comportement plastique décrit le comportement d’un volume élémentaire dont les propriétés mécaniques sont supposées représentatives de n’importe quel point du matériau. Lors de l’établissement ou le choix d’un modèle, une des questions déterminantes réside dans le choix du Volume Elémentaire Représentatif (VER) qui implique des descriptions différentes du comportement mécanique selon la taille de celui-ci.

Le développement des moyens d’analyse expérimentale a mis en évidence différents niveaux d’observation et a impliqué le développement des modélisations correspondantes (à la même échelle) du comportement mécanique. Ces niveaux se définissent par rapport à des longueurs internes caractéristiques. En l’occurrence, ici la discrétisation naturelle provoquée par les grains dans les matériaux métalliques joue un rôle évident.

On distingue ici six volumes caractéristiques de description définis par rapport au nombre de grains impliqués :

a) Plusieurs centaines de grains. Un volume impliquant plusieurs centaines de grains restitue un comportement moyen pour le polycristal. C’est le volume habituellement considéré pour la modélisation phénoménologique utilisée dans les codes faisant appel aux techniques éléments finis ([4], [5]). A cette échelle, il est difficile d’intègrer des informations supplémentaires relatives à la microstructure ou l’orientation des grains. Les études de mise en forme des métaux s’effectuent le plus souvent en recourant à des modèles de comportement phénoménologiques définis à ce niveau. Les lois de comportement utilisées sont généralement identifiées sur des essais « simples » de laboratoire (traction, compression, cisaillement,…).

b) Une centaine de grains. Un volume de l’ordre d’une centaine de grains permet d’intégrer des informations moyennes liées à la microstructure comme l’orientation ou la fraction volumique représentative par orientation. Pour mener des simulations, chaque groupe de grains ayant la même orientation définit une inclusion caractérisée par sa fraction volumique. Le comportement mécanique du polycristal se détermine à partir du comportement moyen des inclusions par un schéma d’intégration autocohérent. La prise en compte des orientations cristallographiques et de leur répartition dans les formulations des lois de comportement crée une interaction entre le comportement mécanique macroscopique et la structure cristalline. Ces modèles traitent cet effet dans un sens moyen pour introduire dans la formulation macroscopique les variables microstructurelles ([6], [7]). Ceci explique leur utilisation pour l’étude de la texture des métaux cristallins.

c) Un grain. Un volume de la taille du grain implique la description du comportement individuel de chacun des grains considérés comme un monocristal. Le comportement d’un agrégat cristallin se restitue en recourant à l’utilisation de la méthode des éléments finis, en réalisant un maillage judicieux des grains par des éléments qui épousent les frontières, ([8], [9], [10]). Des schémas d’intégration de type homogénéisation sont nécessaires pour résoudre les problèmes aux limites.

d) Une fraction du grain. Un volume inférieur au volume du grain nécessite la détermination du comportement d’un volume monocristallin. Ce volume doit impliquer un nombre de dislocations suffisant pour être représentatif du comportement local moyen. La déformation plastique à cette échelle est principalement provoquée par le glissement cristallographique des dislocations sous l’effet de la contrainte appliquée. Les modèles développés dans ce cadre reposent sur une description de l’évolution moyenne des densités de dislocations sur les systèmes de glissement ; celles-ci jouant le rôle de variables internes. Les prédictions du comportement mécanique au niveau du monocristal sont généralement validées par des essais mécaniques macroscopiques ou des essais mécaniques in situ réalisés sur des éprouvettes monocristallines (essais de traction, essais cycliques, …).

e) Une fraction du grain à l’échelle de la dislocation. Un volume rendant visible les dislocations implique la connaissance des mécanismes d’activation et d’interaction de celles-ci. Le comportement mécanique se décrit à partir de la description de l’évolution dynamique des dislocations. A cette échelle, le comportement individuel de segments de dislocations est modélisé pour obtenir ensuite des informations sur le comportement collectif d’une population discrète de dislocations : leurs interactions mutuelles, leurs interactions avec les autres obstacles, l’évolution de leur densité,… Actuellement, ces outils d’étude de l’évolution dynamique des dislocations discrètes font l’objet de recherches de plus en plus nombreuses et poussées pour améliorer la modélisation des mécanismes élémentaires impliqués lors de la déformation plastique et rendre plus pertinente leur utilisation dans les études du comportement mécanique macroscopique.

f) Une fraction du grain à l’échelle de l’atome. Un volume compatible avec la prise en compte des atomes et de leur mouvement implique la connaissance des mécanismes régissant les interactions atomiques. Les modèles numériques développés à cette échelle se fondent sur la description de la liaison atomique et du potentiel interatomique pour décrire l’évolution dynamique des positions de tous les atomes contenus dans une boite de simulation (modèles de dynamique moléculaire). L’intérêt, dans le domaine de plasticité cristalline, est de modéliser le comportement des défauts cristallins (dislocations) contenus dans la boite, sous chargement mécanique.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I : Etude bibliographique
1.1 Introduction
1.2 Mise en œuvre d’une modélisation micromécanique
1.2.1 Positionnement de l’échelle de modélisation
1.2.2 Transition d’échelles
1.2.3 Typologie des lois de comportement micromécaniques des cristaux CFC
1.3 Origine de l’écrouissage isotrope
1.3.1 Evolution de la densité de dislocations
1.4 Origines de l’écrouissage cinématique
1.4.1 Hétérogénéité Intergranulaire
1.4.2 Hétérogénité Intragranulaire
1.4.3 Etude analytique du comportement de l’empilement par simulation en dynamique des dislocations discrètes
1.5 Conclusions
CHAPITRE II : Modélisation physique du comportement du monocristal – prise en compte de l’écrouissage cinématique
2.1 Introduction
2.2 Présentation du modèle du monocristal
2.2.1 Loi d’écoulement
2.2.2 Construction des lois d’écrouissage
2.3 Identification des paramètres du modèle
2.3.1 Rappel des principales formules du modèle
2.3.2 Détermination des paramètres du modèle
2.3.3 Commentaire
2.4 Validation qualitative du modèle
2.4.1 Modélisation de l’essai de cisaillement simple
2.4.2 Modélisation de l’essai de traction uniaxiale
2.4.3 Modélisation de l’essai de traction-compression
2.5 Conclusion
CHAPITRE III : Validation expérimentale du modèle sur un monocristal d’aluminium 99,50%
3.1 Introduction
3.2 Préparation des éprouvettes monocristallines de cisaillement
3.2.1 Géométrie des éprouvettes
3.2.2 Etapes de préparation des éprouvettes
3.3 Préparation de la machine de cisaillement
3.4 Outils de mesure utilisés
3.4.1 Mesure de champs cinématiques
3.4.2 Mesure de champs thermiques et estimation des sources de chaleur
3.4.3 Commentaires
3.5 Mise au point de l’essai de cisaillement
3.6 Courbes de cisaillement cyclique
3.7 Confrontation des résultats numériques et expérimentaux
3.8 Conclusion
CONCLUSION

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